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06/12/2010 | FRANCE | N°09NC01439

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 06 décembre 2010, 09NC01439


Vu le recours enregistré le 24 septembre 2009, présenté par LE MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ; la ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901382 du 15 juillet 2009 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision référencée 48SI du 18 février 2009 en tant qu'elle porte retraits de points au permis de conduire de Mme A pour des infractions commises les 25 mai 2004, 2 août 2004, 20 juin 2006 et 14 avril 2008 ;

2°) de rejeter la demande de Mme A devant le tribunal administratif ;


Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, la réalité...

Vu le recours enregistré le 24 septembre 2009, présenté par LE MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ; la ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901382 du 15 juillet 2009 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision référencée 48SI du 18 février 2009 en tant qu'elle porte retraits de points au permis de conduire de Mme A pour des infractions commises les 25 mai 2004, 2 août 2004, 20 juin 2006 et 14 avril 2008 ;

2°) de rejeter la demande de Mme A devant le tribunal administratif ;

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, la réalité des infractions en cause est établie ; il est en effet lié par les décisions prise par l'autorité judiciaire qu'il ne fait que mettre à exécution ; l'intéressé n'établit pas avoir contesté la réalité des infractions commises ; les mentions du relevé d'information intégral relatives au paiement des amendes établissent dès lors la réalité des infractions ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 19 avril 2010 complété par le mémoire enregistré le 23 septembre 2010, présenté pour Mme A ... par Me Gartioux, avocat qui conclut au rejet de la requête et à ce que l'Etat lui verse la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que la requête est irrecevable car signée par une autorité incompétente ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 novembre 2010 :

- le rapport de M. Wallerich, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public ;

Vu, enregistrée le 30 septembre 2010, la note en délibéré de Me Gartioux pour Mme A ;

Sur la fin de non recevoir opposée en défense :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 susvisé : A compter du jour suivant la publication au Journal Officiel de la République Française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre (...) et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : / 1° (...) les directeurs d'administration centrale (...). / Le changement de ministre (...) ne met pas fin à cette délégation (...) ; qu'aux termes de l'article 3 du décret précité du 27 juillet 20005 : Les personnes mentionnées aux 1° et 3° de l'article 1er peuvent donner délégation pour signer tous actes relatifs aux affaires pour lesquelles elles ont-elles-mêmes reçu délégation : 1° Aux magistrats, aux fonctionnaires de catégorie A et aux agents contractuels chargés de fonctions d'un niveau équivalent, qui n'en disposent pas au titre de l'article 1er (...) ; qu'aux termes de l'article 10 de la décision du 3 décembre 2008 modifiée portant délégation de signature (direction des libertés publiques et des affaires juridiques) : Délégation est donnée à l'effet de signer, au nom du ministre chargé de l'intérieur ou du ministre chargé de l'immigration, dans la limite de leurs attributions respectives, tous actes, arrêtés, décisions, correspondances courantes, recours et mémoires en défense devant les juridictions, à l'exception de ceux qui sont présentés devant le tribunal des conflits et le Conseil d'Etat, ainsi que les actes, décisions, pièces comptables et administratives concernant les affaires contentieuses et les réparations des dommages dont le montant n'excède pas 40 000 euros : à M. Jean-Etienne Szollosi, conseiller d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, chef du bureau du contentieux des polices administratives, directement placé sous l'autorité du sous-directeur du conseil juridique et du contentieux ; (...) ; qu'ainsi M. Szollosi bénéficie d'une délégation de signature régulièrement publiée au Journal Officiel de la République Française et conforme aux dispositions de l'article 3 du décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ; que l'appel du ministre, qui n'est au demeurant pas tardif, est par conséquent recevable ;

Sur la légalité des retraits de points :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-1 du code de la route : Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. /.../ La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive ;

Considérant qu'il résulte des articles 529, 529-1, 529-2 et du premier alinéa de l'article 530 du code de procédure pénale que, pour les infractions des quatre premières classes dont la liste est fixée par décret en Conseil d'Etat, le contrevenant peut, dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention, soit acquitter une amende forfaitaire et éteindre ainsi l'action publique, soit présenter une requête en exonération ; que s'il s'abstient tant de payer l'amende forfaitaire que de présenter une requête, l'amende forfaitaire est majorée de plein droit et recouvrée au profit du Trésor Public en vertu d'un titre rendu exécutoire par le ministère public, lequel est exécuté suivant les règles prévues pour l'exécution des jugements de police ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 530 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : Dans les trente jours de l'envoi de l'avis invitant le contrevenant à payer l'amende forfaitaire majorée, l'intéressé peut former auprès du ministère public une réclamation motivée qui a pour effet d'annuler le titre exécutoire en ce qui concerne l'amende contestée. Cette réclamation reste recevable tant que la peine n'est pas prescrite, s'il ne résulte pas d'un acte d'exécution ou de tout autre moyen de preuve que l'intéressé a eu connaissance de l'amende forfaitaire majorée. S'il s'agit d'une contravention au code de la route, la réclamation n'est toutefois plus recevable à l'issue d'un délai de trois mois lorsque l'avis d'amende forfaitaire majorée est envoyé par lettre recommandée à l'adresse figurant sur le certificat d'immatriculation du véhicule, sauf si le contrevenant justifie qu'il a, avant l'expiration de ce délai, déclaré son changement d'adresse au service d'immatriculation des véhicules ;

Considérant que l'article L. 225-1 du code de la route fixe la liste des informations qui, sous l'autorité et le contrôle du ministre de l'intérieur, sont enregistrées au sein du système national des permis de conduire ; que sont notamment mentionnés au 5° de cet article les procès-verbaux des infractions entraînant retrait de points et ayant donné lieu au paiement d'une amende forfaitaire en vertu de l'article 529 du code de procédure pénale ou à l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée prévu à l'article 529-2 du code de procédure pénale ; qu'en vertu de l'arrêté du 29 juin 1992 fixant les supports techniques de la communication par le ministère public au ministère de l'intérieur des informations prévues à l'article L. 30 (4°, 5°, 6° et 7°) du code de la route, les informations mentionnées au 6° de l'article L. 30, devenu 5° de l'article L. 225-1 du code de la route sont communiquées par l'officier du ministère public par support ou liaison informatique ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que le mode d'enregistrement et de contrôle des informations relatives aux infractions au code de la route conduit à considérer que la réalité de l'infraction est établie dans les conditions prévues à l'article L. 223-1 du code de la route dès lors qu'est inscrite, dans le système national des permis de conduire, la mention du paiement de l'amende forfaitaire ou de l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, sauf si l'intéressé justifie avoir présenté une requête en exonération dans les quarante-cinq jours de la constatation de l'infraction ou de l'envoi de l'avis de contravention ou formé, dans le délai prévu à l'article 530 du code de procédure pénale, une réclamation ayant entraîné l'annulation du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée ;

Considérant qu'a été versé au dossier, pour la première fois en appel, le relevé d'information intégral relatif à la situation de Mme A, extrait du système national du permis de conduire ; qu'eu égard aux mentions de ce document et en l'absence de tout élément avancé par l'intéressée de nature à mettre en doute leur exactitude, le ministre établit que Mme A a acquitté les amendes forfaitaires pour les infractions commises les 25 mai 2004, 2 août 2004, 20 juin 2006 et 14 avril 2008 ; qu'il suit de là que c'est à tort que, pour annuler la décision contestée, le Tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur l'absence de réalité des infractions ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par Mme A tant devant le Tribunal administratif de Strasbourg qu'en appel ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-3 du code de la route dans sa rédaction issue de la loi du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière : Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L. 223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9. Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification est dûment portée à sa connaissance ; il est également informé de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. Le retrait de points est porté à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand il est effectif. ; que les dispositions précitées sont reprises et précisées à l'article R. 223-3 du même code aux termes duquel : I.-Lors de la constatation d'une infraction entraînant retrait de points, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L. 223-1. II. - Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. Le droit d'accès aux informations ci-dessus mentionnées s'exerce dans les conditions fixées par les articles L. 225-1 à L. 225-9. ; qu'il résulte des dispositions du code de la route relatives au permis à points que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire, à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues aux articles L. 223-3 et R. 223-3 précités, qui constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tous moyens, qu'elle a satisfait à cette obligation préalable d'information ; que les dispositions de l'article 537 du code de procédure pénale, selon lesquelles les procès-verbaux établis par les officiers ou agents de police judiciaire font foi jusqu'à preuve contraire, ne trouvent à s'appliquer qu'en ce qui concerne la constatation des faits constitutifs des infractions ; que la mention portée sur ces procès-verbaux selon laquelle le contrevenant a reçu l'information prévue par les dispositions précitées du code de la route n'est pas revêtue de la même force probante ; que, néanmoins, même contredite par le contrevenant, cette indication peut emporter la conviction du juge si elle est corroborée par d'autres éléments ; que tel est notamment le cas s'il ressort des pièces du dossier que le contrevenant a contresigné le procès-verbal ou qu'il a pris connaissance, sans élever d'objection, de son contenu ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier qu'en ce qui concerne les infractions commises les 25 mai 2004, 20 juin 2006 et 14 avril 2008, l'administration a produit les procès-verbaux établis par les agents de la gendarmerie nationale et de la police nationale ayant qualité d'agent de police judiciaire mentionnant que, pour chacune des infractions en cause, le document du centre d'enregistrement et de révision des formulaires administratifs (CERFA) n° 90-0204 a été remis à Mme A et que cette dernière a été informée que les faits relevés à son encontre étaient susceptibles d'entraîner un retrait de points de son permis de conduire ; que Mme A a signé le procès-verbal des deux premières infraction ; que s'agissant de la troisième infraction, la circonstance que Mme A a refusé de signer le procès-verbal d'infraction ne suffit pas, dans les circonstances de l'espèce, à établir que l'intéressée n'a pas reçu l'information prévue par l'article L. 223-3 du code de la route ;

Considérant, d'autre part, qu'en ce qui concerne l'infraction pour excès de vitesse constatée le 2 août 2004 et relevée par l'intermédiaire d'un radar automatique, le ministre de l'intérieur soutient que Mme A a réglé, dans les délais impartis, le montant de l'amende forfaitaire ainsi que cela ressort d'ailleurs du relevé intégral d'information relatif à la situation de l'intéressée ; que pour s'acquitter ainsi de l'amende, cette dernière était nécessairement en possession du procès-verbal de contravention dont le troisième volet comporte l'ensemble des informations exigées par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; que, par suite, l'administration doit être regardée comme ayant apporté la preuve que la contrevenante a reçu l'ensemble des informations exigées par les textes précités ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé les retraits de points en cause ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, la somme que Mme A demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L'article 1er du jugement n° 0901382 du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 15 juillet 2009 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Strasbourg est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme A sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et à Mme Thérèse A.

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N° 09NC01439


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC01439
Date de la décision : 06/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: M. Marc WALLERICH
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : GARTIOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-12-06;09nc01439 ?
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