Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2012, présentée pour Mme C...B..., demeurant à..., par Me A...;
Mme B...demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1101839 du 20 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté son recours formé contre l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle du 18 avril 2011 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'intervalle, de la munir d'une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 794 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me A...en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
Elle soutient que :
Sur la décision de refus de titre de séjour :
- la décision contestée n'est pas motivée ;
- elle a été prise sans procédure contradictoire préalable, en violation des dispositions de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, du considérant 6 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 et de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;
- le préfet ne pouvait statuer une seconde fois sur son droit au séjour sans une nouvelle demande de sa part ;
- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du
7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
- l'obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision refusant de lui accorder un titre de séjour ;
- elle n'est pas motivée ;
- elle est entachée d'un vice de procédure tiré du défaut de procédure contradictoire préalable à la fixation du délai de départ volontaire ;
- les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont incompatibles avec les dispositions des articles 7 et 8 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;
- ces mêmes dispositions sont incompatibles avec celles de l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 ;
- le préfet a commis une erreur de droit en n'examinant pas spécifiquement la durée du délai accordé en cas de retour volontaire ;
- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 et 9 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation du délai de retour volontaire en raison de la présence en France de son époux et de son fils ;
- elle a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;
Sur le pays de destination :
- la décision fixant le pays de destination est dépourvue de base légale par voie de conséquence de l'illégalité des décisions lui refusant un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français ;
- elle n'est pas motivée ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- elle méconnaît également les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;
Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 juillet 2012, présenté par le préfet de Meurthe-et-Moselle, qui conclut au rejet de la requête ; il déclare on outre s'en remettre à ses écrits de première instance ;
Vu la décision du président du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 15 mars 2012, admettant Mme B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 janvier 2013 :
- le rapport de Mme Herbelin, président de chambre ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
1. Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu d'adopter les motifs retenus par les premiers juges pour écarter les moyens tirés du défaut de motivation et de procédure contradictoire soulevés à l'encontre de la décision refusant un titre de séjour à MmeB... ;
2. Considérant, en deuxième lieu, que Mme B...soutient que le préfet de Meurthe-et-Moselle a entaché sa décision d'une erreur de droit en statuant une nouvelle fois sur son droit au séjour, sans qu'elle en ait fait la demande ; que, toutefois, la décision du 22 février 2011, dont Mme B...fait état, a seulement entendu refuser d'admettre provisoirement l'intéressée au séjour en vue de solliciter, auprès de l'Office national de protection des réfugiés et apatrides, la reconnaissance de la qualité de réfugié ; que la décision contestée, lui refusant un titre de séjour a, après examen de la situation personnelle de l'intéressée, légalement tiré les conséquences du rejet de sa demande visant à se voir reconnaître la qualité de réfugié par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 7 mars 2011 et notifiée le 11 mars suivant ; que, dès lors, le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a pas commis d'erreur de droit en refusant un titre de séjour à Mme B...en application des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
3. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " et qu'aux termes de l'article R. 313-21 du même code : " Pour l'application du
7° de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. " ;
4. Considérant que si MmeB..., ressortissante arménienne entrée en France à l'âge de 23 ans, fait valoir qu'elle y réside depuis le 11 décembre 2007 avec son époux et son fils et qu'elle n'a plus d'attaches familiales dans son pays d'origine, il ressort toutefois des pièces du dossier que son époux fait également l'objet d'une mesure d'éloignement et qu'elle ne démontre pas être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine ; que, dès lors, la décision refusant à
Mme B...un titre de séjour n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale normale au regard des buts en vue desquels elle a été prise et n'a ainsi méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales précitées ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
5. Considérant, enfin, que si Mme B...fait valoir qu'elle présente des garanties sérieuses d'intégration, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
6. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que doit être écarté le moyen tiré de ce que la décision du 18 avril 2011 par laquelle le préfet de Meurthe-et-Moselle a fait obligation à Mme B...de quitter le territoire français doit être annulée comme dépourvue de base légale par voie de conséquence de l'annulation de la décision refusant d'accorder un titre de séjour à l'intéressée ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il y a lieu d'adopter les motifs retenus par les premiers juges pour écarter les moyens tirés du défaut de motivation, du vice de procédure et de l'incompatibilité du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile avec les dispositions des articles 7, 8 et 12 de la directive du 16 décembre 2008 ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation du délai de retour volontaire soulevés à l'encontre de la décision obligeant Mme B...à quitter le territoire français ;
8. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Meurthe-et-Moselle, qui disposait des informations nécessaires sur la situation personnelle de l'intéressée, n'aurait pas examiné la possibilité de prolonger le délai de départ volontaire octroyé à MmeB... ; qu'au contraire, les termes mêmes de la décision contestée, que les allégations de l'intéressée ne permettent pas de remettre en cause, établissent que le préfet a étudié l'éventualité d'une prolongation de son délai de départ volontaire ;
9. Considérant, en quatrième lieu, que les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée, qui reprennent les éléments précédemment développés à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que précédemment ;
10. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; que la décision litigieuse n'a ni pour objet ni pour effet de séparer l'enfant Vahé de ses parents ; qu'il suit de là que la décision portant obligation de quitter le territoire ne méconnaît pas les stipulations précitées ;
11. Considérant, enfin, que Mme B...ne peut pas utilement invoquer les stipulations de l'article 9 de la convention relative aux droits de l'enfant qui créent seulement des obligations entre Etats ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
12. Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu d'adopter les motifs retenus par les premiers juges pour écarter les moyens tirés de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français, du défaut de motivation du défaut de motivation, et de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales soulevés à l'encontre de la décision fixant le pays de destination de MmeB... ;
13. Considérant, en deuxième lieu, que Mme B...soutient que la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant, dès lors que son éloignement à destination de l'Arménie conduirait à un éclatement de la cellule familiale, son époux étant éloigné vers l'Azerbaïdjan, ainsi qu'à la déscolarisation de son enfant ; que, toutefois, Mme B...n'établit pas qu'elle serait empêchée de poursuivre une vie familiale commune dans l'un ou l'autre pays dont son époux et elle-même ont respectivement la nationalité, ou dans tout autre où ils seraient légalement admissibles, notamment la Russie, pays dans lequel ils ont vécu durant huit ans de 1999 à 2007 ; que la déscolarisation de son jeune enfant ne suffit à établir la méconnaissance des stipulations précitées, alors que la requérante ne démontre pas que son fils serait dans l'impossibilité d'être scolarisé dans leur pays de renvoi ;
14. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;
15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 avril 2011 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a refusé un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
16. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par MmeB..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions de la requérante tendant à ce que la Cour enjoigne au préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation ne peuvent, dès lors, être accueillies ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
17. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du
10 juillet 1991 relatives à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu 'il aurait réclamée à sa cliente, si cette dernière n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ; que l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, ne saurait être condamné à verser à l'avocat de Mme B...une somme en application de ces dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
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N° 12NC00693