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06/02/2014 | FRANCE | N°12NC01597

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 06 février 2014, 12NC01597


Vu la requête, enregistrée le 12 septembre 2012, présentée pour la SARL Manufacture Vosgienne de Napperons (MVN), dont le siège est route de Badonvillers à Raon L'Etape (88110), par Me Reichert, avocat ;

La SARL MVN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100622 du 10 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2006 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

E

lle soutient que :

- le prix des parts de la SCI B...Jeanne devait être évalué à la date où ...

Vu la requête, enregistrée le 12 septembre 2012, présentée pour la SARL Manufacture Vosgienne de Napperons (MVN), dont le siège est route de Badonvillers à Raon L'Etape (88110), par Me Reichert, avocat ;

La SARL MVN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100622 du 10 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa requête tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2006 ;

2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;

Elle soutient que :

- le prix des parts de la SCI B...Jeanne devait être évalué à la date où les parties se sont mises d'accord sur la chose et le prix et non à la date de signature de l'acte de cession des parts sociales ;

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, elle justifie de l'existence d'un nantissement des parts sociales suite au jugement du tribunal de commerce du 23 novembre 2005 ; l'insertion dans l'acte d'une clause de résolution de la vente des parts de la SCI B...Jeanne dans le cas où les créances de la société Manufacture Vosgienne des Napperons (MVN) ne seraient pas remboursées a pour effet de réduire le prix potentiellement attendu de la cession ;

- le montant de l'indemnisation ne pouvait être retenu pour apprécier la valeur de l'actif de la SCI B...Jeanne alors qu'il n'est pas loisible à l'administration de se fonder sur des éléments postérieurs à la transaction ;

- la valorisation de l'indemnité future est erronée dès lors que les termes de comparaison de l'administration ne correspondent pas à l'immeuble en cause, qu'il est demandé au service la communication des prix de cession des immeubles sis dans la communauté de communes de la vallée de la Plaine en application de l'article 107 B du livre des procédures fiscales, alors que la méthode de leur conseil était pertinente ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 février 2013, présenté par le ministre délégué chargé du budget qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- la valeur vénale de titres non cotés sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible que celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et la demande à la date où la cession est intervenue ;

- la société n'a pas été lésée par la méthode utilisée par le service ;

- la position de l'administration consistant à limiter le montant de la créance au montant de l'indemnité d'assurance réellement versée à la société n'était pas excessive dès lors que les différentes approches de l'évaluation convergent vers une valeur voisine de 1 000 000 € ;

- la valorisation des actifs de la société a été sous-estimée et les titres ont été cédés en deçà de leur valeur vénale ;

- en vendant ses actifs à un prix minoré, la société a renoncé à une recette, ce qui constitue un acte anormal de gestion ;

Vu la lettre du 29 novembre 2013 par laquelle les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience du 16 janvier 2014 et que l'instruction pourrait être close à partir du 18 décembre 2013 sans information préalable ;

Vu l'avis d'audience portant clôture de l'instruction immédiate pris le 20 décembre 2013 en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 janvier 2014 :

- le rapport de M. Wallerich, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

1. Considérant qu'à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2005, 2006 et 2007, l'administration a estimé que la SARL Manufacture Vosgienne de Napperons (MVN) a commis un acte anormal de gestion en cédant, par acte sous seing privé du 30 janvier 2006, l'intégralité de ses participations dans la SCI B...Jeanne (58 parts sur 60) à M et MmeB..., qui détiennent avec leurs deux enfants la totalité de son capital, pour le prix de 301 600 euros, alors que la valeur vénale des titres cédés correspondait, selon le service à 792 222 euros ; que la SARL MVN fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande tendant à la décharge du complément d'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre de l'exercice 2006 résultant de la réévaluation du prix de cession des titres ;

2 Considérant que la SARL MVN, qui avait pour activité principale le travail à façon pour le compte de la société Team Tex, exerçait son activité dans des locaux qu'elle louait à la SCI B...Jeanne, dont elle détenait 96% des parts sociales, dont M. et Mme A...B...possédaient les 4% restants ; qu'à la suite d'un incendie survenu dans ces locaux en avril 2005 ayant entrainé leur destruction la SARL MVN a décidé de cesser son activité de façonnage et a cédé, le 30 janvier 2006, les parts de la SCI B...Jeanne, pour moitié à M. A...B...et pour moitié à son épouse, Mme C...B..., pour un montant total de 301 600 euros que l'administration, rehaussant la valeur unitaire des titres de 5 200 euros à 13 659 euros, a réévalué à 792 222 euros ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, dans sa version alors en vigueur : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. (...) " ; que la valeur vénale de titres non admis à la négociation sur un marché réglementé doit être appréciée compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession est intervenue ; que la valeur réelle des titres d'une société doit prioritairement être évaluée par référence à la valeur des autres titres de la société telle qu'elle ressort des transactions portant à la même époque sur ces titres, dès lors que cette valeur ne résulte pas d'un prix de convenance ; qu'en l'absence de toute transaction ou de transaction équivalente, l'appréciation de la valeur vénale est faite en utilisant les méthodes d'évaluation qui permettent d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible de celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande à la date où la cession est intervenue ;

4. Considérant, en premier lieu, que la SARL MVN soutient que pour estimer la valeur des parts de la SCI B...Jeanne il convenait de se placer non au 30 janvier 2006, date de la cession, mais au mois de septembre 2005, au cours duquel la décision de vendre a été prise et il a été procédé à l'évaluation des titres cédés ; que, cependant, la valeur vénale de titres non cotés sur un marché réglementé doit être appréciée, compte tenu de tous les éléments dont l'ensemble permet d'obtenir un chiffre aussi voisin que possible que celui qu'aurait entraîné le jeu normal de l'offre et de la demande, à la date où la cession est intervenue, c'est-à-dire, en l'espèce, à la date effective de la cession, soit au 30 janvier 2006 ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que les arguments avancés par la société requérante, tant en première instance qu'en appel, ne sont pas de nature à démontrer le caractère incertain, dans son principe comme dans son montant, de l'indemnisation déterminant la valeur des parts due à la SCI B... Jeanne à la suite du sinistre dont elle a été victime ; qu'en effet, il ressort des termes de la police d'assurance que, s'agissant d'un incendie, la SARL doit être indemnisée pour la " valeur de reconstruction à neuf sans limitation de somme ", montant auquel peut s'ajouter l'indemnisation des frais de déblais et démolition ainsi que de perte d'usage des locaux ; qu'au surplus, et alors qu'il est toujours loisible à l'administration de se fonder sur des éléments postérieurs à une transaction pour en établir la valeur réelle, l'assureur a informé, en avril 2006, le gérant de la SCI B...Jeanne d'un montant d'indemnisation de 1 130 000 euros ; que c'est dès lors à bon droit que l'administration a évalué l'actif de la société en y incluant celle de l'indemnité d'assurance à percevoir ;

6. Considérant, au surplus et en troisième lieu, que si la société requérante conteste le montant de l'indemnité d'assurance à percevoir, tel que retenu par l'administration, ce montant pouvait être évalué à partir des termes du contrat d'assurance souscrit par la société MVN elle-même ; qu'il résulte de l'instruction que le bâtiment détruit était un bâtiment à usage d'atelier de fabrication et bureaux d'une superficie totale de 3 200 m² ; que l'administration fait en outre valoir, sans être contredite sur ce point, que trois bâtiments comparables ont été vendus à proximité en octobre 2003, janvier 2005 et mars 2007 pour des prix au m² de 330, 325 et 333 euros, ce qui conduit pour 3 200 m² à une fourchette de 1 040 000 à 1 065 600 euros ; qu'aucun élément ne permet de retenir , en l'espèce, que la valeur à la vente de tels biens serait supérieure à celle du coût de leur construction et que la localisation précise du bien de la SCI B...Jeanne aurait une influence déterminante sur le coût de sa reconstruction ; que la société requérante ne peut non plus utilement se prévaloir d'une mutation concernant un immeuble situé à Pierre-Percée intervenue en 2010 postérieurement à la date de la proposition de rectification ; qu'ainsi, l'administration doit être regardée comme établissant l'existence d'un écart significatif entre la valeur vénale des titres de la société et leur prix de cession qui n'incorporait l'indemnité d'assurance qu'à hauteur de 400 000 euros ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que de la valeur des parts sociales de la SCI B...Jeanne était affectée par leur nantissement au profit du commissaire à l'exécution de son plan de cession, dès lors que la constitution de cette sureté lui avait été imposée par une décision du tribunal de commerce de Saint-Dié-des-Vosges pour tenir compte des modalités particulières de paiement des parts cédées aux époux B...par compensation avec leur compte courant dans la SARL MVN, laquelle avait été placée en redressement judiciaire par jugement du 15 mai 1996 ;

7. Considérant en cinquième lieu, qu'il résulte de l'instruction et de ce qui vient d'être dit que l'administration apporte la preuve de l'insuffisance du prix de cession des parts sociales de la SCI B...Jeanne initialement fixé à 301 600 euros, alors que la valeur vénale des titres correspond à 792 222 euros ;

8. Considérant, enfin, que l'administration, en rappelant les relations familiales et d'intérêt entre la SARL MVN, la SCI B...Jeanne et les acheteurs, apporte également la preuve de l'intention, pour la société, d'octroyer, et, pour les co-contractants, de recevoir une libéralité du fait des conditions de la cession ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL MVN n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SARL Manufacture Vosgienne de Napperons (MVN) est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Manufacture Vosgienne de Napperons (MVN) et au ministre de l'économie et des finances.

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N° 12NC01597


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC01597
Date de la décision : 06/02/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-02-03-01-01-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués. Notion de revenus distribués. Imposition de la personne morale distributrice.


Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: M. Marc WALLERICH
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : SCP CONTENTIEUX REDACTION CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-02-06;12nc01597 ?
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