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10/10/2013 | FRANCE | N°12NC00805

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 10 octobre 2013, 12NC00805


Vu la requête, enregistrée le 4 mai 2012, présentée pour M. D... A..., demeurant..., par Me E... ;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805035-0901074 du 6 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 septembre 2008 par lequel le maire de la commune de Hagen a délivré à la société CetC construction un permis de construire un immeuble de 24 logements sis rue Saint-Valentin, ainsi que du rejet implicite de son recours gracieux formé le 7 novembre 2008 ;

2°) d

'annuler l'arrêté du 12 septembre 2008 et la décision implicite rejetant son recour...

Vu la requête, enregistrée le 4 mai 2012, présentée pour M. D... A..., demeurant..., par Me E... ;

M. A... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805035-0901074 du 6 mars 2012 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 septembre 2008 par lequel le maire de la commune de Hagen a délivré à la société CetC construction un permis de construire un immeuble de 24 logements sis rue Saint-Valentin, ainsi que du rejet implicite de son recours gracieux formé le 7 novembre 2008 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 septembre 2008 et la décision implicite rejetant son recours gracieux ;

3°) de mettre à la charge solidaire de la commune de Hagen et de la société CetC construction la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- les dispositions de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme, alors applicables, ont été méconnues, dès lors qu'il n'est pas établi que la notice paysagère a été effectivement produite à l'appui de la demande de permis de construire ;

- l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme a été méconnu, la rue Saint-Valentin étant une rue sans issue empruntée par de nombreux engins agricoles ;

- l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme a été méconnu dès lors que l'immeuble collectif de 24 logements projeté ne s'intègre nullement dans le bâti traditionnel existant et qui est caractéristique de fermes ou bâtisses typiques de Lorraine présentant un intérêt patrimonial indéniable ;

- les orientations du futur plan local d'urbanisme et du projet d'aménagement et de développement durable de la commune ont été méconnues ; le règlement de la carte communale alors en vigueur indiquait du reste déjà que " les objectifs de développement de la commune restent donc volontairement limités au bâti existant " ;

- les dispositions de l'article L. 111-3 du code rural ont été méconnues car l'exploitation agricole de M. F...qui comprend des bâtiments d'élevage abritant des veaux d'engraissement est située à moins de 100 mètres du bâtiment dont le permis de construire a été autorisé, sans qu'une dérogation à la règle d'éloignement ait été adoptée par le conseil municipal ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 27 septembre 2012, présenté pour la commune de Hagen, par Me C...qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'il ressort de l'attestation du sous-directeur de la chambre d'agriculture de la Moselle du 28 janvier 2009 et de l'avis émis le 19 novembre 2007 par le conseil d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement que le dossier de demande de permis de construire comportait bien le volet paysager ; que la rue Saint-Valentin n'est pas une impasse ; que cette voie a une largeur de 5 m hors trottoirs ; qu'il n'est pas établi que la circulation des engins agricoles soit incompatible avec le projet de construction en cause ; que le service départemental d'incendie et de secours a émis le 7 août 2007 un avis favorable au projet ; qu'il existe une hétérogénéité architecturale dans le quartier où sera implantée la construction ; que lorsqu'elle instruit une demande de permis de construire, l'autorité compétente ne peut opposer un refus sur le fondement de dispositions d'un PLU non encore approuvé ; que les conditions posées par les articles L. 111-7 et L. 123-6 2° du code de l'urbanisme ne sont pas respectées ; qu'à la date du 12 septembre 2008, aucun projet de règlement du PLU n'avait encore été établi ; qu'il n'est pas établi que le Gaec de la Petite Source était encore une installation classée pour la protection de l'environnement soumise à autorisation à la date du permis de construire litigieux ni qu'il se situerait à moins de 100 m du projet de construction ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 19 décembre 2012, présenté pour M. A...qui conclut aux mêmes fins que la requête ;

Il soutient que la commune de Hagen doit produire une délibération du conseil municipal habilitant son maire à agir en justice ou bien prenant position sur le présent recours ; qu'il ressort de l'avis émis par la chambre d'agriculture que l'exploitation de M. F...est une installation classée soumise à un périmètre d'éloignement de 100 mètres ; qu'il ressort des plans produits et notamment du plan cadastral qui fait apparaître l'exploitation de M. F...sur la parcelle cadastrée n° 14 que la distance comptée du bâtiment le plus éloigné de l'exploitation jusqu'à la villa Margaux reste inférieure à 100 mètres (85 mètres environ) ; qu'aucune dérogation à la règle de distance posée par l'article L. 111-3 du code rural n'a été adoptée par la commune de Hagen ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 décembre 2012, présenté pour la Sarl CetC construction par Me B... qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. A...la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le volet paysager était joint au dossier ; que s'agissant de la largeur de la voie d'accès, aucune difficulté n'est apparue alors même que l'immeuble litigieux est construit depuis plusieurs années ; que le bâti du village est ordinaire et est composé à la fois d'immeubles anciens et de constructions plus récentes ; que le projet s'inscrit dans un cadre urbanisé sans véritable harmonie ; que le projet a été guidé par la volonté d'aboutir à un résultat volumétrique semblable à celui d'un ensemble de maisons accolées ; que ce n'est que par une délibération du 6 juin 2008 que le conseil municipal de Hagen a défini les modalités de concertation dans le cadre de l'élaboration du plan local d'urbanisme ; que le permis de construire attaqué a bien été délivré après avis favorable de la chambre d'agriculture, conformément à l'article L. 111-3 du code rural ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 février 2013, présenté pour la commune de Hagen qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;

Elle soutient en outre que le mémoire en défense du 25 septembre 2012 a été rédigé pour la commune ; que M.A..., qui renverse la charge de la preuve, n'apporte aucun élément de nature à établir l'existence d'une prétendue violation de l'article L. 111-3 du code rural ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 février 2013, présenté pour M.A..., qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que l'attestation de la chambre d'agriculture du 28 janvier 2009 est dépourvue de force probante dès lors qu'à cette date elle ne disposait plus du dossier ; que le maire lui-même a déclaré qu'aucun volet paysager ne figurait dans le dossier de demande de permis de construire ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 mars 2013, présenté par la Sarl CetC construction qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;

Elle soutient qu'en vertu de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales le maire est chargé de représenter la commune soit en demandant soit en défendant ; qu'ainsi le mémoire en défense de la commune est recevable ; qu'il appartient au requérant de prouver que l'exploitation de M. F...était encore soumise au respect d'une distance de 100 mètres ; qu'un arrêté motivé n'est pas nécessaire à l'application de la dérogation prévue par l'article L. 111-3 du code rural ;

Vu le jugement et les décisions attaquées ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code rural ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu l'arrêté du 7 février 2005 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire les élevages de bovins, de volailles et/ou gibier à plumes et de porcs soumis à déclaration au titre du livre V du code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 septembre 2013 :

- le rapport de M. Pommier, président,

- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,

- et les observations de Me Bozzi, avocat de la commune de Hagen ;

1. Considérant que, par un arrêté du 12 septembre 2008, le maire de la commune de Hagen a délivré à la société CetC construction le permis de construire un immeuble collectif de 24 logements sis rue Saint-Valentin ; qu'après avoir formé le 7 novembre 2008, sans succès, un recours gracieux tendant au retrait de cette décision, M.A..., voisin de la construction autorisée, a introduit devant le tribunal administratif de Strasbourg un recours contentieux dirigé contre ledit permis et la décision du maire rejetant implicitement son recours gracieux ; que M. A... relève appel du jugement du 6 mars 2012 rejetant sa demande ;

Sur la recevabilité des mémoires en défense de la commune de Hagen :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales : " Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...)16° D'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal ; (...) " ; qu'en vertu de l'article L. 2132-1 du même code, sous réserve des dispositions du 16° de l'article L. 2122-22, le conseil municipal délibère sur les actions à intenter au nom de la commune ; que, par délibération du 10 novembre 2011, le conseil municipal de Hagen a retiré au maire la délégation qu'il lui avait donnée aux fins d'intenter au nom de la commune les actions en justice et de défendre la commune dans les actions intentées contre elle ; qu'alors que M. A...avait soulevé l'irrecevabilité, du fait de cette délibération, des mémoires en défense présentés pour la commune de Hagen et que celle-ci a été mise à même de régulariser ses écritures, elle n'a pas produit de délibération du conseil municipal décidant de défendre dans la présente instance ; que, par suite, les mémoires en défense présentées pour la commune ne sont pas recevables ,

Sur la légalité des décisions attaquées :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-3 du code rural, dans sa rédaction alors applicable : " Lorsque des dispositions législatives ou réglementaires soumettent à des conditions de distance l'implantation ou l'extension de bâtiments agricoles vis-à-vis des habitations et immeubles habituellement occupés par des tiers, la même exigence d'éloignement doit être imposée à ces derniers à toute nouvelle construction et à tout changement de destination précités à usage non agricole nécessitant un permis de construire, à l'exception des extensions de constructions existantes. / Dans les parties actuellement urbanisées des communes, des règles d'éloignement différentes de celles qui résultent du premier alinéa peuvent être fixées pour tenir compte de l'existence de constructions agricoles antérieurement implantées. Ces règles sont fixées par le plan local d'urbanisme ou, dans les communes non dotées d'un plan local d'urbanisme, par délibération du conseil municipal, prise après avis de la chambre d'agriculture et enquête publique./ Dans les secteurs où des règles spécifiques ont été fixées en application de l'alinéa précédent, l'extension limitée et les travaux rendus nécessaires par des mises aux normes des exploitations agricoles existantes sont autorisés, nonobstant la proximité de bâtiments d'habitations./ Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, une distance d'éloignement inférieure peut être autorisée par l'autorité qui délivre le permis de construire, après avis de la chambre d'agriculture, pour tenir compte des spécificités locales. Une telle dérogation n'est pas possible dans les secteurs où des règles spécifiques ont été fixées en application du deuxième alinéa. (...) " ; que l'article 2.1.1 de l'annexe I de l'arrêté du 7 février 2005 fixant les règles techniques auxquelles doivent satisfaire les élevages de bovins, de volailles et/ou gibier à plumes et de porcs soumis à déclaration au titre du livre V du code de l'environnement prévoit que : " les bâtiments d'élevage et leurs annexes sont implantés à au moins 100 mètres des habitations de tiers (... ) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment d'une lettre de la direction de l'environnement et du développement durable de la préfecture de la Moselle en date du 15 février 2008, confirmée par une lettre du 20 décembre 2012, que l'exploitation agricole de M. F... constitue une installation classée pour la protection de l'environnement soumise au régime de la déclaration au titre de la rubrique 2101-2° b (élevage de 50 à 100 vaches laitières et/ou mixtes) ; que, devant la Cour, M. A...soutient sans être contredit que l'exploitation de M. F... est implantée sur la parcelle n° 14 du plan cadastral versé au débat ; que ce plan fait apparaître que la partie des bâtiments d'élevage située le plus en retrait sur cette parcelle est distante d'environ 85 m de l'immeuble objet du permis de construire litigieux ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le conseil municipal de Hagen, commune qui n'était pas à la date de délivrance dudit permis de construire couverte par un plan local d'urbanisme, aurait fixé une règle d'éloignement inférieure à 100 mètres ; qu'il est constant que le maire de la commune n'a pas non plus entendu déroger à la règle de distance découlant de l'application du premier alinéa de l'article L. 111-3 pour tenir compte de spécificités locales, au demeurant non établies ; qu'il s'ensuit que M. A...est fondé à soutenir que le maire de Hagen a délivré le permis de construire attaqué en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 111-3 du code rural et de l'arrêté ministériel du 7 février 2005 ;

5. Considérant que, pour l'application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun des autres moyens de la requête soulevés par M. A...n'est, en l'état du dossier, de nature à justifier l'annulation des décisions attaquées ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation du permis de construire délivré le 12 septembre 2008 à la société CetC et de la décision implicite du maire de Hagen rejetant son recours gracieux ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Hagen le versement à M. A... de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de M. A..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement des sommes que demandent au même titre la commune de Hagen, dont au demeurant les conclusions ne sont pas recevables ainsi qu'il été dit plus haut, et la société CetC construction ;

D É C I D E :

Article 1er : Les mémoires en défense présentées par la commune de Hagen ne sont pas recevables.

Article 2 : L'arrêté du maire de Hagen en date du 12 septembre 2008 accordant un permis de construire à la société CetC construction et la décision implicite du maire rejetant le recours gracieux formé le 7 novembre 2008 par M. A...sont annulés.

Article 3 : La commune de Hagen versera à M. A...la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la société CetC construction tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à la commune de Hagen et à la Société CetC construction.

Copie du présent arrêt sera transmise au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Metz.

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12NC00805


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC00805
Date de la décision : 10/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Octroi du permis.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire - Légalité au regard de la réglementation nationale - Diverses dispositions législatives ou réglementaires.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Joseph POMMIER
Rapporteur public ?: M. FAVRET
Avocat(s) : MATHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-10-10;12nc00805 ?
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