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13/06/2013 | FRANCE | N°12NC00787

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 13 juin 2013, 12NC00787


Vu la requête, enregistrée le 2 mai 2012, complétée par un mémoire enregistré le

27 décembre 2012, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me Polese-Person ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100789 du 23 février 2012 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts pour les troubles dans les conditions d'existence et le préjudice moral résultant du harcèlement moral dont elle estime avoir é

té victime;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 25 000 euros en réparation ...

Vu la requête, enregistrée le 2 mai 2012, complétée par un mémoire enregistré le

27 décembre 2012, présentée pour Mme A...B..., demeurant..., par Me Polese-Person ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100789 du 23 février 2012 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts pour les troubles dans les conditions d'existence et le préjudice moral résultant du harcèlement moral dont elle estime avoir été victime;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 25 000 euros en réparation des préjudices qu'elle a subis ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- dès son affectation au collège Saint-Exupéry de Lons-le-Saunier, elle a été victime des agissements malveillants du principal qui a refusé de procéder à ses évaluations annuelles, a instauré un climat de tension en l'isolant dans son travail, l'a privée de la possibilité d'exercer ses attributions en lui confiant des tâches supplémentaires de gardiennage qui ne lui incombaient pas ;

- ses conditions de travail ne se sont pas améliorées, en dépit des courriers qu'elle a adressés au rectorat qui, d'une part, ne l'a pas soutenue mais a conforté le principal de collège dans ses manipulations, vexations et brimades à son égard et, d'autre part, a préféré la muter dans un autre établissement ;

- l'attitude brutale du principal de collège, qui a toujours refusé d'avoir une confrontation avec elle, a eu des répercussions sur sa carrière professionnelle et son état de santé, ainsi qu'en atteste le conseiller médical de l'académie ;

- elle donne aujourd'hui pleinement satisfaction dans sa nouvelle affectation mais souffre toujours d'une dépression profonde, qui engage la responsabilité de l'administration ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2012, présenté pour le ministre de l'éducation nationale qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre soutient que :

- il n'y a eu aucun harcèlement moral au sens de l'article 6 quinquies de la loi du

13 juillet 1983 et de la jurisprudence, ainsi que l'a établi l'enquête administrative diligentée par les services du recteur à la suite des agissements dénoncés par MmeB... ;

- les faits reprochés au principal du collège n'ont pas été commis dans l'intention de nuire à MmeB... ;

- le défaut de notation est lié aux difficultés relationnelles de Mme B...et aux graves insuffisances professionnelles dont elle a fait preuve dans l'accomplissement de son travail et qui sont à l'origine des tensions avec sa hiérarchie ;

- il n'y a eu aucune atteinte à la dignité de MmeB..., aucune menace quant à son avenir professionnel ;

- le seul ressenti de Mme B...ainsi que la dégradation de son état de santé ne sont pas suffisants pour caractériser le harcèlement ;

- les préjudices allégués ne sont pas établis ;

Vu la lettre du 15 avril 2013 par laquelle les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience du 23 mai 2013 et que l'instruction pourrait être close à partir du 25 avril 2013 sans information préalable ;

Vu l'avis d'audience portant clôture de l'instruction immédiate, pris le 6 mai 2013 en application de l'article R. 613-2 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 mai 2013 :

- le rapport de Mme Fischer-Hirtz,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me Polese-Person, avocat de MmeB... ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. (...) " ;

2. Considérant qu'il appartient à un agent public, qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

3. Considérant que MmeB..., attachée d'administration de l'éducation nationale et de l'enseignement supérieur, a été affectée, à compter de septembre 2008, en qualité de gestionnaire, au collège Saint-Exupéry de Lons-le-Saunier ; que, par lettres du

25 février 2009 et du 18 mai 2009, Mme B...a dénoncé au recteur d'académie les faits de harcèlement dont elle s'estimait victime de la part du principal du collège ; que l'intéressée a notamment fait état de ce que, dès la rentrée 2008, le principal de l'établissement avait rédigé une note de service qui avait eu pour conséquence, d'une part, de la dessaisir de ses missions de gestionnaire en organisant, sans concertation, les tâches des personnels administratifs et ouvriers dont elle avait la charge et, d'autre, part, de la dévaloriser en lui assignant des tâches de gardiennage pour pallier l'absence de la concierge, alors que les autres personnels d'encadrement n'avaient pas été sollicités ; que Mme B...a également indiqué qu'elle faisait l'objet de propos et d'agissements vexatoires de la part de son supérieur hiérarchique qui l'écartait systématiquement des réunions de travail, refusait toutes ses propositions de réorganisation du secrétariat et, en son absence, avait même ordonné à deux agents techniques de déplacer un coffre-fort qui se trouvait dans son bureau ; qu'enfin,

Mme B...indiquait que le principal, qui l'avait complètement écartée de la gestion du collège, avait également refusé de procéder à son évaluation annuelle et de la rencontrer ;

4. Considérant que si l'ensemble des éléments de faits dénoncés par Mme B...est susceptible de faire présumer l'existence d'agissements constitutifs d'un harcèlement moral à son encontre au sens des dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983, aucune des pièces versées au dossier par la requérante, à l'exception d'une lettre du 4 novembre 2009, adressée par le conseiller médical de l'académie au recteur pour l'informer des difficultés rencontrées par Mme B...dans son travail et de la répercussion délétère de cette situation sur son état de santé, et d'une lettre du 8 décembre 2009, rédigée par une psychologue clinicienne, relatant les plaintes de sa patiente, n'a permis de corroborer ses allégations ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que le recteur d'académie a pris en compte les doléances de Mme B...en faisant diligenter par ses services une enquête administrative ; que le rapport d'enquête, qui relate avec précision les différentes démarches et auditions auxquelles il a été procédé pour appréhender de manière complète et objective les difficultés rencontrées au sein de l'établissement, a établi que Mme B...entretenait des relations tendues tant avec son supérieur hiérarchique qu'avec l'ensemble des agents de l'équipe administrative et technique ; que le rapport d'inspection relève, sans être contredit sur ce point, que les personnels interrogés se sont tous plaints des " relations déstabilisantes, culpabilisatrices et stressantes " qu'ils entretenaient avec

MmeB..., dont les connaissances fondamentales insuffisantes en matière de gestion budgétaire et comptable rendaient en outre les conditions de travail très difficiles ; qu'enfin, le rapport d'enquête n'a pas permis d'établir que les remarques faites à Mme B...ou les mesures de réaménagement de son poste auraient eu pour objectif d'entraver volontairement l'exercice de ses fonctions et de lui nuire intentionnellement, ou qu'elles n'auraient pas été justifiées par les nécessités du service ; que la seule circonstance que Mme B...n'ait fait l'objet d'aucune notation par sa hiérarchie durant son affectation au collège Saint-Exupéry de Lons-le-Saunier, pour regrettable qu'elle soit, ne suffit pas à établir qu'elle aurait été victime de harcèlement moral ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande indemnitaire ; qu'il n'y a pas lieu, en conséquence, de lui allouer, en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative la somme qu'elle demande au titre de frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...et au ministre de l'éducation nationale.

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N° 12NC00787


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Contentieux de la fonction publique - Contentieux de l'indemnité.

Procédure - Instruction - Preuve.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Responsabilité régie par des textes spéciaux.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme HERBELIN
Rapporteur ?: Mme Catherine FISCHER-HIRTZ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : POLESE-PERSON

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 13/06/2013
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 12NC00787
Numéro NOR : CETATEXT000027546525 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-06-13;12nc00787 ?
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