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05/12/2011 | FRANCE | N°10NC01478

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 05 décembre 2011, 10NC01478


Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2010 et complétée par le mémoire enregistré le 24 juin 2011, présentée pour la SCI ANTOINE, dont le siège est 240 Grand'Rue à Crainvilliers (88140), représentée par son gérant, par Me Joubert, avocat ; la SCI ANTOINE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901273 en date du 29 juin 2010 du Tribunal administratif de Nancy en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 28 octobre 2008 par laquelle la commission départementale d'aménagement foncier des Vosges a statué sur sa récla

mation relative aux opérations de remembrement de la commune de Crainvillier...

Vu la requête, enregistrée le 6 septembre 2010 et complétée par le mémoire enregistré le 24 juin 2011, présentée pour la SCI ANTOINE, dont le siège est 240 Grand'Rue à Crainvilliers (88140), représentée par son gérant, par Me Joubert, avocat ; la SCI ANTOINE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901273 en date du 29 juin 2010 du Tribunal administratif de Nancy en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 28 octobre 2008 par laquelle la commission départementale d'aménagement foncier des Vosges a statué sur sa réclamation relative aux opérations de remembrement de la commune de Crainvilliers ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- l'opération de remembrement entraîne une aggravation des conditions d'exploitation non seulement sur le compte n°6 mais également les comptes n° 8 et 9 dans la mesure où les parcelles D 58 et D 61 qui ne lui ont pas été attribuées coupent en deux la propriété, la parcelle B 79 est enclavée, un chemin d'exploitation a été créé au niveau de l'ancienne parcelle D 79 et l'absence d'attribution de terrain au nord de la parcelle ZD 37 l'empêchera d'obtenir le droit d'eau en vue du renouvellement de la pisciculture ;

- la règle de non éloignement du centre d'exploitation a été méconnue pour le compte n°6, lequel est anormalement morcelé ;

- la décision est entachée d'un détournement de pouvoir dès lors que certains membres de la commission communale ont obtenu entièrement satisfaction ;

- la règle d'équivalence posée à l'article L. 121-3 du code rural a été méconnue dès lors que des parcelles d'apports représentant 4 ha 53 a et 48 ca n'ont pas été comptabilisées, ce moyen non soulevé devant la commission départementale étant toutefois recevable ;

- l'apport de deux parcelles B 279 et B 289 sur lesquelles se trouvaient des vignes aurait dû entraîner l'attribution de parcelles également constituées de vignes ;

- les dispositions de l'article L. 123-19 du code rural ont été méconnues pour la parcelle B 78 ;

- la commission aurait dû tenir compte de la prescription acquisitive résultant de sa possession, pendant plus de trente ans, de la parcelle D 53 ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 juin 2011, présenté par le ministre de l'alimentation, de l'agriculture, de la pèche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire qui conclut au rejet de la requête ;

Le ministre soutient que :

- les conditions d'exploitation n'ont pas été aggravées alors que la requérante a bénéficié pour le compte n° 6 d'un bon regroupement et d'une diminution des distances ;

- les parcelles D 58 et D 61 ne coupent pas l'îlot attribué ;

- la parcelle cadastrée B 79 desservie par un chemin d'exploitation n'est pas enclavée ;

- le moyen tiré de ce que la création d'un chemin d'exploitation sur la parcelle ZB 14 conduirait à une aggravation des conditions d'exploitation est irrecevable dès lors qu'il n'a pas été présenté devant la commission départementale d'aménagement foncier ;

- la requérante ne démontre pas l'impossibilité de renouveler la pisciculture ;

- le moyen tiré du défaut de prise en compte de toutes les parcelles d'apport n'a pas été soulevé devant la commission départementale d'aménagement foncier ;

- les parcelles B 279 et 289 ne sont pas incluses dans une aire d'appellation d'origine contrôlée ;

- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 123-19 du code rural, au demeurant inapplicable en l'espèce, n'a pas été soulevé devant la commission départementale ;

- la requérante n'établit pas être devenue propriétaire de la parcelle D 53 ;

Vu l'ordonnance du 30 mai 2011 par laquelle le président de la quatrième chambre a fixé la clôture de l'instruction au 30 juin 2011 ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 novembre 2011, présenté pour la SCI ANTOINE par Me Joubert ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 novembre 2011 :

- le rapport de M. Wallerich, premier conseiller,

- les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public,

- et les observations de Me Demarest, conseil de la SCI ANTOINE ;

Sur la légalité de la décision contestée :

En ce qui concerne le moyen tiré de l'aggravation des conditions d'exploitation :

Considérant que l'article L. 123-1 du code rural dispose, dans sa rédaction alors applicable : Le remembrement, applicable aux propriétés rurales non bâties, se fait au moyen d'une nouvelle distribution des parcelles morcelées et dispersées. / Il a principalement pour but, par la constitution d'exploitations rurales d'un seul tenant ou à grandes parcelles bien groupées, d'améliorer l'exploitation agricole des biens qui y sont soumis. Il doit également avoir pour objet l'aménagement rural du périmètre dans lequel il est mis en oeuvre. / Sauf accord des propriétaires et exploitants intéressés, le nouveau lotissement ne peut allonger la distance moyenne des terres au centre d'exploitation principale, si ce n'est dans la mesure nécessaire au regroupement parcellaire. ; que le respect des règles posées par cet article doit s'apprécier compte par compte et non pour l'ensemble des parcelles constituant l'exploitation ;

S'agissant du compte n°6 :

Considérant que le compte n°6 est composé de sept parcelles d'attributions, qui ont été constituées en échange de soixante-neuf parcelles d'apports, réparties en trente-et-un îlots disséminés sur l'ensemble du périmètre de remembrement ; qu'en outre, la distance moyenne par rapport au centre d'exploitation des parcelles composant ce compte a été sensiblement diminuée dès lors qu'elle est passée de 801 mètres à 310 mètres ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la parcelle B 79 soit enclavée ; qu'ainsi, la SCI ANTOINE n'est pas fondée à soutenir que la commission départementale d'aménagement foncier des Vosges aurait méconnu pour ce compte les dispositions précitées de l'article L. 123-1 du code rural ;

S'agissant du compte n° 8 :

Considérant que ni la circonstance que les parcelles D 58 et D 61, qui constituent une enclave dans l'îlot, ne lui ont pas été attribuées, ni la création d'un chemin au niveau de l'îlot ZB 14, lequel permet l'accès aux parcelles voisines, ne sont pas de nature à révéler une aggravation des conditions d'exploitations de la société requérante, alors que le compte susvisé bénéficie d'un bon regroupement ;

S'agissant du compte n° 9 :

Considérant que si la SCI ANTOINE soutient que l'absence d'attribution de terrains au nord de la parcelle ZD 37 l'empêchera d'obtenir un droit d'eau en vue du renouvellement d'une pisciculture, elle n'apporte aucun élément justificatif à l'appui de ses allégations alors que l'ensemble des terrains d'apports situés dans ce secteur lui ont été réattribués ;

En ce qui concerne le moyen tiré du défaut d'attributions de vignes :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 123-1 du code rural, dans sa rédaction applicable à l'espèce : La commission communale ou intercommunale d'aménagement foncier détermine, en fonction de la vocation culturale des fonds, la ou les natures de culture à l'intérieur du périmètre de remembrement. / (...) ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les parcelles B 279 et B 289 fassent partie d'une aire de production de vins d'appellation d'origine contrôlée ; qu'ainsi, ces parcelles qui n'étaient, au demeurant, pas complantées de vignes ne correspondaient pas à une nature spéciale de culture ; que par suite, les dispositions susvisées ne faisaient pas obstacle à ce qu'elles soient échangées contre des parcelles relevant de l'unique nature de culture, terre , qui avait été retenue ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la violation de l'article R. 123-2 du code rural :

Considérant que les dispositions de l'article R. 123-2 du code rural, aux termes desquelles la commission fait procéder aux opérations nécessaires pour préciser la nature et l'étendue des droits de chaque propriétaire sur les parcelles soumises au remembrement et déterminer l'apport de chacun des intéressés en prenant pour base la surface cadastrale des propriétés ou, en cas de bornage ayant donné lieu à un procès-verbal, la contenance définie sur le plan de bornage publié ou sur ce procès-verbal , n'ont pas pour effet d'interdire aux propriétaires intéressés de faire la preuve de l'inexactitude des énonciations cadastrales ;

Considérant que si la SCI ANTOINE fait valoir qu'elle serait devenue propriétaire de la parcelle D 53 dès lors qu'elle remplit les conditions pour pouvoir bénéficier de la prescription acquisitive instituée par l'article 2272 du code civil, les pièces qu'elle produit ne permettent pas d'établir le caractère sérieux de sa contestation des énonciations cadastrales ; que, par suite, et sans qu'il y ait lieu de poser à la juridiction compétente une question préjudicielle sur l'existence, au profit de la requérante, d'un droit de propriété sur la parcelle D 53, le moyen tiré

de ce que la commission départementale d'aménagement foncier des Vosges aurait, à tort, rejeté cette contestation doit être écarté ;

En ce qui concerne les autres moyens :

Considérant que la SCI ANTOINE n'a soulevé, devant la commission départementale d'aménagement foncier des Vosges, ni le moyen tiré de ce que plusieurs parcelles dont elle est propriétaire n'auraient pas été incluses dans ses apports, ni celui tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 123-19 du code rural, ni celui de la méconnaissance des règles d'équivalence ; qu'elle n'était, dès lors, pas recevable à invoquer devant le juge de l'excès de pouvoir ces moyens qui ne sont pas relatifs à la régularité de la procédure ayant conduit à l'établissement du plan de remembrement ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision en date du 28 octobre 2008 qui n'est pas entachée de détournement de pouvoir ;

Sur les conclusions aux fins d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SCI ANTOINE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SCI ANTOINE est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI ANTOINE et au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire.

Copie sera adressée au préfet des Vosges.

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10NC01478


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10NC01478
Date de la décision : 05/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-04 Agriculture, chasse et pêche. Remembrement foncier agricole.


Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: M. Marc WALLERICH
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : SCP JOUBERT et DEMAREST

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2011-12-05;10nc01478 ?
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