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10/04/2014 | FRANCE | N°13NC00455

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 10 avril 2014, 13NC00455


Vu la requête, enregistrée le 8 mars 2013, présentée pour M. D... E..., demeurant..., par MeA... ;

M. E... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201148 du 8 janvier 2013 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du président de la communauté urbaine de Strasbourg, en date du 12 janvier 2012, refusant de renouveler son contrat d'engagement et de la décision du 19 janvier 2012 rejetant son recours gracieux ;

2°) d'annuler ces deux décisions ;

3°) d'enjoindre à la communa

uté urbaine de Strasbourg de retirer ces décisions de son dossier, sous astreinte de 100...

Vu la requête, enregistrée le 8 mars 2013, présentée pour M. D... E..., demeurant..., par MeA... ;

M. E... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201148 du 8 janvier 2013 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du président de la communauté urbaine de Strasbourg, en date du 12 janvier 2012, refusant de renouveler son contrat d'engagement et de la décision du 19 janvier 2012 rejetant son recours gracieux ;

2°) d'annuler ces deux décisions ;

3°) d'enjoindre à la communauté urbaine de Strasbourg de retirer ces décisions de son dossier, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre à la communauté urbaine de Strasbourg de le réintégrer dans ses fonctions de chef de projet, sur un poste d'ingénieur de catégorie A, sous contrat à durée indéterminé, dans un délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

5°) de condamner la communauté urbaine de Strasbourg à lui verser les sommes de 15 000 euros en réparation du préjudice résultant du non renouvellement de son contrat, 3 535,96 euros au titre du non respect du délai de prévenance et 22 500 euros à titre de rappels de salaires;

6°) de mettre à la charge de la communauté urbaine de Strasbourg le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le non renouvellement de son contrat est intervenu pour des motifs étrangers à l'intérêt du service, dans le seul but de ne pas lui permettre de bénéficier d'un contrat à durée indéterminée ;

- la réorganisation du service alléguée n'est pas démontrée, la communauté urbaine de Strasbourg (CUS) n'ayant produit aucun document à l'appui de ses allégations ;

- l'administration a publié une offre d'emploi correspondant exactement à l'emploi qu'il occupait, alors que sa manière de servir n'avait appelé aucune critique ;

- comme il occupait un poste de catégorie A et avait été recruté sur le fondement de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, il remplissait ainsi toutes les conditions pour bénéficier de la loi du 12 mars 2012 qui était alors en cours d'élaboration ;

- la CUS était informée de son souhait de bénéficier d'un contrat à durée indéterminée ;

- le refus qui lui a été opposé est entaché d'un détournement de pouvoir ;

- le préjudice moral et financier qu'il a subi sera indemnisé à hauteur de 15 000 euros ;

- il a subi un préjudice dès lors qu'il n'a été informé de l'absence du renouvellement de son contrat que 15 jours avant son échéance, en méconnaissance des dispositions de l'article 38 du décret du 15 février 1988 ;

- il a ainsi été dans l'impossibilité de prendre ses congés et a subi un préjudice chiffré à 3 535,96 euros bruts ;

- alors qu'il occupait un poste correspondant au grade d'ingénieur, il a été rémunéré en qualité de rédacteur chef et a ainsi subi une perte de salaire qui peut être fixée à 22 500 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure, adressée le 10 juillet 2013 à Me Olszak, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 juillet 2013, présenté pour la communauté urbaine de Strasbourg (CUS), par MeC..., qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. E...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- à titre principal, les conclusions à fin d'annulation ne sont pas recevables, le refus de renouvellement de contrat n'étant pas une décision faisant grief ;

- les agents non titulaires ne bénéficient pas d'un droit au renouvellement de leur contrat ;

- contrairement à ce que soutient le requérant, le non renouvellement de son contrat n'est pas intervenu pour des motifs étrangers au service, la réorganisation du service est réelle et a été démontrée par la CUS ;

- le poste occupé par le requérant a été transformé pour y ajouter des missions nouvelles et est différent de celui qu'il occupait ;

- le profil de M. E...ne correspondait pas au niveau de qualification requis pour le nouveau poste ;

- aucun détournement de pouvoir ne peut être retenu à... ;

- la loi du 12 mars 2012 ne trouvait pas à s'appliquer ;

- le requérant, qui ne dispose pas des diplômes requis pour occuper un poste de catégorie A, n'a pu être recruté en application de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 ;

- même si la décision de non renouvellement devait être annulée, le requérant ne peut se prévaloir d'un droit à réintégration ;

- la responsabilité de la CUS n'étant pas engagée, le requérant ne peut se prévaloir d'aucun préjudice ;

- en l'absence de clause de reconduction dans le contrat de l'intéressé, l'article 38 du décret du 15 février 1988 ne trouvait pas à s'appliquer ;

- la méconnaissance de ces dispositions est sans incidence sur la légalité du non renouvellement de contrat ;

- en admettant même que l'intéressé ait occupé un poste de catégorie A, il avait accepté cette situation et ne peut se prévaloir d'aucun préjudice indemnisable ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 9 septembre 2013, présenté pour M. E... qui conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

Vu le nouveau mémoire en défense, enregistré le 19 février 2014, présenté pour la communauté urbaine de Strasbourg (CUS) qui conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 14 mars 2014, présenté pour M. E... qui conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le décret n° 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mars 2014 :

- le rapport de Mme Bonifacj, président,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me Rauchpour M. E...et de Me Fraserpour la communauté urbaine de Strasbourg ;

1. Considérant que M. E...a été recruté par la communauté urbaine de Strasbourg, à compter du 3 février 2005, par un contrat d'une durée d'un an, régulièrement renouvelé jusqu'au 2 février 2012, en qualité de chargé d'études auprès du service des déplacements, puis pour exercer les fonctions de " référent plan déplacement d'entreprise " ; qu'il relève appel du jugement du 8 janvier 2013 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du président de la communauté urbaine de Strasbourg (CUS), en date du 12 janvier 2012, refusant de renouveler son contrat et à la condamnation de cet établissement public à lui verser la somme de 22 500 euros à titre d'indemnisation ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la délibération du conseil de communauté du 24 février 2012, que le poste occupé depuis 2005 par M.E..., au sein de la direction " mobilité et transport " de la communauté urbaine de Strasbourg, a été modifié pour y adjoindre de nouvelles missions et être confié à un agent titulaire d'un diplôme permettant l'accès à la catégorie A ; qu'il est constant que l'intéressé ne remplissait pas ces conditions de diplôme nécessaires pour occuper ce nouvel emploi ; que, contrairement à ce que soutient M. E..., les fonctions qu'il occupait relevaient d'un poste de catégorie B, correspondant à la rémunération de rédacteur chef, qui figure sur ses contrats d'engagement ; que la seule référence à un poste d'ingénieur sur l'une des fiches de poste établies en 2007 ne saurait suffire à remettre en cause cette qualification ; que, par ailleurs, M. E...se borne à faire valoir qu'il remplissait les conditions pour obtenir un contrat à durée indéterminée, en application de la loi du 12 mars 2012 qui n'était pas encore entrée en vigueur ; qu'au demeurant, aucune des pièces du dossier ne permet d'établir que le refus de renouvellement qui lui a été opposé le 12 janvier 2012 aurait eu pour but de faire obstacle à ce qu'il bénéficie d'un tel contrat ; que le détournement de pouvoir allégué n'est ainsi pas démontré ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du président de la communauté urbaine de Strasbourg, en date du 12 janvier 2012, refusant de renouveler son contrat ;

Sur les conclusions indemnitaires :

4. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède qu'en prenant la décision de ne pas renouveler le contrat de M.E..., la communauté urbaine de Strasbourg n'a pas commis de faute de nature à engager sa responsabilité ; que l'intéressé ne peut dès lors prétendre à la réparation des préjudices que lui aurait causés cette décision ;

5. Considérant, en second lieu, qu'aucune des pièces produites ne permet d'établir que M. E... aurait dû bénéficier d'une rémunération correspondant à un grade de catégorie A, alors que sa rémunération a été fixée par ses contrats d'engagement par référence à l'indice brut 580, correspondant au 6ème échelon de rédacteur chef, puis au 7ème échelon du même grade à compter du 3 février 2009 ; que, dès lors, ses conclusions tendant à ce que la communauté urbaine de Strasbourg soit condamnée à lui verser un complément de rémunération doivent être rejetées ;

6. Considérant, en revanche, qu'aux termes de l'article 38 du décret du 15 février 1988 : " Lorsqu'un agent non titulaire a été engagé pour une durée déterminée susceptible d'être reconduite, l'administration lui notifie son intention de renouveler ou non l'engagement au plus tard : / 2° Au début du mois précédant le terme de l'engagement pour l'agent recruté pour une durée égale ou supérieure à six mois et inférieure à deux ans " ; que, d'une part, il résulte de ces dispositions que la décision notifiant l'intention de ne pas renouveler un tel contrat doit intervenir au moins un mois avant son terme ; que, d'autre part, un contrat doit être regardé comme étant susceptible d'être reconduit dès lors qu'il n'exclut pas expressément une telle possibilité ; qu'en l'espèce, M.E..., dont le contrat prenait fin le 2 février 2012, aurait dû être informé de la décision de ne pas renouveler son contrat au moins un mois avant son terme, soit avant le 2 janvier 2012 ; que, dès lors, en prenant sa décision seulement le 12 janvier 2012, la communauté urbaine a méconnu le délai fixé par les dispositions précitées et ainsi engagé sa responsabilité ; que le requérant soutient, sans être contredit, que la méconnaissance de ce délai lui a interdit de prendre l'ensemble des heures de repos et de congés dont il bénéficiait ; qu'il y a lieu, par suite, de condamner la communauté urbaine de Strasbourg à lui verser la somme non contestée de 3 535,96 euros bruts ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Considérant que le présent arrêt qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. E...n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la Communauté urbaine de Strasbourg de réintégrer M. E...dans son poste et de mettre à jour son dossier administratif doivent être rejetées ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M.E... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions indemnitaires à hauteur de 3 535,96 euros bruts ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté urbaine de Strasbourg, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie essentiellement perdante, le versement de la somme que M. E... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E...le versement de la somme que la communauté urbaine de Strasbourg demande sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La communauté urbaine de Strasbourg est condamnée à verser à M. E...la somme de 3 535,96 euros bruts.

Article 2 : Le jugement n° 1201148 du 8 janvier 2013 du Tribunal administratif de Strasbourg est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de la communauté urbaine de Strasbourg présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E...et à la communauté urbaine de Strasbourg.

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N° 13NC00455


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC00455
Date de la décision : 10/04/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12-03-02 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat. Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Julienne BONIFACJ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : RAUCH MAJERLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-04-10;13nc00455 ?
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