Vu, la requête, enregistrée le 20 juillet 2011, présentée pour Mme Lavnora A, demeurant Plate-forme des demandeurs d'asile, 1a, rue Sainte Claire, à Mulhouse (68100), par Me Kling, avocat ;
Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1101842 du 16 juin 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 mars 2011 par lequel le préfet du Haut-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office à l'expiration de ce délai ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de 15 jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 196 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Elle soutient que :
- la décision portant refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entré et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ; le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les articles L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;
Vu la décision du président du bureau de l'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Nancy (section administrative), en date du 29 septembre 2011, accordant à Mme A l'aide juridictionnelle totale ;
Vu l'ordonnance en date du 6 février 2012 fixant la clôture de l'instruction au 1er mars 2012 à 16 heures ;
Vu les pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la formation de jugement dispensant le rapporteur public, sur sa demande, de prononcer ses conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 octobre 2012 le rapport de M. Laubriat, premier conseiller ;
1. Considérant qu'en application de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui dispose : " I.-L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour [...] peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. [...] " ; le préfet du Haut-Rhin a refusé par un arrêté du 7 mars 2011 de délivrer à Mme A, ressortissante kosovare, un titre de séjour, a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office à l'expiration de ce délai ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 11 : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : [...] 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ;
3. Considérant que pour refuser à Mme A la délivrance de la carte de séjour temporaire qu'elle avait sollicitée sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet s'est fondé sur l'avis émis le 16 juillet 2010 par le médecin de l'agence régionale de santé Lorraine aux termes duquel si l'état de santé de Mme A nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle peut toutefois bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que pour soutenir qu'elle ne pourra bénéficier au Kosovo des soins que nécessite son état de santé, la requérante se prévaut d'un rapport émanant d'une association suisse d'aide aux réfugiés, d'une attestation établie le 1er avril 2008 par un médecin exerçant au Kosovo et de plusieurs certificats médicaux ; que ces documents ne contredisent pas l'avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région Lorraine selon lequel Mme A peut bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine ; qu'au surplus une note émanant de l'ambassade de France au Kosovo, produite par le préfet, précise que ce pays participe à la prise en charge des médicaments nécessaires et indispensables au traitement des pathologies psychiatriques et que ces médicaments sont disponibles dans toutes les pharmacies ; qu'enfin si la requérante fait valoir, que l'origine de sa pathologie est liée aux événements traumatisants qu'elle a vécus au Kosovo, elle ne l'établit pas ; que, dès lors, celle-ci ne peut être regardée comme ne pouvant bénéficier dans son pays d'un accès effectif aux soins ; qu'ainsi, Mme A n'est pas fondée à soutenir que le préfet du Haut-Rhin a méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant de lui délivrer un titre de séjour en raison de son état de santé ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'au soutien de sa critique du jugement attaqué, Mme A reprend, avec la même argumentation, son moyen de première instance tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d'adopter, commis une erreur en écartant ce moyen ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ; qu'il ressort des pièces du dossier que les trois enfants de Mme A étaient respectivement âgés de 12 ans, 11 ans et 1 an à la date de la décision contestée ; qu'ils ne sont présents en France que depuis novembre 2008 ; qu'eu égard à leur jeune âge, et à la durée limitée de leur présence en France ces enfants ne peuvent être regardés comme ayant développé des attaches importantes en France ; qu'en outre, rien ne fait obstacle à ce qu'ils accompagnent leurs parents lors du retour de ces derniers dans leur pays d'origine ; que par suite, le préfet du Haut-Rhin qui n'a pas porté atteinte à l'intérêt supérieur de ces enfants, n'a pas méconnu les stipulations précitées ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :
6. Considérant qu'au soutien de sa critique du jugement attaqué, Mme A reprend, avec la même argumentation, ses moyens de première instance tirés de l'exception d'illégalité du refus de titre et de l'erreur manifeste d'appréciation ; que toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d'adopter, commis une erreur en écartant ces moyens ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination:
7. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées où qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " ; que Mme A fait valoir qu'elle et son époux ont subi des menaces et des agressions du fait des accusations de collaboration avec les serbes proférées à l'encontre de son mari ; que toutefois ses demandes d'admission au bénéfice du statut de réfugié ont été rejetées successivement par l'office français de protection des réfugiés et des apatrides et par la cour nationale du droit d'asile, au motif que ses allégations relatives aux évènements subis dans son pays d'origine n'étaient pas établies ; que la requérante ne produit aucun élément probant de nature à établir la réalité des risques actuels et personnels encourus en cas de retour au Kosovo ; qu'ainsi elle n'établit pas que la décision fixant le pays de destination méconnaîtrait les dispositions précitées de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation présentées par Mme A n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions de la requérante tendant à ce que la Cour enjoigne au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent, dès lors, être accueillies ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, les sommes que Mme A demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête susvisée de Mme A est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à Mme Lavnora A et au ministre de l'intérieur.
Copie du présent arrêt sera adressée au préfet du Haut-Rhin.
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11NC01189