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23/01/2014 | FRANCE | N°13NC00431

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 23 janvier 2014, 13NC00431


Vu la requête, enregistrée le 6 mars 2013, présentée pour M. E... D..., demeurant..., par MeA... ;

M. D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002443 en date du 18 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nancy :

- a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 13 février 2008 et 5 août 2010 refusant de le réintégrer au sein du crédit municipal de Nancy ;

- l'a renvoyé devant le crédit municipal de Nancy afin de déterminer le montant de ses allocations de retour à l'emploi ;

- a fixé à 5 000 euro

s le montant des dommages et intérêts alloués en réparation du préjudice subi du fait du retard dan...

Vu la requête, enregistrée le 6 mars 2013, présentée pour M. E... D..., demeurant..., par MeA... ;

M. D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1002443 en date du 18 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Nancy :

- a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 13 février 2008 et 5 août 2010 refusant de le réintégrer au sein du crédit municipal de Nancy ;

- l'a renvoyé devant le crédit municipal de Nancy afin de déterminer le montant de ses allocations de retour à l'emploi ;

- a fixé à 5 000 euros le montant des dommages et intérêts alloués en réparation du préjudice subi du fait du retard dans le versement des allocations de retour à l'emploi ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions des 13 février 2008 et 5 août 2010 ;

3°) d'enjoindre au crédit municipal de Nancy de le réintégrer dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt, sous astreinte de 15 euros par jour de retard ;

4°) de condamner le crédit municipal de Nancy à lui verser la somme de 61 550,82 euros en réparation du préjudice subi du fait de la perte de traitement ;

5°) de condamner le crédit municipal de Nancy à lui verser la somme de 60 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du retard dans le versement de son allocation de retour à l'emploi et 9 193,63 euros à titre de rappels d'allocation de retour à l'emploi ;

6°) de mettre à la charge du crédit municipal de Nancy le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. D...soutient que :

- la décision refusant de le réintégrer doit être annulée dès lors que le crédit municipal de Nancy n'établit pas l'absence de vacance de poste depuis 2008 ;

- un des deux adjoints administratifs en poste au sein de crédit municipal aurait été titularisé en décembre 2007 ;

- cette titularisation serait illégale faute d'avoir été précédée d'une période de stage ;

- le crédit municipal lui a versé avec retard l'allocation de retour à l'emploi ;

- il a subi un important préjudice en étant sans revenus, a du vendre une partie de ses meubles, et se trouve dans une situation administrative inextricable en raison des fautes commises par le crédit municipal ;

Vu le jugement et les décisions attaquées ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 juin 2013, présenté pour le crédit municipal de Nancy, par MeC..., qui demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident, d'annuler le jugement en tant qu'il l'a condamné à verser à M. D...:

- l'allocation de retour à l'emploi au titre de la période du 1er juillet 2008 au 31 janvier 2009 ;

- la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts et 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

3°) de condamner M. D...à lui verser la somme de 7 064,90 euros correspondant au versement des allocations chômages au titre de la période de juillet 2008 à janvier 2009 ;

4°) de mettre à la charge de M. D...une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le crédit municipal de Nancy fait valoir que :

- les conclusions d'excès de pouvoir de première instance du requérant étaient tardives ;

- les conclusions indemnitaires étaient irrecevables ;

- le crédit municipal est un petit établissement qui n'a connu aucune vacance de poste depuis 2008 ;

- M. D...ne peut prétendre au versement des allocations chômage avant le 27 janvier 2009 ;

- le retard de paiement invoqué par l'intéressé lui est imputable ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 juillet 2013, présenté pour M. D... qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statuaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le décret n° 86-68 du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité, de congé parental des fonctionnaires territoriaux et à l'intégration ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 décembre 2013 :

- le rapport de M. Nizet, premier conseiller,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., substituant MeA..., pour M. D...et de Me F..., substituant MeC..., pour le crédit municipal de Nancy ;

1. Considérant que M.D..., agent titulaire du crédit municipal de Nancy depuis 1997, a sollicité sa mise en disponibilité pour convenance personnelle, qui lui a été accordée pour la période du 26 juin 2007 au 25 juin 2008 ; qu'il a demandé sa réintégration le 5 janvier 2008 ; que le directeur du crédit municipal a rejeté cette demande, par lettre du 13 février 2008, au motif qu'aucun poste n'était alors vacant ; qu'en conséquence, M. D...a, par arrêté du 23 juin 2008, été maintenu en disponibilité ; qu'une convention de retour à l'emploi a été signée le 6 août 2008 entre M. D...et le crédit municipal prévoyant le versement à l'intéressé de ses allocations chômage ; que M. D...a, par lettre du 4 août 2010, demandé au crédit municipal de lui verser des rappels de traitement, des rappels d'allocation chômage, ainsi que 20 000 euros à parfaire en réparation du préjudice subi à raison du retard à verser lesdites allocations ; que cette demande a été rejetée par le crédit municipal par lettre du 5 août 2010 ; que, par un jugement en date du 18 décembre 2012, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté les conclusions de M. D...tendant à l'annulation de la décision du 13 février 2008, réitérée le 5 août 2010, et a condamné le crédit municipal à lui verser les allocations de retour à l'emploi, au titre de la période du 1er juillet 2008 au 31 janvier 2009, en renvoyant le requérant devant le crédit municipal pour liquidation du montant de cette allocation, ainsi que la somme de 5 000 euros en réparation du retard fautif constaté dans le versement de l'allocation de retour à l'emploi, et la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur la légalité des décisions du 13 février 2008 et du 5 août 2010 :

Sur la fin de non recevoir tirée de la tardiveté de la demande de première instance :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. " ; et qu'aux termes de l'article R. 421-5 du même code : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision du 13 février 2008, refusant de réintégrer M.D..., ne mentionnait pas les délais et voies de recours ; que, par suite, le crédit municipal n'est pas fondé à soutenir que la demande de première instance serait tardive ;

Sur le fond :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale modifiée : " (...) Le fonctionnaire mis en disponibilité, soit d'office (...), soit de droit, sur demande, pour raisons familiales, est réintégré à l'expiration de sa période de disponibilité dans les conditions prévues aux premier, deuxième et troisième alinéas de l'article 67 de la présente loi. Dans les autres cas, si la durée de la disponibilité n'a pas excédé trois années, une des trois premières vacances dans la collectivité ou l'établissement d'origine doit être proposée au fonctionnaire " ; qu'aux termes de l'article 26 du décret du 13 janvier 1986 relatif aux positions de détachement, hors cadres, de disponibilité et de congé parental des fonctionnaires territoriaux : " (...) le fonctionnaire mis en disponibilité sur sa demande fait connaître à son administration d'origine sa décision de solliciter le renouvellement de la disponibilité ou de réintégrer son cadre d'emplois d'origine trois mois au moins avant l'expiration de la disponibilité. / (...) Le fonctionnaire qui a formulé avant l'expiration de la période de mise en disponibilité une demande de réintégration est maintenu en disponibilité jusqu' à ce qu'un poste lui soit proposé dans les conditions prévues à l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 (...) " ; qu'aux termes de l'article 97 de la loi du 26 janvier 1984 précitée : " (...) Si la collectivité ou l'établissement ne peut lui offrir un emploi correspondant à son grade, le fonctionnaire est maintenu en surnombre pendant un an. Pendant cette période, tout emploi créé ou vacant correspondant à son grade dans la collectivité ou l'établissement lui est proposé en priorité ; la collectivité (...) et le centre de gestion examinent, chacun pour ce qui le concerne, les possibilités de reclassement. (...) Au terme de ce délai, le fonctionnaire est pris en charge par le centre de gestion dans le ressort duquel se trouve la collectivité (...). / Pendant la période de prise en charge, (...) le centre (...) lui propose tout emploi vacant correspondant à son grade (...) " ;

5. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'à l'issue d'une disponibilité pour convenances personnelles n'excédant pas trois ans, un fonctionnaire territorial ne bénéficie d'un droit à réintégration qu'à l'une des trois premières vacances dans la collectivité d'origine et non dès la première vacance ; que cette dernière doit justifier son refus de réintégration sur les deux premières vacances par un motif tiré de l'intérêt du service ;

6. Considérant que pour rejeter sa demande de réintégration, le crédit municipal de Nancy a opposé à M. D...l'absence d'un emploi vacant correspondant à son grade ; que pour justifier le bienfondé des décisions contestées des 13 février 2008 et du 5 août 2010 le crédit municipal se borne à faire valoir qu'étant un petit établissement comptant 7 personnes pour un équivalent temps plein de 5.61, " il n'est pas surprenant qu'aucune vacance de poste n'ait été enregistrée depuis 2008 " ; que ce faisant, et alors que M. D...affirme que des recrutements ont eu lieu au cours de cette période sur des postes correspondant à son grade, et soutient que le crédit municipal de Nancy n'établit donc pas l'absence de vacance de poste depuis 2008, ce dernier s'abstient de produire tout autre élément, et notamment le tableau des effectifs de l'établissement, qui permettrait d'établir leur consistance au jour des décisions litigieuses et la réalité d'une absence de poste vacant correspondant au grade de l'intéressé ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté les conclusions de M. D...tendant à l'annulation des décisions du 13 février 2008 et du 5 août 2010 portant refus de réintégration ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

9. Considérant qu'il résulte des dispositions susmentionnées de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée que M. D... n'avait droit à être réintégré qu'à l'une des trois premières vacances et non dès la première ; que l'exécution de la présente décision d'annulation n'implique donc pas nécessairement la réintégration de l'intéressé ; que les conclusions de ce dernier tendant à ce que le juge administratif enjoigne au crédit municipal de Nancy de procéder à cette réintégration ne peuvent dès lors qu'être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu, en application de la présente décision, d'enjoindre au crédit municipal de Nancy de réexaminer la demande de réintégration présentée par M. D... au regard des dispositions du troisième alinéa de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée, compte tenu des vacances d'emplois correspondant à son grade survenues le cas échéant depuis le 13 février 2008, et, en cas de réintégration, d'en tirer toutes les conséquences sur sa situation administrative et sa carrière dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction du prononcé d'une astreinte ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par le crédit municipal à la demande de première instance ;

12. Considérant que si, comme il vient d'être dit, les décisions du 13 février 2008 et du 5 août 2010 portant refus de réintégration de M. D...sont illégales, le crédit municipal n'était pas tenu de réintégrer l'intéressé à la première vacance de poste mais à l'une des trois premières ; que, par suite, en l'état du dossier, l'intéressé n'établit pas le caractère indemnisable de la perte de traitement et indemnités que lui aurait causé ces décisions ; que, de même, les préjudices liés à l'allocation de retour à l'emploi, ainsi qu'au retard observé dans le versement de cette allocation, qui dépendent des conséquences à tirer de la décision qui sera prise en application de l'injonction prononcée dans le cadre du réexamen de la demande de réintégration de M.D..., sont purement éventuels et, par suite, insusceptibles d'ouvrir droit à réparation ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a condamné le crédit municipal à indemniser M. D...des préjudices qu'il soutient avoir subis ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

1. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par le crédit municipal de Nancy doivent dès lors être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du crédit municipal de Nancy une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. D...et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nancy n° 1002443 en date du 18 décembre 2012 et les décisions portant refus de réintégration des 13 février 2008 et 5 août 2010 sont annulées.

Article 2 : Il est enjoint au crédit municipal de Nancy de réexaminer la demande de réintégration présentée par M. D...au regard des dispositions du troisième alinéa de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984, compte tenu des vacances d'emplois correspondant à son grade survenues le cas échéant depuis le 13 février 2008 dans un délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le crédit municipal de Nancy versera à M. D...une somme de 1 500 (mille cinq cents euros) sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D...et au crédit municipal de Nancy.

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N° 13NC00431


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC00431
Date de la décision : 23/01/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Olivier NIZET
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : CABINET FILOR - JURI-FISCAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2014-01-23;13nc00431 ?
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