La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/11/2012 | FRANCE | N°11NC01485

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 29 novembre 2012, 11NC01485


Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2011, complétée par des mémoires enregistrés le 6 juillet 2012 et le 9 octobre 2012, présentée pour la Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes ci-après désignée Matmut, dont le siège social est 66, rue de Sotteville à Rouen (76100), représentée par Me Bourgaux, avocat ;

La Matmut demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0900114 du 28 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a condamné le département des Vosges à lui verser une somme de 11 750 euros assortie des intérêts légaux à

compter du 24 janvier 2008 qu'elle estime insuffisante en réparation des conséquences...

Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2011, complétée par des mémoires enregistrés le 6 juillet 2012 et le 9 octobre 2012, présentée pour la Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes ci-après désignée Matmut, dont le siège social est 66, rue de Sotteville à Rouen (76100), représentée par Me Bourgaux, avocat ;

La Matmut demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0900114 du 28 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a condamné le département des Vosges à lui verser une somme de 11 750 euros assortie des intérêts légaux à compter du 24 janvier 2008 qu'elle estime insuffisante en réparation des conséquences dommageables de l'accident de la circulation survenu le 21 août 2004 au titre duquel elle est subrogée dans les droits de son assuré et des ayants droits des victimes ;

2°) de condamner le département des Vosges à lui verser la somme de 122 176,39 euros avec les intérêts légaux à compter de la date des différents paiements ;

3°) de mettre à la charge du département des Vosges une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La Matmut soutient que :

- le département des Vosges est entièrement responsable des conséquences dommageables de l'accident survenu le 21 août 2004 sur le chemin départemental CD 13 dans le sens Houecourt-Vittel en l'absence de toute signalisation du caractère très glissant de la chaussée dû à la présence d'une nappe d'hydrocarbures ;

- tous les justificatifs des paiements qu'elle a effectués en sa qualité de subrogée de son assuré, M. Contal, ont été versés au débat et établissent qu'elle a pris en charge l'indemnisation des différentes victimes à concurrence d'une somme totale de 122 176,39 euros ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 20 janvier 2012, le mémoire en défense présenté pour la caisse primaire d'assurances maladie des Vosges, représentée par Me Fort, avocat, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 000 euros soit mise à la charge du département des Vosges au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La caisse primaire d'assurances maladie des Vosges demande la confirmation du jugement attaqué s'agissant de sa créance et de l'indemnité de gestion prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et déclare s'en remettre à la sagesse de la Cour s'agissant de la demande de la Matmut ;

Vu, enregistré le 30 janvier 2012, le mémoire en défense, complété par un mémoire du 16 octobre 2012, présenté pour le département des Vosges, représenté par le président du conseil général, par la SCP Vilmin, Caninica, Lagarrigue, qui conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à ce que la responsabilité des victimes soit seule retenue dans l'accident survenu et, subsidiairement, à la réduction des indemnités auxquelles il a été condamné et, en outre à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la Matmut sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le département des Vosges soutient que :

- la preuve du défaut d'entretien normal n'est pas rapportée ;

- l'accident ne peut être imputable qu'à la faute de M. Contal qui circulait à vive allure ainsi qu'à celle de la conductrice qui circulait en sens inverse et dont le véhicule empiétait sur l'autre partie de la chaussée ;

- à titre subsidiaire, les prétentions indemnitaires sont excessives ;

Vu la lettre du 5 septembre 2012 par laquelle les parties ont été informées qu'en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative il était envisagé d'appeler l'affaire à une audience qui pourrait avoir lieu au cours du 4ème trimestre 2012 et que l'instruction pourrait être close à partir du 15 octobre 2012 sans information préalable ;

Vu l'ordonnance de clôture de l'instruction immédiate prise le 19 octobre 2012 à 16 heures en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des assurances ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 novembre 2012 :

- le rapport de Mme Fischer-Hirtz, président,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- les observations de Me Bourgaux, avocat de la Matmut,

- et les observations de Me Vilmin, pour le département des Vosges ;

1. Considérant que, le 21 août 2004, M. Contal, qui circulait en voiture sur le chemin départemental n° 33 dans le sens Houecourt-Vittel (Vosges) a perdu le contrôle de son véhicule en dérapant dans un virage sur une nappe d'hydrocarbures répandue sur la chaussée ; qu'en se déportant, son véhicule est allé percuter la voiture roulant sur la voie opposée ; qu'à la suite de cette collision, M. Contal a été grièvement blessé et les deux passagères du véhicule heurté, Mmes Chouleur et Raguet, sont décédées sur le coup ; que la Matmut, en qualité d'assureur de M. Contal, a déboursé une somme totale de 122 176,39 euros correspondant à l'indemnisation du préjudice de son assuré et aux sommes allouées aux ayants droit des deux autres victimes ; que la compagnie d'assurances, qui met en cause l'insuffisance de la signalisation du danger, a recherché la responsabilité du département des Vosges ; que le Tribunal administratif de Nancy a, par le jugement attaqué, estimé la responsabilité du département des Vosges entièrement engagée à l'égard des victimes ; que la Matmut critique en appel le montant de l'indemnité qui lui a été allouée par le tribunal et réclame le remboursement par le département des Vosges de l'intégralité des sommes qu'elle déclare avoir versées ; que le département des Vosges, par la voie du recours incident, demande que la responsabilité des conducteurs soit retenue dans le présent litige ;

Sur la responsabilité :

1. Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du procès verbal de gendarmerie et des témoignages recueillis par les enquêteurs, tant auprès de M. Contal que des témoins directs de la collision et des pompiers dépêchés sur les lieux, que l'accident survenu le 21 août 2004, vers 18 heures 15, au cours duquel M. Contal a été grièvement blessé, après avoir dérapé dans un virage et heurté un véhicule arrivant en sens inverse, a été provoqué par la présence d'une trainée d'hydrocarbure, répandue sur la totalité de la chaussée ; que le département des Vosges n'apporte aucun élément de nature à établir que l'hydrocarbure avait été répandu sur le sol depuis un délai trop bref pour que ses services aient eu la possibilité matérielle de prendre les mesures nécessaires ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, et notamment en l'absence de toute signalisation indiquant le danger que comportait pour les usagers l'existence de cette nappe d'hydrocarbure, le département des Vosges ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, de l'entretien normal de la voie ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la victime ait commis une faute ou une imprudence ; que, dès lors, le département dans Vosges doit être déclaré entièrement responsable des conséquences dommageables de l'accident ;

Sur l'action subrogatoire de la Matmut à raison des sommes versées à M. Contal et aux ayants droit de Mmes Chouleur et Raguet :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 121-12 du code des assurances : " L'assureur qui a payé l'indemnité d'assurance est subrogé jusqu'à concurrence de cette indemnité dans les droits et actions de l'assuré contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'assureur est, dès le versement d'une indemnité d'assurance à son assuré ou, en son nom, à des tiers victimes d'un dommage regardé comme imputable à ce dernier, subrogé dans les droits et actions de l'assuré et des tiers qu'il a indemnisés à concurrence des sommes versées ; que, pour bénéficier de cette subrogation, l'assureur peut justifier par tout moyen du paiement de ces indemnités, sans que soit nécessaire la production de quittances subrogatives ; qu'ainsi, la Matmut est en droit d'obtenir réparation de l'intégralité des préjudices subis par les victimes de l'accident, à concurrence des indemnités qu'elle a versées ;

3. Considérant que la Matmut a établi, devant les premiers juges, avoir été amenée à verser, à la suite de l'accident, la somme globale de 29 742,78 euros à M. Contal, son assuré ainsi qu'aux ayants droit de Mme Chouleur, décédée dans l'accident ; que, contrairement à ce qui a été jugé par le tribunal, la Matmut établit également, par la production d'une quittance subrogative, avoir réglé une somme d'un montant total de 72 370, 78 euros correspondant à la moitié des indemnités versées aux ayants droit de Mme Raguet ; qu'elle est dès lors également fondée à demander que le département des Vosges soit condamné à lui verser ce montant ; que, de même, sa demande relative aux frais d'obsèques de 1 996, 39 euros qu'elle justifie avoir versés aux deux enfants de Mme Chouleur doit être prise en compte ; qu'il suit de là, que la réparation due par le département des Vosges à la Matmut s'élève à la somme totale de 104 109,95 euros, y compris la somme de 11 750 euros, qui a déjà été accordée à cette compagnie d'assurances par le jugement du 28 juin 2011 ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Matmut est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a refusé de condamner le département des Vosges à lui verser une somme de 92 359,95 euros représentant la différence entre la somme totale de 104 109,95 euros correspondant aux sommes versées à M. Contal ainsi qu'aux ayants droit de Mmes Chouleur et Raguet et celle de 11 750 euros déjà mise à la charge du département par le Tribunal administratif de Nancy dans son jugement du 28 juin 2011 ; que la somme de 92 359,95 euros portera intérêt au taux légal à compter du 24 janvier 2008, date d'enregistrement de sa requête de première instance ;

Sur les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ; que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la Matmut, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le département des Vosges demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu de mettre à la charge du département des Vosges une somme de 1 200 euros au titre des frais exposés par la Matmut et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La somme de 11 750 euros que le département des Vosges a été condamné à verser à la Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes par l'article 1er du jugement n° 0900114 du Tribunal administratif de Nancy du 28 juin 2011 est majorée de la somme de 92 359,95 euros, qui portera intérêt au taux légal à compter du 24 janvier 2008.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Nancy du 28 juin 2011 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 3 : Le département des Vosges versera à la Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes somme de 1 200 (mille deux cents) euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes est rejeté ainsi que les conclusions du département des Vosges et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes, au département des Vosges et à la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges.

''

''

''

''

2

11NC01485


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC01485
Date de la décision : 29/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-03-01-01-02 Travaux publics. Différentes catégories de dommages. Dommages sur les voies publiques terrestres. Entretien normal. Chaussée.


Composition du Tribunal
Président : Mme HERBELIN
Rapporteur ?: Mme Catherine FISCHER-HIRTZ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : BOURGAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-11-29;11nc01485 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award