Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 mai 2009 sous le n° 09NC00711, présentée pour M. Laurent A, demeurant ..., par Me Richard, avocat ; M. A demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0700140 en date du 10 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nancy, s'il a fait droit à ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle en date du 7 décembre 2006 refusant de lui délivrer une autorisation de création d'une officine de pharmacie à Messein, n'a condamné l'Etat à lui verser qu'une somme de 2 000 euros, qu'il estime insuffisante, en réparation du préjudice que lui a causé cette décision ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 125 461 euros en réparation de son préjudice financier et de 10 000 euros en réparation des ses préjudices moral et d'agrément ;
3°) subsidiairement, d'ordonner une expertise pour déterminer le préjudice de perte de revenus subi ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
-le Tribunal a refusé à tort d'indemniser la perte de revenus résultant de la différence entre les salaires qui lui ont été versés à l'occasion des remplacements effectués dans des officines et les revenus qu'il auraient perçus s'il avait été autorisé à ouvrir son officine, qui s'élèvent selon plusieurs études concordantes à un revenu mensuel moyen de 7 568 euros ;
-le Tribunal a minoré son préjudice moral et d'agrément ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 août 2009, par lequel le ministre de la santé et des sports conclut au rejet de la requête comme non fondée ;
II - Vu, enregistré au greffe de la Cour le 27 mai 2009 sous le n° 09NC00786, le recours présenté par le MINISTRE DE LA SANTE ET DES SPORTS ;
Le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0700140 en date du 10 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a, à la demande de M. B, d'une part, annulé l'arrêté du préfet de Meurthe-et-Moselle en date du 6 décembre 2006 refusant de lui délivrer une autorisation de création d'une officine de pharmacie à Messein, d'autre part, enjoint au préfet de Meurthe-et-Moselle de procéder, dans le délai de deux mois, à une nouvelle instruction de la demande de M. B, enfin, condamné l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros en réparation du préjudice causé par cette décision ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. B devant le Tribunal administratif de Nancy ;
Il soutient que :
- le Tribunal a commis une erreur de droit en annulant la décision attaquée ; les premiers juges se sont mépris sur la portée de l'article L. 5125-11 du code de la santé publique en appliquant à un ensemble de communes les règles applicables à une seule ; la commune de Messein ayant été rattachée à celle de Neuves maison par arrêté préfectoral du 16 avril 2002, la création de pharmacie ne pouvait être autorisée ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 14 août 2009, présentée pour M. Laurent B, demeurant ..., par Me Richard avocat ; M. B conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- dès lors que le rattachement de la commune de Messein aux communes de Neuves-Maisons et Chavigny n'a pas été opéré pour permettre la création d'une officine dans ces communes, lesquelles disposaient déjà de trois officines pour une population cumulée de 8508 habitants, soit 2836 habitants par officine, les dispositions de l'article L. 5125-11 du code de la santé publique n'ont pas pour effet d'interdire la création d'une officine à Messein ; ledit rattachement a en effet été décidé seulement pour l'application des dispositions de l'article L. 5125-12 du code de la santé publique qui ne fait qu'établir une carte départementale de la desserte des communes de moins de 2 500 habitants par les officines des communes de plus de 2 500 habitants ;
- la création d'une officine à Messein devait être autorisée dès lors que la zone géographique sur laquelle est envisagée la création est constituée d'un ensemble de communes contigües et que sa population est supérieure à 2 500 habitants ; en l'espèce, c'est le cas des communes de Messein et Méréville qui constituent un ensemble de 2 906 habitants ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu les ordonnances fixant la clôture de l'instruction le 14 décembre 2009 à 16 heures pour la requête n° 09NC00711 et le 15 décembre 2009 à 16 heures pour la requête n° 09NC00786.
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 mai 2010 :
- le rapport de M. Devillers, premier conseiller,
- les conclusions de M. Wallerich, rapporteur public,
- et les observations de Me Richard, avocat de M. A ;
Sur la jonction :
Considérant que les requêtes susvisées n° 09NC00711 et 09NC00786 sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt ;
Sur la légalité de la décision du 7 décembre 2006 du préfet de Meurthe-et-Moselle :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 5125-3 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable à la date de la décision en litige : Les créations, les transferts et les regroupements d'officines de pharmacie doivent permettre de répondre de façon optimale aux besoins en médicaments de la population résidant dans les quartiers d'accueil de ces officines ; qu'aux termes de l'article L. 5125-4 du même code : Toute création d'une nouvelle officine, tout transfert d'une officine d'un lieu dans un autre et tout regroupement d'officines sont subordonnés à l'octroi d'une licence délivrée par le représentant de l'Etat dans le département selon les critères prévus aux articles L. 5125-11, L. 5125-13, L. 5125-14 et L. 5125-15 (...) ; que, selon les deux derniers alinéas de l'article L. 5125-11 de ce code : Dans les communes de moins de 2 500 habitants dépourvues d'officine et dont la population n'a pas été ou n'est plus prise en compte pour une création d'officine dans une autre commune, une création peut être accordée dans une zone géographique constituée d'un ensemble de communes contiguës, si la totalité de la population de cette zone est au moins égale à 2 500 habitants. / Le représentant de l'Etat dans le département précise, dans sa décision, les communes prises en compte pour l'octroi de la licence. La totalité de la population de ces communes est considérée comme desservie par la nouvelle création ; et qu'aux termes de l'article L. 5125-12 dudit code, alors en vigueur : Pour les communes de moins de 2 500 habitants disposant d'au moins une officine à la date du 28 juillet 1999, un arrêté du représentant de l'Etat dans le département détermine, pour chacune de ces officines, la ou les communes desservies par cette officine, après avis d'une commission qui comprend des représentants de l'administration et des professionnels. / Seules peuvent être retenues les communes dont au moins 50 % des habitants sont desservis par l'officine de manière satisfaisante. Dans ce cas, la totalité des habitants de la commune est considérée comme desservie par l'officine pour l'application de l'alinéa ci-dessus. / L'arrêté prévu au premier alinéa détermine également la ou les communes de moins de 2 500 habitants dont au moins 50 % des habitants sont desservis de manière satisfaisante par une officine située dans une commune de 2 500 habitants et plus. Dans ce cas, la totalité des habitants de la commune est considérée comme desservie par l'officine. ; qu'il résulte des dispositions précitées que la création d'une nouvelle officine dans une commune de moins de 2 500 habitants est subordonnée à la condition que la pharmacie desserve des communes contigües dont la population totale est au moins égale à 2 500 habitants et n'a déjà été ni prise en compte pour une création d'officine dans une autre commune, ni rattachée par arrêté préfectoral à une commune déjà pourvue d'une officine ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par arrêté du 16 avril 2002, pris en application des dispositions précitées de l'article L. 5125-12 du code de la santé publique, le préfet de Meurthe-et-Moselle a considéré comme desservies par les officines de Neuves-Maisons les communes de Chavigny et Messein ; que dans ces conditions, sans que la circonstance que les communes contiguës de Messein et Méréville ne comportent aucune officine de pharmacie et comptent ensemble plus de 2 500 habitants ait une incidence sur cette appréciation, le préfet de Meurthe-et-Moselle a pu légalement, par sa décision litigieuse en date du 7 décembre 2006, refuser à M. A l'autorisation de créer une officine de pharmacie à Messein, au motif que la population de cette commune était rattachée à celle de Neuves-Maisons par l'arrêté susmentionné du 16 avril 2002 ; que, dès lors, le MINISTRE DE LA SANTE ET DES SPORTS est fondé à soutenir que le Tribunal administratif de Nancy s'est fondé à tort sur le motif susénoncé pour annuler cette décision ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, en l'absence d'autres moyens invoqués par M. A à l'encontre de la décision litigieuse et susceptibles d'être examinés par la Cour dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, que le MINISTRE DE LA SANTE ET DES SPORTS est fondé à soutenir, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a, à la demande de M. A, annulé la décision en date du 6 décembre 2006 susvisée du préfet de Meurthe-et-Moselle, lui a enjoint de procéder, dans le délai de deux mois, à une nouvelle instruction de la demande de M. A et a condamné l'Etat à lui verser une somme de 2 000 euros en réparation de son préjudice ;
Sur la responsabilité de l'Etat :
Considérant que les conclusions de la requête de M. A tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 125 461 euros en réparation de son préjudice financier et de 10 000 euros en réparation de ses préjudices moral et d'agrément, en raison de l'illégalité dont serait entachée la décision du 7 décembre 2006 susvisée du préfet de Meurthe-et-Moselle ne peuvent, compte tenu de ce qui précède, qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : le jugement n° 0700140 en date du 10 mars 2009 du Tribunal administratif de Nancy est annulé.
Article 2 : La demande de M. A tendant à l'annulation de la décision en date du
6 décembre 2006 du préfet de Meurthe-et-Moselle, à ce qu'il lui soit enjoint de procéder à une nouvelle instruction de sa demande dans un délai d'un mois à compter du jugement sous astreinte de 500 euros par jour de retard et ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 9 662 euros par mois à compter du 1er janvier 2007 au jour du prononcé du jugement, la somme de 2000 euros au titre des honoraires d'architecte et la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral et d'agrément est rejetée.
Article 3 : La requête n° 09NC00711 de M. A est rejetée.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Laurent A et au MINISTRE DE LA SANTE ET DES SPORTS.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
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N° 09NC00711-09NC00786