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18/02/2013 | FRANCE | N°12NC00947

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 18 février 2013, 12NC00947


Vu la requête, enregistrée le 4 juin 2012, présentée pour M. A... B..., demeurant au..., par Me Mengus, avocat ; M. B... demande à la Cour :

1°) de saisir avant dire-droit la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle relative à la compatibilité des articles L. 511-11, L 551-1 à L 551-3, L 561-1 et L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avec les articles 1er 3-7, 5c 7, 8-4 et 15 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

2°) d'annuler le jugement n° 1200756 du 21 février 2012 par lequel le Tribu

nal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de...

Vu la requête, enregistrée le 4 juin 2012, présentée pour M. A... B..., demeurant au..., par Me Mengus, avocat ; M. B... demande à la Cour :

1°) de saisir avant dire-droit la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle relative à la compatibilité des articles L. 511-11, L 551-1 à L 551-3, L 561-1 et L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avec les articles 1er 3-7, 5c 7, 8-4 et 15 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

2°) d'annuler le jugement n° 1200756 du 21 février 2012 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 16 février 2012 par lequel le préfet du Bas-Rhin a ordonné son placement en rétention dans un local non pénitentiaire pour une durée de cinq jours ;

3°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

4°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat les sommes de 2 000 et 2 500 euros à verser à Me Mengus en application des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative au titre respectivement des procédures engagées devant le Tribunal administratif de Strasbourg puis devant cette cour ;

M. B... soutient que :

- la décision ordonnant son placement en rétention est insuffisamment motivée ;

- en ne l'invitant pas à présenter ses observations avant d'ordonner son placement en rétention, le préfet du Bas-Rhin a méconnu l'article 41 de la charte des droits fondamentaux ;

- le préfet n'ayant pas tenu compte de sa nouvelle demande de titre de séjour présentée le 9 février 2012 en raison de ses dix ans de présence en France, d'une promesse d'embauche et de son état de santé, a commis une erreur d'appréciation ;

- en ne prévoyant pas que le recours devant le juge contre une mesure de placement en rétention administrative suspend la mesure d'éloignement, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction issue de la loi du 16 juin 2011 méconnaît l'article 5-4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; en mentionnant qu'un recours juridictionnel à l'encontre de sa décision prononçant le placement en rétention de M. B...ne suspend pas l'exécution de la mesure d'éloignement, le préfet a méconnu les stipulations de l'article 5-4 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile énumérant les situations dans lesquelles l'autorité administrative peut estimer que l'étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement présente un risque de fuite et doit, par suite, être placé en rétention administrative, est contraire à l'article 1er de la directive retour ;

- la décision méconnaît l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les articles 15-1 et 8-4 de la directive du 16 décembre 2008 dès lors que son placement en rétention a été prononcé uniquement au regard de sa situation irrégulière ;

- il présente des garanties de représentation effectives, son identité et son adresse, stable depuis 2005, étant connues des services préfectoraux ; la décision prononçant son placement en rétention est disproportionnée ;

- son recours contre la décision prononçant son placement en rétention n'a été examiné par le premier juge que six jours après son interpellation et sa privation de liberté ; que ce délai ne constitue pas un contrôle juridictionnel accéléré ;

- la mesure de garde à vue, dont le contrôle est confié au seul Procureur de la République qui peut en outre décider d'une prolongation de 24 heures, méconnaît l'article 5§3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour est entachée d'un vice de procédure, la commission du titre de séjour n'ayant pas été saisie sur sa demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée le 9 février 2012 ; elle méconnaît les articles L. 313-11 11° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision désignant l'Arménie comme le pays à destination duquel il sera reconduit d'office méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu la décision du 10 mai 2012 par laquelle la présidente du bureau d'aide juridictionnelle a admis M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu l'ordonnance en date du 28 décembre 2012 fixant la clôture de l'instruction le 15 janvier 2013 à 16 heures ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 janvier 2013, présenté par le préfet du Bas-Rhin ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants des pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 janvier 2013 :

- le rapport de M. Laubriat, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public ;

1. Considérant qu'en application de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : / [...] ...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé [...] " le préfet du Bas-Rhin a, par une décision du 16 février 2012, placé M.B..., ressortissant arménien, en rétention dans un local non pénitentiaire pendant une durée de cinq jours à compter du 16 février 2012 ; que M. B...demande l'annulation du jugement du 21 février 2012 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et du vice de procédure :

2. Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la décision préfectorale du 16 février 2012 et de la méconnaissance des stipulations de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne qui ne comportent aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

Sur le moyen tiré de l'incompatibilité des dispositions de l'article L 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avec les objectifs de la directive n° 2008/115/CE :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet " ; qu'aux termes de l'article L. 561-2 de ce code : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation (...) " ; que, par ailleurs, le seizième considérant de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 susvisée énonce que " Le recours à la rétention aux fins d'éloignement devrait être limité et subordonné au respect du principe de proportionnalité en ce qui concerne les moyens utilisés et les objectifs poursuivis. La rétention n'est justifiée que pour préparer le retour ou procéder à l'éloignement et si l'application de mesures moins coercitives ne suffirait pas " ; qu'aux termes de l'article 15 de cette directive : " 1. À moins que d'autres mesures suffisantes, mais moins coercitives, puissent être appliquées efficacement dans un cas particulier, les États membres peuvent uniquement placer en rétention le ressortissant d'un pays tiers qui fait l'objet de procédures de retour afin de préparer le retour et/ou de procéder à l'éloignement, en particulier lorsque : / a) il existe un risque de fuite, ou / b) le ressortissant concerné d'un pays tiers évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d'éloignement. / Toute rétention est aussi brève que possible et n'est maintenue qu'aussi longtemps que le dispositif d'éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise. / 2. La rétention est ordonnée par les autorités administratives ou judiciaires. / La rétention est ordonnée par écrit, en indiquant les motifs de fait et de droit. / Si la rétention a été ordonnée par des autorités administratives, les États membres : / a) soit prévoient qu'un contrôle juridictionnel accéléré de la légalité de la rétention doit avoir lieu le plus rapidement possible à compter du début de la rétention, / b) soit accordent au ressortissant concerné d'un pays tiers le droit d'engager une procédure par laquelle la légalité de la rétention fait l'objet d'un contrôle juridictionnel accéléré qui doit avoir lieu le plus rapidement possible à compter du lancement de la procédure en question. Dans ce cas, les États membres informent immédiatement le ressortissant concerné d'un pays tiers de la possibilité d'engager cette procédure. / Le ressortissant concerné d'un pays tiers est immédiatement remis en liberté si la rétention n'est pas légale (...) " ;

4. Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, prévoyant les cas dans lesquels un étranger peut être placé en rétention administrative, doivent être lues à la lumière des engagements internationaux de la France, et notamment de l'exigence de proportionnalité issue de la directive 2008/115/CE, et rapprochées de celles de l'article L. 561-2 du même code, prévoyant la possibilité d'assigner à résidence un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement lorsqu'il présente des garanties de représentation suffisantes ; que, dès lors, ce n'est que lorsque cette mesure apparaît proportionnée au but recherché, compte tenu des circonstances particulières de chaque espèce, que l'autorité administrative peut, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, ordonner le placement en rétention administrative d'un étranger faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ; que M. B... n'est par suite pas fondé à soutenir que les dispositions de cet article seraient incompatibles avec les objectifs de la directive 2008/115/CE ;

Sur le moyen tiré du caractère disproportionné de la mesure de placement en rétention :

5. Considérant qu'il est constant que M. B...n'a pas exécuté l'obligation de quitter le territoire français édictée à son encontre le 8 août 2011 et n'a pas remis son passeport aux services de police ; qu'ainsi, et alors même qu'il justifie d'une résidence permanente en France, le préfet du Bas-Rhin a pu considérer qu'il présentait un risque de fuite au sens du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et décider sans entacher sa décision d'erreur d'appréciation de le placer en rétention administrative plutôt que de l'assigner à résidence ;

Sur la méconnaissance des articles L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 15-4 et 8-4 de la directive n° 2008/115/CE :

6. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, M. B...a été placé en rétention pour n'avoir pas exécuté l'obligation de quitter le territoire français édictée à son encontre le 8 août 2011 et n'avoir pas remis son passeport aux services de police ; que par suite, il n'est pas fondé à soutenir que son placement en rétention aurait été décidé uniquement au regard de sa situation irrégulière en méconnaissance des dispositions des articles L 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 15-4 et 8-4 de la directive n° 2008/115/CE ;

Sur le moyen tiré de l'exception d'illégalité de l'arrêté du 8 août 2011 :

7. Considérant qu'à l'appui de ses conclusions en annulation de la décision du 16 février 2012 prononçant son placement en rétention, M. B...se prévaut par la voie de l'exception de l'illégalité de l'arrêté en date du 8 août 2011 par lequel le préfet du Bas-Rhin lui a refusé le renouvellement de la carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " qui lui avait été délivrée à raison de son état de santé, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office à l'expiration de ce délai ;

8. Considérant, en premier lieu, qu' aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2011-672 du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : [...] 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence [...] " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. [...] L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. [...] " ;

9. Considérant que pour refuser à M. B...le renouvellement de son titre de séjour, le préfet du Bas-Rhin s'est notamment fondé sur l'avis du médecin de l'Agence régionale de santé en date du 25 juillet 2011, aux termes duquel si l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, ce dernier peut toutefois bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et son état de santé lui permet, au jour de l'examen de son dossier, de voyager sans risque vers son pays d'origine ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des avis médicaux produits par l'intéressé, qui n'apportent aucune information sur ce point, ou des articles produits par celui-ci, qu'il n'existerait pas actuellement en Arménie de traitement approprié aux pathologies et séquelles d'accident du travail dont souffre M. B... ; que, par suite, dès lors que les dispositions précitées de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile se bornent à requérir l'existence et non l'accessibilité d'un traitement approprié à l'état de santé de l'étranger, M. B...n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté du 8 août 2011 serait entaché d'une erreur de droit ou d'une erreur d'appréciation ;

10. Considérant en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que selon l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au jour de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : [...] 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; qu'aux termes de l'article R. 313-21 dudit code : " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine " ;

11. Considérant que M. B... fait valoir qu'il vit en France depuis presque dix ans, qu'il y est bien intégré et que sa situation fait obstacle à son renvoi en Arménie ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que si l'intéressé affirme que son épouse et ses filles vivent en Ukraine, il a déclaré antérieurement lors d'un entretien en préfecture que celles-ci résidaient toujours en Arménie ; qu'ainsi il ne peut être regardé comme établissant être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où, selon ses propres déclarations, vivrait également sa soeur et où il a lui-même vécu pendant quarante et un ans ; qu'en se bornant à arguer de sa connaissance de la langue française et d'un travail saisonnier dans une exploitation agricole depuis l'année 2006, le requérant ne peut être regardé comme justifiant d'une bonne insertion sociale ; que contrairement à ses allégations, le renouvellement de son titre de séjour depuis le 14 juin 2004 se fonde exclusivement sur son état de santé et non sur son intégration dans la société française ; que dès lors, dans les circonstances de l'espèce, eu égard en particulier aux conditions de séjour en France de M.B..., l'arrêté du 8 août 2011 lui refusant le renouvellement de son titre de séjour n'a pas porté à son droit au respect dû à sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et n'a pas méconnu, par suite, les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

12. Considérant, en troisième lieu qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles précités auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; qu'il résulte de ce qui précède que M. B...ne remplit pas les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté du 8 août 2011 serait entaché d'un vice de procédure ne peut être accueilli ;

13. Considérant, en dernier lieu, qu'avant de statuer par son arrêté du 8 août 2011 sur la demande de M. B...de renouvellement de sa carte de séjour temporaire, le préfet ne pouvait prendre en considération les éléments produits par l'intéressé dans une nouvelle demande de titre de séjour formée le 9 février 2012 ; que M. B...n'est par suite pas fondé à soutenir que l'arrêté préfectoral du 8 août 2011 serait entaché d'une erreur d'appréciation ; qu'il n'est pas plus fondé à soutenir que le préfet aurait dû consulter la commission du titre de séjour avant de statuer sur sa demande d'admission exceptionnelle au séjour ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

14. Considérant que la décision décidant du placement de l'intéressé dans un local ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, ne porte par elle-même aucune atteinte au droit de M. B...à mener une vie familiale normale ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance, par cette décision, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

15. Considérant que la décision ordonnant le placement en rétention de M. B... n'emporte pas, par elle-même, reconduite de l'intéressé dans le pays dont il a la nationalité ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'un tel retour présenterait des risques pour sa sécurité ou sa liberté et l'exposerait à des traitements prohibés par les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, est inopérant ;

Sur le moyen tiré de l'absence de contrôle juridictionnel accéléré de la décision le plaçant en rétention :

16. Considérant que la circonstance que la demande formée par M. B...devant le Tribunal administratif de Strasbourg à l'encontre de la décision prononçant son placement en rétention administrative ait été examinée le sixième jour suivant son interpellation et sa privation de liberté est sans incidence sur la légalité de ladite décision ;

Sur le moyen tiré de l'irrégularité de la garde à vue :

17. Considérant qu'il n'appartient pas au juge administratif de se prononcer sur la légalité de la mesure de garde à vue dont a fait l'objet M. B...préalablement à son placement en rétention administrative ; que par suite, le moyen tiré de ce que la mesure de garde à vue dont le contrôle est confié au seul juge judiciaire méconnaîtrait l'article 5§3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision préfectorale du 16 février 2012 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

19. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la demande de M. B..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour doivent en tout état de cause être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. B... les sommes qu'il réclame au titre des frais exposés lors des procédures de première d'instance et d'appel et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.

Copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

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12NC00947


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC00947
Date de la décision : 18/02/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Alain LAUBRIAT
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : MENGUS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-02-18;12nc00947 ?
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