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10/06/2010 | FRANCE | N°09NC01346

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 10 juin 2010, 09NC01346


Vu la requête, enregistrée le 31 août 2009, présentée pour M. Ahmed A, domicilié ..., par Me Reghioui ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802667 du 2 juillet 2009 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 19 juin 2008 par lequel le préfet de police de Paris a ordonné son expulsion ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de Paris, sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice admi

nistrative, de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours à compter de la notification...

Vu la requête, enregistrée le 31 août 2009, présentée pour M. Ahmed A, domicilié ..., par Me Reghioui ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0802667 du 2 juillet 2009 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 19 juin 2008 par lequel le préfet de police de Paris a ordonné son expulsion ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de Paris, sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de réexaminer sa situation dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

Il soutient que :

- le préfet de police de Paris n'était pas territorialement compétent pour prendre l'arrêté attaqué, dès lors qu'à la date de cet arrêté il ne résidait plus à Paris ;

- le signataire de l'arrêté attaqué n'avait pas reçu de délégation de signature à l'effet de signer une décision d'expulsion ;

- sa présence en France ne constituait pas une menace grave pour l'ordre public eu égard notamment à la volonté de réinsertion qu'il a manifestée au cours de sa détention en suivant des cours et des formations ;

- l'arrêté attaqué est intervenu en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté attaqué est intervenu en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- compte tenu des risques qu'il encourt en cas de retour au Rwanda, l'arrêté attaqué a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en décidant son expulsion vers ce pays ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 18 septembre 2009, admettant M. A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mai 2010 :

- le rapport de M. Couvert-Castéra, président,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté attaqué :

Considérant qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter les moyens, qui ne comportent aucun élément de fait ou droit nouveau par rapport à l'argumentation développée par M. A devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, tirés, d'une part, de l'incompétence territoriale du préfet de police de Paris pour adopter l'arrêté attaqué et, d'autre part, de ce que le signataire de cet arrêté n'aurait pas reçu de délégation de signature à l'effet de signer une décision d'expulsion ;

En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté attaqué :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public. ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a été condamné par le Tribunal correctionnel de Paris le 16 août 2007, pour des faits commis entre le 20 juillet 2007 et le 15 août 2007, à une peine d'un mois d'emprisonnement pour acquisition, détention, offre ou cession non autorisées de stupéfiants, puis, le 27 septembre 2007, à une peine de dix-huit mois d'emprisonnement, pour des chefs de condamnation identiques à raison de faits commis entre le 25 et le 26 septembre 2007 ; qu'en estimant au vu de ces faits, eu égard à la gravité des infractions en cause et à leur répétition, que, malgré la volonté de réinsertion manifestée par le requérant au cours de sa détention, la présence en France de M. A constituait une menace grave pour l'ordre public à la date de l'arrêté attaqué, le préfet de police de Paris n'a, ainsi que l'a jugé à bon droit le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, pas fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ; que M. A, ressortissant rwandais né le 2 juin 1980, fait valoir qu'il est entré en France en novembre 2005, qu'il n'a plus d'attaches familiales dans son pays d'origine et qu'il a manifesté en suivant des cours et des formations pendant sa détention sa volonté de s'intégrer à la société française ; que, toutefois, compte tenu de la gravité des faits pour lesquels il a été condamné, la mesure d'expulsion attaquée n'a pas porté au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excédant ce qui était nécessaire à la défense de l'ordre public ; que, dès lors, l'arrêté attaqué n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en troisième lieu, que M. A ne saurait utilement se prévaloir, à l'encontre d'une mesure d'expulsion, de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui définissent les catégories d'étrangers auxquels une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit lorsque leur présence ne constitue pas une menace pour l'ordre public ;

Considérant, en quatrième lieu, que l'arrêté contesté ne fixe aucun pays de destination, ni n'implique nécessairement l'expulsion de M. A vers le Rwanda, son pays d'origine ; que, par suite, doit être écarté comme inopérant le moyen tiré par le requérant de ce que cet arrêté méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en raison des risques qu'il encourrait en cas de retour dans ce pays ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 19 juin 2008 par lequel le préfet de police de Paris a ordonné son expulsion ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-2 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ;

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de M. A, n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions du requérant tendant à ce que la Cour enjoigne au préfet de police de Paris de réexaminer sa situation ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Ahmed A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

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N° 09NC01346


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC01346
Date de la décision : 10/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: M. Olivier COUVERT-CASTERA
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : REGHIOUI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-06-10;09nc01346 ?
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