Vu la requête, enregistrée le 10 novembre 2010, présentée pour Mme Indijana A, demeurant chez ..., par Me Kling ; Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1004149, 1004150 en date du 6 septembre 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Haut-Rhin du 20 août 2010 décidant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Haut-Rhin de lui délivrer une carte de séjour temporaire vie privée et familiale dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de cinquante euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le préfet a commis une erreur de droit dès lors qu'il ne lui a pas notifié une décision explicite de refus de titre de séjour ;
- l'arrêté attaqué méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits et des libertés fondamentales dans la mesure où sa fille est scolarisée en France et qu'elle n'a plus aucun membre de sa famille dans son pays d'origine ;
- le préfet a commis une erreur d'appréciation des conséquences de l'arrêté attaqué sur sa situation personnelle ;
- dès lors que sa vie est menacée en Bosnie et alors que l'arrêté attaqué ne fait aucune mention du pays de renvoi, le préfet du Haut-Rhin a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré au greffe de la Cour le 28 janvier 2011, présenté par le préfet du Haut-Rhin qui conclut au rejet de la requête au motif qu'elle est tardive et que les moyens invoqués ne sont pas fondés ;
Vu, en date du 19 novembre 2010, la décision du président du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Nancy (section administrative), admettant Mme A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 février 2011 :
- le rapport de M. Giltard, président de la Cour,
- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public ;
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :
Sur le moyen tiré de l'erreur de droit :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1, II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) et qu'aux termes de l'article L 742-6 du même code :: L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides , lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office. (...) ;
Considérant que l'admission au séjour de Mme A, ressortissante bosniaque, qui entrée en France le 25 janvier 2010 a présenté une demande d'asile, a été refusée par le préfet du Haut-Rhin sur le fondement du 2° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la demande d'asile ayant été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 21 avril 2010, le préfet pouvait prendre une mesure d'éloignement à l'encontre de Mme A ; que la requérante étant entrée irrégulièrement sur le territoire français, le préfet pouvait légalement ordonner sa reconduite à la frontière sur le fondement du 1° de l'article L. 511-1, II précité et n'a dès lors pas commis d'erreur de droit en ne fondant pas sa décision d'éloignement sur les dispositions du I de cet article L. 511-1 relatives à l'obligation de quitter le territoire français ;
Sur le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :
Considérant que si Mme A, qui est entrée en France accompagnée de son mari et de leur fille, fait valoir que sa fille est scolarisée et qu'elle n'a plus aucune attache familiale dans son pays d'origine, il ressort des pièces du dossier que son mari fait également l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ; qu'aucune circonstance ne fait obstacle à ce qu'elle constitue une vie familiale en dehors de la France ; que, par suite, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de la durée et des conditions de séjour en France de Mme A, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, la décision prise à son encontre n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Sur le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation :
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Haut-Rhin aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de Mme A ;
En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :
Considérant que Mme A ne peut utilement se prévaloir de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 512-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre de l'arrêté attaqué qui n'indique pas le pays de renvoi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 août 2010 par lequel le préfet du Haut-Rhin a ordonné sa reconduite à la frontière ; que, par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction et les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Indijana A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
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N° 10NC01713