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31/05/2012 | FRANCE | N°10NC01852

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 31 mai 2012, 10NC01852


Vu la requête enregistrée le 30 novembre 2010, complétée par un mémoire enregistré le 11 juillet 2011, présentée pour M. et Mme Didier A, demeurant ... représenté par Me Debray, avocat ;

M. et Mme Didier A demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0704588 du 28 octobre 2010 du Tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a, en son article 2, rejeté le surplus de leurs conclusions tendant à la décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel ils ont été assujettis au titre de l'année 2003 et en tant qu'il a omis de statuer sur leurs conclu

sions présentées au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative...

Vu la requête enregistrée le 30 novembre 2010, complétée par un mémoire enregistré le 11 juillet 2011, présentée pour M. et Mme Didier A, demeurant ... représenté par Me Debray, avocat ;

M. et Mme Didier A demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0704588 du 28 octobre 2010 du Tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a, en son article 2, rejeté le surplus de leurs conclusions tendant à la décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel ils ont été assujettis au titre de l'année 2003 et en tant qu'il a omis de statuer sur leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761 1 du code de justice administrative ;

2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

M. et Mme A soutiennent que :

- le jugement est irrégulier car les premiers juges ont omis de statuer sur leurs conclusions tendant à l'allocation d'une somme de 3 000 euros qu'ils avaient demandée en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

- l'activité de restauration de la maison d'hôtes " Moana " est éligible aux dispositions de l'article 199 undecies B du code général des impôts dès lors qu'elle se rattache directement aux activités du secteur hôtelier, que le décret du 14 février 1986 dispose que les hôtels de tourisme peuvent comporter un service de restauration et que l'administration fiscale admet, dans son instruction 5-B-20-86 du 7 novembre 1986 reprise dans son instruction 5-B-2425 n° 16 du 1er septembre 1999 que l'ensemble des investissements amortissables nécessaires à la réalisation des activités d'hébergement et de restauration est susceptible d'ouvrir droit à la déduction ;

- les travaux du musée effectués au rez-de-chaussée de la maison d'hôtes qui s'intègrent directement et à titre principal à l'activité hôtelière, doivent bénéficier de l'avantage fiscal de l'article 199 undecies B du code général des impôts ;

- la réalisation de la maison " Moana " s'inscrit dans le cadre des objectifs de développement du site touristique naturel de l'Anse Couleuvre dont elle constitue un équipement permettant d'en développer le caractère attractif au sens de l'instruction 5-B-20-86 du 7 novembre 1986 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 mai 2011, présenté pour le Ministre du budget, des comptes publics et de la réforme d'Etat ; le ministre conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que le secteur de la restauration est exclu du dispositif d'incitation fiscale de l'article 199 undecies B du code général des impôts et que sont également exclues du bénéfice de l'aide fiscale les activités de loisirs, sportives et culturelles à l'exception de celles qui s'intègrent directement et à titre principal à une activité hôtelière ou touristique ; qu'en l'espèce, la table d'hôtes ne répond pas à la définition d'un restaurant classé de tourisme et le musée ne s'intègre pas à une activité touristique ; que le service de restauration ne peut être regardé comme se rattachant directement au service hôtelier dans la mesure où il a une existence propre et une activité indépendante de celle des chambres d'hôtes ; que le musée constitue une prestation accessoire à la prestation de restauration et ne constitue pas une activité indépendante qui s'intègre directement à l'activité hôtelière ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2012 :

- le rapport de Mme Fischer-Hirtz, président,

- et les conclusions de M. Féral, rapporteur public ;

Sur les conclusions relatives au bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article 199 undecies B du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur : " I. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B peuvent bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à raison des investissements productifs neufs qu'ils réalisent dans les départements d'outre-mer, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française, dans les îles Wallis-et-Futuna et les Terres australes et antarctiques françaises, dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité agricole ou une activité industrielle, commerciale ou artisanale relevant de l'article 34. Toutefois, n'ouvrent pas droit à la réduction d'impôt les investissements réalisés dans les secteurs d'activité suivants : /(...).b) La restauration, à l'exception des restaurants de tourisme classés, les cafés, débits de tabac et débits de boissons ; /(...).j) Les activités de loisirs, sportives et culturelles, à l'exception, d'une part, de celles qui s'intègrent directement et à titre principal à une activité hôtelière ou touristique et ne consistent pas en l'exploitation de jeux de hasard et d'argent et, d'autre part, de la production et de la diffusion audiovisuelles et cinématographiques." ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme A ont réalisé en 2003 et 2004 des investissements productifs neufs portant sur l'aménagement et l'équipement de la maison d'hôtes " Moana " située à l'Anse Couleuvre sur le territoire de la commune de Prêcheur en Martinique ; que devant la Cour, les contribuables contestent la reprise de la réduction d'impôt sur le revenu dont ils avaient bénéficié au titre de l' année 2003 à raison d'investissements, d'un montant de 152 485 euros hors taxes, afférents à l'ameublement de la table d'hôtes d'une capacité de quarante couverts et aux équipements de cuisine, ainsi qu'à la décoration d'un " musée " organisé autour du thème du cacao ;

S'agissant des investissements afférents à la table d'hôtes :

Considérant, en premier lieu, que les investissements litigieux réalisés dans le cadre de l'aménagement et de l'équipement de la table d'hôtes, dont il n'est ni établi ni même allégué qu'il s'agirait d'un restaurant de tourisme classé, sont afférents à une activité de restauration ; qu'ainsi, ils ne sauraient ouvrir droit au bénéfice de la réduction d'impôt sur le revenu prévue par les dispositions susrappelées de l'article 199 undecies B du code général des impôts dès lors que le secteur de la restauration en est expressément exclu ;

Considérant, en second lieu, que si l'instruction administrative du 7 novembre 1986, dont les dispositions ont été reprises et intégrées au paragraphe 16 de la documentation de base 5 B-2425, admet qu'un service de restauration inclus dans un hôtel se rattache directement aux activités du secteur hôtelier susceptible d'ouvrir droit à la déduction, la même instruction précise que le secteur de l'hôtellerie se limite aux seuls hôtels classés de tourisme et aux centres classés " villages de vacances " dans la catégorie desquels la maison d'hôtes " Moana " n'entre pas ; que dans ces conditions, M. et Mme A ne peuvent utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L 80 A du livre des procédures fiscales, de cette doctrine pour demander la restitution de l'imposition litigieuse ;

S'agissant des investissements afférents à l'aménagement du musée :

Considérant, en premier lieu, que pour contester la réintégration dans leurs revenus imposables des investissements afférents à la réalisation d'un " musée " sis au rez-de-chaussée de la maison d'hôtes, les requérants soutiennent que les travaux réalisés pour cette activité culturelle s'intègrent directement et à titre principal à l'activité hôtelière de la maison d'hôtes ; que, toutefois, et à supposer que l'aménagement, dans les conditions susdécrites, d'une galerie d'objets anciens consistant dans la mise en place de gravures d'époque, de panneaux explicatifs et d'objets artisanaux décoratifs, puisse être rattaché à une activité culturelle, il n'est nullement établi qu'une telle activité, qui est proposée à l'ensemble de la clientèle de l'établissement composé de quatre chambres d'hôtes et d'une table d'hôtes d'une capacité totale de quarante couverts, soit directement et principalement intégrée à son activité hôtelière ;

Considérant, en second lieu que si les requérants soutiennent que le " musée " qui a été installé dans la maison d'hôtes s'inscrit dans le programme de développement du site naturel et historique de l'Anse Couleuvre, notamment par la réhabilitation progressive de l'ensemble des immeubles et des moyens de production du café et du cacao permettant ainsi d'en développer le caractère attractif, il résulte de ce qui vient d'être dit ci-dessus que les dépenses engagées ne sont pas susceptibles d'ouvrir droit à réduction d' impôts dès lors qu'elles ne s'intègrent pas directement et principalement à son activité hôtelière ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

Considérant qu'il ressort des motifs du jugement attaqué que le tribunal administratif a omis de statuer sur les conclusions présentées par M. et Mme A, dans un mémoire enregistré le 29 juin 2010, tendant à ce que, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat ; que, par suite, le jugement attaqué doit, dans cette mesure, être annulé

S'agissant de la demande présentée en première instance :

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme A devant le Tribunal administratif de Strasbourg ; que dans la mesure où, devant les premiers juges les prétentions de M. et Mme A ont été pour partie accueillies, il n'est pas équitable de laisser à leur charge l'intégralité des frais qu'ils ont exposés ; que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de leur allouer une indemnité de mille euros ;

S'agissant de la demande présentée en appel :

Considérant que les dispositions précitées font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas principalement dans la présente instance la partie perdante, la somme sollicitée par M. et Mme A au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. et Mme A sont seulement fondés à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il a omis de statuer sur leur demande tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et à bénéficier à ce titre d une somme de 1000 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 14 octobre 2010 est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions de M. et Mme A présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 2 : L'Etat versera à M. et Mme A une somme de mille euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais exposés par eux devant le Tribunal administratif de Strasbourg.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête et de la demande de M. et Mme A est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Didier A et au ministre de l'économie, des finances et du commerce extérieur.

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10NC01852


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10NC01852
Date de la décision : 31/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Analyses

19-04-01-02-05-03 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu. Établissement de l'impôt. Réductions d'impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: Mme Catherine FISCHER-HIRTZ
Rapporteur public ?: M. FERAL
Avocat(s) : DEBRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-05-31;10nc01852 ?
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