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18/02/2014 | FRANCE | N°13NC00339

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 18 février 2014, 13NC00339


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 février 2013, présentée pour M. B... A..., demeurant ... Balnot la Grange, 73 Le Charmes 10210 Balon par Me Cosich, avocat au barreau de Paris ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102143 du 18 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 2008 ;

2°) d'ordonner le sursis à statuer jusqu'à l'issue de la procédure pénale ;

3°) de

prononcer la décharge demandée d'un montant de 2 912 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 février 2013, présentée pour M. B... A..., demeurant ... Balnot la Grange, 73 Le Charmes 10210 Balon par Me Cosich, avocat au barreau de Paris ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102143 du 18 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 2008 ;

2°) d'ordonner le sursis à statuer jusqu'à l'issue de la procédure pénale ;

3°) de prononcer la décharge demandée d'un montant de 2 912 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat à une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que la proposition de rectification est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales en ce qu'elle se réfère à la proposition de rectification adressées à la SEP, qui n'est pas assortie de pièces justificatives et n'est pas suffisamment motivée pour lui être opposable, ainsi que l'a d'ailleurs considéré le tribunal mixte de commerce de Saint-Denis de la Réunion dans des circonstances semblables ;

- que l'entreprise AV Trade entrait dans le champ d'application de l'article 199 undecies B applicable aux activités relevant du secteur de l'industrie concourant directement à l'élaboration ou à la transformation de biens mobiliers corporels, en ce qu'elle avait une activité de conditionnement et expédiait des fruits préalablement nettoyés, calibrés et conditionnés et également en ce que son objet social portait sur l'exportation et l'importation de fruits, ainsi sur toutes opérations industrielles s'y rattachant ;

- que l'entreprise AV Trade a démenti avoir confié ses activités à une autre entreprise et qu'en tout état de cause la SEP Elara 2 ne peut être tenue responsable des défaillances de l'entreprise AV Trade ;

- que le principe général du droit communautaire de proportionnalité, qui s'applique en l'espèce contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, s'oppose à ce que l'administration applique des redressements à M.A..., totalement étranger aux constats effectués par l'administration ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 juin 2013, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ;

Le ministre conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

- que la proposition de rectification indique les motifs de la reprise des réduction d'impôt en rappelant les constats opérés lors de la vérification de l'EURL AV Trade et comportait, en tout état de cause, la copie de la proposition de rectification adressée à la SEP Elara 2, sans qu'ait de portée sur le litige un jugement judiciaire sans lien avec le dossier ;

- qu'il résulte des constatations opérées par l'administration que la société AV Trade n'a eu que quelques activités d'exportation en décembre 2005 et aucune activité de conditionnement en 2006 ni même au cours de l'exercice clos le 30 juin 2007, et qu'elle n'a ni utilisé, ni par conséquent conservé pendant cinq ans, les équipements en litige, qu'elle a donnés en sous-location à une autre entreprise dès le départ ;

- que le principe de proportionnalité ne peut pas être invoqué par le contribuable à l'encontre d'impositions uniquement régies par la loi fiscale interne ;

Vu la lettre du 6 janvier 2014 par laquelle les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience du 6 février 2014 et que l'instruction pourrait être close à partir du 16 janvier 2014 sans information préalable ;

Vu l'avis d'audience portant clôture de l'instruction immédiate pris le 21 janvier 2014 en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 février 2014 :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public ;

1. Considérant que l'EURL Safy, qui a son siège à La Réunion et a pour objet de permettre à des particuliers de bénéficier des avantages fiscaux instaurés par le code général des impôts en faveur des investissements réalisés Outre-mer, a créé la SEP Elara 2, chargée d'acheter, au cours de l'année 2006, des matériels d'un montant total de 132.891 euros qu'elle devait donner en location à l'EURL AV Trade, située à La Réunion, dont l'objet social était l'exportation et le conditionnement de fruits, dans des conditions ouvrant droit aux avantages instaurés par les articles 199 undecies B, 217 undecies et 217 duodecies du code général des impôts ; que M.A..., qui a apporté des fonds à la SEP Elara 2, dont il est devenu associé, a bénéficié des réductions d'impôt correspondant à ses investissements dans cette SEP au titre des années 2006 à 2008 ; que, toutefois, l'administration a remis en cause ces avantages fiscaux au motif que les opérations réalisées par cette SEP ne remplissaient pas, en réalité, les conditions exigées par les articles susmentionnés du code général des impôts ; que le requérant interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires établies par l'administration de ce chef au titre de l'année 2008, aucun complément d'impôt n'ayant été réclamé au titre des années 2006 et 2007 ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2.Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : "L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation...." ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification en date du 21 septembre 2009 adressée à M.A..., précise de façon détaillée les règles de droit applicables, la nature, le montant et les motifs des redressements établis à la suite des opérations de contrôle sur place de l'EURL AV Trade et des opération de contrôle de la SEP Elara 2, dont le contribuable détient des parts ; qu'elle fait en outre notamment référence à la proposition de rectification adressée à la SEP Elara 2, qui indiquent précisément les faits, les motifs et la nature des redressements à l'origine des litiges et dont les extraits pertinents sont joints en annexe ; qu'ainsi, le contribuable a été mis à même de présenter de manière entièrement utile ses observations ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, qui n'exigent pas que l'administration joigne aux propositions de rectification les pièces qu'elle a utilisées pour établir les redressements, doit être rejeté ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 199 undecies B du code général des impôts :

4. Considérant, qu'aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur : "I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer... dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34. / Toutefois n'ouvrent pas droit à la réduction d'impôt les investissements réalisés dans les secteurs d'activité suivants : /... i) les services fournis aux entreprises, à l'exception de la maintenance, des activités de... conditionnement à façon... / Les dispositions du premier alinéa s'appliquent aux investissements réalisés par une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 ..., dont les parts sont détenues directement, ou par l'intermédiaire d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, par des contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B. En ce cas, la réduction d'impôt est pratiquée par les associés ou membres dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société ou le groupement. / ...Si, dans le délai de cinq ans de son acquisition ou de sa création ou pendant sa durée normale d'utilisation si elle est inférieure, l'investissement ayant ouvert droit à réduction d'impôt est cédé ou cesse d'être affecté à l'activité pour laquelle il a été acquis ou créé, ou si l'acquéreur cesse son activité, la réduction d'impôt pratiquée fait l'objet d'une reprise au titre de l'année au cours de laquelle cet événement est intervenu..." ;

5. Considérant que M. A...soutient que, par son objet social qui comportait l'importation et l'exportation de fruits et toutes opérations industrielles s'y rattachant, ainsi que par ses activités de conditionnement de fruits en vue de leur expédition, l'EURL AV Trade entrait dans le champ d'application de l'article 199 undecies B du code général des impôts et qu'elle a démenti n'avoir pas elle-même utilisé les biens achetés par la SEP Elara 2 ; que, toutefois, il résulte de l'instruction et notamment des constatations effectuées sur place par l'administration, non précisément contredites par le requérant, que l'EURL AV Trade n'avait procédé qu'à quelques rares opérations d'exportation en décembre 2005, qu'elle n'avait effectué aucune opération de conditionnement en 2006, ni ultérieurement, qu'elle avait mis l'ensemble de son personnel à la disposition d'une société tierce, la société Ouest Agri, et qu'elle avait refacturé l'ensemble des loyers relatifs aux matériels achetés par la SEP Elara 2 à la société Coopérative agricole des avirons qui utilisait ces biens, la comptabilité de l'EURL AV Trade ayant enregistré des recettes provenant de la refacturation de ces loyers et aucune recette provenant d'opérations de conditionnement à façon ; que, dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve, d'une part, que l'activité de l'EURL AV Trade ne comportait pas, au cours de la période en litige, d'activité de conditionnement à façon éligible à la réduction d'impôt prévue par l'article 199 undecies B du code général des impôts, d'autre part, que l'EURL AV Trade n'avait jamais affecté à cette activité de conditionnement les investissements qu'elle avait pris en location et qu'elle ne remplissait pas, en conséquence, l'autre condition prévue par le code général des impôts exigeant que les biens pris en location restent affectés durant cinq ans à l'activité pour laquelle ils avaient été acquis ; qu'il s'ensuit que M. A...ne pouvait, dès lors, bénéficier des mesures prévues par l'article 199 undecies B du code général des impôts ;

En ce qui concerne le moyen tiré, pour l'ensemble des redressements, de la méconnaissance du principe communautaire de proportionnalité :

6. Considérant que M. A...soutient qu'en remettant en cause, du fait d'agissements réalisés à son insu, les avantages fiscaux qu'il a obtenus sur le fondement des dispositions précitées du code général des impôts, alors qu'il est de bonne foi, l'administration a méconnu le principe communautaire de proportionnalité ; que, selon ce principe, les Etats membres doivent avoir recours à des moyens qui, tout en permettant d'atteindre efficacement l'objectif poursuivi par le droit interne, portent le moins possible atteinte aux objectifs et aux principes posés par la législation communautaire en cause ; que, toutefois, ce principe, qui fait partie des principes généraux de l'Union européenne ne trouve à s'appliquer dans l'ordre juridique national que lorsque la situation dont a à connaître le juge administratif français est régie par le droit de l'Union européenne ; que tel n'est pas le cas en l'espèce, dès lors que les avantages en litige ne sont pas établis dans le cadre des pouvoirs que les directives communautaires confèrent aux Etats membres et qu'aucune violation d'une liberté instaurée par le traité CE n'est invoquée ; que, par suite, les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de la méconnaissance de ce principe ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer jusqu'à l'issue des procédures pénales mentionnées par le contribuable, en tout état de cause sans lien avec les faits en litige, que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. A...la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'économie et des finances.

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13NC00339


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC00339
Date de la décision : 18/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : COSICH AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-02-18;13nc00339 ?
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