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01/07/2010 | FRANCE | N°09NC00464

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 01 juillet 2010, 09NC00464


Vu la requête, enregistrée le 27 mars 2009 et le mémoire complémentaire enregistré le 10 septembre 2009, présentés pour la VILLE D'AMNEVILLE, représentée par son maire en exercice, à ce dûment habilité par délibération du conseil municipal en date du 1er avril 2008 et domicilié en cette qualité à l'Hôtel de ville d'Amnéville (57360), par Me Froessel, avocat ;

La VILLE D'AMNEVILLE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605509 du 29 janvier 2009 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg l'a condamnée à verser à la société Dalkia Franc

e la somme de 117 530,50 €, assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 juille...

Vu la requête, enregistrée le 27 mars 2009 et le mémoire complémentaire enregistré le 10 septembre 2009, présentés pour la VILLE D'AMNEVILLE, représentée par son maire en exercice, à ce dûment habilité par délibération du conseil municipal en date du 1er avril 2008 et domicilié en cette qualité à l'Hôtel de ville d'Amnéville (57360), par Me Froessel, avocat ;

La VILLE D'AMNEVILLE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605509 du 29 janvier 2009 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg l'a condamnée à verser à la société Dalkia France la somme de 117 530,50 €, assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 2006 et capitalisation des intérêts à compter du 13 juillet 2007 ;

2°) de désigner un expert qui aura pour mission de valider les constatations de la VILLE D'AMNEVILLE depuis la résiliation du marché ;

3°) de rejeter la demande de la société Dalkia France ;

Elle soutient que :

- la résiliation du marché doit être considérée comme ayant été prise sur le fondement de l'article 28.1 h du CCAG, lequel vise l'hypothèse où le titulaire s'est livré à des actes frauduleux, ce qui exclut toute indemnisation ;

- à titre subsidiaire, doivent être déduites du manque à gagner les recettes résultant des activités que la société a pu réaliser une fois la résiliation prononcée ;

- les chiffres avancés par la société ne sont pas vérifiables ;

- c'est à tort que le Tribunal a écarté l'avenant n° 7 par lequel la société a renoncé à la fourniture du gaz du complexe piscine-patinoire, la ville ayant supporté les charges de cette fourniture ;

- c'est à juste titre que le Tribunal n'a pas retenu les mesures d'accompagnement ;

- les frais de formation et de reclassement ne sont pas justifiés ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistrés les 1er juillet et 17 novembre 2009, les mémoires en défense présentés pour la société Dalkia France, représentée par son représentant légal, par Me Cassin ;

Elle conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident, à la condamnation de la VILLE D'AMNEVILLE à lui verser la somme totale de 151 000 €, augmentée des intérêts moratoires et capitalisation de ces derniers à compter du 13 juillet 2007 ;

3°) à ce que qu'il soit enjoint à la VILLE D'AMNEVILLE de procéder au versement des sommes réclamées dans un délai de 30 jours à compter de la notification de l'arrêt à venir, sous peine d'astreinte de 500 € par jour de retard ;

4°) d'ordonner la suppression des passages du mémoire de la VILLE D'AMNEVILLE en date du 8 septembre 2009 commençant par les mots la ville d'Amnéville et se terminant par patinoire (page 6), commençant par les mots d'un côté et se terminant par des années (page 9) et commençant par les mots il y a lieu de souligner et se terminant par victimes (page 10) ;

5°) de condamner la VILLE D'AMNEVILLE à lui payer la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l'article L. 741-2 du code de justice administrative ;

6°) à ce que soit mis à la charge de la VILLE D'AMNEVILLE le versement de la somme de 4 000 € en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés et qu'elle justifie de l'intégralité de son préjudice ;

Vu l'ordonnance en date du 17 novembre 2009 fixant la clôture de l'instruction le 1er mars 2010 à 16 heures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 juin 2010 :

- le rapport de Mme Ghisu-Deparis, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public,

- et les observations de Me Froessel, avocat de la VILLE D'AMNEVILLE, ainsi que celles de Me Cassin, avocat de la société Dalkia France ;

Vu, enregistrée le 22 juin 2010, la note en délibéré, présentée pour la VILLE D'AMNEVILLE ;

Sur les conclusions de l'appel principal :

En ce qui concerne le bien-fondé de l'indemnisation :

Considérant qu'aux termes de l'article 24 du CCAG marchés de fournitures courantes et de services , dans sa version alors en vigueur, applicable au marché en litige : 24.1. La personne publique peut à tout moment, qu'il y ait ou non faute du titulaire, mettre fin à l'exécution des prestations faisant l'objet du marché avant l'achèvement de celles-ci. par une décision de résiliation du marché. Sauf dans les cas de résiliation prévus aux articles 25 à 28, le titulaire a droit à être indemnisé du préjudice qu'il subit du fait de cette décision comme il est dit à l'article 31.(...) ; qu'aux termes de l'article 28.1 : . Le marché peut, selon les modalités prévues au 2 ci-dessous, être résilié aux torts du titulaire sans que celui-ci puisse prétendre à indemnité et, le cas échéant, avec exécution des prestations à ses frais et risques comme il est dit à l'article 32 (...)h) Lorsque le titulaire s'est livré à l'occasion de son marché à des actes frauduleux portant sur la nature, la qualité ou la quantité des prestations ; (...) ;

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction et notamment de la délibération du 13 janvier 2006 qu'au jour où le conseil municipal a décidé de résilier le marché qui le liait à la société Dalkia France jusqu'au 30 novembre 2007 pour la conduite, l'entretien des installations de chauffage, ventilation, production de froid des bâtiments communaux, que ce sont des actes frauduleux qui ont motivé la cessation des relations contractuelles ; qu'un tel motif, évoqué pour la

première fois en appel, n'a jamais été opposé à la société envers laquelle aucune procédure de résiliation pour faute n'a été mise en oeuvre ; que la résiliation, par la commune, du contrat qui la liait à la société défenderesse a donc été prononcée sur le fondement du seul article 24 du CCAG précité, auquel se réfère d'ailleurs la délibération de résiliation, qui permet à l'administration de dénoncer discrétionnairement le contrat moyennant indemnisation de l'exploitant ; qu'il résulte de ce qui précède que la VILLE D'AMNEVILLE n'est pas fondée à soutenir que la résiliation aurait été décidée en raison d'actes frauduleux dont se serait rendu coupable la société Dalkia France portant sur la nature, la qualité ou la quantité des prestations et que ce motif ferait obstacle à toute indemnisation ; que par suite, la résiliation n'étant pas motivée par une faute de l'entreprise, la société Dalkia France a droit à la réparation intégrale du préjudice résultant pour elle de la résiliation anticipée de son contrat ;

En ce qui concerne le montant du préjudice :

Considérant que les premiers juges ont condamné la VILLE D'AMNEVILLE à verser à la société Dalkia France, au titre du manque à gagner pour la période restant à courir entre la date effective de la cessation des relations contractuelles, le 1er septembre 2006 et le terme contractuellement prévu, le 30 novembre 2007, la somme de 117 302 € correspondant à la perte de bénéfice escompté du fait de la cessation anticipée de son contrat ; que ce chiffre a été établi sur la base du bénéfice de l'exercice 2005 justifié par la production du compte d'exploitation et des factures clients ou fournisseurs de la société ; qu'en se bornant à affirmer que ces chiffres non certifiés seraient erronés et qu'il y aurait lieu de déduire les bénéfices des activités que la société Dalkia France a pu exercer suite à la résiliation du marché sans apporter aucun élément de nature à préciser ou corroborer ses dires, la VILLE D'AMNEVILLE ne conteste pas utilement le montant sollicité par la société Dalkia France et retenu par le Tribunal ; que par ailleurs, contrairement à ce que la requérante soutient, il résulte de l'instruction et notamment des factures de la société au titre de l'exercice 2006 adressées à la commune que l'avenant n° 7, lequel prévoyait la suppression de la mission P1 du complexe piscine-patinoire, qui n'a d'ailleurs pas été signé par la commune, n'a jamais été exécuté ; que la VILLE D'AMNEVILLE n'est dès lors pas fondée à soutenir que cette prestation doit être déduite du bénéfice escompté par la société ; qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de désigner un expert, que la commune requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont fixé ce chef de préjudice à la somme de 117 302 € ;

Sur les conclusions d'appel incident :

En ce qui concerne la facture BWT :

Considérant que la société Dalkia France fait valoir, au soutien de ses conclusions tendant à être indemnisée de la totalité de la facture de la société BWT, avoir exposé en pure perte la dépense de contrôle technique du traitement des eaux de la piscine facturée par la société BWX d'un montant total de 546,56 € dès lors que cette prestation couvre une période allant au-delà de la date d'effet de la résiliation et que contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, elle n'a pas amorti cette somme à hauteur de la moitié ; que toutefois, cette charge relève de celles qui auraient dues être comprises dans le calcul du manque à gagner ; que la société Dalkia France ne justifie ainsi pas d'un préjudice distinct de celui qui a déjà été indemnisé ; que par suite, ses conclusions d'appel incident ne peuvent être que rejetées ;

En ce qui concerne les frais de formation :

Considérant que la réalité des frais de reconversion des deux ingénieurs de la société affectés à Amnéville n'est pas établie ; que par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que le salarié de la société Dalkia France ayant bénéficié d'un contrat de qualification n'ait pas été embauché en raison de la résiliation du marché en litige ; que le lien de causalité entre le préjudice allégué par la société et la cessation anticipée du contrat qui la liait à la commune n'est par conséquent pas établi ; que la société n'est dès lors pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté ce chef de préjudice ;

En ce qui concerne l'achat d'une cuve d'acide chlorhydrique :

Considérant qu'en se bornant à produire un courrier dans lequel elle propose en septembre 2002 à la ville la mise en place d'une cuve d'acide chlorhydrique, la société Dalkia France ne justifie pas, en tout état de cause, de la réalité de ce chef de préjudice ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qu'il précède que la VILLE D'AMNEVILLE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement contesté le Tribunal administratif de Strasbourg l'a condamnée à verser à la société Dalkia France la somme de 117 530,50 € , assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 2006 et capitalisation de ces intérêts ; que les conclusions d'appel incident de la société Dalkia doivent également être rejetées ;

Sur les conclusions à fin d'exécution du jugement :

Considérant que le présent arrêt, qui statue sur des conclusions indemnitaires présentées dans le cadre d'un recours de plein contentieux, ne nécessite aucune mesure d'exécution autre que le versement de la somme accordée ; que, par suite, les conclusions de la société Dalkia France tendant à ce que la Cour prononce une injonction à l'encontre de la VILLE D'AMNEVILLE doivent être rejetées ;

Sur les conclusions de la société tendant à la mise en oeuvre des dispositions de L. 741-2 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-2 du code de justice administrative : sont également applicables les dispositions des alinéas 3 à 5 de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 ci-après reproduites : Article 41 alinéas 3 à 5 : ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte-rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux; pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires et condamner qui il appartiendra à des dommages intérêts. Pourront toutefois les faits diffamatoires étrangers à la cause donner ouverture, soit à l'action publique, soit à l'action civile des parties, lorsque ces actions leur auront été réservées par les tribunaux, et, dans tous les cas, à l'action civile des tiers ;

Considérant que les passages de la requête jugés diffamatoires par la société Dalkia France n'excèdent pas le droit à la libre discussion ; que par suite, les conclusions de la société Dalkia France tendant à ce que la Cour ordonne la suppression des passages en cause et celles tendant à la condamnation de la commune requérante au versement de 1 000 € à titre de dommages-intérêts doivent être écartées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la VILLE D'AMNEVILLE la somme de 1 500 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la VILLE D'AMNEVILLE et les conclusions d'appel incident de la société Dalkia France sont rejetées.

Article 2 : La VILLE D'AMNEVILLE est condamnée à verser à la société Dalkia France la somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3: Le présent arrêt sera notifié à la VILLE D'AMNEVILLE et à la société Dalkia France.

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N°09NC00464


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC00464
Date de la décision : 01/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: Mme Véronique GHISU-DEPARIS
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : FROESSEL ; FROESSEL ; FROESSEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-07-01;09nc00464 ?
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