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17/03/2011 | FRANCE | N°10NC00778

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 17 mars 2011, 10NC00778


Vu la requête, enregistrée le 21 mai 20101, présentée pour M. Emmanuel A, demeurant ..., par Me De Zolt, avocat ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700131 du 23 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision en date du 10 novembre 2006 par laquelle le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement a, à la demande de la société Steeltech, d'une part, annulé la décision en date du 11 mai 2006 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de M. A, et, d'autre part, refusé l'auto

risation de licencier l'intéressé ;

2°) de rejeter la demande de première ...

Vu la requête, enregistrée le 21 mai 20101, présentée pour M. Emmanuel A, demeurant ..., par Me De Zolt, avocat ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700131 du 23 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision en date du 10 novembre 2006 par laquelle le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement a, à la demande de la société Steeltech, d'une part, annulé la décision en date du 11 mai 2006 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé le licenciement de M. A, et, d'autre part, refusé l'autorisation de licencier l'intéressé ;

2°) de rejeter la demande de première instance de la société Steeltech ;

3°) de mettre à la charge de la société Steeltech une somme de 2 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier, car il n'a pas été signé par le rapporteur et le président de la formation de jugement ;

- il a été empêché de participer au vote du comité d'entreprise statuant sur son licenciement, et l'avis du comité étant favorable au licenciement, la procédure ne peut pas être purgée de toute irrégularité ;

- il n'a pas commis de faute de nature à justifier son licenciement : la lettre de sanction du 13 mars 2006 ne mentionnait pas la possibilité pour l'employeur de substituer un licenciement à la sanction de mutation ; les griefs figurant dans la lettre de licenciement mais pas dans la demande d'autorisation de licenciement ne peuvent pas être pris en compte pour apprécier le bien-fondé de la demande de licenciement ; le conseil de prud'hommes de Metz a estimé que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse ; il souffre de troubles du sommeil qui entraînent de brèves périodes de somnolence involontaires ; sa prostatite chronique, qui l'oblige à se lever souvent durant les périodes de repos, aggrave ses problèmes de récupération ; le médecin du travail avait recommandé une affectation à un poste dans travail de nuit ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 août 2010, présenté pour la société Steeltech, par Me Jaxel, avocat, qui conclut au rejet de la requête de M. A et à ce que soit mise à la charge de ce dernier une somme de 2 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 8 novembre 2010, présenté pour M. A, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que :

- suite à son refus de la mutation disciplinaire, l'employeur pouvait prononcer une autre sanction, y compris un licenciement, mais ce n'était pas une obligation ;

- l'inspecteur du travail n'était saisi que du seul grief consistant dans l'endormissement au travail survenu le 16 février 2006 ;

Vu les pièces du dossier desquelles il résulte que la requête a été notifiée au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, qui n'a pas produit d'observations en défense ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 février 2011 :

- le rapport de M. Favret, premier conseiller,

- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,

- et les observations de Me Ambrosi pour la Selarl Cossalter et De Zolt, avocat de M. A ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que M. A soutient que le jugement attaqué est irrégulier, dès lors qu'il n'a pas été signé par le rapporteur et le président de la formation de jugement ; que, toutefois, la minute du jugement attaqué, versée au dossier, comporte la signature des magistrats ayant rendu la décision et du greffier du Tribunal ; que, par suite, M. A n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une irrégularité de nature à entraîner son annulation ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu d'adopter les motifs retenus par les premiers juges pour écarter le moyen de M. A tiré de ce que la consultation du comité d'entreprise serait entachée d'irrégularité au motif qu'il a été empêché de participer au vote du comité d'entreprise statuant sur son licenciement, alors que l'avis du comité d'entreprise était favorable à son licenciement ;

Considérant, en deuxième lieu, que la société Steeltech, employeur de M. A, avait d'abord décidé la mutation de ce dernier à l'usine de Sarreguemines, à titre de sanction disciplinaire ; que l'intéressé ayant refusé cette mutation, qui impliquait une modification de son contrat de travail, dès lors qu'elle l'aurait conduit à ne plus travailler de nuit, l'employeur a alors envisagé son licenciement, aux lieu et place de la sanction refusée ; que la société Steeltech n'était pas tenue de mentionner, dans le courrier en date du 13 mars 2006 lui notifiant sa mutation, la possibilité de substituer un licenciement à la sanction de mutation à Sarreguemines, refusée par le requérant ; que, par suite, le moyen tiré de cette absence de mention doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle d'un juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, qui souffre de troubles du sommeil entraînant un besoin fréquent de dormir, s'est endormi, le 16 février 2006, pendant son temps de travail ; qu'il ressort également des pièces du dossier que l'intéressé avait lui-même admis, au cours de l'entretien préalable, d'une part qu'il lui était déjà arrivé de s'endormir sur son lieu de travail, et, d'autre part, que, pour rattraper le temps perdu, il n'utilisait pas de palan pour placer les pièces sur la chaîne de production, mais les portait lui-même à la main, en méconnaissance des règles de sécurité ; que la circonstance que de nouveaux griefs aient été mentionnés dans la lettre de licenciement par rapport à ceux énoncés dans la demande d'autorisation de licenciement est, en tout état de cause, sans incidence sur la régularité de la décision d'autorisation de licenciement ; que les faits susrappelés sont constitutifs de fautes de nature à justifier une sanction disciplinaire ; que, compte tenu notamment de leur caractère répété et du fait que M. A avait expressément demandé un poste de nuit, tout en sollicitant du médecin du travail qu'il dissimule la contre-indication au travail de nuit qui existait, comte tenu de la pathologie dont il était atteint, ces faits présentent un caractère de gravité suffisant pour justifier le licenciement de l'intéressé, sans qu'y fasse obstacle les circonstances, d'une part que le conseil de prud'hommes de Metz a, par jugement en date du 11 décembre 2008, estimé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse, d'autre part que le requérant souffre de troubles du sommeil, aggravés par une prostatite chronique ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision en date du 10 novembre 2006 par laquelle le ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement a, d'une part annulé la décision de l'inspecteur du travail en date du 11 mai 2006 par laquelle il avait autorisé le licenciement de M. A, et, d'autre part, refusé d'autoriser la société à procéder à ce licenciement ;

Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Steeltech, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A une somme à verser à la société Steeltech au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Steeltech tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Emmanuel A, à la société Steeltech et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.

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10NC00778


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10NC00778
Date de la décision : 17/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Jean-Marc FAVRET
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SELARL COSSALTER et DE ZOLT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2011-03-17;10nc00778 ?
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