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08/11/2012 | FRANCE | N°12NC00315

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 08 novembre 2012, 12NC00315


Vu la requête, enregistrée le 22 février 2012, présentée par Mme Manya épouse , demeurant c/o CADA ADOMA 1, rue des Canonniers à Strasbourg (67100), par Me Schweitzer, avocat ;

Mme demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103445 du 22 septembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 avril 2011 par lequel le préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annul

er, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui d...

Vu la requête, enregistrée le 22 février 2012, présentée par Mme Manya épouse , demeurant c/o CADA ADOMA 1, rue des Canonniers à Strasbourg (67100), par Me Schweitzer, avocat ;

Mme demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103445 du 22 septembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 avril 2011 par lequel le préfet du Bas-Rhin lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'intervalle, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Mme soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de séjour :

- la décision est insuffisamment motivée dès lors que le préfet n'a nullement pris en compte sa situation personnelle ;

- la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ne prend pas en compte sa situation familiale, la présence en France de son mari malade et de ses deux enfants, la très bonne intégration de sa famille en France et l'absence de liens avec son pays d'origine ;

- le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour ; elle est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- sa nationalité ou le pays dans lequel elle serait légalement admissible restant indéterminés, elle n'a pas pu formuler ses objections quant au choix du pays à destination duquel elle doit être renvoyée ;

- son retour en Russie l'exposerait à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- son fils a obtenu le bénéficie du statut de réfugié par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 24 mai 2011 ;

Vu la décision du président du bureau d'aide juridictionnelle statuant seul, en date du 19 janvier 2012, admettant Mme au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu, enregistré le 11 juin 2012, le mémoire en défense présenté par le préfet du Bas-Rhin, qui conclut au rejet de la requête ;

Le préfet soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ; que l'arrêté litigieux est suffisamment motivé ; qu'il n'est pas établi que la requérante et sa famille ne pourraient poursuivre leur vie familiale hors de France ni qu'elle serait exposée à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour en Arménie, pays dont elle a déclaré avoir la nationalité ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 2012 :

- le rapport de Mme Fischer-Hirtz, président,

- et les observations de Me Andréini substituant Me Schweitzer, représentant Mme ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

1. Considérant, en premier lieu, qu'au soutien de sa critique du jugement attaqué, Mme se borne à reprendre, pour contester l'arrêté portant refus de titre de séjour, ses moyens de première instance tirés, d'une part, de ce que l'arrêté litigieux serait insuffisamment motivé et, d'autre part, de ce qu'en refusant de lui délivrer le titre de séjour sollicité, le préfet du Bas-Rhin aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus à bon droit et qu'il y a lieu d'adopter, commis une erreur en écartant de tels moyens ;

2. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté contesté : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " :

3. Considérant que Mme , qui invoque la présence sur le territoire français de son mari et de leurs deux enfants, respectivement âgés de 11 ans et de 9 ans et scolarisés, fait valoir qu'elle s'est bien intégrée et bénéficie d'une prise en charge par l'association CADA pour apprendre le français ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressée est entrée irrégulièrement en France en 2009, selon ses déclarations, que son mari se trouve également en situation irrégulière et qu'aucun obstacle ne s'oppose à la reconstitution de la cellule familiale dans son pays d'origine où il n'est d'ailleurs nullement établi que la requérante serait dépourvue de toute attache ; que, dans ces conditions, Mme n'établit pas que la décision refusant de l'admettre au séjour aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, contrairement aux allégations de la requérante, la décision contestée n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est entachée d'aucune erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

4. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient la requérante, et ainsi qu'il vient d'être dit, l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour n'est pas établie ; que, dès lors, la requérante n'est pas fondée à exciper de son illégalité pour contester la décision par laquelle le préfet l'a obligée à quitter le territoire ;

5. Considérant, en second lieu, que les moyens tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation, qui se fondent sur la même argumentation que celle développée au soutien des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doivent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges ; que, si Mme soutient également qu'en l'obligeant à quitter le territoire national, le préfet du Bas-Rhin aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle compte tenu de l'état de santé de son mari, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé d'Alsace, que le mari de la requérante peut bénéficier de soins appropriés à son état dans son pays ; que, dans ces conditions, le moyen doit être écarté ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

6. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants" ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; que si Mme soutient, pour la première fois en appel, qu'elle serait de nationalité indéterminée, il ressort des pièces du dossier et notamment de celles produites au soutien de sa demande d'asile présentée devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, qu'elle est originaire d'Arménie ; que, dans ces conditions, et alors qu'elle ne produit aucun élément de nature à établir qu'un retour en Arménie l'exposerait des traitements inhumains ou dégradants, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 avril 2011 du préfet du Bas-Rhin ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la demande de Mme , n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Manya épouse et au ministre de l'intérieur.

Une copie sera adressée au préfet du Bas-Rhin.

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12NC00315


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC00315
Date de la décision : 08/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme HERBELIN
Rapporteur ?: Mme Catherine FISCHER-HIRTZ
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SCHWEITZER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-11-08;12nc00315 ?
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