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20/03/2014 | FRANCE | N°13NC01031

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 20 mars 2014, 13NC01031


Vu la requête, enregistrée le 6 juin 2013, présentée pour M. E... A..., représenté par son tuteur légal, M. D...A..., demeurant..., par MeB... ;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200916 du 9 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Morbier à l'indemniser des conséquences dommageables de l'accident dont il a été victime le 12 avril 2011 sur la voie publique ;

2°) de condamner la commune de Morbier à l'indemniser de son entier préjudice ou, à titre

subsidiaire, à hauteur de 75 % ;

3°) d'ordonner une expertise médicale en vue d'évalu...

Vu la requête, enregistrée le 6 juin 2013, présentée pour M. E... A..., représenté par son tuteur légal, M. D...A..., demeurant..., par MeB... ;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200916 du 9 avril 2013 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Morbier à l'indemniser des conséquences dommageables de l'accident dont il a été victime le 12 avril 2011 sur la voie publique ;

2°) de condamner la commune de Morbier à l'indemniser de son entier préjudice ou, à titre subsidiaire, à hauteur de 75 % ;

3°) d'ordonner une expertise médicale en vue d'évaluer l'ensemble des préjudices subis ;

4°) de condamner la commune de Morbier à lui verser la somme de 20 000 euros à titre de provision ;

5°) de mettre à la charge de la commune de Morbier la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la responsabilité de la commune de Morbier est engagée, dès lors que la route départementale n° 26 a été rendue glissante par la présence d'huile apportée par des véhicules sortant d'une voie communale recouverte de la même substance et souffrant d'un défaut d'entretien ;

- le maire n'a pas signalé aux usagers les risques encourus sur la route départementale ;

- la commune ne peut se prévaloir d'une cause exonératoire dès lors qu'il n'est pas établi, d'une part, qu'il roulait à une vitesse supérieure à la limite autorisée et, d'autre part, que sa conduite sous l'emprise du cannabis serait la cause exclusive de l'accident ;

- si la faute de la victime devait être retenue, elle aurait pour seul effet de laisser à sa charge 25 % du montant des préjudices ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 août 2013, présenté pour la commune de Morbier, représentée par son maire en exercice, par la SELAS M et R Avocats ,qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation du requérant à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Morbier fait valoir que :

- il ne ressort pas des pièces produites à l'instance par le requérant que la route départementale aurait été rendue glissante par la présence d'huile ;

- aucune faute ne lui est imputable dès lors, d'une part, que la voie ne souffrait d'aucun défaut d'entretien, et, d'autre part, que la commune n'a pas à répondre d'un accident survenu sur une route départementale ;

- l'accident est entièrement imputable à la vitesse excessive du véhicule, dont le conducteur se trouvait sous l'emprise de stupéfiants ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 30 septembre 2013, présenté pour M. A... qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Il soutient, en outre, qu'il justifie, par de nouveaux témoignages, de la présence d'huile sur la route départementale ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 octobre 2013, présenté pour la SUVA, caisse nationale suisse d'assurance accident, par MeC..., qui conclut à l'annulation du jugement attaqué et à la condamnation de la commune de Morbier à lui verser la somme totale de 185 002,30 francs suisses en remboursement de ses débours, ainsi que la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La SUVA fait valoir que la responsabilité de la commune, qui n'a pas signalé la présence d'huile sur la route, est engagée ;

Vu la mise en demeure, adressée le 4 décembre 2013 à la caisse primaire d'assurance maladie de Dôle, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire, enregistré le 9 décembre 2013, présenté pour la commune de Morbier qui conclut aux mêmes fins et demande, en outre, la condamnation de la SUVA à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Morbier fait valoir, en outre, que :

- les attestations produites à l'instance ne sont pas de nature à établir la présence d'huile sur la route le jour de l'accident ;

- le recours de la SUVA est tardif et donc irrecevable ;

- cet organisme ne justifie pas de l'existence et du montant des sommes dont elle demande le remboursement ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 20 février 2014, présentée pour M. A...;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 février 2014 :

- le rapport de M. Guérin-Lebacq, premier conseiller,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., pour M. A..., et de MeC..., pour la SUVA ;

1. Considérant que M.A..., qui circulait le 12 avril 2011, vers 14 heures 30, sur la route départementale n° 26, au niveau de la commune de Morbier (Jura), a perdu le contrôle de son véhicule, lequel a quitté la voie, puis a percuté une clôture et un arbre ; que l'intéressé, qui reste atteint de graves séquelles invalidantes, a recherché la responsabilité de la commune de Morbier devant le Tribunal administratif de Besançon, lequel a rejeté sa demande d'indemnisation par un jugement du 9 avril 2013, dont M. A...fait appel ;

2. Considérant, en premier lieu, que le maître d'ouvrage est responsable, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages publics dont il a la garde peuvent causer aux tiers, en raison tant de leur existence que de leur fonctionnement ; qu'il appartient toutefois aux tiers, victimes desdits dommages, d'apporter la preuve de la réalité des préjudices qu'ils allèguent avoir subis et de l'existence d'un lien de causalité entre l'ouvrage public et ces préjudices ; que le maître d'ouvrage ne peut dégager sa responsabilité que s'il établit que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure ;

3. Considérant que le requérant soutient que son accident a été provoqué par la présence d'une nappe d'huile, répandue sur la route départementale n° 26 par les véhicules sortant d'une voie communale adjacente recouverte de la même substance et souffrant d'un défaut d'entretien ; que toutefois, les gendarmes qui sont intervenus sur place ont relevé, dans le procès-verbal établi à la suite de l'accident, que celui-ci était survenu sur une portion de route rendue glissante par des pluies récentes ; qu'il ne ressort pas de la main courante du centre technique routier départemental du Jura, datée du même jour, eu égard aux termes dans lesquels elle est rédigée, qu'une nappe d'huile se serait trouvée sur la portion de route où l'accident s'est produit ; que si l'un des pompiers ayant porté secours à M. A...indique, dans une attestation établie le 21 février 2012, que la route départementale était particulièrement glissante, il n'en précise pas les raisons ; que si d'autres attestations, produites à l'instance plus de deux ans après les faits, font également état de la présence d'huile ou de gasoil sur la route départementale, elles ne précisent pas l'origine de cette substance ; que, dans ces conditions, il n'est pas établi qu'une nappe d'huile ou toute autre substance glissante se trouvant sur l'une des voies communales adjacentes à la route départementale n° 26 se serait ensuite répandue sur cette route, provoquant l'accident dont M. A...a été victime ; qu'en outre, il résulte de l'instruction que ce dernier circulait sous l'emprise de stupéfiants ; que, par suite, M. A... ne peut être regardé comme apportant la preuve d'un lien de causalité entre l'ouvrage public incriminé, dont la commune de Morbier a la garde, et les préjudices dont il demande réparation ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 2213-1 du code général des collectivités territoriales : " Le maire exerce la police de la circulation sur les routes nationales, les routes départementales et les voies de communication à l'intérieur des agglomérations, sous réserve des pouvoirs dévolus au représentant de l'Etat dans le département sur les routes à grande circulation (...) " ; qu'il résulte des propres écritures du requérant que la partie de la route départementale n° 26 où s'est produit l'accident se trouve en dehors de l'agglomération de la commune de Morbier ; que la responsabilité de la commune ne peut donc être engagée pour avoir méconnu les dispositions précitées de l'article L. 2213-1 du code général des collectivités territoriales ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par la commune de Morbier aux conclusions présentées par la SUVA, que celle-ci et M. A... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon a rejeté leurs demandes ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... et de la SUVA le versement de la somme de 2 000 euros que la commune de Morbier demande sur le fondement des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... et les conclusions de la SUVA sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions de la commune de Morbier présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A..., à la commune de Morbier, à la caisse primaire d'assurance maladie de Dole et à la SUVA - Caisse nationale suisse d'assurance accident.

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N° 13NC01031


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC01031
Date de la décision : 20/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Travaux publics - Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics - Régime de la responsabilité - Qualité de tiers.

Travaux publics - Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics - Lien de causalité.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Jean-Marc GUERIN-LEBACQ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SERGE BEYNET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-03-20;13nc01031 ?
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