Vu la requête, enregistrée le 19 février 2013, présentée pour M. A... B..., demeurant..., par Me Nollevalle ;
M. B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1101101-1101053-1101124 du 18 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de Châlons-sur-Vesle approuvant son plan local d'urbanisme, en tant que ce plan a classé en zone naturelle sa parcelle cadastrée section A n° 240 ;
2°) d'annuler la délibération du conseil municipal de la commune de Châlons-sur-Vesle en date du 18 avril 2011 approuvant son plan local d'urbanisme, en tant que ce plan classe en zone N sa parcelle cadastrée section A n° 240 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Châlons-sur-Vesle la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- selon la jurisprudence du Conseil d'Etat, la seule circonstance qu'une parcelle serait en déclivité et exposée à des risques d'inondation, alors qu'elle est à l'entrée du bourg, desservie par une voie et entourée de terrains classés en zone urbaine, ne constitue pas un motif légal de classement en zone N ;
- le risque d'inondation de son terrain n'est pas établi ; les articles de presse produits se rapportent à des inondations qui n'ont pas concerné sa parcelle ; un talus et un fossé le protègent de l'écoulement des eaux pluviales ; l'exposition de son terrain au risque de coulées de boue n'est pas davantage établi ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 juillet 2013, présenté pour la commune de Châlons-sur-Vesle par la Selas cabinet Devarenne associés, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. B...la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la circonstance qu'une parcelle soit antérieurement classée en zone constructible du plan local d'urbanisme n'est pas constitutive d'un droit acquis ;
- des inondations et coulées de boue affectant le lieu-dit " la vieille voie " se sont déjà produites à plusieurs reprises par le passé ;
- le rapport de présentation et le projet d'aménagement et de développement durable précisent qu'il y a lieu de tenir compte de ces phénomènes naturels dans la détermination des zones d'extension de l'urbanisation ;
- un risque de coulée de boue provenant des coteaux voisins constituant une zone viticole justifie amplement le classement des terrains concernés en zone N ;
- le terrain du requérant est situé à proximité immédiate du secteur atteint par une coulée de boue le 23 juillet 2001, ce qui atteste de la réalité du risque ayant justifié son classement en zone N ;
Vu le jugement et la délibération attaqués ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le décret n° 2007-18 du 5 janvier 2007 pris pour l'application de l'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005 relative au permis de construire et aux autorisations d'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 décembre 2013 :
- le rapport de M. Pommier, président,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de Me Nollevalle, avocat de M.B..., ainsi que celles de Me Keyser, avocat de la commune de Châlons-sur-Vesle ;
1. Considérant que M. B...fait appel du jugement du 18 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 18 avril 2011 par laquelle le conseil municipal de Châlons-sur-Vesle a approuvé son plan local d'urbanisme, en tant que ce plan classe en zone naturelle la parcelle cadastrée section A n° 240 dont il est propriétaire ;
Sur la fin de non-recevoir opposée en première instance et non expressément abandonnée en appel par la commune de Châlons-sur-Vesle :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-7 du code de justice administrative alors applicable : " La présentation des requêtes dirigées contre un document d'urbanisme ou une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol est régie par les dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ci-après reproduit : " Art. R. 600-1 .- En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un certificat d'urbanisme, une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou un permis de construire, d'aménager ou de démolir. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif " ;
3. Considérant qu'il résulte clairement des dispositions précitées de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue du décret susvisé du 5 janvier 2007, que la formalité de notification qu'il pose n'était plus exigée à peine d'irrecevabilité que pour les recours dirigés contre un certificat d'urbanisme, une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou un permis de construire, d'aménager ou de démolir ; que, par suite, M. B...n'était pas tenu de notifier à la commune de Châlons-sur-Vesle son recours contentieux qui tendait à l'annulation de la délibération du conseil municipal approuvant son plan local d'urbanisme ; que, dès lors la fin de non-recevoir opposée par la commune de Châlons-sur-Vesle doit être écartée ;
Sur la légalité de la délibération attaquée :
4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 123-8 du code de l'urbanisme : " Les zones naturelles et forestières sont dites "zones N". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison soit de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique, soit de l'existence d'une exploitation forestière, soit de leur caractère d'espaces naturels (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 123-11 du même code : " Les zones U, AU, A et N sont délimitées sur un ou plusieurs documents graphiques. Les documents graphiques du règlement font, en outre, apparaître s'il y a lieu : (...) b) Les secteurs où (...) l'existence de risques naturels, tels qu'inondations, incendies de forêt, érosion, affaissements, éboulements, avalanches, ou de risques technologiques justifient que soient interdites ou soumises à des conditions spéciales les constructions et installations de toute nature, permanentes ou non, les plantations, dépôts, affouillements, forages et exhaussements des sols " ;
5. Considérant qu'il ressort du rapport de présentation et du projet d'aménagement et de développement durable que pour classer en zone naturelle les terrains non construits sis au lieu-dit " la vieille voie ", les auteurs du plan local d'urbanisme se sont fondés non sur la qualité et l'intérêt des sites, des milieux naturels, des paysages, ou sur leur caractère d'espaces naturels à préserver, mais exclusivement sur l'existence d'un risque de coulées de boue provenant des coteaux viticoles voisins en cas de fortes précipitations et sur la nécessité, en l'absence de travaux appropriés, de maintenir inconstructibles les terrains en bas de pente ; qu'un tel motif, s'il peut conduire, en vertu de l'article R. 123-11 du code de l'urbanisme, à fixer au sein d'une zone des secteurs où les constructions sont interdites ou soumises à des conditions spéciales, n'est pas au nombre de ceux qui peuvent, par eux-mêmes, justifier un classement en zone N au regard des dispositions de l'article R. 123-8 de ce code ; que, par suite, M. B...est fondé à soutenir que le classement de son terrain, qui est intervenu sur le fondement de ce seul critère, est entaché d'illégalité ;
6. Considérant, en second lieu, que si les arrêtés portant reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle en date des 25 août 1986, 29 décembre 1999 et 12 mars 2002 pour des inondations par ruissellement et coulées de boue ne peuvent, en l'absence de précision quant aux parties du territoire communal qui ont été touchées, être pris en compte pour justifier l'existence d'un risque avéré d'inondation au lieu-dit " la vieille voie ", il ressort des articles de presse que le 23 juillet 2001 est survenue une inondation importante ayant affecté les habitations riveraines de la rue de la vieille voie ; que si la parcelle 240 dont est propriétaire M. B...est située en deçà de la rue de la vieille voie, et s'il soutient que sa parcelle serait protégée par un talus et un fossé, sur lesquels il ne donne toutefois aucune précision quant à leur dimensionnement, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle ne serait pas atteinte par des eaux de ruissellement ou des coulées de boue en cas de précipitations d'une importance exceptionnelle ; que, par suite, M. B... n'établit pas que les auteurs du plan local d'urbanisme se seraient fondés sur des faits matériellement inexacts pour estimer que l'emplacement de cette parcelle l'exposait à être inondée en cas de fortes intempéries ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté ;
7. Considérant, cependant, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 5 ci-dessus que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Châlons-sur-Vesle le versement à M. B...de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de ce dernier la somme que demande au même titre la commune de Châlons-sur-Vesle ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 18 décembre 2012 et la délibération du conseil municipal de Châlons-sur-Vesle en date du 18 avril 2011 approuvant son plan local d'urbanisme, en tant que ce plan classe en zone N la parcelle cadastrée section A n° 240 appartenant à M.B..., sont annulés.
Article 2 : La commune de Châlons-sur-Vesle versera la somme de 1 000 euros à M. B... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Châlons-sur-Vesle tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et à la commune de Châlons-sur-Vesle.
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