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08/11/2012 | FRANCE | N°12NC00057

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 08 novembre 2012, 12NC00057


Vu la requête, enregistrée le 10 janvier 2012, présentée pour Mme Véronique A, demeurant ..., par Me Vonfelt ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103456 du 23 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant, d'une part, à annuler la décision du 1er juin 2011 par laquelle le directeur des opérations des ressources humaines de La Poste a prononcé à son encontre la sanction de la révocation et, d'autre part, à enjoindre à La Poste de la rétablir dans ses fonctions sous astreinte de 1 000 euros par j

our de retard et de procéder au versement de sa rémunération complète depuis ...

Vu la requête, enregistrée le 10 janvier 2012, présentée pour Mme Véronique A, demeurant ..., par Me Vonfelt ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103456 du 23 novembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant, d'une part, à annuler la décision du 1er juin 2011 par laquelle le directeur des opérations des ressources humaines de La Poste a prononcé à son encontre la sanction de la révocation et, d'autre part, à enjoindre à La Poste de la rétablir dans ses fonctions sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard et de procéder au versement de sa rémunération complète depuis le 15 juillet 2005 ;

2°) d'annuler la décision du 1er juin 2011 ;

3°) d'enjoindre à La Poste de la rétablir dans ses fonctions sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de procéder au versement de sa rémunération complète depuis le 15 juillet 2005 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la décision contestée est insuffisamment motivée ;

- le conseil de discipline n'a pas été informé des motifs de la sanction ;

- La Poste ne pouvait pas lui infliger une nouvelle sanction à raison des faits ayant déjà donné lieu à une sanction annulée par le juge ;

- dès lors qu'elle avait bénéficié d'un jugement de relaxe rendu par le tribunal correctionnel de Mulhouse le 10 septembre 2009, l'administration ne pouvait pas lui infliger une sanction disciplinaire pour les mêmes faits ;

- la matérialité des faits qui lui sont reprochés n'est pas établie, et le doute doit lui profiter ; on ne peut pas lui reprocher le non respect de procédures qu'elle n'était pas censée connaître, car elles ne correspondaient pas à ses fonctions habituelles ; d'autres agents impliqués dans les retraits d'argent litigieux n'ont pas été inquiétés ;

- il n'est pas démontré que M. B et Mme C auraient subi un préjudice ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2012, présenté par La Poste, qui conclut au rejet de la requête de Mme A et à ce que soit mise à la charge de Mme A une somme de 2 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

- la décision attaquée est suffisamment motivée ;

- à supposer même que le conseil de discipline n'ait pas été informé des motifs de la révocation, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ;

- le principe non bis in idem est inapplicable en l'espèce ;

- le jugement du tribunal correctionnel de Mulhouse du 10 septembre 2009 n'interdisait pas à l'administration d'infliger une sanction disciplinaire à l'intéressée, dès lors que la cour d'appel a confirmé la relaxe au seul bénéfice du doute ;

- la matérialité des faits reprochés à la requérante est établie ;

- la sanction n'est pas manifestement disproportionnée ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 22 mars 2012, présenté pour Mme A, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et à France Télécom ;

Vu le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat ;

Vu le décret n° 90-1111 du 12 décembre 1990 portant statut de La Poste.

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 octobre 2012 :

- le rapport de M. Favret, premier conseiller,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me Heaulme substituant Me Vonfelt, avocat de Mme A, présente à l'audience ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

1. Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu d'adopter le motif retenu par les premiers juges pour écarter le moyen de Mme A tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de La Poste du 1er juin 2011 la révoquant de ses fonctions ;

2. Considérant, en deuxième lieu, qu'à la supposer avérée, la circonstance que le conseil de discipline n'ait pas été informé des motifs de la décision en litige, conformément aux dispositions de l'article 8 du décret du 25 octobre 1984, est sans incidence sur sa légalité ;

3. Considérant, en troisième lieu, qu'il y a lieu d'adopter le motif retenu par les premiers juges pour écarter le moyen de la requérante tiré de ce que La Poste ne pouvait pas lui infliger une nouvelle sanction à raison des faits ayant déjà donné lieu à une sanction annulée par le juge ;

4. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 66 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, applicable aux agents titulaires de La Poste en vertu de l'article 29 de la loi du 2 juillet 1990 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. (...) Troisième groupe : - la rétrogradation ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans. (...) L'exclusion temporaire de fonctions, qui est privative de toute rémunération, peut être assortie d'un sursis total ou partiel. Celui-ci ne peut avoir pour effet, dans le cas de l'exclusion temporaire de fonctions du troisième groupe, de ramener la durée de cette exclusion à moins de un mois " ;

5. Considérant, d'une part, que, si les faits constatés par le juge pénal et qui commandent nécessairement le dispositif d'un jugement ayant acquis force de chose jugée s'imposent au juge administratif, la même autorité ne saurait s'attacher aux motifs d'un jugement de relaxe tirés de ce que les faits reprochés ne sont pas établis ou de ce qu'un doute subsiste sur leur réalité ; qu'il appartient, dans ce cas, à l'autorité administrative puis, le cas échéant, au juge administratif d'apprécier si les mêmes faits sont établis ; qu'il ressort des pièces du dossier que le tribunal correctionnel de Mulhouse a, par jugement du 10 septembre 2009, confirmé par arrêt de la cour d'appel de Colmar du 15 octobre 2010, prononcé la relaxe de Mme A, au motif qu'il subsistait un doute sur la matérialité des faits dénoncés dans les poursuites pénales ; que, dans ces conditions, le tribunal administratif de Strasbourg n'a pas méconnu l'autorité de la chose jugée par le juge pénal en estimant que les pièces du dossier ont permis d'établir que l'intéressée avait fait preuve de graves négligences en permettant à un client non identifié de procéder, sur le compte d'un tiers, à un premier retrait de 3 600 euros le 11 juin 2004, puis à un second retrait de 10 301,69 euros le 18 juin 2004, sans procéder à la vérification de l'identité de la personne prétendument à l'origine de ces retraits tout en apposant la mention " Vu CNI " sur les bordereaux de retrait ;

6. Considérant, d'autre part, que la matérialité des faits ayant motivé la révocation en litige prononcée à l'encontre de la requérante, qui ne peut sérieusement soutenir qu'elle ignorait les procédures à respecter à l'occasion de retraits effectués par les clients de La Poste, et dont les déclarations au cours de son audition du 13 mai 2005 révèlent de sérieuses contradictions, est établie par les pièces du dossier ; que ces faits sont constitutifs de fautes de nature à justifier une sanction disciplinaire ; qu'eu égard à leur gravité, la sanction de révocation prononcée par La Poste ne peut être regardée comme entachée d'une disproportion manifeste ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

8. Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions aux fins d'injonction de Mme A ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;

Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de La Poste, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme A demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A une somme à verser à La Poste au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de La Poste tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A et à La Poste.

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N°12NC00057


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12NC00057
Date de la décision : 08/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09 Fonctionnaires et agents publics. Discipline.


Composition du Tribunal
Président : Mme HERBELIN
Rapporteur ?: M. Jean-Marc FAVRET
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : VONFELT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-11-08;12nc00057 ?
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