Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 12 mai 2010, présentée pour M. André A, demeurant ..., par Me Aube, avocat ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0701739 en date du 20 avril 2010 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande en décharge du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre des années 2001, 2002 et 2003 ainsi que des pénalités dont il a été assorti ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient :
- que l'administration a mis en recouvrement des impositions d'un montant supérieur à celui mentionné dans la proposition de rectification sans avoir procédé à une nouvelle notification et que les montants recouvrés sont erronés ;
- que les travaux effectués par la SCI CCCP constituent, non des dépenses d'amélioration, mais des dépenses de remise en état et aux normes d'un immeuble commercial et sont déductibles sur le fondement de l'article 31 du code général des impôts ;
- qu'il en est de même des dépenses effectuées par la SCI Claudot sur l'immeuble situé 23 rue Claudot à Nancy, dès lors qu'aucune surface nouvelle n'a été créée, qu'il n'y a pas de modification de destination et qu'il n'y a eu qu'une remise en état exigée par le bail signé par la société Manufacture communication ;
- que c'est à bon droit qu'il a déclaré en bénéfices non commerciaux, et non en bénéfices industriels et commerciaux, les produits de la sous-location de l'immeuble situé 15 rue Claudot à Nancy dont il n'était pas propriétaire et qui ne constituait donc pas un élément de l'actif de son activité de marchand de biens, contrairement à l'immeuble situé 23 rue Claudot, que l'administration et le tribunal administratif ont confondu avec celui situé au 15 de la même rue ;
- que c'est dès lors à tort que l'administration a appliqué à ces redressements les pénalités exclusives de bonne foi ;
- que la somme qu'il a déduite en 2003 au titre du solde d'une indemnité d'éviction due aux consorts Broda-Gilberg pour l'occupation d'un immeuble situé 7 place Mengin à Nancy, avait bien la nature d'une indemnité d'éviction versée en 2003 pour permettre un changement d'affectation des locaux équivalant à une éviction ;
- que le prix pour lequel il a vendu l'immeuble situé 7 place Mengin à la SCI AB n'est pas constitutif d'un acte anormal de gestion pour son entreprise de marchand de biens compte tenu de l'état de délabrement des locaux cédés ;
- que les parts de la SCI Maréchal Foch qu'il a transférées dans son patrimoine privé en 2003 étaient incessibles car incluses dans une indivision ; qu'elles n'avaient dès lors aucune valeur et que c'est à tort que l'administration s'est référée au prix du marché pour les évaluer ;
- qu'il ressort des justifications qu'il produit que les pénalités de mauvaise foi n'étaient pas justifiées ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 décembre 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ;
Le ministre conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 2011 :
- le rapport de Mme Stefanski, président,
- et les conclusions de M. Féral, rapporteur public ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors en vigueur :A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou dans la notification mentionnée à l'article L. 76, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications. Lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de rectification contradictoire l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai... ;
Considérant, en ce qui concerne l'année 2001, qu'il résulte de l'instruction que contrairement à ce que soutient M. A, l'avis d'imposition du 30 juin 2007 mentionne bien, conformément aux énonciations de la proposition de rectification du 22 décembre 2004, que l'impôt sur le revenu dû s'élève à 73 555 euros ; que si l'administration a abandonné, ainsi qu'elle en a en tout état de cause informé le contribuable dans la lettre du 30 octobre 2006, un redressement relatif à une somme de 250 000 francs regardée comme un avantage accordé à la SCI Dom Germain, cet abandon n'a eu d'effet que sur les impositions dues au titre de l'année 1999 ; qu'ainsi, le service n'a pas modifié les rehaussements et n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en ce qui concerne les années 2002 et 2003, qu'il résulte de l'instruction que les sommes mises en recouvrement par les deux avis successifs n'excèdent pas le montant des rappels notifiés et définitivement retenus après avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'ainsi, l'administration n'a pas méconnu l'obligation d'information contradictoire prévue par l'article L. 48 du livre des procédures fiscales ;
Sur le bien-fondé des impositions en litige :
En ce qui concerne les revenus fonciers :
Considérant qu'aux termes de l'article 31 du code général des impôts : I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : /1° Pour les propriétés urbaines : / a) Les dépenses de réparation et d'entretien, les frais de gérance et de rémunération des gardes et concierges, effectivement supportés par le propriétaire ... / b bis) Les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux professionnels et commerciaux destinées à protéger ces locaux des effets de l'amiante ou à faciliter l'accueil des handicapés, à l'exclusion des frais correspondant à des travaux de construction, de reconstruction ou d'agrandissement... ;
S'agissant des frais engagés par la SCI CCCP :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des factures jointes au dossier, que les travaux effectués par la SCI CCCP sur un immeuble à usage commercial lui appartenant ont notamment comporté la démolition et le remplacement de vitrines ainsi que de structures afin de permettre le remplacement d'un monte-charge, la réouverture d'une cage d'escalier, la création d'un local social et d'un mur de soutènement destiné à en supporter le dallage, des modifications de cloisons et, ainsi que le fait valoir M. A lui-même, le remplacement des canalisations du chauffage central et de radiateurs, d'un ascenseur et de matériel électrique afin de rendre ces installations conformes aux normes de sécurité applicables aux locaux ouverts au public ; que de tels travaux, qui ont permis de transformer des locaux commerciaux vétustes en une surface de vente de produits alimentaires constituent, eu égard à leur ampleur et à l'importance des éléments modifiés, des travaux d'amélioration et non de réparation ou d'entretien, sans lien avec la protection contre les effets de l'amiante ou l'accueil d'handicapés ; que les dépenses afférentes à ces travaux n'étaient, dès lors, pas déductibles ;
Considérant que M. A ne saurait utilement invoquer, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, la réponse n° 17862 faite le 4 décembre 1989 à M. Raynal, député, dans les prévisions desquelles sa situation n'entre pas tant au regard de l'impôt mentionné, que du type de local et des travaux concernés ;
S'agissant des frais engagés par la SCI Claudot :
Considérant qu'il résulte des pièces jointes au dossier ainsi que des allégations de M. A, que les travaux effectués par la SCI Claudot sur un immeuble lui appartenant situé 23 rue Claudot ont eu pour objectif de remettre en état des locaux vétustes et dégradés après deux ans d'abandon par leur précédent propriétaire et leur occupation par des squatters, afin d'en permettre l'usage par un nouveau professionnel ; que ces travaux ont notamment comporté l'aménagement d'une cage d'escalier, l'ouverture d'une porte intérieure, le remplacement de cloisons, de faux plafonds, de portes, de vitrages ; que, dans ces conditions, ils ont constitué des travaux d'amélioration, alors même qu'ils avaient pour objet de satisfaire une condition du bail conclu avec le nouvel occupant ; que les dépenses correspondantes n'étaient en conséquence pas déductibles sur le fondement de l'article 31 du code général des impôts ;
En ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux :
S'agissant des produits de la sous-location immobilière de l'immeuble situé 15 rue Claudot à Nancy :
Considérant qu'aux termes de l'article 155 du code général des impôts : Lorsqu'une entreprise industrielle ou commerciale étend son activité à des opérations dont les résultats entrent dans la catégorie des bénéfices de l'exploitation agricole ou dans celle des bénéfices des professions non commerciales, il est tenu compte de ces résultats pour la détermination des bénéfices industriels et commerciaux à comprendre dans les bases de l'impôt sur le revenu. ;
Considérant que M. A, qui exerce à titre prépondérant l'activité de marchand de biens imposable dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, a également une activité de sous-location d'un immeuble situé 15 rue Claudot à Nancy en vertu d'un contrat de bail commercial, consenti le 26 avril 1995 par le propriétaire des locaux ; que les produits de ces sous-locations sont versées sur les comptes bancaires de la profession de marchand de biens de M. A et enregistrés dans la comptabilité tenue à ce titre, avant d'être inscrits en tant que l'opérations diverses dans la comptabilité de l'activité de sous-location ; que dans ces conditions, les sous-locations présentent, au sens de l'article 155 du code général des impôts, un lien étroit avec les opérations de marchand de biens du contribuable ; que c'est, dès lors, à tort que M. A en a déclaré les recettes dans la catégorie des bénéfices non commerciaux et n'en a pas tenu compte pour la détermination des bénéfices industriels et commerciaux ;
S'agissant des charges relatives à l'immeuble situé 7 place Mengin à Nancy :
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire... ;
Considérant que M. A persiste à faire valoir, sans apporter d'éléments nouveaux, que la somme 919,33 euros qu'il a déduite en 2002 au titre de son activité de marchand de biens, correspond au solde d'une indemnité d'éviction d'un montant de 480 000 francs due aux consorts Gilberg, qui occupaient un immeuble situé 7 place Mengin à Nancy et qu'une telle indemnité est déductible l'année de son paiement ; que, toutefois, il résulte de l'instruction et notamment de l'arrêt de la Cour d'Appel de Nancy en date du 18 septembre 1995, produit d'ailleurs par le contribuable, que le montant en litige ne résulte pas d'une indemnité d'éviction mais du rachat, par exercice de leur droit de préemption, du fonds de commerce des consorts Gilberg auquel M. A et la SCI André A ont été condamnés, par l'arrêt de la Cour d'appel de Nancy du 18 septembre 1995, en qualité de propriétaires d'un immeuble situé 7 place Mengin à Nancy faisant l'objet d'un bail commercial ; qu'ainsi, la somme en litige, qui ne présente pas le caractère d'une charge, n'était pas déductible des résultats de l'année 2002 ;
S'agissant de l'acte anormal de gestion résultant de la vente en 1999 de l'immeuble situé 7 place Mengin la SCI André A :
Considérant qu'en 1999, M. A a vendu à la SCI André A, dont il était associé et gérant, un immeuble situé 7 place Mengin à Nancy pour un montant de 97 000 francs ; que pour faire valoir que ce montant était sous-évalué, l'administration se borne à soutenir que, s'agissant d'un immeuble situé en centre ville et à usage partiellement commercial, sa valeur vénale était au moins égale à sa valeur comptable à laquelle devait être ajouté le montant du droit au bail racheté aux consorts Gilberg, soit un total de 576 837,62 francs ; que, toutefois, le service n'apporte aucun élément relatif à la valeur vénale d'immeubles comparables du secteur ; que M. A soutient sans être contredit que l'immeuble était très dégradé et qu'il l'avait acquis pour un montant de 91 500 francs en 1991 ; que, dans ces conditions, l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe que le contribuable a cédé cet élément d'actif à un prix inférieur à sa valeur vénale ; que c'est, dès lors, a tort que le service a opéré un redressement à ce titre ;
S'agissant du profit réalisé à l'occasion du transfert en 2003 d'immeubles le patrimoine de M. A :
Considérant que le 31 décembre 2003, M. A a repris dans son patrimoine privé pour une valeur de 51 223, 91 euros, 1 176 parts de la SCI Maréchal Foch représentatives de deux appartements et leurs dépendances ; que pour démontrer que la valeur de ces parts était en réalité de 115 866 euros, l'administration apporte des éléments portant sur des ventes d'appartements comparables dans le même immeuble ou dans des immeubles proches au cours de la même année ou de l'année antérieure ; que M. A se borne à soutenir, sans apporter de preuve contraire, que les parts de la SCI étaient, lors de la reprise dans son patrimoine, encore détenues en indivision et n'avaient aucune valeur ; que dans ces conditions, l'administration établit que M. A a réalisé un profit correspondant à la différence entre ces deux sommes à l'occasion de ce transfert ;
Sur les pénalités :
Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré / b. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ou de dissimulation d'une partie du prix stipulé dans un contrat ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à l'issue d'un contrôle antérieur de l'activité de M. A, l'administration avait déjà prononcé des redressements, que le contribuable n'avaient pas contestés, relatifs à la déclaration à tort des produits de sous-locations dans le catégorie des bénéfices non commerciaux et non dans celle des bénéfices industriels et commerciaux ; que, compte tenu de l'ancienneté du litige, M. A ne pouvait ignorer que la somme de 480 000 francs ne constituait pas une indemnité d'éviction ; qu'ainsi, l'administration établit que les manquements commis par M. A étaient délibérés et justifiaient l'application de la majoration de 40 % prévue par l'article 1729 du code général des impôts ; que le requérant n'articule aucun moyen contre les autres pénalités appliquées par l'administration ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, pas le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande en tant qu'elle tendait à la décharge des redressements mis à sa charge au titre de l'année 2002 dans la mesure où ils ont pour origine le montant de la vente de l'immeuble situé 7 place Mengin à Nancy ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas pour l'essentiel la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à M. A la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : M. A est déchargé du complément d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 2002 et des pénalités correspondantes en tant qu'il procède de la vente de l'immeuble situé 7 place Mengin à Nancy.
Article 2 : Le jugement attaqué du Tribunal administratif de Nancy est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article précédent.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. André A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement.
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N°10NC00703