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12/12/2013 | FRANCE | N°12NC01463

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 12 décembre 2013, 12NC01463


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 août 2012, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Cosich, avocat ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000115 en date du 21 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 2005 ;

2°) d'ordonner le sursis à statuer jusqu'à l'issue de la procédure pénale ;

3°) de prononcer la décharge demandée d'un montant de 28 656 euros ;



4°) de mettre à la charge de l'Etat à une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 août 2012, présentée pour M. B... A..., demeurant..., par Me Cosich, avocat ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000115 en date du 21 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 2005 ;

2°) d'ordonner le sursis à statuer jusqu'à l'issue de la procédure pénale ;

3°) de prononcer la décharge demandée d'un montant de 28 656 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat à une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que si la Cour n'est pas tenue de surseoir à statuer, une bonne administration de la justice le justifie en l'espèce, compte tenu des nombreuses approximations dans les constatations opérées par l'administration fiscale, révélées par les procédures pénales en cours ;

- que la proposition de rectification est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales en ce que l'administration ne produit aucune pièce permettant de démontrer ses dires ;

- qu'en vertu de l'alinéa 2 du II de l'article 199 undecies B applicable à l'exercice 2005, aucun agrément préalable ne pouvait être exigé, dès lors que le financement effectué par chaque SEP ne dépassait pas 300 000 euros ainsi que l'a implicitement admis l'administration pour d'autres SEP ;

- que la livraison du bien, qui est indépendante de sa remise matérielle, a été effectuée en 2005 ; qu'en tout état de cause et à supposer que la livraison ait eu lieu en 2006, l'investissement devrait être admis en déduction au titre de 2006 ;

- que la surfacturation alléguée par l'administration n'est pas démontrée ;

- que le principe général du droit communautaire de proportionnalité, qui s'applique en l'espèce contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, s'oppose à ce que l'administration leur applique des redressements, alors qu'elle inflige aux autres intervenants des amendes qui lui permettent d'obtenir plusieurs fois le remboursement des réductions d'impôt accordées, que ces amendes sont telles que les autres intervenants ne seront pas en mesure de restituer leurs apports aux investisseurs, qui ont subi un préjudice en raison de la fraude de tiers et dont la sécurité n'est en conséquence pas correctement assurée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 janvier 2013, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ;

Le ministre conclut au non-lieu à statuer à concurrence des dégrèvements accordés et au rejet du surplus de la requête ;

Il soutient :

- que la cour n'est pas tenue de surseoir à statuer ;

- que la proposition de rectification est suffisamment motivée en droit comme en fait ;

- qu'en matière d'investissement Outre-mer, l'article 199 undecies B du CGI subordonne l'octroi du crédit d'impôt à la condition de la livraison effective du bien ; qu'en l'espèce, le matériel n'a été livré à la Réunion qu'en février 2006 ;

- qu'il résulte des pièces du dossier que les investissements relatifs aux SEP Clématite ont été surfacturés ;

- que le contribuable n'est pas fondé à invoquer la méconnaissance par l'administration du principe général du droit communautaire de proportionnalité à l'encontre de cotisations de taxe professionnelle uniquement régies par la loi fiscale interne ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 novembre 2013 :

- le rapport de M. Commenville, président,

- et les conclusions de M. Goujon-Fischer, rapporteur public ;

Sur l'étendue du litige :

1. Considérant que, par décision en date du 4 septembre 2013 postérieure à l'introduction de la requête, la directrice départementale des finances publiques de l'Aube a prononcé le dégrèvement en droits et pénalités, à concurrence respectivement des sommes de 7 030 et de 787 euros, du complément d'impôt sur le revenu auquel M. A...a été assujetti au titre de l'année 2005 à raison de l'investissement réalisé dans la SEP Clématite 5 ; que les conclusions de la requête sont, dans cette mesure, sans objet ;

2. Considérant que la société à responsabilité limitée (SARL) SGI, qui a son siège à La Réunion et a pour objet de permettre à des particuliers de bénéficier des avantages fiscaux instaurés par le code général des impôts en faveur des investissements réalisés Outre-mer, a créé de nombreuses sociétés en participation (SEP) dont elle assurait la gestion ; que chaque SEP était chargée de la réalisation d'une opération et devait acheter à un fournisseur un matériel qu'elle devait ensuite louer à un artisan ou entrepreneur dans des conditions ouvrant droit aux avantages instaurés par les articles 199 undecies B, 217 undecies et 217 duodecies du code général des impôts ; que M.D..., qui a apporté des fonds aux SEP Clématite 1, 2, 3 et 5, dont il est devenu associé, a bénéficié des réductions d'impôt correspondant à ses investissements dans ces SEP ; que, toutefois, l'administration a remis en cause ces avantages fiscaux au motif que les opérations réalisées par ces SEP ne remplissaient pas, en réalité, les conditions exigées par les articles susmentionnés du code général des impôts ; que le requérant interjette appel du jugement par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions supplémentaires établies par l'administration de ce chef ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : "L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation...." ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler ses observations de façon entièrement utile ; qu'en revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la proposition de rectification en date du 17 octobre 2008 adressée à M. C...l en tant qu'associé des SEP Clématite 1, 2 et 3 précise de façon détaillée les règles de droit applicables, la nature, le montant et les motifs des redressements établis à la suite de la vérification de la comptabilité des SEP dont le contribuable détient des parts ; qu'ainsi, le contribuable a été mis à même de présenter de manière entièrement utile ses observations ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, qui n'exigent pas que l'administration joigne aux propositions de rectification les pièces qu'elle a utilisées pour établir les redressements, doit être rejeté ;

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'espèce : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer (...) dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34. (...) Les dispositions du premier alinéa s'appliquent aux investissements réalisés par une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 ou un groupement mentionné aux articles 239 quater ou 239 quater C, dont les parts sont détenues directement, ou par l'intermédiaire d'une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, par des contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B. En ce cas, la réduction d'impôt est pratiquée par les associés ou membres dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société ou le groupement. La réduction d'impôt prévue au premier alinéa est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé. " ; qu'aux termes de l'article 95 Q de l'annexe II au code général des impôts : " La réduction d'impôt prévue au I de l'article 199 undecies B du code général des impôts est pratiquée au titre de l'année au cours de laquelle l'immobilisation est créée par l'entreprise ou lui est livrée ou est mise à sa disposition dans le cadre d'un contrat de crédit bail " ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que le fait générateur du droit à déduction du montant total des investissements que peut exercer l'entreprise est constitué, soit par la création de l'immobilisation au titre de laquelle l'investissement productif a été réalisé, soit par la livraison effective de l'immobilisation dans les départements concernés ; que le droit à déduction n'est ouvert qu'à compter du moment où l'investissement peut être effectivement exploité et être productif de revenus ; qu'il revient au contribuable qui revendique un avantage fiscal d'établir en remplir les conditions ;

6. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des documents douaniers produits par le service que les biens n'ont été livrés à La Réunion que le 7 février 2006 ; que les procès-verbaux de réception fournis en dernier lieu par le requérant se sont pas probants à cet égard, dès lors que seul le fournisseur IPC (en fait, un revendeur) a apposé sa signature sur ce document émis le 17 novembre 2005 depuis l'Ile Maurice, lieu de son siège, alors que les biens ont été expédiés de France (siège du fabricant Elumatec) directement vers les locataires de La Réunion, et que le locataire a signé ce même document sans y apposer aucune date ; que c'est, dès lors, à bon droit que l'administration s'est fondée sur ces motifs pour estimer que les investissements n'avaient pas été réalisés en 2005 et n'ouvraient pas droit à réduction d'impôt au titre de cette année ; que, dans ces conditions, les circonstances que les matériels n'auraient pas été surfacturés, contrairement à ce qu'a estimé le service, et que l'administration s'est fondée, à tort, sur l'absence d'agrément préalable, sont sans incidence sur la solution ;

7. Considérant, en second lieu, que le requérant soutient qu'en remettant en cause, du fait d'agissements réalisés à son insu, les avantages fiscaux qu'il a obtenus sur le fondement des dispositions précitées du code général des impôts, alors qu'il est de bonne foi, l'administration a méconnu le principe communautaire de proportionnalité ; que, selon ce principe, les Etats membres doivent avoir recours à des moyens qui, tout en permettant d'atteindre efficacement l'objectif poursuivi par le droit interne, portent le moins possible atteinte aux objectifs et aux principes posés par la législation communautaire en cause ; que, toutefois, ce principe, qui fait partie des principes généraux de l'Union européenne ne trouve à s'appliquer dans l'ordre juridique national que lorsque la situation dont a à connaître le juge administratif français est régie par le droit de l'Union européenne ; que tel n'est pas le cas en l'espèce, dès lors que les avantages en litige ne sont pas établis dans le cadre des pouvoirs que les directives communautaires confèrent aux Etats membres et qu'aucune violation d'une liberté instaurée par le traité CE n'est invoquée ; que, par suite, le requérant ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance de ce principe ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de surseoir à statuer jusqu'à l'issue des procédures pénales, que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. A...la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : A concurrence des sommes de 7 030 euros au titre des droits et de 787 euros au titre des pénalités, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M.A....

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'économie et des finances.

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12NC01463


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC01463
Date de la décision : 12/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-01-02-05-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt. Réductions et crédits d`impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: M. Bernard COMMENVILLE
Rapporteur public ?: M. GOUJON-FISCHER
Avocat(s) : COSICH

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-12-12;12nc01463 ?
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