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08/11/2012 | FRANCE | N°12NC00489

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 08 novembre 2012, 12NC00489


Vu la requête, enregistrée le 15 mars 2012, présentée pour M. Mamed , demeurant ..., par Me Jeannot ;

M. demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101023-1101024 du 3 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa requête tendant, d'une part, à annuler la décision du 9 mai 2011 par laquelle le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, d'autre part, à annuler l'arrêté du 30 juin 2011 par lequel le préfet du Doubs a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligati

on de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'an...

Vu la requête, enregistrée le 15 mars 2012, présentée pour M. Mamed , demeurant ..., par Me Jeannot ;

M. demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1101023-1101024 du 3 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa requête tendant, d'une part, à annuler la décision du 9 mai 2011 par laquelle le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, d'autre part, à annuler l'arrêté du 30 juin 2011 par lequel le préfet du Doubs a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 9 mai 2011 et l'arrêté du 30 juin 2011 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Doubs de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en tant que demandeur d'asile ou un titre de séjour " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et, dans l'intervalle, lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 794 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à Me Jeannot en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Il soutient que :

- la décision portant refus d'autorisation provisoire de séjour est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un vice de procédure, dès lors que les informations relatives à la procédure d'asile ne lui ont pas été données dans une langue qu'il comprend ;

- le préfet n'a pas fait usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation à titre exceptionnel et n'a pas examiné la possibilité d'une mesure de régularisation de sa situation administrative ;

- il n'est pas démontré que sa demande d'asile constituerait une fraude délibérée ou un recours abusif aux procédures d'asile ; le préfet n'a pas examiné la pertinence ni même l'existence des éléments nouveaux présentés à l'appui de sa demande de réexamen ;

- la décision portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant refus d'admission provisoire au séjour ; elle est insuffisamment motivée ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il justifie d'une forte volonté d'intégration et qu'il est présent aux côtés de sa mère malade ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 27 juin 2012, présenté par le préfet du Doubs, qui conclut au rejet de la requête de M. ;

Il soutient que, ni la décision du 9 mai 2011, ni l'arrêté du 30 juin 2011 ne sont entachés d'illégalité ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, du 7 février 2012, admettant M. au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 2012 :

- le rapport de M. Favret, premier conseiller,

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne la décision du 9 mai 2011 portant refus d'admission provisoire au séjour :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

1. Considérant que les dispositions de l'article 10 de la directive n° 2005/85 du 1er décembre 2005 relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié dans les Etats membres prévoient, en ce qui concerne les procédures prévues à son chapitre III, et notamment les procédures d'examen prioritaire des demandeurs refusant de se conformer à l'obligation de donner leurs empreintes digitales, que : " les Etats membres veillent à ce que tous les demandeurs d'asile bénéficient des garanties suivantes : / a) ils sont informés, dans une langue dont il est raisonnable de supposer qu'ils la comprennent, de la procédure à suivre et de leurs droits et obligations au cours de la procédure ainsi que des conséquences que pourrait avoir le non-respect de leurs obligations ou le refus de coopérer avec les autorités. Ils sont informés du calendrier, ainsi que des moyens dont ils disposent pour remplir leur obligation de présenter les éléments visés à l'article 4 de la directive 2004/83/CE. Ces informations leur sont communiquées à temps pour leur permettre d'exercer les droits garantis par la présente directive et de se conformer aux obligations décrites à l'article 11 " ; que la méconnaissance du droit du demandeur d'asile d'être informé sur ses droits et obligations, dans une langue dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend, constitue une atteinte grave et manifestement illégale au droit d'asile et, partant, un vice substantiel de procédure ;

2. Considérant qu'il n'est pas contesté que M. , ressortissant géorgien, ne comprend pas la langue française ; qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que, lors du dépôt de sa demande d'autorisation provisoire de séjour, les informations prévues à l'article 10 de la directive du 1er décembre 2005 lui aient été communiquées dans une langue dont il est raisonnable de supposer qu'il la comprend ; qu'ainsi, la décision portant rejet de la demande d'admission provisoire au séjour en vue de déposer une demande d'asile est intervenue au terme d'une procédure irrégulière et doit, pour ce motif, être annulée ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 mai 2011 par laquelle le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ; que, par suite, ce jugement doit être annulé ;

En ce qui concerne la décision du 30 juin 2011 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination :

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, la décision portant refus d'autorisation provisoire de séjour étant illégale, l'arrêté attaqué du 30 juin 2011 doit, par voie de conséquence, être annulé ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juin 2011 par lequel le préfet du Doubs a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que, par suite, ce jugement doit être annulé ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

6. Considérant que le présent arrêt, qui annule les décisions du 9 mai 2011 et du 30 juin 2011, implique qu'il soit enjoint au préfet du Doubs de délivrer à M. l'autorisation provisoire de séjour à laquelle il a droit en vertu de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que M. a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Jeannot, avocat de M. , renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Jeannot de la somme de 1 500 euros ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1101023-1101024 du 3 novembre 2011 du Tribunal administratif de Besançon est annulé.

Article 2 : La décision du 9 mai 2011 par laquelle le préfet du Doubs a refusé à M. l'admission provisoire au séjour est annulée, ainsi que l'arrêté du 30 juin 2011 par lequel le préfet du Doubs a rejeté la demande de titre de séjour de M. , a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Doubs de délivrer à M. une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation au regard de son droit au titre de séjour au vu des circonstances de droit et de fait existant à la date de ce réexamen, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 4 : L'Etat versera à Me Jeannot la somme de 1 500 (mille cinq cents euros) en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me Jeannot renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. Mamed et au ministre de l'intérieur.

Une copie sera adressée au préfet du Doubs

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N° 12NC00489


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC00489
Date de la décision : 08/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme HERBELIN
Rapporteur ?: M. Jean-Marc FAVRET
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : JEANNOT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-11-08;12nc00489 ?
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