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31/05/2012 | FRANCE | N°11NC00347

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 31 mai 2012, 11NC00347


Vu la décision n° 324147 en date du 18 janvier 2011, enregistrée au greffe de la Cour le 2 mars 2011 sous le n° 11NC00347, par laquelle le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la Cour du 17 novembre 2008 et a renvoyé l'affaire à la Cour administrative d'appel de Nancy ;

Vu la requête, enregistrée le 19 octobre 2007, complétée par un mémoire enregistré le 1er avril 2008, présentée pour Mme Bouana A, demeurant chez Mme B, ..., par Me Baumont, avocat ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 20 septembre 2007 par lequel le Tribunal administrat

if de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 mai 200...

Vu la décision n° 324147 en date du 18 janvier 2011, enregistrée au greffe de la Cour le 2 mars 2011 sous le n° 11NC00347, par laquelle le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la Cour du 17 novembre 2008 et a renvoyé l'affaire à la Cour administrative d'appel de Nancy ;

Vu la requête, enregistrée le 19 octobre 2007, complétée par un mémoire enregistré le 1er avril 2008, présentée pour Mme Bouana A, demeurant chez Mme B, ..., par Me Baumont, avocat ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 20 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 mai 2007 du préfet du Territoire de Belfort lui refusant le renouvellement de sa carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 22 mai 2007 ;

3°) d'ordonner une expertise avant-dire droit ;

4°) d'enjoindre au préfet du Territoire de Belfort, en application des dispositions des articles L. 911-1, L. 911-2 et L. 911-3 du code de justice administrative :

- à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire assortie d'une astreinte de 50 € par jour de retard à compter d'un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

- à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour assortie d'une astreinte de 50 € par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la motivation de l'arrêté attaqué est insuffisante et comporte des données de fait erronées ;

- le préfet s'est fondé sur un avis du médecin inspecteur de santé publique insuffisamment motivé pour prendre sa décision de refus de renouvellement de titre de séjour ;

- la commission du titre de séjour aurait dû être saisie préalablement à la décision de refus de renouvellement du titre de séjour qui lui a été opposée ;

- elle avait droit au renouvellement de sa carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " en raison de son état de santé ;

- le refus de séjour lui a été opposé afin de faire obstacle au dépôt d'une demande de délivrance d'un certificat de résidence valable 10 ans ;

- elle peut prétendre à la délivrance d'un certificat de résidence en tant qu'ascendante à charge d'un ressortissant français ;

- les décisions attaquées portent atteinte aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, aux dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'illégalité de la décision de refus de renouvellement du titre de séjour prive de base légale la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 26 novembre 2007 et 21 juillet 2008, par lesquels le préfet du Territoire de Belfort conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- le médecin inspecteur de la santé publique a suffisamment motivé son avis ;

- la décision de refus de séjour indique de manière suffisamment précise les circonstances de fait et de droit qui la justifient ;

- la commission du titre de séjour n'avait pas à être saisie ;

- Mme A peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et voyager sans effet néfaste sur sa santé ;

- Mme A ne peut être considérée comme à la charge de ses enfants résidant en France ;

- Mme A a encore de nombreuses attaches familiales en Algérie et ne peut se prévaloir d'une atteinte aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les décisions attaquées ne portent pas une atteinte excessive au droit de Mme A au respect de sa vie familiale et ne sont pas entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui vise expressément l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, est suffisamment motivée ;

- Mme A ne peut valablement invoquer une illégalité de la décision de refus de séjour ;

Vu les lettres en date du 10 mars 2011 par lesquelles le greffe a invité les parties à produire leurs observations ;

Vu l'ordonnance en date du 13 février 2012 par laquelle le président de la 2ème chambre a fixé au 23 février 2012 la clôture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades prévus à l'article 7-5 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2012 :

- le rapport de Mme Fischer-Hirtz, président,

- et les conclusions de M. Féral, rapporteur public ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire (...) " ;

Considérant qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage l'éloignement d'un étranger du territoire national, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin inspecteur, devenu médecin de l'agence régionale de santé, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays de renvoi ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement décider l'éloignement de l'étranger que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans le pays de renvoi ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que dans un avis en date du 4 mai 2007, le médecin inspecteur de santé publique a indiqué que si l'état de santé de Mme A, ressortissante algérienne, entrée en France le 10 juillet 2002, nécessite une prise en charge médicale, dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressée peut bénéficier dans son pays d'origine d'un traitement approprié ; que Mme A soutient, sans être contredite, qu'en cas de retour en Algérie, elle ne disposerait pas de ressources suffisantes pour bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; qu'en se bornant à faire valoir que Mme A n'était pas isolée dans son pays d'origine, le préfet n'établit pas que l'intéressée pouvait bénéficier d'un traitement approprié en Algérie ; que, par suite, la décision du 20 mai 2007 par laquelle le préfet du Territoire de Belfort lui a refusé le renouvellement de son certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, cette décision doit être annulée ainsi que, par voie de conséquence, les décisions du même jour faisant obligation à Mme A de quitter le territoire français et désignant le pays à destination duquel elle serait renvoyée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui annule l'arrêté du préfet du Territoire de Belfort du 22 mai 2007 implique seulement qu'il soit enjoint au préfet du Territoire de Belfort de réexaminer la situation de Mme A au regard de son droit au titre de séjour au vu des circonstances de droit et de fait existant à la date de ce réexamen, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de Mme A tendant au remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 07NC01424 du 20 septembre 2007 du Tribunal administratif de Besançon est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet du Territoire de Belfort du 22 mai 2007 refusant de renouvellement à Mme A de son certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale ", lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Territoire de Belfort de réexaminer la situation de Mme A dans le délai d'un mois suivant la notification qui lui sera faite du présent arrêt.

Article 4 : Les conclusions de Mme A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Bouana A et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet du Territoire de Belfort.

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11NC00347


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC00347
Date de la décision : 31/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Droits civils et individuels - Convention européenne des droits de l'homme - Droits garantis par la convention - Droit au respect de la vie privée et familiale (art - 8) - Violation - Séjour des étrangers.

Étrangers - Séjour des étrangers - Autorisation de séjour - Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: Mme Catherine FISCHER-HIRTZ
Rapporteur public ?: M. FERAL
Avocat(s) : BAUMONT ;

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-05-31;11nc00347 ?
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