La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/11/2011 | FRANCE | N°10NC01841

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 03 novembre 2011, 10NC01841


Vu la requête, enregistrée le 26 novembre 2010, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-MARNE ;

Le PREFET DE LA HAUTE-MARNE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901317 en date du 23 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la délibération en date du 12 février 2009 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes du pays du Der a fixé le montant de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères applicable en 2009 ;

2°) d'annuler ladite déli

bération ;

Il soutient que :

- la tarification retenue viole le principe d'égalité...

Vu la requête, enregistrée le 26 novembre 2010, présentée par le PREFET DE LA HAUTE-MARNE ;

Le PREFET DE LA HAUTE-MARNE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901317 en date du 23 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la délibération en date du 12 février 2009 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes du pays du Der a fixé le montant de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères applicable en 2009 ;

2°) d'annuler ladite délibération ;

Il soutient que :

- la tarification retenue viole le principe d'égalité entre les usagers ; l'intimée ne justifie pas que le coût de la collecte serait supérieur en zone rurale par rapport à la zone urbaine ; il n'existe pas de différences notables dans les conditions du service rendu ; elle ne démontre pas davantage que les communes soient classées correctement en zone urbaine et rurale ; il n'est pas démontré que les communes tarifées par foyer soient plus urbaines (habitat vertical) que certaines tarifées par habitants (habitat pavillonnaire) ; le rattachement de la commune de Sommevoire à la zone urbaine est notamment erroné ; au surplus, il n'est pas logique que les résidences principales et les résidences secondaires situées à Montiers en Der et Sommevoire soient traitées de manière identique alors que tel n'est pas le cas dans les autres communes ;

- la tarification retenue méconnaît le principe d'équivalence ou de proportionnalité ; l'intimée ne démontre pas qu'il existe un lien, pour chaque catégories d'usagers, entre les tarifs arrêtés et le coût supporté par le service ; par ailleurs, pour établir le montant de la redevance, il n'est pas tenu compte du volume de déchets enlevés ; n'est pas davantage pris en compte le coût de transport jusqu'au centre de traitement des déchets qui est situé près de Saint-Dizier ; Sommevoire et Montiers en Der sont distantes respectivement de 35 et 24 km de ce centre alors que Frampas n'en est éloigné que de 15 km ;

- la charge de la preuve du bien-fondé de la tarification retenue repose sur la communauté de communes du pays du Der ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 29 mars 2011, le mémoire en défense, présenté pour la communauté de communes du pays du Der, par Me Schidlowsky, avocate, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Elle soutient que :

- la délibération du 12 février 2009 se borne à réactualiser les tarifs fixés par la délibération n° 84/02 du 10 octobre 2002, suite à l'adhésion de la commune de Sommevoire ; elle est toujours applicable et n'a pas été contestée ;

- la distinction entre zone rurale et zone urbaine est légitime ; le coût de la collecte est différent selon que le linéaire est plus court et l'habitat plus vertical , comme à Montiers en Der et Sommevoire, ou que la population est moins dense sur le linéaire et ne comporte aucun habitat vertical , comme dans les autres communes la composant ; la tarification tient compte des spécificités géographiques et socio-démographiques ; le préfet de la Haute-Marne a accepté cette différenciation dans une lettre circulaire datée du 8 septembre 2009 ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 2011 :

- le rapport de M. Vincent, président de chambre,

- et les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public ;

Sur la légalité de la délibération du 12 février 2009 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2336-76 du code général des collectivités territoriales : Les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes qui bénéficient de la compétence prévue à l'article L. 2224-13 peuvent instituer une redevance d'enlèvement des ordures ménagères calculée en fonction du service rendu dès lors qu'ils assurent au moins la collecte des déchets des ménages. (...) / La redevance est instituée par l'assemblée délibérante de la collectivité locale ou de l'établissement public qui en fixe le tarif. / Ce tarif peut, en raison des caractéristiques de l'habitat, inclure une part fixe qui n'excède pas les coûts non proportionnels et prévoir, pour les résidences constituées en habitat vertical ou pavillonnaire, une redevance globale calculée en fonction du nombre de résidents ou de la masse des déchets produits exprimée en volume ou en poids. La personne morale ou physique chargée de la gestion de la résidence est alors considérée comme l'usager du service public et procède à la répartition de la redevance globale entre les foyers (...) ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'une communauté de communes ne peut fixer le tarif de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères qu'en fonction de l'importance du service rendu par ce service public industriel et commercial à chaque catégorie d'usagers , chacune d'elles regroupant, en fonction de critères objectifs et rationnels, des usagers se trouvant dans une situation identique, mais différente de celle des usagers des autres catégories, au regard du service rendu, mesuré notamment par les charges que génère la desserte de leur habitation ;

Considérant que, par délibération du 12 février 2009, le conseil communautaire de la communauté de communes du pays du Der a fixé les tarifs de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères applicable en 2009 aux usagers des communes membres ; qu'il a établi une tarification par foyer à hauteur de 107 euros pour les résidences principales et secondaires situées à Montiers en Der et Sommevoire et une tarification par habitant à hauteur de 89 euros pour les résidences principales situées dans les 9 autres communes ;

Considérant, d'une part, que, s'il n'est pas illégal par principe, comme l'a rappelé le PREFET DE LA HAUTE-MARNE par circulaire du 8 septembre 2009, de créer deux catégories d'usagers selon qu'ils se trouvent en zone urbaine ou en zone rurale, pour tenir compte de la densité de la population qui induit des charges différentes de collecte des déchets ménagers, il ressort des pièces du dossier que la commune de Sommevoire, qui a été placée, par la délibération querellée, en zone urbaine avec la commune de Montiers en Der, et dont il n'est pas soutenu que son habitat présenterait des caractéristiques spécifiques, ne présente qu'une densité de 23 habitants au kilomètre carré, alors que les communes de Planrupt et Longeville sur la Laines, qui ont des densités au kilomètre carré de respectivement 29 et 27 habitants, ont été considérées comme rurales ; que, par ailleurs, il n'est pas prétendu que la desserte des résidences principales et des résidences secondaires situées sur le territoire des communes de Sommevoire et de Montiers en Der générerait le même coût de collecte des déchets ménagers alors que le volume de déchets produits par une résidence secondaire est notablement inférieur à celui d'une résidence principale ; qu'ainsi, les catégories prévues par la délibération attaquée, qui, au demeurant, n'ont été définies qu'en fonction du seul critère sommaire du coût théorique de la desserte de l'habitation et non en fonction du volume des déchets ramassés, regroupent des usagers dont il n'est pas démontré qu'ils sont, eu égard au coût de l'enlèvement des ordures ménagères, dans une situation analogue au regard du service en cause ; que, dès lors, la communauté de communes du pays du Der a méconnu le principe d'égalité entre usagers du service public en fixant un même tarif pour des usagers ne se trouvant pas dans une situation identique ;

Considérant, d'autre part, que la communauté de communes du pays de Der, qui se borne à expliquer qu'elle répercute sur les usagers le coût du service tel qu'il résulte des factures établies par le prestataire qui assure le service, n'établit pas que les tarifs fixés pour chaque catégorie d'usagers correspondent au service qui leur est respectivement rendu ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA HAUTE-MARNE est fondé à soutenir que la délibération en date du 12 février 2009 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes du pays du Der a fixé le montant de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères, applicable en 2009, méconnaît les dispositions précitées de l'article L. 2336-76 du code général des collectivités territoriales ;

Sur les fins de non-recevoir opposées en première instance par la communauté de communes du pays du Der :

Considérant que le juge d'appel, auquel est déféré un jugement ayant rejeté au fond des conclusions sans que le juge de première instance ait eu besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées devant lui, ne peut faire droit à ces conclusions qu'après avoir écarté expressément ces fins de non-recevoir, alors même que le défendeur, sans pour autant les abandonner, ne les aurait pas reprises en appel ; qu'il y a ainsi lieu pour la Cour de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées en première instance par la communauté de communes du pays du Der ;

Considérant, d'une part, que la délibération du 12 février 2009 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes du pays du Der a fixé les tarifs de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères, applicables pour l'année 2009, ne se borne pas à actualiser , suite à l'adhésion de la commune de Sommevoire à compter du 1er janvier 2009, une précédente délibération en date du 29 octobre 2002, qui, au demeurant, avait été précédemment abrogée ; qu'elle est, par suite, décisoire et susceptible de faire l'objet d'un déféré préfectoral ;

Considérant, d'autre part, que la délibération en date du 12 février 2009 a été transmise au sous-préfet de l'arrondissement de Saint-Dizier le 20 février 2009 ; que le représentant de l'Etat, estimant cette décision contraire à la légalité, a demandé au président de la communauté de communes du pays du Der, par lettre du 17 avril 2009, de la rapporter ; que, par lettre du 11 mai 2009, réceptionnée en sous-préfecture le 19 mai suivant, le président de l'établissement public de coopération intercommunale a rejeté la demande du sous-préfet ; que, par suite, le recours gracieux effectué ayant eu pour effet d'interrompre le délai du déféré préfectoral, le recours formé par le PREFET DE LA HAUTE-MARNE, enregistré au greffe du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne le 17 juillet 2009, n'était pas tardif ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE LA HAUTE-MARNE est fondé à soutenir, quand bien même il n'aurait pas contesté les tarifications arrêtés au titre des années précédentes, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la délibération en date du 12 février 2009 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes du pays du Der a fixé le montant de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères applicable en 2009 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la communauté de communes du pays du Der au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0901317 en date du 23 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté le déféré du PREFET DE LA HAUTE-MARNE tendant à l'annulation de la délibération en date du 12 février 2009 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes du pays du Der a fixé le montant de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères applicable en 2009 est annulé.

Article 2 : La délibération en date du 12 février 2009 par laquelle le conseil communautaire de la communauté de communes du pays du Der a fixé le montant de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères applicable en 2009 est annulée.

Article 3 : Les conclusions formées par la communauté de communes du pays du Der tendant à la condamnation de l'Etat au paiement d'une somme au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DE LA HAUTE-MARNE et à la communauté de communes du pays du Der.

''

''

''

''

2

N° 10NC01841


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award