Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 2011 et complétée par mémoire enregistré le 3 octobre 2012, présentée pour M. Djibril A et M. Saber B, demeurant ..., par M. Nunge, avocat ;
MM. A et B demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0902438 du 19 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 6 novembre 2009 par lequel le maire de Bouxières-aux-Dames a rejeté leur demande de permis de construire deux maisons individuelles sur un terrain leur appartenant ... ;
2°) d'annuler l'arrêté en date du 6 novembre 2009 par lequel le maire de Bouxières-aux-Dames a rejeté leur demande de permis de construire deux maisons individuelles sur un terrain leur appartenant ... ;
3°) d'enjoindre la commune de Bouxières-aux-Dames de leur délivrer le permis de construire sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Bouxières-aux-Dames une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code justice administrative, à verser paritairement à chacun des appelants ;
Ils soutiennent que :
- le classement, dans le plan d'occupation des sols, de la parcelle cadastrée section A n° 624 en " espaces boisés " est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- le refus qui leur a été opposé n'est pas légalement fondé dès lors que les raccordements aux réseaux publics des maisons à construire n'auront aucune incidence sur les plantations situées sur la parcelle section A n° 624 ;
- l'arrêté est entaché de détournement de pouvoir ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 17 janvier 2012 et complété par mémoire enregistré le 16 novembre 2012, présenté pour la commune de Bouxières-aux-Dames, par Me Tadic, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de MM. A et B au titre de l'article L. 761-1 du code justice administrative ;
Elle soutient que :
- le classement de la parcelle section A n° 624 en " espaces boisés " n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que cette parcelle est un parc d'agrément et ceci quand bien même elle se situe dans la zone urbanisée de la commune ; les arbres présents sur la parcelle avaient majoritairement de la valeur, l'autorisation d'abattage délivrée en 2009 ne concernait d'ailleurs que 27 arbres sur 84 ;
- la mise en place des raccordements des constructions nécessite de les enfouir dans le sous-sol de la parcelle n° 624, qui est en grande partie boisée, à l'aide d'engins lourds de travaux publics, ce qui compromet le développement des arbres ; les requérants n'établissent pas pouvoir effectivement utiliser les petits engins pour lesquels ils présentent une notice et un devis ;
- l'existence d'une voie de desserte n'est pas établie ;
- la preuve de l'existence d'un détournement de pouvoir n'est pas rapportée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2012 :
- le rapport de M. Vincent, président de chambre,
- les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public,
- et les observations de Me Gantois, substituant Me Nunge, avocat de MM. A et B, ainsi que celles de Me Martin, substituant Me Tadic, avocat de la commune de Bouxières-aux-Dames ;
Sur la légalité de l'arrêté litigieux :
En ce qui concerne les moyens retenus par le Tribunal :
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 130-1 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme peuvent classer comme espaces boisés, les bois, forêts, parcs à conserver, à protéger ou à créer, qu'ils relèvent ou non du régime forestier, enclos ou non, attenant ou non à des habitations. Ce classement peut s'appliquer également à des arbres isolés, des haies ou réseaux de haies, des plantations d'alignements. / Le classement interdit tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements (...) " ;
2. Considérant, en premier lieu, que la parcelle cadastrée section A n° 624 au lieu-dit " Les Douars " a été classée en " espaces boisés " par le plan local d'urbanisme de la commune de Bouxières-aux-Dames ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu pour la cour d'adopter, les premiers juges auraient commis une erreur en écartant le moyen tiré de ce que ce classement serait injustifié ;
3. Considérant cependant, en second lieu, que la présence de branchements particuliers souterrains reliant les maisons d'habitation, dont la construction est projetée sur la parcelle voisine cadastrée section A n° 1049 aux réseaux publics situés rue Saint-Martin, n'est par principe pas susceptible de changer l'affectation ou le mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation et la protection des boisements existants sur la parcelle section A n° 624 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment du rapprochement du plan de masse faisant apparaître le tracé des raccordements envisagés joint à la demande de permis de construire et de la cartographie de l'implantation des arbres demeurant sur la parcelle section A n° 624 à la suite de l'abattage intervenu en 2009, soit antérieurement à la date de l'arrêté litigieux, que les travaux d'enfouissement des canalisations projetées auraient lieu dans la partie boisée de la parcelle classée, ni qu'ils entraineraient l'abattage d'arbres ou porteraient nécessairement atteinte à l'espace boisé classé ; que, par suite, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, le maire de Bouxières-au-Dames n'a pu légalement, pour ce motif, refuser de délivrer le permis de construire sollicité ;
En ce qui concerne les autres moyens :
4. Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, les autres moyens soulevés par MM. A et B ne sont pas, en l'état de l'instruction, de nature à justifier l'annulation de l'arrêté litigieux ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que MM. A et B sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 6 novembre 2009 par lequel le maire de Bouxières-aux-Dames a rejeté leur demande de permis de construire deux maisons individuelles sur un terrain leur appartenant ... ;
Sur les conclusions à fins d'injonction :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ; que le motif précité d'annulation du refus de délivrance du permis de construire implique seulement que le maire de Bouxières-aux-Dames procède au réexamen de la demande des requérants ; que, par suite, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre le maire de Bouxières-aux-Dames de réexaminer la demande de MM. A et B,et ce dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation " ;
8. Considérant, d'une part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Bouxières-aux-Dames le paiement de la somme de 1 000 euros au bénéfice respectif de M. A et M. B au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
9. Considérant, d'autre part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de MM. A et B, qui ne sont pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la commune de Bouxières-aux-Dames au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Nancy du 19 juillet 2011 est annulé.
Article 2 : L'arrêté en date du 6 novembre 2009 du maire de Bouxières-aux-Dames est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au maire de Bouxières-aux-Dames de réexaminer la demande de permis de construire de MM. A et B dans le délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 4 : La commune de Bouxières-aux-Dames versera respectivement à M. A et à M. B une somme de 1 000 euros (mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Djibril A, à M. Saber B et à la commune de Bouxières-aux-Dames.
Copie en sera adressée au procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Nancy.
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11NC01573