Vu la requête, enregistrée le 14 décembre 2012, présentée pour M. A...B..., demeurant au..., par Me Chamy, avocat ;
M. B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0905525 du 15 octobre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 30 octobre 2009 par laquelle le ministre chargé du travail a autorisé la société THK Manufacturing Europe SAS à le licencier ;
2°) mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- la décision du ministre porte une date inexacte et est intervenue après la naissance d'une décision implicite de rejet du recours gracieux de la société ;
- le signataire de la décision semble avoir une attitude négative à l'égard des salariés syndiqués ;
- les droits de la défense ont été méconnus dès lors qu'il a été entendu par le directeur régional du travail le jour même de la décision en litige ;
- le manquement allégué ne se situe pas dans le champ de la relation de travail et n'a aucun rapport avec ses obligations professionnelles mais s'est produit à l'occasion de l'exercice de son mandat ;
- les faits reprochés se sont produits dans un contexte de harcèlement et de discrimination à son encontre et dans un climat social tendu ;
- son comportement a été une réponse à une provocation de la part de M.C... ;
- il existe un lien avec le mandat ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 avril 2013, présenté pour la société THK Manufacturing Europe SAS, dont le siège social est situé Zone Artisanale La passerelle, à Ensisheim (68190), agissant par son président en exercice, par la SCP Christian Hunzinger - Bisantonio Calvano ; la SAS THK Manufacturing Europe conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de M. B...la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle fait valoir que :
- le comportement de M. B...dans l'entreprise a donné lieu a plusieurs sanctions, dès novembre 2007 ;
- qu'il n'y a aucune discrimination syndicale au sein de l'entreprise ;
- que les injures et menaces reprochées à M. B...constituent bien une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;
- les faits reprochés ne se sont pas produits au cours de la réunion de négociation annuelle obligatoire mais dans le hall d'entrée du personnel ;
- les provocations dont M. B...fait état ne sont pas justifiées ;
- la demande d'autorisation de licenciement n'est pas en lien avec le mandat syndical de l'intéressé ;
Vu la mise en demeure adressée le 12 avril 2013 au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;
Vu l'ordonnance en date du 30 mai 2013 fixant la clôture de l'instruction au 25 juin 2013 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 septembre 2013 :
- le rapport de Mme Kohler, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public ;
1. Considérant que la société THK Manufacturing of Europe SAS a sollicité l'autorisation de licencier M.B..., employé en qualité d'opérateur de production et délégué syndical ; que, par une décision du 4 mai 2009, l'inspecteur du travail a refusé d'autoriser le licenciement sollicité ; que, saisi sur recours hiérarchique, le ministre du travail a, par une décision du 30 octobre 2009, annulé la décision de l'inspecteur du travail et a autorisé le licenciement de M.B... ;
Sur la légalité de la décision du 30 octobre 2009 :
2. Considérant, en premier lieu, que la décision en litige porte la date du 30 octobre 2009 ; que la seule circonstance que M. B... ait été entendu le même jour par le directeur régional du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle d'Alsace ne suffit pas à établir ni que la décision aurait été prise à une date ultérieure, ni que le ministre du travail n'aurait pas eu communication des résultats de cet entretien, alors d'ailleurs qu'aucun texte ni aucun principe n'imposent au ministre, saisi sur recours hiérarchique de procéder à une enquête contradictoire ; que, par suite, les moyens tirés du vice de procédure et de la violation des droits de la défense doivent, en tout état de cause, être écartés ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que si M. B...soutient que le signataire de la décision en litige aurait une attitude négative à l'égard des salariés syndiqués, il n'apporte à l'appui de ces allégations aucun élément permettant d'en vérifier le bien-fondé ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'il est reproché à M. B...d'avoir eu à plusieurs reprises un comportement violent et agressif envers ses collègues de travail et envers sa hiérarchie et notamment d'avoir, le 24 mai 2009, agressé verbalement un cadre de la société en proférant de violentes insultes et des menaces ; que le requérant ne dément pas avoir utilisé les expressions " je vais te crever avant de partir " et " étalé par terre la tête en sang " ;
5. Considérant que M. B...soutient que ces faits se sont produits à l'occasion d'une réunion de négociation annuelle obligatoire plutôt tendue et que le manquement qui lui est reproché ne se situe pas dans le cadre de la relation de travail ; que ces éléments, au demeurant inexacts dès lors que les faits se sont produits à l'issue de la réunion en cause lors d'un échange entre M. B...et un cadre de l'entreprise, et non à l'occasion d'une négociation syndicale ne sont pas de nature à les faire regarder comme ne présentant pas un caractère de gravité suffisant pour justifier le licenciement de l'intéressé ;
6. Considérant que M. B...soutient également que le climat au sein de l'entreprise serait hostile au syndicat qu'il représente et qu'il n'aurait fait que répondre à une provocation de la part d'un cadre de la société, ces circonstances, au demeurant non établies par les pièces du dossier, ne permettent pas d'atténuer la gravité de ses actes ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que les faits à l'origine de la demande de licenciement ne présentent pas un caractère de gravité suffisant pour justifier son licenciement ;
8. Considérant, en quatrième lieu, qu'il n'est pas établi que la demande d'autorisation de licenciement concernant le requérant ait été en rapport avec ses fonctions représentatives ou son appartenance syndicale ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 octobre 2009 par laquelle le ministre chargé du travail a autorisé son licenciement ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que l'Etat n'étant, dans la présente instance, ni une partie perdante, ni une partie tenue aux dépens, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme quelconque soit mise à sa charge au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens ;
11. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la société SAS THK Manufacturing Europe tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société THK Manufacturing Europe SAS tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., à la société THK Manufacturing Europe SAS et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
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N° 12NC02045