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28/01/2013 | FRANCE | N°11NC00821

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 28 janvier 2013, 11NC00821


Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2011, présentée pour le département de la Marne agissant par le président du conseil général en exercice, par Me Schidlowsky, avocat ;

Le département de la Marne demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802111 du 24 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a déchargé la SARL Alubat de l'obligation de payer la somme de 179 624,11 euros mise à la charge par un titre exécutoire du 17 août 2007 ;

2°) de mettre à la charge de la SARL Alubat la somme de 3 000 euros sur le fondement de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la dema...

Vu la requête, enregistrée le 23 mai 2011, présentée pour le département de la Marne agissant par le président du conseil général en exercice, par Me Schidlowsky, avocat ;

Le département de la Marne demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802111 du 24 mars 2011 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a déchargé la SARL Alubat de l'obligation de payer la somme de 179 624,11 euros mise à la charge par un titre exécutoire du 17 août 2007 ;

2°) de mettre à la charge de la SARL Alubat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- la demande de première instance était tardive ;

- le délai de quinze jours prévu par l'article 49 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés de travaux a été respecté ;

- les procédures de mise en régie et de résiliation ont été régulières ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 mars 2012, présenté par la SARL Alubat, dont le siège est au 14, rue Maurice Prévoteau - Actipôle La Neuvillette, à Reims (51000), agissant par son gérant, par Me Lechesne, avocat ; la SARL Alubat demande à la Cour de rejeter la requête et de mettre à la charge du département de la Marne la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

- sa demande n'était pas tardive dès lors qu'elle constitue une demande en matière de travaux publics et que les mentions relatives aux voies et délais de recours ne précisant pas quelle était la juridiction compétente, elles ne pouvaient faire courir le délai ;

- que le délai de 15 jours n'a pas été respecté ;

- qu'elle n'a pas été mise en mesure de suivre l'exécution des travaux mis en régie dès lors que l'accès au chantier lui a été interdit ;

Vu le mémoire enregistré le 9 mars 2012, présenté pour la SARL Alubat qui entend corriger une erreur de plume figurant dans son mémoire du 8 mars ;

Vu le mémoire enregistré le 2 janvier 2013, présenté pour la SARL Alubat qui persiste dans ses précédentes écritures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux, ensemble ledit cahier des clauses administratives générales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 2013 :

- le rapport de Mme Kohler, conseiller,

- et les conclusions de M. Wiernaz, rapporteur public ;

1. Considérant que le département de la Marne a conclu en 2005 un marché portant sur la reconstruction du collège Thibaud de Champagne de Fismes (51) ; que la SARL Alubat était attributaire du lot n°6 " menuiseries extérieures aluminium " de ce marché ; que cette entreprise ayant été défaillante dans l'exécution de ses prestations, le département de la Marne l'a mise en demeure de remédier aux malfaçons avant de décider de la mise en régie de son marché puis de sa résiliation ; qu'un titre exécutoire d'un montant de 179 624,11 euros correspondant aux frais occasionnés pour la reprise et l'achèvement des travaux a été émis à l'encontre de la société le 17 août 2007 ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a déchargé la société Alubat de l'obligation de payer la somme ainsi mise à sa charge ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Considérant qu'aux termes du 2° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales : " L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite (...) " ;

3. Considérant que, contrairement à ce qu'ont jugé les premiers juges, il résulte de ces dispositions, auxquelles ne peuvent faire obstacle les dispositions de l'article R. 421-1 du code de justice administrative en vertu desquelles le délai de deux mois prévu pour saisir la juridiction administrative ne s'applique pas en matière de travaux publics, que le recours formé contre un titre exécutoire émis par une collectivité territoriale, y compris s'il est émis pour assurer le recouvrement de sommes relatives à l'exécution de travaux publics, doit être présenté, à peine de forclusion, dans un délai de deux mois ;

4. Considérant toutefois, que les dispositions précitées du code général des collectivités territoriales n'ont ni pour objet ni pour effet d'écarter la règle générale, rappelée à l'article R. 421-5 du code de justice administrative, selon laquelle les délais de recours ne peuvent courir en l'absence de mention des voies et délais de recours dans la notification de la décision ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le titre exécutoire émis le 17 août 2007 portait l'indication " vous pouvez contester la somme mentionnée en saisissant directement le tribunal judiciaire ou le tribunal administratif compétent selon la nature de la créance. A titre d'exemple : cantines scolaires : tribunal administratif / loyers d'habitation et charges locatives : tribunal d'instance " ; que cette seule mention, qui ne précisait pas quelle était la juridiction compétente, n'a pu faire courir les délais de recours ; que, par suite, le département de la Marne n'est pas fondé à se plaindre que le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a écarté la fin de non-recevoir qu'il avait opposée à la requête de la société Alubat ;

Sur le titre exécutoire du 17 août 2007 :

6. Considérant que le département de la Marne produit en appel l'accusé de réception de la mise en demeure adressée à la société Alubat le 15 mars 2007 ; qu'il résulte de cet accusé de réception que le délai imparti à la société pour réaliser les prestations prévues à son contrat n'a pas été, contrairement à ce qu'elle fait valoir, inférieur à quinze jours ; que dès lors, le département de la Marne est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur ce motif pour annuler le titre exécutoire du 7 août 2007 ;

7. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Alubat devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 49 du cahier des clauses administratives générales applicables au marché en cause : " Si l'entrepreneur n'a pas déféré à la mise en demeure, une mise en demeure, une mise en régie à ses frais et risques peut être ordonnée ou la résiliation du marché peut être décidée. (...) Après l'expiration d'un délai d'un mois suivant la notification de la décision de mise en régie, la résiliation du marché peut être décidée. (...) En cas de résiliation aux frais et risques de l'entrepreneur, il est passé un marché avec un autre entrepreneur pour l'achèvement des travaux. (...) L'entrepreneur dont les travaux sont mis en régie est autorisé à en suivre l'exécution sans pouvoir entraver les ordres du maître d'oeuvre et de ses représentants. (...) Les excédents de dépenses qui résultent de la régie ou du nouveau marché sont [à la charge de] l'entrepreneur. (...) " ;

9. Considérant qu'il résulte de ces stipulations que l'entrepreneur défaillant dont le marché est mis en régie à ses frais et risques doit, en vue de la sauvegarde de ses intérêts, être mis en mesure de suivre les prestations exécutées par une autre entreprise intervenant après la mise en régie de son marché ; qu'il résulte de l'instruction que la société Alubat s'est vu interdire l'accès au chantier à compter de la décision de mise en régie du 5 avril 2007 et que cette interdiction a été maintenue, de manière définitive le 11 juin 2007 ; qu'ainsi la société Alubat n'a pas été mise en mesure d'user du droit qu'elle avait de suivre l'exécution des travaux ; que, par suite, elle ne saurait être tenue de supporter les excédents de dépenses qui en seraient résultés ; qu'il résulte de ce qui précède, que le département de la Marne n'est pas fondé à se plaindre que le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a, par le jugement attaqué, déchargé la société Alubat de l'obligation de payer la somme de 179 624,11 euros mise à sa charge par le titre exécutoire du 7 août 2007 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que la société Alubat n'étant, dans la présente instance, ni une partie perdante, ni une partie tenue aux dépens, ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme quelconque soit mise à sa charge au titre des frais exposés par le département de la Marne et non compris dans les dépens ;

11. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du département de la Marne la somme de 1 500 euros au titre des frais de cette nature exposés par la société Alubat ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête du département de la Marne est rejetée.

Article 2 : Le département de la Marne versera à la société Alubat la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au département de la Marne et à la SARL Alubat.

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11NC00821


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC00821
Date de la décision : 28/01/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-03 Marchés et contrats administratifs. Fin des contrats. Mise en régie.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Julie KOHLER
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : SCHIDLOWSKY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2013-01-28;11nc00821 ?
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