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06/05/2013 | FRANCE | N°12NC01502

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 06 mai 2013, 12NC01502


Vu, 1°), sous le numéro 12NC01502, la requête, enregistrée le 3 septembre 2012, présentée pour M. C...A..., domicilié..., par la SCP d'avocats ACG et associés ; M. A...demande à la Cour :

- d'annuler le jugement du 6 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 13 novembre 2009 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville avait refusé à la société TND Nord l'autorisation de le licencier ;

- de rejeter la demande présentée par la société TND No

rd devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

- de mettre à la ...

Vu, 1°), sous le numéro 12NC01502, la requête, enregistrée le 3 septembre 2012, présentée pour M. C...A..., domicilié..., par la SCP d'avocats ACG et associés ; M. A...demande à la Cour :

- d'annuler le jugement du 6 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 13 novembre 2009 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville avait refusé à la société TND Nord l'autorisation de le licencier ;

- de rejeter la demande présentée par la société TND Nord devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

- de mettre à la charge de la société TND Champagne la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A...soutient que :

- les causes de l'accident de la circulation dont il a été victime le 11 février 2009 ne peuvent être imputées de façon certaine à sa vitesse excessive ; les services de police présents le jour de l'accident ont constaté la présence ponctuelle de verglas ; la vitesse de 74 km/h relevée peu avant l'impact n'est pas à l'origine de la perte du contrôle de son véhicule mais n'en est qu'une conséquence ; il n'avait pas connaissance du plan de charge du camion ; le doute doit lui profiter ;

- s'il a effectivement dépassé la vitesse maximale autorisée à 15 reprises depuis 2007, ces dépassements n'ont pas été sanctionnés par son employeur dans le délai de prescription de deux mois ; ces faits ne pouvaient donc plus être invoqués à l'appui de la demande d'autorisation de licenciement formée à son égard, pas plus que l'avertissement dont il a fait l'objet en 2005 qui est prescrit ;

Vu, enregistrée le 21 septembre 2012, la communication de la requête au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 novembre 2012, présenté pour la société TND Champagne, dont le siège social est situé Les Pierrelles, BP 93 Beausemblant à Saint-Vallier-sur-Rhône (26241), représentée par son gérant, par Me Bachelot, avocat, qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. A...de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société TND Champagne soutient que :

- M. A...a commis une faute de nature à justifier son licenciement en dépassant la vitesse maximale autorisée dans la traversée du village de Bergères-les-Vertus ; sa vitesse était particulièrement inadaptée aux conditions climatiques ;

- le semi-remorque de M. A...n'était pas en surcharge ; la répartition des charges n'a pas été identifiée comme ayant eu une incidence dans la perte de contrôle de l'ensemble ; en tout état de cause, la remorque est équipée d'un système de contrôle de stabilité ;

- son véhicule étant équipé d'un thermomètre et la température le jour de l'accident avoisinant les 0°, M. A...aurait du raisonnablement prévoir la présence ponctuelle de verglas et adapter sa conduite en conséquence ;

Vu l'ordonnance en date du 4 février 2013 fixant la clôture de l'instruction le 27 février 2013 à 16 heures ;

Vu, 2°), sous le numéro 12NC01506, la requête, enregistrée le 3 septembre 2012, présentée pour M. C...A...domicilié..., par la SCP d'avocats ACG et associés ; M. A...demande à la Cour :

- de surseoir à l'exécution du jugement du 6 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 13 novembre 2009 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville avait refusé à la société TND Nord l'autorisation de le licencier ;

- de mettre à la charge de la société TND Champagne une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A...soutient que c'est à tort que le tribunal a estimé que la faute qui lui était reprochée était d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, dès lors que les causes de l'accident de la circulation dont il a été victime le 11 février 2009 ne peuvent être imputées de façon certaine à sa vitesse excessive ;

Vu, enregistrée le 21 septembre 2012, la communication de la requête au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2012, complété par un mémoire enregistré le 28 janvier 2013, présenté pour la société TND Champagne, dont le siège social est situé Les Pierrelles, BP 93 Beausemblant, à Saint-Vallier-sur-Rhône (26241), représentée par son gérant, par Me Bachelot, avocat, qui conclut au rejet de la requête ;

La société TND Champagne soutient que :

- l'inspecteur du travail a déféré à l'injonction qui lui avait été faite par le jugement du 6 juillet 2012 en se prononçant à nouveau sur la demande d'autorisation de licenciement de M. A... par une décision du 28 août 2012 ; le jugement du 6 juillet 2012 étant ainsi totalement exécuté, M. A...est irrecevable à en solliciter le sursis ;

M. A...n'invoque aucun moyen sérieux de nature à justifier, outre l'annulation du jugement du 6 juillet 2012, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillis par ce jugement ;

Vu le mémoire, enregistré le 11 décembre 2012, présenté pour M. A...qui conclut aux mêmes fins ;

M. A...soutient que sa requête à fin de sursis est recevable, la circonstance que, par une décision postérieure au jugement d'annulation d'une décision administrative refusant la délivrance d'une autorisation de licenciement, l'autorité administrative, se fondant sur l'autorité de la chose jugée par le tribunal administratif, délivre l'autorisation ne rend pas sans objet les conclusions tendant au sursis à l'exécution du jugement dès lors que ladite autorisation n'est pas devenue définitive ; ayant formé un recours hiérarchique contre la décision de l'inspecteur du travail du 28 août 2012, ladite décision n'est pas définitive ;

Vu l'ordonnance en date du 4 février 2013 fixant la clôture de l'instruction le 27 février 2013 à 16 heures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2013 :

- le rapport de M. Laubriat, premier conseiller,

- les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public,

- et les observations de Me B...pour M. A...et de Me Bachelot pour la société TND Champagne ;

Sur la jonction :

1. Considérant que les requêtes susvisées n° 12NC01502 et n° 12NC01506 de M. A... tendent à l'annulation et au sursis à l'exécution du jugement en date du 6 juillet 2012 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

Sur la requête n° 12NC01506 :

2. Considérant que la présente décision statue sur la requête n° 12NC01502 de M. A... à fin d'annulation du jugement dont il est demandé le sursis à exécution ; que, dès lors, la requête à fin de sursis à exécution du jugement est devenue sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer ;

Sur la requête n° 12NC01502 :

3. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des représentants du personnel, qui bénéficient dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent d'une protection exceptionnelle, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'autorité compétente de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

4. Considérant que M. C...A..., employé en qualité de conducteur routier depuis 2004 par la société TND Nord aux droits de laquelle vient la société TND Champagne, détient dans cette entreprise les mandats de membre titulaire du comité d'établissement de Châlons-en-Champagne, de membre du comité central d'entreprise, de délégué du personnel titulaire, de membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et de conseiller du salarié inscrit sur la liste départementale ; que M. A...demande l'annulation du jugement du 6 juillet 2012 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 13 novembre 2009 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville avait refusé à son employeur l'autorisation de le licencier ;

5. Considérant qu'il est constant que le 11 février 2009 à 4 heures 05, Monsieur A...a perdu le contrôle de son ensemble routier alors qu'il traversait le village de Bergères-les-Vertus (51) et a percuté successivement des arbres, un lampadaire, deux véhicules en stationnement avant de s'encastrer dans une maison ;

6. Considérant qu'il ressort du procès-verbal d'investigation de la gendarmerie analysant le contrôlographe numérique du semi-remorque de M. A...que le véhicule est entré dans la commune de Bergères-les-Vertus, à 04 h 03, à la vitesse de 57 km/h et qu'à 143,30 mètres du lieu d'impact de l'accident, le poids lourd a accéléré progressivement jusqu'à 74 km/h avant de redescendre brutalement à une vitesse de 53 km/h au moment du premier choc ; qu'il est ainsi constant que M. A...roulait à une vitesse excessive à son entrée dans le village ;

7. Considérant toutefois qu'au jour de l'accident, la présence de plaques de verglas est attestée par les déclarations d'un chauffeur d'un camion d'enlèvement des ordures ménagères que M. A...avait doublé en entrant dans le village ; qu'il ressort également des pièces du dossier que M. A...n'a pu avant son départ prendre connaissance des conditions météorologiques affichées dans les locaux du service expédition de son entreprise qui étaient fermés à l'heure de sa prise de service ; que nonobstant la présence d'un thermomètre dans son véhicule indiquant une température extérieure avoisinant les 0°, il a donc pu ignorer le risque de verglas et négliger ainsi d'adapter sa conduite, que les données du contrôlographe ne contredisent pas les allégations de M. A...selon lesquelles son véhicule aurait dérapé sur une plaque de verglas et que c'est cette perte de contrôle initiale qui serait la cause de l'augmentation de la vitesse de son attelage, la remorque en glissant sur la gauche ayant accéléré le tracteur ; qu'en effet, la vitesse moyenne de M. A...pendant la traversée du village n'a pas dépassé 54 km/h avant d'augmenter progressivement seulement à partir d'une distance de 143,30 mètres du point d'impact ; que l'imputabilité de l'accident à la conduite de M. A...à une vitesse excessive n'est ainsi pas établie ; que le doute devant profiter au salarié, c'est à tort que les premiers juges se sont fondés, pour annuler la décision du ministre du travail du 13 novembre 2009, sur la circonstance que le comportement de M. A...avait été dangereux et constituait par suite une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;

8. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société TND Champagne devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

9. Considérant, en premier lieu, que la décision vise les articles L. 2411-1, L. 2411-5, L. 2411-8, L. 2411-13 et L. 2411-21 du code du travail et rappelle les faits reprochés à M. A...avant d'indiquer que ces faits ne sont pas d'une gravité suffisante pour autoriser son licenciement ; que la décision comporte ainsi les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée ;

10. Considérant, en second lieu, que l'examen par l'autorité administrative de l'éventuel lien entre la mesure de licenciement envisagée et les mandats détenus par le salarié protégé dont le licenciement est sollicité ne s'impose que dans le cas où l'autorisation est accordée ; que par suite, la circonstance que la décision du 13 novembre 2009, qui refuse à la société TND Champagne l'autorisation de licencier M. A...dès lors que les faits qui lui sont reprochés ne sont pas d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, ne se prononce pas sur le lien entre les mandats détenus par ce dernier et la demande d'autorisation est sans incidence ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 13 novembre 2009 par laquelle le ministre du travail avait refusé à la société TND Champagne l'autorisation de le licencier ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.A..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société TND Champagne au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de mettre à la charge de la société TND Champagne une somme de 1 500 euros à verser à M. A...au même titre ;

D É C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de M. A...tendant au sursis à l'exécution du jugement du 6 juillet 2012 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 6 juillet 2012 est annulé.

Article 3 : La demande présentée par la société TND Champagne devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La société TND Champagne versera à M. A...la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A..., à la société TND Champagne et au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

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N° 12NC01502 - 12NC01506


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC01502
Date de la décision : 06/05/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Travail et emploi - Licenciements - Autorisation administrative - Salariés protégés - Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation.

Travail et emploi - Licenciements - Autorisation administrative - Salariés protégés - Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation - Licenciement pour faute - Existence d'une faute d'une gravité suffisante.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Alain LAUBRIAT
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS ACG CHALONS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-05-06;12nc01502 ?
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