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24/06/2010 | FRANCE | N°08NC01019

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 24 juin 2010, 08NC01019


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 juillet 2008, complété par un mémoire enregistré le 21 octobre 2008, présentée pour la société par actions simplifiée (SAS) BOFIDIS venant aux droits de la société Losser, dont le siège est route de Rhinau à Boofzheim (67860), par Mes Serpentier-Linares et Debord ; la SOCIETE BOFIDIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500878 en date du 7 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur les achats de viande à laquelle elle a ét

assujettie au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003,...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 juillet 2008, complété par un mémoire enregistré le 21 octobre 2008, présentée pour la société par actions simplifiée (SAS) BOFIDIS venant aux droits de la société Losser, dont le siège est route de Rhinau à Boofzheim (67860), par Mes Serpentier-Linares et Debord ; la SOCIETE BOFIDIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500878 en date du 7 mai 2008 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur les achats de viande à laquelle elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 décembre 2003, assortie des intérêts moratoires ;

2°) de prononcer la restitution des droits versés à compter du 1er janvier 2001, assortis des intérêts moratoires ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de

l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que le dégrèvement prononcé constitue une remise gracieuse attributive de droit et qu'il appartenait à l'administration de procéder à la mise en recouvrement d'une nouvelle imposition si elle entendait revenir sur la décision de dégrèvement ;

- que la perception de la taxe est illégale, dès lors que la France n'a pas notifié la modification de cette aide d'Etat à la Commission des Communautés européennes en méconnaissance des articles 87-1 et 88-3 du Traité CE ;

- qu'elle peut utilement invoquer, sur le fondement des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, dès lors que sa demande de restitution constitue un rehaussement ou une nouvelle imposition, que la décision de dégrèvement, qui comportait un accord implicite au contenu de la réclamation, était opposable à l'administration sur le fondement de la doctrine administrative 13 L 323, prise pour l'application de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales et selon laquelle les motifs d'une décision de dégrèvement peuvent engager l'administration sur son appréciation d'une situation de fait ;

- à titre subsidiaire :

- que le principe de sécurité juridique est méconnu, dès lors qu'une décision de dégrèvement, annulée quelques semaines plus tard, place le contribuable dans une situation d'incertitude et de confusion ;

- que la taxe sur les achats de viande constitue une taxe d'effet équivalent à un droit de douane, contraire aux articles 23 et 25 du traité CE et est incompatible avec le principe de libre circulation des marchandises au sein de la Communauté économique européenne ;

- à titre infiniment subsidiaire :

- que l'administration ne peut invoquer le principe d'affectation juridique résultant de l'article 18 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 dès lors que la règle de droit supérieure de l'article 88-3 du traité CE est méconnue ;

- que le principe pollueur-payeur est méconnu ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ;

Le ministre conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés ;

Vu la lettre en date du 12 mai 2010 par laquelle le président de la deuxième chambre a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de fonder sa décision sur un moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions relatives aux intérêts moratoires en l'absence de litige né et actuel ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité instituant la Communauté européenne ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code rural ;

Vu l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 ;

Vu la loi n° 96-1139 du 26 décembre 1996 ;

Vu la loi n° 2000-1353 du 30 décembre 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2010 :

- le rapport de Mme Stefanski, président

- et les conclusions de Mme Fischer-Hirtz, rapporteur public ;

En ce qui concerne la restitution des droits en principal et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 302 bis ZD du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : I. Il est institué, à compter du 1er janvier 1997, une taxe due par toute personne qui réalise des ventes au détail de viandes et de produits énumérés au II. (...) VI. La taxe est constatée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanction, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée (...) ; que l'article L. 256 du livre des procédures fiscales dispose : Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public à tout redevable des sommes, droits et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité (...) ; qu'aux termes de l'article L. 208 du même livre dans sa rédaction alors en vigueur : Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt légal. Les intérêts courent du jour du paiement. Ils sont capitalisés ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, sur réclamation de la SOCIETE BOFIDIS tendant au remboursement de la taxe sur les achats de viande qu'elle avait acquittée au titre de la période allant du 1er janvier 2001 au 31 mars 2003 pour un montant de 158 406 euros, l'administration a pris, le 29 septembre 2004, une décision d'admission totale ; que, cependant, par décision du 22 décembre 2004, le service a, après avoir informé la société de son intention de revenir sur sa décision de dégrèvement, prononcé le rejet de la réclamation ; que la requête de la SOCIETE BOFIDIS tendant à la restitution de la somme en litige, assortie des intérêts moratoires doit être regardée comme un recours de plein contentieux ;

Considérant que, lorsque l'administration, qui en conséquence d'une réclamation formée par le contribuable, a fait droit à une demande tendant à la restitution de taxes recouvrées selon les mêmes procédures que la taxe sur la valeur ajoutée, estime ultérieurement qu'elle a accordé ce dégrèvement à tort, il lui appartient, dès lors que la décision de dégrèvement a eu pour effet d'éteindre toute créance du Trésor et sans qu'y fasse obstacle l'absence de remboursement des sommes dégrevées, d'émettre, conformément aux dispositions de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales, un avis de mise en recouvrement pour le recouvrement de la créance fiscale dont elle se prévaut ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas contesté, qu'après avoir prononcé un dégrèvement de taxe sur les achats de viande, l'administration a estimé avoir procédé à tort à ce dégrèvement ; que, toutefois, il résulte de ce qui précède qu'à défaut d'avoir émis un nouvel avis de mise en recouvrement correspondant à ce montant, le service était tenu d'exécuter entièrement le dégrèvement prononcé le 29 septembre 2004 ;

En ce qui concerne les intérêts moratoires :

Considérant qu'en l'absence de litige né et actuel, les conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires sont irrecevables et ne peuvent, pas suite, qu'être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SOCIETE BOFIDIS est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la restitution des droits litigieux en principal ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions de condamner l'Etat à payer à la SOCIETE BOFIDIS une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L'Etat restituera à la SOCIETE BOFIDIS la somme de 158 406 euros au titre de la taxe sur les achats de viande à laquelle elle a été assujettie au titre de la période allant du

1er janvier 2001 au 31décembre 2003.

Article 2 : L'Etat versera à la SOCIETE BOFIDIS une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 7 mai 2008 est reformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE BOFIDIS et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 3 juin 2010, à laquelle siégeaient :

M. Commenville, président de chambre,

Mme Stefanski, président,

Mme Le Montagner, président.

Lu en audience publique, le 24 juin 2010.

Le rapporteur,

Signé : C. STEFANSKILe président,

Signé : B. COMMENVILLE

La greffière,

Signé : S. ROBINET

La République mande et ordonne au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. ROBINET

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N° 08NC01019


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08NC01019
Date de la décision : 24/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Action en désaveu

Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: Mme Colette STEFANSKI
Rapporteur public ?: Mme FISCHER-HIRTZ
Avocat(s) : SOCIÉTÉ D'AVOCATS FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-06-24;08nc01019 ?
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