La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/10/2010 | FRANCE | N°09NC01420

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 18 octobre 2010, 09NC01420


Vu la requête, enregistrée le 18 septembre 2009 et complétée par des mémoires enregistrés les 20 octobre 2009 et 21 septembre 2010, présentée pour la COMMUNE D'ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN, représentée par son maire dûment habilité, par Me Brand, avocat ; la COMMUNE D'ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0504645 du 11 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 16 juin 2005 par lequel le préfet du Bas-Rhin a autorisé la société anonyme Entreprise de Travaux et de Matériau

x (ETM) à mettre en sécurité les berges de la gravière située route d'Eschau...

Vu la requête, enregistrée le 18 septembre 2009 et complétée par des mémoires enregistrés les 20 octobre 2009 et 21 septembre 2010, présentée pour la COMMUNE D'ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN, représentée par son maire dûment habilité, par Me Brand, avocat ; la COMMUNE D'ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0504645 du 11 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 16 juin 2005 par lequel le préfet du Bas-Rhin a autorisé la société anonyme Entreprise de Travaux et de Matériaux (ETM) à mettre en sécurité les berges de la gravière située route d'Eschau ;

2°) d'enjoindre sous astreinte l'exploitant de procéder à la remise en état de la carrière telle qu'elle est prévue par l'arrêté préfectoral du 12 mai 1999, ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre sous astreinte à l'Etat d'utiliser ses pouvoirs de sanction administrative à l'encontre de l'exploitant au besoin en utilisant les garanties financières constituées par celui-ci :

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le recours à un arrêté complémentaire pris sur le fondement de l'article 34-1 du décret du 21 septembre 1977 est irrégulier pour un changement d'activité ayant un impact sur l'environnement qui aurait nécessité l'octroi d'une nouvelle autorisation en application des articles L. 512-15 et R. 512-33 du code de l'environnement ;

- la COMMUNE D'ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN, propriétaire des terrains en cause, n'a jamais autorisé l'exploitant, en application du décret du 15 mars 2006 relatif aux installations de stockage de déchets inertes, à utiliser le site à d'autres fins que l'exploitation du gisement et en aucun cas comme lieu de stockage définitif de déchets inertes ;

- la constitution d'un dépôt définitif de déchets inertes qui ne relève pas du régime des installations classées, aurait dû être soumise à la police des eaux et notamment à autorisation selon les articles L. 214-1 et suivants du code de l'environnement ainsi qu'à autorisation au titre du code de l'urbanisme ;

- la demande de l'exploitant de remblayer la carrière avec des déchets inertes aurait dû faire l'objet d'un rejet de plein droit en application de l'article R. 512-35 du code de l'environnement et de l'autorité de la chose décidée ;

- le préfet avait compétence liée pour mettre en demeure l'exploitant de se conformer aux prescriptions de son arrêté d'autorisation relatives à la remise en état du site et au remblayage ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire enregistré 11 janvier 2010 présenté pour la société anonyme Entreprise de Travaux et de Matériaux (ETM), dont le siège social se trouve 17 route d'Eschau à Illkirch-Graffenstaden (67411 cedex) représentée par son président, par Me Ruhlmann, avocat, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de la COMMUNE D'ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, les moyens étant infondés ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2010, présenté par le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat ; il conclut au rejet de la requête, les moyens étant infondés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2010 :

- le rapport de M. Wallerich, premier conseiller,

- les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public,

- et les observations de Me Brandt, avocat de la COMMUNE D'ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant que la société Entreprise de Travaux et Matériaux (ETM) a repris en 1989 l'exploitation d'une carrière de sables et de graviers sur des terrains appartenant à la COMMUNE D'ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN ; que, par un arrêté en date du 12 mai 1999, le préfet du Bas-Rhin a renouvelé l'autorisation d'exploiter accordée à la société ETM pour une durée limitée à trois ans ; que la société ETM a cessé son activité d'extraction sur le site concerné en mai 2002 ; que, dans le cadre de la remise en état du site, la société ETM a fait procéder à différentes études qui ont conclu à la nécessité de remblayer certaines parties de la gravière pour assurer la stabilité des berges ; que, par une demande en date du 6 juillet 2004, la société ETM a sollicité du préfet l'autorisation de sécuriser les berges de la gravière par remblaiement avec des matériaux inertes ; que, par un arrêté en date du 16 juin 2005, complémentaire à l'arrêté du 12 mai 1999, le préfet du Bas-Rhin a autorisé la société ETM à remblayer pendant cinq ans certaines parties de la gravière, avec des matériaux extérieurs au site pour en sécuriser les berges ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de la COMMUNE D'ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article L. 514-1 du code de l'environnement : Indépendamment des poursuites pénales qui peuvent être exercées, et lorsqu'un inspecteur des installations classées ou un expert désigné par le ministre chargé des installations classées a constaté l'inobservation des conditions imposées à l'exploitant d'une installation classée, le préfet met en demeure ce dernier de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé. Si, à l'expiration du délai fixé pour l'exécution, l'exploitant n'a pas obtempéré à cette injonction, le préfet peut : / 1° Obliger l'exploitant à consigner entre les mains d'un comptable public une somme répondant du montant des travaux à réaliser, laquelle sera restituée à l'exploitant au fur et à mesure de l'exécution des mesures prescrites ; il est procédé au recouvrement de cette somme comme en matière de créances étrangères à l'impôt et au domaine. Pour le recouvrement de cette somme, l'Etat bénéficie d'un privilège de même rang que celui prévu à l'article 1920 du code général des impôts ; / 2° Faire procéder d'office, aux frais de l'exploitant, à l'exécution des mesures prescrites ; / 3° Suspendre par arrêté, après avis de la commission départementale consultative compétente, le fonctionnement de l'installation, jusqu'à exécution des conditions imposées et prendre les dispositions provisoires nécessaires. ; qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 19 juillet 1976, que lorsque l'inspecteur des installations classées a constaté, selon la procédure requise par le code de l'environnement, l'inobservation de conditions légalement imposées à l'exploitant d'une installation classée, le préfet, sans procéder à une nouvelle appréciation de la violation constatée, est tenu d'édicter une mise en demeure de satisfaire à ces conditions dans un délai déterminé ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le préfet du Bas-Rhin, après avoir nécessairement constaté que les prescriptions relatives à la remise en état du site et à son remblayage visées aux articles 25 et 27 de l'arrêté du 12 mai 1999 n'avaient pas été observées par la société ETM, n'a pas mis en demeure cet exploitant, comme il y était tenu, de respecter lesdites prescriptions dans un délai déterminé ; que, par ailleurs, il ne justifie pas de l'existence de dangers ou d'inconvénients au sens de l'article L. 511-1 du code de l'environnement qui n'étaient pas connus à la date de son arrêté d'autorisation ; qu'ainsi, en modifiant les conditions de remblayage initialement prévues sans avoir épuisé les pouvoirs qu'il tient de l'article L. 514-1 du code de l'environnement, le préfet a entaché son arrêté du 16 juin 2005 d'une erreur de droit ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE D'ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 juin 2005 ;

Sur les conclusions à fin d'injonctions :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;

Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que le préfet du Bas-Rhin mette en demeure dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt la société Entreprise de Travaux et Matériaux (ETM) de respecter les prescriptions des articles 25 et 27 de l'arrêté du 12 mai 1999 autorisant la SA Entreprise de Travaux et Matériaux à exploiter à Illkirch-Graffenstaden une carrière en eau d'alluvions rhénanes ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la COMMUNE D'ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la société anonyme Entreprise de travaux et de matériaux (ETM) la somme que cette dernière demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de l'Etat, qui succombe dans la présente instance, la somme de 1 500 euros que la COMMUNE D'ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN demande au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0504645 en date du 11 juin 2009 du Tribunal administratif de Strasbourg et l'arrêté du 16 juin 2005 par lequel le préfet du Bas-Rhin a autorisé la société anonyme Entreprise de Travaux et de Matériaux (ETM) à mettre en sécurité les berges de sa carrière par remblayage avec apport de matériaux située route d'Eschau à Illkirch-Graffenstaden sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Bas-Rhin de mettre en demeure dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt la société Entreprise de Travaux et Matériaux (ETM) de respecter les prescriptions des articles 25 et 27 de l'arrêté du 12 mai 1999 autorisant la SA Entreprise de Travaux et Matériaux à exploiter à Illkirch-Graffenstaden une carrière en eau d'alluvions rhénanes.

Article 3 : L'Etat versera à la COMMUNE D'ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN une somme de 1 500 euros (mille cinq cents) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la COMMUNE D'ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN est rejeté.

Article 5 : Les conclusions présentées par la SA Entreprise de Travaux et Matériaux (ETM) sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, au préfet du Bas-Rhin, à la COMMUNE D'ILLKIRCH-GRAFFENSTADEN et à la SA Entreprise de Travaux et Matériaux (ETM).

''

''

''

''

2

N° 09NC01420


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC01420
Date de la décision : 18/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: M. Marc WALLERICH
Rapporteur public ?: M. WIERNASZ
Avocat(s) : BRAND

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-10-18;09nc01420 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award