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19/12/2013 | FRANCE | N°13NC01532

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 19 décembre 2013, 13NC01532


Vu la requête, enregistrée le 2 août 2013, complétée par un mémoire enregistré le 4 décembre 2013, présentée pour M. B...A..., demeurant au..., par Me Pujol-Bainier, avocat ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205516 du 19 juin 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part de la décision du 1er juin 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur à prononcé l'invalidation de son titre de conduite pour solde de points nul et lui a enjoint

de le restituer, d'autre part de la décision du 27 septembre 2012 par laquelle l...

Vu la requête, enregistrée le 2 août 2013, complétée par un mémoire enregistré le 4 décembre 2013, présentée pour M. B...A..., demeurant au..., par Me Pujol-Bainier, avocat ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1205516 du 19 juin 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part de la décision du 1er juin 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur à prononcé l'invalidation de son titre de conduite pour solde de points nul et lui a enjoint de le restituer, d'autre part de la décision du 27 septembre 2012 par laquelle le préfet du Haut-Rhin a refusé de créditer quatre points au capital affecté à son permis de conduire à la suite d'un stage de sensibilisation à la sécurité routière effectué les 25 et 26 juin 2012 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ces décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui restituer son titre de conduite affecté d'un crédit de quatre points dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A...soutient que :

- la décision ministérielle portant invalidation de son titre de conduite ne lui ayant pas été régulièrement notifiée et ne comportant pas mention des voies et délais de recours, c'est à tort que le premier juge a rejeté sa demande comme irrecevable car tardive ;

- la décision ministérielle invalidant son titre de conduite ne lui étant pas opposable faute de notification régulière, c'est à tort que le préfet du Haut-Rhin a refusé de créditer quatre points sur le capital affecté à son titre de conduite à la suite du stage de sensibilisation à la sécurité routière qu'il a effectué les 25 et 26 juin 2012 ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 novembre 2013, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. A...de la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le ministre soutient que :

- la notification le 7 juin 2012 de la décision référencée 48SI est régulière ;

- le permis de conduire de M. A...ayant été invalidé le 7 juin 2012, date de notification de la décision 48SI, M. A...ne pouvait donc prétendre à ce que le capital de points affecté à son permis de conduire soit crédité de quatre points à la suite du stage de sensibilisation qu'il a effectué les 25 et 26 juin 2012 ;

Vu la décision du 15 novembre 2013 par laquelle le président du bureau d'aide juridictionnelle a admis M. A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle ;

Vu l'ordonnance en date du 20 novembre 2013 fixant la clôture de l'instruction le 4 décembre 2013 à 16 heures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 décembre 2013 :

- le rapport de M. Laubriat, premier conseiller,

- les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public ;

1. Considérant que par décision du 27 septembre 2012, le préfet du Haut-Rhin a refusé de créditer quatre points au capital affecté au permis de conduire de M. A...à la suite de l'accomplissement par ce dernier, les 25 et 26 juin 2012, d'un stage de sensibilisation à la sécurité routière, au motif que le permis de conduire de l'intéressé avait été précédemment invalidé pour solde de points nul par une décision du ministre de l'intérieur notifiée le 7 juin 2012 ; que M. A...demande l'annulation du jugement du 19 juin 2013 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part de la décision ministérielle du 1er juin 2012, d'autre part de la décision du préfet du Haut-Rhin du 27 septembre 2012 ;

Sur l'irrecevabilité opposée par le tribunal :

2. Considérant que pour rejeter comme irrecevables les conclusions de la demande présentée par M. A...tendant à l'annulation de la décision référencée 48SI par laquelle le ministre de l'intérieur à prononcé l'invalidation de son titre de conduite pour solde de points nul, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Strasbourg a relevé que cette décision, adressée sous pli recommandé avec demande d'accusé de réception, et présentée le 7 juin 2012 à la dernière adresse connue du requérant, avait été régulièrement notifiée ;

3. Considérant toutefois qu'aucun principe général, ni aucune disposition législative ou réglementaire, ne fait obligation au titulaire d'un permis de conduire de déclarer à l'autorité administrative sa nouvelle adresse en cas de changement de domicile ; qu'il en résulte qu'alors même que M. A...n'aurait pas signalé son changement d'adresse aux services compétents, la présentation à une adresse où il ne réside plus du pli notifiant une décision relative à son permis de conduire et prise à l'initiative de l'administration n'est pas de nature à faire courir le délai de recours contentieux ; qu'il ressort des mentions portées sur la photocopie de l'avis de réception postal afférent à cette décision que le pli en cause, envoyé par le " F.N.P.C. " (fichier national du permis de conduire), a été adressé au 11, chemin des Vignerons à Illfurth ; que ce pli a été présenté et distribué le 7 juin 2012 ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...habite au 7, avenue du Général de Gaulle, à Rixheim depuis le 15 décembre 2010 et que l'adresse du 11, chemin des Vignerons, à Illfurth, correspond à l'adresse du père du requérant ; que, dans ces circonstances, c'est à tort que le premier juge a considéré que la décision du ministre de l'intérieur ayant été régulièrement notifiée, les conclusions de la demande de M. A...tendant à l'annulation de cette décision présentées le 30 novembre 2012 étaient irrecevables parce que tardives ; qu'ainsi, M. A...est fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché sur ce point d'irrégularité et doit être annulé dans cette mesure ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'annuler le jugement du 19 juin 2013 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il rejette comme irrecevables les conclusions de M. A... dirigées contre la décision du ministre de l'intérieur portant invalidation de son permis de conduire, de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur ces conclusions et par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

5. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 223-1 du code de la route : " Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue (...) Lorsque le nombre de points est nul, le permis perd sa validité. La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive " ; qu'aux termes de l'article L. 223-3 du même code : " Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L. 223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9. Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification est dûment portée à sa connaissance ; il est également informé de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. Le retrait de points est porté à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand il est effectif. "; qu'aux termes des dispositions du 4ème alinéa de l'article L. 223-6 : " Le titulaire du permis de conduire qui a commis une infraction ayant donné lieu à retrait de points peut obtenir une récupération de points s'il suit un stage de sensibilisation à la sécurité routière (...). " ; que l'article R. 223-8 dispose : " I.-Le titulaire de l'agrément prévu au II de l'article R. 213-2 délivre une attestation de stage à toute personne qui a suivi un stage de sensibilisation à la sécurité routière dans le respect de conditions d'assiduité et de participation fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité routière. Il transmet un exemplaire de cette attestation au préfet du département du lieu du stage, dans un délai de quinze jours à compter de la fin de celui-ci. / II.-L'attestation délivrée à l'issue du stage effectué en application des dispositions de l'alinéa 3 de l'article L. 223-6 donne droit à la récupération de quatre points dans la limite du plafond affecté au permis de conduire de son titulaire. (...)/ III.-Le préfet mentionné au I ci-dessus procède à la reconstitution du nombre de points dans un délai d'un mois à compter de la réception de l'attestation et notifie cette reconstitution à l'intéressé par lettre simple. La reconstitution prend effet le lendemain de la dernière journée de stage. (...). " ;

6. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 223-3 du code de la route, éclairées notamment par les travaux préparatoires de la loi du 10 juillet 1989, que si le nombre de points affecté au permis de conduire est réduit de plein droit lorsqu'est établie, par le paiement d'une amende forfaitaire ou par une condamnation devenue définitive, la réalité de l'infraction donnant lieu à retrait de points, la perte de points doit être portée à la connaissance de l'intéressé par lettre simple du ministre de l'intérieur ; que, dès lors, la décision constatant la perte de points n'est, en vertu des dispositions de l'article 8 de la loi du 17 juillet 1978 fixant les relations entre l'administration et le public et auxquelles les auteurs de la loi du 10 juillet 1989 n'ont pas entendu déroger, opposable à l'intéressé qu'à compter de la date où cette décision a été portée à sa connaissance par l'administration ;

En ce qui concerne la décision ministérielle portant invalidation du titre de conduite :

7. Considérant que le ministre n'est pas en mesure d'apporter la preuve que les décisions portant retraits successifs de points, expédiées par lettre simple, ont été reçues par M.A... ; qu'ainsi qu'il a été dit, la décision 48 SI du ministre de l'intérieur informant M. A... du dernier retrait de points opéré sur le capital affecté à son permis de conduire et récapitulant les retraits antérieurs ne lui est pas opposable ; qu'en vertu des dispositions précitées de l'article L. 223-1 du code de la route, le permis de conduire ne perd sa validité qu'en cas de solde de points nul ; que compte tenu de l'inopposabilité des décisions de retrait de points, M. A...disposait encore à la date d'édiction de la décision 48SI, de points sur le capital affecté à son permis ; qu'ainsi, il est fondé à soutenir que la décision ministérielle notifiée le 7 juin 2012 est entachée d'une erreur de droit en tant qu'elle porte annulation de son titre de conduite pour défaut de point ;

En ce qui concerne la décision préfectorale du 27 septembre 2012 :

8. Considérant que s'il résulte des dispositions précitées de l'article R. 223-8 du code de la route que le préfet est tenu de rejeter toute demande de reconstitution de points acquis à la suite d'un stage de sensibilisation lorsque le conducteur a reçu, avant le dernier jour du stage, régulièrement notification d'une décision du ministre de l'intérieur l'informant que son permis de conduire a perdu sa validité par suite de l'épuisement de son capital de points, il ressort des pièces du dossier que M. A...a effectué un stage de sensibilisation à la sécurité routière les 25 et 26 juin 2012 alors qu'à ces dates, comme il a été dit précédemment, la décision " 48 S " ne lui avait pas été régulièrement notifiée ; que, dès lors, M. A...était le 26 juin 2012 toujours titulaire de son permis de conduire ; que, par suite, le préfet du Haut-Rhin était tenu de créditer quatre points au capital affecté au permis de conduire de M. A... ; que M. A...est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet du Haut-Rhin a refusé de créditer quatre points sur le capital affecté à son permis de conduire à la suite du stage accompli les 25 et 26 juin 2012 ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui doit être annulé, le premier juge a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision ministérielle notifiée le 7 juin 2012 ainsi que de la décision préfectorale du 27 septembre 2012 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

10. Considérant que le présent jugement implique nécessairement que le préfet du Haut-Rhin restitue à M. A...son titre de conduite affecté d'un capital de quatre points ; qu'il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur d'ordonner au préfet du Haut-Rhin de le faire dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. A...qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à l'Etat la somme qu'il réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. A...présentées sur le même fondement ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 19 juin 2013 est annulé, ensemble la décision ministérielle notifiée le 7 juin 2012 et la décision du préfet du Haut-Rhin du 27 septembre 2012.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur d'ordonner au préfet du Haut-Rhin de restituer à M. A...son permis de conduire crédité de quatre points dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de l'Etat tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie du présent arrêt sera adressé au préfet du Haut-Rhin.

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N° 13NC01532


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13NC01532
Date de la décision : 19/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Police - Police générale - Circulation et stationnement - Permis de conduire - Retrait de permis.

Police - Police générale - Circulation et stationnement - Permis de conduire - Restitution de points.


Composition du Tribunal
Président : Mme ROUSSELLE
Rapporteur ?: M. Alain LAUBRIAT
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : PUJOL-BAINIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-12-19;13nc01532 ?
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