Vu la requête, enregistrée le 24 janvier 2013, présentée pour la société Mari, dont le siège social est situé au 1, Grand rue, à Gundershoffen (67110), agissant par son représentant légal, par Me Billard, avocat ; la société Mari demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1000433 du 26 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 décembre 2009 par laquelle le ministre chargé du travail a annulé la décision du 2 juin 2009 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de M. C...;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 2 décembre 2009 ;
3°) de mettre à la charge de M. C...la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la décision du ministre chargé du travail est insuffisamment motivée dès lors qu'elle n'indique pas les raisons pour lesquelles l'inspecteur du travail par intérim n'était pas compétent pour prendre la décision d'autoriser le licenciement de M.C... ;
- la demande d'autorisation de licenciement était motivée par référence au projet de lettre de licenciement qui indiquait l'énoncé précis des faits reprochés à M.C... ;
- la demande d'autorisation de licenciement était fondée tant sur l'insuffisance professionnelle que sur la faute grave ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 avril 2013, présenté pour M. A...C..., domicilié..., par Me Martin, avocat ; M. C...conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la société Mari la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il fait valoir que :
- la requête est irrecevable dès lors que la société Mari l'a dirigée contre M. C... et non contre l'auteur de la décision en litige ;
- la décision du ministre est suffisamment motivée ;
- la demande d'autorisation de licenciement ne peut être motivée par référence à des documents joints ;
- alors que la demande était fondée sur la faute grave, l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement pour insuffisance professionnelle, motif distinct de celui invoqué par l'employeur ;
Vu le mémoire enregistré le 26 juillet 2013, présenté par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social qui conclut au rejet de la requête ;
Il fait valoir que :
- la décision du ministre est suffisamment motivée ;
- la demande d'autorisation de licenciement, qui ne contenait l'énoncé d'aucun motif ni d'aucun fait précis justifiant l'engagement de la procédure de licenciement, ne peut être motivée par référence à des documents joints ;
Vu l'ordonnance en date du 21 août 2013 fixant la clôture de l'instruction au 10 septembre 2013 à 16 heures ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 décembre 2013 :
- le rapport de Mme Kohler, premier conseiller,
- les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., conseil de M.C... ;
1. Considérant que par une décision du 2 juin 2009 l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de M.C..., cariste - emballeur au sein de la société Mari depuis septembre 2000 et délégué du personnel suppléant depuis 2006 ; que, saisi sur recours hiérarchique, le ministre chargé du travail a, par décision du 2 décembre 2009, annulé la décision de l'inspecteur du travail et a rejeté la demande d'autorisation de licenciement présentée par la société Mari ; que ladite société relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre du 2 décembre 2009 ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2411-5 du code du travail : " Le licenciement d'un délégué du personnel, titulaire ou suppléant, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail. (...). " ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ; qu'en l'espèce, la décision ministérielle en litige vise la demande d'autorisation de licenciement ainsi que les éléments de procédure, mentionne les articles applicables du code du travail et, en ce qui concerne les considérations de fait, précise que la décision de l'inspecteur du travail a été prise par une autorité incompétente et que la demande d'autorisation de licenciement ne comportait l'énoncé d'aucun motif ni d'aucun fait précis justifiant l'engagement de la procédure de licenciement ; que contrairement à ce que soutient la société Mari, l'exigence de motivation telle que définie par la loi du 11 juillet 1979 n'imposait pas au ministre de préciser les raisons pour lesquelles l'inspecteur du travail par intérim, signataire de la décision du 2 juin 2009 était incompétent pour ce faire ; qu'ainsi la décision en litige est suffisamment motivée ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 2421-10 du code du travail : " La demande d'autorisation de licenciement d'un délégué du personnel, (...) énonce les motifs du licenciement envisagé. (...) " ; qu'en l'espèce, la demande d'autorisation de licenciement de M. C...ne contient l'énoncé d'aucun motif ni d'aucun fait de nature à justifier l'engagement de la procédure de licenciement, sans que puisse être regardé comme tenant lieu d'un tel énoncé le renvoi au projet de lettre de licenciement joint à la demande, dont la société ne s'approprie d'ailleurs pas explicitement les termes ; que, dans ces conditions, la société Mari n'est pas fondée à soutenir que le ministre a commis une erreur en n'acceptant pas la motivation de la demande d'autorisation de licenciement de M. C... par référence à ce projet de courrier, alors d'ailleurs qu'il ressort des termes mêmes de la demande d'autorisation de licenciement qu'était envisagé un licenciement pour faute grave mais que l'inspecteur du travail a accordé l'autorisation de licenciement au motif que l'insuffisance professionnelle du salarié était établie, se fondant ainsi sur un motif d'une nature différente de celui invoqué par l'employeur ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par M.C..., que la société Mari n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que M. C...n'étant, dans la présente instance, ni une partie perdante, ni tenue aux dépens, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme quelconque soit mise à sa charge au titre des frais exposés par la société Mari et non compris dans les dépens ;
7. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Mari la somme de 1 000 euros au titre des frais de cette nature exposés par M. C... ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société Mari est rejetée.
Article 2 : La société Mari versera à M. C...la somme de 1 000 (mille) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Mari, à M. A...C...et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
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N° 13NC00168