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29/09/2011 | FRANCE | N°10NC01036

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 29 septembre 2011, 10NC01036


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 juillet 2010, présentée par le PREFET DU BAS-RHIN ;

Le PREFET demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000861 en date du 27 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté en date du 23 décembre 2009 par lequel il a refusé de délivrer à Mme Fatiha A un titre de séjour, a prononcé une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A devant le Tribunal administrati

f de Strasbourg ;

Il soutient :

- que la production d'un visa pour l'Espagne ne perme...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 juillet 2010, présentée par le PREFET DU BAS-RHIN ;

Le PREFET demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000861 en date du 27 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté en date du 23 décembre 2009 par lequel il a refusé de délivrer à Mme Fatiha A un titre de séjour, a prononcé une obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

Il soutient :

- que la production d'un visa pour l'Espagne ne permettait à Mme A d'obtenir un titre de séjour ;

- que Mme A a vécu éloignée de son époux durant plus de sept ans et ne vivait avec celui-ci que depuis peu de temps à la date de la décision contestée, que contrairement à ce qu'elle soutient Mme A n'a pas présenté de demande de visa auprès des autorités consulaires françaises au Maroc, que son mari n'a pas présenté de demande de regroupement familial et que rien n'indique qu'il ne pourrait obtenir le bénéfice de cette mesure, que Mme A dispose d'attaches familiales dans son pays, que son époux n'est pas isolé en France, que Mme A se maintient de façon illégale sur le territoire ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 août 2010, présenté pour Mme Fatiha A demeurant ..., par Me Grit avocat ;

Mme A conclut :

- au rejet de la requête ;

- à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 1500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 17 septembre 2010 accordant l'aide juridictionnelle à 100 % ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 septembre 2011 :

- le rapport de Mme Stefanski, président,

- et les conclusions de M. Féral, rapporteur public ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1°- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant qu'en application de ces stipulations, il appartient à l'autorité administrative qui envisage de se prononcer sur une demande de titre de séjour présentée par un étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise ; que la circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé ; que cette dernière peut en revanche tenir compte le cas échéant, au titre des buts poursuivis par la mesure de refus de titre de séjour assortie d'une obligation de quitter le territoire, de ce que le ressortissant étranger en cause ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial et qu'il n'a pas respecté cette procédure ;

Considérant que Mme A, qui avait épousé en juin 2000 au Maroc un ressortissant également de nationalité marocaine dont elle a eu un enfant en 2001, est entrée en France avec son enfant en décembre 2007 afin de rejoindre son mari ; que M. A, qui vit en France depuis l'âge d'un an et est titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 1er juin 2015, a effectué de fréquents voyages pour rejoindre son épouse depuis leur mariage ; qu'un second enfant est né à Strasbourg le 4 juillet 2008 et qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté du 23 décembre 2009 portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire, la cellule familiale s'était reconstituée en France ; que si Mme A conserve des attaches familiales dans son pays d'origine où vivent son père et trois frères et soeurs et s'il est vrai qu'elle s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire national et que son époux n'a pas présenté de demande de regroupement familial, l'essentiel de sa vie familiale se situe en France ; que, dans ces conditions, l'arrêté du PREFET DU BAS-RHIN porte à sa vie familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision a été prise ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU BAS-RHIN n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 23 décembre 2009 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 37 de la loi susvisée n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de mettre à la charge de la partie perdante le versement d'une somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client si ce dernier n'avait pas bénéficié de cette aide à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement à son profit de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à l'avocat de Mme A, sous réserve pour ce dernier de renoncer au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête du PREFET DU BAS-RHIN est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à l'avocat de Mme A, la somme de 1 500 euros (mille cinq cent euros) en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Fatiha A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités locales et de l'immigration.

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10NC01036


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10NC01036
Date de la décision : 29/09/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: M. FERAL
Avocat(s) : GRIT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2011-09-29;10nc01036 ?
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