Vu la requête, enregistrée le 22 mai 2013, présentée pour M. H... A...B..., demeurant..., Mme F...E..., demeurant..., et M. I... A...B..., demeurant..., par la société d'avocats Schreckenberg, Parniere et associés ;
M. A... B...et autres demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1002073 du 26 mars 2013 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à la condamnation des Hôpitaux universitaires de Strasbourg à leur verser, à chacun, la somme de 20 000 euros en réparation du préjudice qu'ils estiment avoir subi à la suite du décès de leur fils et frère ;
2°) de condamner les Hôpitaux universitaires de Strasbourg à leur verser, à chacun, la somme de 20 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 24 décembre 2009, et de la capitalisation de ces intérêts ;
3°) de mettre à la charge des Hôpitaux universitaires de Strasbourg la somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- la responsabilité de l'établissement hospitalier est engagée pour faute ;
- les praticiens ont prescrit un traitement inefficace et inadapté à l'état psychotique du patient ;
- aucune surveillance adaptée n'a été assurée par le service alors que le patient avait déjà fait une tentative de suicide en 1995, qu'une vigilance particulière était requise eu égard aux éléments figurant au dossier médical, et que le psychiatre n'a pas souhaité s'entretenir avec le père de l'intéressé ;
- la possibilité laissée au patient de confectionner un objet tranchant révèle un dysfonctionnement dans l'organisation du service ;
- les manquements et fautes imputables à l'établissement hospitalier sont directement à l'origine du décès par suicide de leur fils et frère ;
- leur préjudice moral résultant de ce décès est évalué, pour chacun d'entre eux, à 20 000 euros ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le courrier, enregistré le 10 juillet 2013, présenté par la caisse primaire d'assurance maladie des Côtes d'Armor qui informe la Cour qu'elle n'entend pas intervenir dans l'instance ;
Vu la mise en demeure adressée le 3 octobre 2013 à Me Le Prado, avocat des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 octobre 2013, présenté pour les Hôpitaux universitaires de Strasbourg, par Me Le Prado, qui concluent au rejet de la requête ;
Les Hôpitaux universitaires de Strasbourg font valoir que :
- les soins prodigués au patient lors de l'admission dans l'établissement étaient adaptés et conformes aux données de la science ;
- l'intéressé a fait l'objet d'une surveillance adaptée à son état ;
- aucune négligence n'est imputable au service dans la prise en charge du patient ;
Vu le courrier, enregistré le 4 novembre 2013, présenté par la caisse primaire d'assurance maladie des Côtes d'Armor qui confirme son intention de ne pas intervenir dans l'instance ;
Vu le mémoire, enregistré le 19 décembre 2013, présenté pour MM. A...B...et C...E...qui concluent aux mêmes fins que leur requête par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 13 janvier 2014, présenté pour les Hôpitaux universitaires de Strasbourg, qui concluent aux mêmes fins que dans leur précédent mémoire par les mêmes motifs ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 janvier 2014 :
- le rapport de M. Guérin-Lebacq, premier conseiller,
- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,
- et les observations de MeD..., pour les requérants ;
1. Considérant que M. G...A...B..., né le 11 août 1973, a été hospitalisé le 12 juin 2003 à 11 heures, au service de psychiatrie des Hôpitaux universitaires de Strasbourg en raison de troubles psychotiques ; qu'il a été retrouvé dans sa chambre, le 13 juin 2003 à 0 heure 40, par l'infirmier de garde, son artère humérale sectionnée au moyen d'un élément de la prise de connexion d'antenne de télévision ; que les parents et le frère de M. A...B...ont recherché la responsabilité de l'établissement hospitalier devant le Tribunal administratif de Strasbourg en vue d'obtenir l'indemnisation du préjudice moral résultant pour eux de ce décès ; que leur demande a été rejetée par un jugement du 26 mars 2013, dont les consorts A...B...font appel ;
2. Considérant, en premier lieu, que les requérants reprochent à l'établissement hospitalier d'avoir prescrit un traitement inadapté à l'état psychotique de M. G...A...B..., dont les premiers troubles schizophréniques sont apparus en 1995 ; qu'il ressort du rapport de l'expertise, ordonnée dans le cadre de la procédure pénale, que le médicament antipsychotique, prescrit par les praticiens de l'établissement, était adapté à la pathologie et à l'état antérieur de l'intéressé ; que si les requérants soutiennent que le neuroleptique habituellement prescrit à M. A... B...était mieux adapté à son état, les experts précisent que ce médicament, que l'intéressé avait cessé de prendre depuis le mois de février 2003, ne permet pas de diminution immédiate des idées délirantes et ne commence à produire ses effets qu'après plusieurs semaines ; qu'en l'absence de signes cliniques d'angoisses massives ou d'excitation psychomotrice chez le patient, un traitement sédatif à forte dose n'était pas justifié selon les experts, lesquels précisent que les nombreux traitements suivis par M. A...B...pour son insuffisance rénale nécessitaient une prudence particulière dans la prescription de nouveaux médicaments anxiolytiques ou sédatifs ; que, par suite, les Hôpitaux universitaires de Strasbourg n'ont commis aucune faute dans le traitement thérapeutique de M. A...B... ;
3. Considérant, en second lieu, que si, par son comportement dans les jours précédant son hospitalisation, M. A...B...présentait des troubles psychotiques justifiant sa prise en charge, en hospitalisation libre, par le service psychiatrique des Hôpitaux universitaires de Strasbourg, il ressort du rapport d'expertise judiciaire que l'intéressé ne présentait alors aucune agitation, anxiété ou tristesse particulière ; qu'il n'a pas fait part d'intentions suicidaires, ni à son père dans les jours précédant son hospitalisation, ni aux praticiens de l'établissement hospitalier au moment de sa prise en charge ; que si les requérants soutiennent que le médecin psychiatre du service a refusé de s'entretenir avec le père du patient, il ne ressort pas du document établi le 9 juin 2003 par ce dernier à l'attention du praticien que son fils aurait, avant son hospitalisation, émis la volonté de se suicider ; que M. A...B..., qui avait tenté de mettre fin à ses jours en 1995 lors d'une première décompensation délirante, en dissimulant ses intentions morbides à son entourage, n'avait fait aucune nouvelle tentative au cours des épisodes psychotiques suivants en 1999 et en 2000 ; que les infirmiers du service n'ont relevé aucune anomalie dans son comportement à l'occasion du relevé de sa tension, de sa température et de sa fréquence cardiaque à 13 heures, 17 heures, 21 heures et vers minuit lorsque son traitement lui a été administré pour la nuit, soit moins d'une heure avant qu'il ne mette fin à ses jours ; que, selon les experts, le comportement de M. A...B...ne permettait pas de penser qu'il pouvait être dangereux pour lui-même, aucun signe clinique ne laissant supposer un éventuel passage à l'acte ; que, dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que M. A...B..., qui a été normalement pris en charge en hospitalisation libre, aurait fait l'objet de mesures de surveillance inadaptées à son état ; que si l'intéressé s'est trouvé en mesure de démonter la prise de connexion d'antenne de la télévision située dans la salle commune, dont il a utilisé un élément métallique pour sectionner son artère humérale une fois revenu dans sa chambre, cette circonstance, eu égard à ses conditions d'hospitalisation, n'est pas de nature à révéler un dysfonctionnement du service ; que, par suite, aucune faute n'est imputable aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg dans l'organisation et le fonctionnement du service ;
4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que MM. A... B...et C...E...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande ; que, par voie de conséquence, leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... B...et autres est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... A...B..., à Mme F...E..., à M. I... A...B..., aux Hôpitaux universitaires de Strasbourg et à la caisse primaire d'assurance maladie des Côtes d'Armor.
''
''
''
''
2
N° 13NC00942