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23/01/2014 | FRANCE | N°13NC00766

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 23 janvier 2014, 13NC00766


Vu la requête, enregistrée le 19 avril 2013, présentée pour l'association " Commission de protection des eaux de Franche-Comté ", ayant son siège 3 rue Beauregard à Besançon (25000), par MeA... ;

La Commission de protection des eaux de Franche-Comté demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101540 en date du 26 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet du Doubs a refusé de préciser par arrêté préfectoral les conditions de transmission à l

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Vu la requête, enregistrée le 19 avril 2013, présentée pour l'association " Commission de protection des eaux de Franche-Comté ", ayant son siège 3 rue Beauregard à Besançon (25000), par MeA... ;

La Commission de protection des eaux de Franche-Comté demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101540 en date du 26 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet du Doubs a refusé de préciser par arrêté préfectoral les conditions de transmission à l'administration des résultats d'analyse et des mesures d'auto-surveillance de la pisciculture Côte ;

2°) de définir les modalités de diffusion de l'information tant au titre de la police de l'eau que des installations classées et, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Doubs de prendre un arrêté complémentaire relatif à la diffusion d'une telle information dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, en application des articles L. 911-1, L. 911-2 et L. 911-3 du code de justice administrative ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La Commission de protection des eaux de Franche-Comté soutient que :

- le préfet a fait une inexacte application des dispositions de l'article R. 512-28 du code de l'environnement, qui impliquent qu'il définisse les conditions de transmission des résultats des analyses et mesures d'autocontrôle effectuées par la pisciculture Côte ;

- l'arrêté ministériel du 1er avril 2008 a été pris en méconnaissance de l'article R. 512-28 du code de l'environnement et ne peut légalement fonder le refus du préfet d'édicter des prescriptions complémentaires ; Le refus préfectoral a été édicté en méconnaissance des articles L. 124-1 et L. 125-1 du code de l'environnement et de l'article 3 de la directive 2003/04/CE ;

- la décision litigieuse méconnaît l'article L. 512-3 du code de l'environnement et s'avère entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de la périodicité des contrôles effectués sur les piscicultures ;

- la cour est en mesure de déterminer les mesures à prescrire sur les modalités de transmission des informations détenues par la pisciculture Côte sur le fondement de ses pouvoirs de plein contentieux et enjoindra, à titre subsidiaire, au préfet de déterminer de telles mesures ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 octobre 2013, présenté pour le ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre soutient que :

- l'arrêté ministériel du 1er avril 2008 ne méconnait pas l'article R. 512-28 du code de l'environnement, lequel n'impose pas une obligation de communication spontanée des résultats d'analyse de la pisciculture à l'administration ;

- le refus préfectoral de préciser les modalités de communication des résultats d'analyse par arrêté complémentaire ne méconnaît pas les dispositions des articles L. 124-1, L. 125-1 du code de l'environnement, de l'article 3 de la directive du 28 janvier 2003 ni celles de l'article L. 512-3 du code de l'environnement ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2003 ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu l'arrêté ministériel du 1er avril 2008 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire les piscicultures d'eau douce soumises à autorisation au titre du livre V du code de l'environnement (rubrique 2130 de la nomenclature des installations classées) ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 décembre 2013 :

- le rapport de M. Richard, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Favret, rapporteur public ;

1. Considérant que la Commission de protection des eaux de Franche-Comté relève appel du jugement en date du 26 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation du refus implicite du préfet du Doubs d'édicter un arrêté complémentaire à l'arrêté préfectoral d'autorisation en date du 28 octobre 1988 afin de prescrire à la pisciculture Côte, située à Lavans et Vuillafans, les conditions dans lesquelles cette dernière doit transmettre les résultats d'analyse et des mesures d'auto-surveillance à l'administration ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'environnement : " Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d'une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 512-1 du même code : " L'autorisation ne peut être accordée que si ces dangers ou inconvénients peuvent être prévenus par des mesures que spécifie l'arrêté préfectoral " ; qu'aux termes de l'article R. 512-28 du même code : " L'arrêté d'autorisation et, le cas échéant, les arrêtés complémentaires, fixent les prescriptions nécessaires à la protection des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1, L. 220-1 et L. 511-1. / Ces prescriptions tiennent compte notamment, d'une part, de l'efficacité des meilleures techniques disponibles et de leur économie, d'autre part, de la qualité, de la vocation et de l'utilisation des milieux environnants ainsi que de la gestion équilibrée de la ressource en eau. (...) L'arrêté d'autorisation fixe les moyens d'analyses et de mesures nécessaires au contrôle de l'installation et à la surveillance de ses effets sur l'environnement, ainsi que les conditions dans lesquelles les résultats de ces analyses et mesures sont portés à la connaissance de l'inspection des installations classées et du service chargé de la police des eaux (...) " ;

3. Considérant, en premier lieu, que les dispositions précitées de l'article R. 512-28 du code de l'environnement ne sauraient être regardées comme imposant au préfet d'exiger du titulaire d'une autorisation de fonctionnement d'une installation classée la communication spontanée et périodique à l'administration des résultats des analyses effectuées dans le cadre des prescriptions de l'arrêté d'autorisation, lesquelles sont destinées à permettre le contrôle de cette installation et la surveillance de ses effets sur l'environnement ; qu'il s'ensuit que les dispositions de l'article 24 de l'arrêté du 1er avril 2008 susvisé, qui exigent que les résultats des analyses effectuées dans le cadre des contrôles et de l'auto-surveillance soient conservés pendant dix ans par l'exploitant et tenus à la disposition des services d'inspection compétents, n'ont pas été édictées en méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 512-28 du code de l'environnement ; que, par ailleurs, il résulte de l'instruction que l'arrêté d'autorisation délivré pour la pisciculture Côte le 28 octobre 1988 comporte en son article 8 les normes de rejet des effluents de cette exploitation dans la Loue ainsi que les dispositions relatives aux mesures d'auto-contrôle et précise que les résultats des mesures de l'auto-surveillance devront être tenus à la disposition de l'inspecteur des installations classées ; que dans ces conditions, la Commission de protection des eaux de Franche-Comté n'est pas fondée à soutenir que par son refus d'édicter des prescriptions complémentaires relatives à la communication des résultats d'analyse, le préfet du Doubs a fait une application inexacte des dispositions de l'article R. 512-28 du code de l'environnement ou qu'il se fonde sur des règles issues de l'article 24 de l'arrêté du 1er avril 2008 qui seraient elles-mêmes illégales ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 512-3 du code de l'environnement : " Les conditions d'installation et d'exploitation jugées indispensables pour la protection des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1, les moyens de suivi, de surveillance, d'analyse et de mesure et les moyens d'intervention en cas de sinistre sont fixés par l'arrêté d'autorisation et, éventuellement, par des arrêtés complémentaires pris postérieurement à cette autorisation " ;

5. Considérant que la Commission de protection des eaux de Franche-Comté fait valoir que les dispositions de l'article L. 512-3 du code de l'environnement doivent conduire le préfet du Doubs à édicter un arrêté complémentaire relatif aux conditions de transmission des informations portant sur les résultats des analyses et des mesures d'autocontrôle de la pisciculture Côte ; qu'elle soutient que seul un nouvel arrêté mettrait l'administration en mesure de vérifier de manière efficace et transparente que les déversements opérés par la pisciculture dans le milieu naturel respectent les exigences relatives à la conservation du site posées à l'article L. 511-1 précité ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que la pisciculture Côte, suite aux différents rapports de l'inspection des installations classées rédigés dans le cadre des inspections sur site qui se sont déroulées en 2006 et 2009, a adopté un programme relatant l'ensemble des modalités de surveillance des rejets par le biais de prélèvements effectués en aval et en amont du site ; qu'elle a également mis en place un dispositif visant à analyser la présence, en entrée et sortie de la pisciculture, des matières en suspension totale (MEST), ammonium, nitrites, phosphates et DB05 non diluée ainsi que le débit du cours d'eau, de tels documents étant tenus à la disposition des services de l'inspection des installations classées et de la police de l'eau, sur leur demande ; qu'ainsi, et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que les activités de la pisciculture Côte entraineraient la violation des prescriptions concernant les rejets d'effluents dans les milieux posées par l'article 8 de son arrêté d'autorisation, la Commission de protection des eaux de Franche-Comté n'est pas fondée à soutenir que, par son refus d'édicter une prescription complémentaire spécifique aux conditions de transmission des informations sur le fondement des dispositions de l'article L. 512-3 du code de l'environnement, le préfet du Doubs méconnaitrait son obligation d'assurer une protection suffisante des intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ;

6. Considérant, en dernier lieu, que les dispositions des articles L. 124-1 et L. 125-1 du code de l'environnement ainsi que de l'article 3 de la directive européenne du 28 janvier 2003 concernant l'accès du public à l'information en matière environnementale n'ont ni pour objet ni pour effet d'obliger le préfet à édicter un arrêté complémentaire visant à contraindre l'exploitant d'une installation classée à transmettre périodiquement aux services compétents les résultats des mesures d'analyses des rejets d'effluents et des mesures d'autocontrôle ; que ces dispositions ne sont ainsi pas utilement invocables à l'encontre de la décision litigieuse ;

7. Considérant qu'il résulte de ce tout ce qui précède que la Commission de protection des eaux de Franche-Comté n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement en date du 26 février 2013, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le préfet du Doubs a refusé de préciser par arrêté préfectoral les conditions de transmission à l'administration des résultats d'analyse et de mesure d'auto-surveillance de la pisciculture Côte ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la Commission de protection des eaux de Franche-Comté demande au titre des frais exposés dans le présent litige ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'association " Commission de protection des eaux de Franche-Comté " est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la Commission de protection des eaux de Franche-Comté et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Copie en sera adressée au préfet du Doubs.

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13NC00766


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC00766
Date de la décision : 23/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement.

Nature et environnement - Installations classées pour la protection de l'environnement - Régime juridique - Pouvoirs du préfet - Modification des prescriptions imposées aux titulaires.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Michel RICHARD
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : LE CORNEC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-01-23;13nc00766 ?
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