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27/02/2012 | FRANCE | N°11NC01483

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 27 février 2012, 11NC01483


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 septembre 2011, complétée par un mémoire enregistré le 14 novembre 2011, présentée pour M. Frédérick A, demeurant 6 Rue de Nay à Bordères (64800) par la SCP d'avocats ACG et associés ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000827 en date du 7 juillet 2011 par lequel le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision référencée 48SI du 5 mars 2010 par laquelle le ministre de l'intérieur a prononcé

l'invalidation de son titre de conduite et lui a enjoint de le restituer ;

2°) d...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 septembre 2011, complétée par un mémoire enregistré le 14 novembre 2011, présentée pour M. Frédérick A, demeurant 6 Rue de Nay à Bordères (64800) par la SCP d'avocats ACG et associés ; M. A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000827 en date du 7 juillet 2011 par lequel le magistrat désigné par le Président du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision référencée 48SI du 5 mars 2010 par laquelle le ministre de l'intérieur a prononcé l'invalidation de son titre de conduite et lui a enjoint de le restituer ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de reconstituer le capital de points affecté à son permis de conduire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- les premiers juges n'ayant pas statué sur son moyen tiré de l'exception d'illégalité du retrait de points opéré à la suite de l'infraction commise le 17 mars 2008, le jugement est irrégulier ;

- lors de la constatation des infractions relevées à son encontre le 8 mai 2007 et le 17 mars 2008, il n'a pas reçu les informations prévues par les articles L 223-3 et R 223-3 du code de la route ;

- le retrait de dix points opéré à la suite des deux infractions commises le 8 mai 2007 excède le plafond fixé par l'article L 223-2 du code de la route en cas d'infractions simultanées ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2011, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration qui conclut au rejet de la requête comme non fondée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 janvier 2012 :

- le rapport de M. Laubriat, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Féral, rapporteur public ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement :

Sur les conclusions relatives à la décision ministérielle 48 SI:

Considérant, d'une part, que l'article L. 223-1 du code de la route, dans sa rédaction en vigueur résultant de la loi du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière, dispose que : Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. / (...) Lorsque le nombre de points est nul, le permis perd sa validité. / La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive ; que l'article L. 223-2 du même code prévoit que : I. - Pour les délits, le retrait de points est égal à la moitié du nombre maximal de points. / II. - Pour les contraventions, le retrait de points est, au plus, égal à la moitié du nombre maximal de points. / III. - Dans le cas où plusieurs infractions entraînant retrait de points sont commises simultanément, les retraits de points se cumulent dans la limite des deux tiers du nombre maximal de points ; qu'aux termes de l'article L. 223-3 : Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L. 223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9. / Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification est dûment portée à sa connaissance ; il est également informé de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès (...) ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 223-3 dudit code, dans sa rédaction en vigueur résultant du décret du 11 juillet 2003 : I. - Lors de la constatation d'une infraction entraînant retrait de points, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L. 223-1. / II. -Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. Le droit d'accès aux informations ci-dessus mentionnées s'exerce dans les conditions fixées par les articles L. 225-1 à L. 225-9 (...) ; que la délivrance, au titulaire du permis de conduire à l'encontre duquel est relevée une infraction donnant lieu à retrait de points, de l'information prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route constitue une garantie essentielle donnée à l'auteur de l'infraction pour lui permettre, avant d'en reconnaître la réalité par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'exécution d'une composition pénale, d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis et éventuellement d'en contester la réalité devant le juge pénal ; qu'elle revêt le caractère d'une formalité substantielle et conditionne la régularité de la procédure au terme de laquelle le retrait de points est décidé ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tous moyens, de la remise d'un tel document ;

Considérant, d'autre part, que pour l'application des articles R 49-1 et R 49-10 du code de procédure pénale, il est prescrit depuis l'intervention de l'arrêté du 5 octobre 1999 relatif aux formulaires utilisés pour la constatation et le paiement des contraventions soumises à la procédure de l'amende forfaitaire que lorsqu'une contravention soumise à cette procédure est relevée avec interception du véhicule mais sans que l'amende soit payée immédiatement entre les mains de l'agent verbalisateur, ce dernier utilise un formulaire réunissant, en une même liasse autocopiante, le procès-verbal conservé par le service verbalisateur, une carte de paiement matériellement indispensable pour procéder au règlement de l'amende et l'avis de contravention, également remis au contrevenant pour servir de justificatif du paiement ultérieur, qui comporte une information suffisante au regard des exigences résultant des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; que, dès lors, le titulaire d'un permis de conduire à l'encontre duquel une infraction au code de la route est relevée au moyen d'un formulaire conforme à ce modèle et dont il est établi, notamment par la mention qui en est faite au système national des permis de conduire, qu'il a payé l'amende forfaitaire correspondant à cette infraction a nécessairement reçu l'avis de contravention ; qu'eu égard aux mentions dont cet avis est réputé être revêtu, l'administration doit alors être regardée comme s'étant acquittée envers le titulaire du permis de son obligation de lui délivrer les informations requises préalablement au paiement de l'amende, à moins que l'intéressé, à qui il appartient à cette fin de produire l 'avis qu'il a nécessairement reçu, ne démontre s'être vu remettre un avis inexact ou incomplet ; que toutefois, l'intervention de l'arrêté du 5 octobre 1999 ne garantit toutefois pas que des formulaires établis selon un modèle antérieur, où le document comportant les informations requises et celui nécessaire au paiement étaient entièrement distincts, n'aient pas continué à être utilisés pour la constatation des infractions ; que, par suite, la mention, au système national des permis de conduire, du paiement ultérieur de l'amende forfaitaire au titre d'une infraction relevée avec interception du véhicule ne permet donc au juge de considérer que le titulaire du permis a nécessairement reçu un avis de contravention que si elle est accompagnée de la production du procès-verbal de l'infraction, établissant que le formulaire employé est conforme aux dispositions des articles A. 37 à A. 37-4 du code de procédure pénale ;

Considérant que le ministre n'a pas produit les procès-verbaux de contravention établis lors de la constatation de l'infraction pour conduite d'un véhicule avec un taux d'alcoolémie supérieur à 0,25 mg/l et inférieur à 0,40 mg/l relevée à l'encontre de M. A le 8 mai 2007 à 22 H 00 ainsi que de celle relevée le 17 mars 2008 pour usage d'un téléphone par conducteur d'un véhicule en circulation ; qu'ainsi, il ne met pas le juge en mesure de vérifier la conformité de ces procès-verbaux au modèle prévu par les dispositions des articles A. 37 à A. 37-4 du code de procédure pénale ; qu'il suit de là que la seule mention, dans le relevé d'information intégral relatif à la situation du permis de conduire du contrevenant, du paiement des amendes forfaitaires afférentes à ces infractions ne permet pas de regarder l'administration comme apportant la preuve que le contrevenant a nécessairement reçu un avis de contravention comportant les informations prévues par les articles L 223-3 et R 223-3 du code de la route ;

Considérant qu'en vertu de l'article L 223-1 du code de la route, le permis de conduire ne perd sa validité qu'en cas de solde de points nul ; qu'un total de 14 points a été retiré du capital de points affecté au permis de conduire de M. A ; que compte tenu de l'illégalité entachant les décisions de retrait de 6 et 2 points prononcées à la suite des infractions commises les 8 mai 2007 et 17 mars 2008, M. A disposait encore, le 5 mars 2010 à la date d'édiction de la décision 48 SI, de 6 points ; qu'ainsi, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens relatifs à ces deux infractions, M. A est fondé à soutenir que la décision ministérielle du 5 mars 2010 est entachée d'une erreur de droit en tant qu'elle porte annulation de son titre de conduite pour défaut de point ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant que l'exécution du présent arrêt implique que l'administration restitue à M. A son titre de conduite et le crédite de six points ; que, dès lors, il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur, de restituer à M. A son titre de conduite crédité de six points dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous réserve que le requérant n'ait pas commis d'autres infractions ayant entraîné une perte de points faisant obstacle à cette restitution ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. A présentées sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons en Champagne en date du 7 juillet 2011 et la décision ministérielle du 5 mars 2010 portant invalidation du titre de conduite de M. A sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de restituer à M. A son titre de conduite crédité de six points dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sous réserve que M. A n'ait pas commis de nouvelles infractions ayant entraîné des retraits de points faisant obstacle à cette restitution.

Article 3 : Les conclusions de M. A tendant à la condamnation de l'Etat au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Frédérick A et au Ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Copie du présent arrêt sera adressé au préfet des Pyrénées-Atlantiques et au Procureur de la République près du tribunal de grande instance de Pau.

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N° 11NC01483


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11NC01483
Date de la décision : 27/02/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

49-04-01-04-025 Police administrative. Police générale. Circulation et stationnement. Permis de conduire.


Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: M. Alain LAUBRIAT
Rapporteur public ?: M. FERAL
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS ACG CHALONS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2012-02-27;11nc01483 ?
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