Vu la requête, enregistrée le 30 septembre 2010, présentée pour la SOCIETE FERME EOLIENNE DE LIART, dont le siège social est situé 20 avenue de la Paix à Strasbourg (67000), par Me Guiheux, avocat ; la SOCIETE FERME EOLIENNE DE LIART demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0801374 en date du 30 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 2 avril 2008, par lequel le préfet des Ardennes lui a refusé un permis de construire pour l'implantation de quatre éoliennes et d'un poste de livraison sur le territoire de la commune de Liart et à ce qu'il soit enjoint au préfet des Ardennes de procéder à un nouvel examen de la demande de permis de construire dans un délai de deux mois à compter du jugement ;
2°) de faire droit à sa demande de première instance et d'annuler l'arrêté, en date du 2 avril 2008, par lequel le préfet des Ardennes lui a refusé un permis de construire pour l'implantation de quatre éoliennes et d'un poste de livraison sur le territoire de la commune de Liart ;
3°) d'enjoindre, sous astreinte, au préfet des Ardennes de procéder à un nouvel examen de sa demande de permis de construire dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) à titre subsidiaire, si les éléments produits n'étaient pas suffisamment explicites, que les membres de la formation de jugement se transportent sur les lieux pour procéder à toute constatation utile, dans le cadre des dispositions de l'article R. 622-1 du code de justice administrative ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé et méconnaît ainsi les dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative ;
- l'arrêté litigieux, qui ne fait que reproduire littéralement l'avis du chef du service départemental de l'architecture et du patrimoine des Ardennes en date du 3 janvier 2008, est insuffisamment motivé, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 424-5 du code de l'urbanisme ;
- le jugement attaqué a procédé à une appréciation et à une qualification juridique des faits erronées en retenant que l'arrêté de refus litigieux pouvait légalement être fondé sur les dispositions de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 juin 2011, présenté par la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement ; la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement conclut au rejet de la requête au motif qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 27 septembre 2011, présenté pour la SOCIETE FERME EOLIENNE DE LIART et tendant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 octobre 2011 :
- le rapport de M. Luben, président,
- les conclusions de Mme Ghisu-Deparis, rapporteur public,
- et les observations de Me Guiheux, avocat de la SOCIETE FERME EOLIENNE DE LIART ;
Vu, enregistrée le 3 octobre 2011, la note en délibéré présentée pour la SOCIETE FERME EOLIENNE DE LIART, par Me Guiheux ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : Les jugements sont motivés. ;
Considérant, d'une part, qu'il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que les premiers juges ont écarté de manière circonstanciée les différents moyens soulevés, après avoir rappelé les dispositions réglementaires applicables au litige ; que, d'autre part, la circonstance qu'une autre demande de permis de construire a été déposée en vue de l'implantation d'un parc de trois éoliennes et d'un poste de livraison sur le territoire de la commune de la Férée, limitrophe de celle de Liart, qui a fait l'objet d'un arrêté de refus, de la part de la préfète des Ardennes, pris le même jour que l'arrêté litigieux, ledit arrêté ayant ultérieurement été annulé par le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne par un jugement lu le même jour que le jugement contesté, est sans incidence sur l'appréciation que devaient porter les premiers juges sur la légalité du seul projet de construction d'éoliennes sur le territoire de la commune de Liart, indépendamment du projet envisagé sur le territoire de la commune de la Férée, dès lors qu'il s'agissait de deux projets distincts, au demeurant présentés par deux sociétés pétitionnaires différentes, sur le territoire de deux communes, ayant fait l'objet de la part de la préfète des Ardennes de deux arrêtés de refus, qui eux-mêmes ont conduit à ce que deux requêtes soient déposées devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ; qu'au surplus, la société requérante n'ayant pas argumenté, dans ses mémoires de première instance, sur le fait qu'il aurait convenu, pour apprécier l'intégration dans le site, de prendre en considération l'ensemble du parc éolien implanté sur le territoire des communes de Liart et de La Férée, elle ne saurait reprocher au jugement attaqué de ne pas s'être prononcé sur ce point ; que, par suite, la SOCIETE FERME EOLIENNE DE LIART n'est pas fondée à soutenir que le jugement litigieux serait irrégulier en ce qu'il aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 9 du code de justice administrative et en ce que les premiers juges n'auraient pas pris en considération l'ensemble des faits de l'espèce ;
Sur la légalité de l'arrêté de refus de permis de construire litigieux :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 424-5 du code de l'urbanisme : Si la décision comporte rejet de la demande, si elle est assortie de prescriptions ou s'il s'agit d'un sursis à statuer, elle doit être motivée. (...) ;
Considérant que la préfète des Ardennes a refusé, par l'arrêté litigieux, le permis de construire sollicité aux motifs que le projet est situé dans la Thiérache ardennaise qui présente de très grandes qualités paysagères et un patrimoine emblématique, notamment avec ses églises fortifiées, caractéristiques de ce territoire, / qu'il s'agit d'un paysage marqué par la présence de bocages, de prairies, de massifs boisés, de vallées et de petits reliefs donnant constamment à voir des ondulations du terrain, / qu'il s'agit d'un paysage de petite échelle dont le relief changeant et la structuration en bocage rendent peu favorable l'implantation d'éoliennes, plus adaptées à des paysages agricoles très ouverts, / qu'il convient de protéger ce paysage de nature très sensible et fragile et actuellement très bien préservé, / que la grande fragmentation du relief et l'absence de zones tabulaires induisent, par les fortes contraintes qu'elles génèrent, un projet d'implantation peu lisible et dispersé, avec des orientations confuses et des interdistances irrégulières entre les machines, / en conséquence, que le projet est de nature à porter atteinte au caractère et à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels et urbains, ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales (article R. 111-21 du code de l'urbanisme) ; que, d'une part, la norme réglementaire applicable étant citée et les circonstances de fait qui faisaient obstacle à ce que le projet pût être accepté étant détaillées de manière précise et circonstanciée, ladite motivation ne méconnaît pas les dispositions précitées de l'article R. 424-5 du code de l'urbanisme ; que, d'autre part, la circonstance que ladite motivation s'inspire étroitement des termes des deux avis défavorables au projet émis par le chef du service départemental de l'architecture et du patrimoine des Ardennes les 20 février 2007 et 3 janvier 2008, visés par l'arrêté contesté, ne saurait la faire regarder comme insuffisante ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, d'une part, la zone d'implantation des éoliennes projetées est un paysage de bocage particulièrement préservé de la Thiérache ardennaise, faiblement vallonné, avec des boisements épars et des villages installés sur les versants, sans ligne de force et sans zone tabulaire, où est présent un patrimoine remarquable constitué par des églises fortifiées, dont celle de Liart, classée à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques ; que le zonage de synthèse du schéma régional éolien de Champagne-Ardenne de novembre 2005 classe la zone concernée en jaune, présence d'au moins une contrainte absolue, implantation soumise à études complémentaires adaptées ; que le plan de paysage éolien du département des Ardennes de décembre 2007 classe le secteur en entités sensibles , qu'il s'agisse de la zone 4.2, aux abords de Liart, dénommée les vallonnements , et plus au sud de la zone 4.3 dénommée les clairières sud ; que, d'autre part, le projet est composé de deux groupes de deux éoliennes, implantés pour le premier sur une butte témoin à une altitude d'environ 280 mètres, au nord-est du hameau des Hénaux, à proximité de la route départementale n° 978, et pour le second groupe également sur une butte témoin, à une altitude comprise entre 225 et 240 mètres, au sud-est du même hameau, formant deux lignes qui ne sont pas parallèles, le groupe le plus au nord étant implanté selon une orientation ouest - est-nord-est, celui le plus au sud selon une implantation sud - nord-nord-est, les deux éoliennes du premier groupe étant séparées par une distance d'environ 620 mètres, celles du second groupe étant séparées par une distance d'environ 420 mètres, les deux groupes étant à une distance d'environ 1 200 mètres l'un de l'autre ; que ces orientations différentes et ces implantations dispersées rendent le projet peu lisible et nuisent à son insertion dans l'environnement, et que la taille des machines - 150 mètres de haut en bout de pales, la hauteur du mât étant de 105 mètres et le diamètre du rotor de 90 mètres - provoque un effet d'écrasement visuel du paysage, de petite échelle, de la campagne avoisinante et du hameau des Hénaux ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de procéder à un transport sur les lieux dans le cadre des dispositions de l'article R. 622-1 du code de justice administrative, c'est à bon droit que les premiers juges ont jugé que la préfète des Ardennes, en refusant de délivrer à la société requérante le permis de construire qu'elle avait sollicité au motif que le projet, qui porte atteinte au caractère et à l'intérêt du paysage, méconnaissait les dispositions précitées de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, n'avait pas commis d'erreur d'appréciation ni d'erreur de fait ;
Considérant qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que la SOCIETE FERME EOLIENNE DE LIART n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 30 juillet 2010, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 2 avril 2008, par lequel le préfet des Ardennes lui a refusé un permis de construire pour l'implantation de quatre éoliennes et d'un poste de livraison sur le territoire de la commune de Liart et à ce qu'il soit enjoint au préfet des Ardennes de procéder à un nouvel examen de la demande de permis de construire dans un délai de deux mois à compter du jugement ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et ses conclusions à fin d'injonction ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SOCIETE FERME EOLIENNE DE LIART est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE FERME EOLIENNE DE LIART et à la ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement. Copie en sera délivrée au préfet des Ardennes.
''
''
''
''
2
N° 10NC01591