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31/05/2010 | FRANCE | N°08NC00483

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 31 mai 2010, 08NC00483


Vu la requête, enregistrée le 28 mars 2008, complétée par un mémoire enregistré le 5 mai 2010, présentée pour la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS, représentée par son gérant, ayant son siège 1 chemin du Château d'eau à Chatelay (39380), par Me Begin avocat ; La SOCIETE TERRIER PERE ET FILS demande à la Cour :

1) d'annuler le jugement n° 0600222 en date du 31 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Besançon l'a condamnée à verser à la commune de Santans une somme de 53.861,92 euros en réparation des malfaçons affectant son église et a mis à sa charge les

frais d'expertise ainsi qu'une somme de 1 000 euros à lui verser au titre de ...

Vu la requête, enregistrée le 28 mars 2008, complétée par un mémoire enregistré le 5 mai 2010, présentée pour la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS, représentée par son gérant, ayant son siège 1 chemin du Château d'eau à Chatelay (39380), par Me Begin avocat ; La SOCIETE TERRIER PERE ET FILS demande à la Cour :

1) d'annuler le jugement n° 0600222 en date du 31 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Besançon l'a condamnée à verser à la commune de Santans une somme de 53.861,92 euros en réparation des malfaçons affectant son église et a mis à sa charge les frais d'expertise ainsi qu'une somme de 1 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2) de rejeter la demande de la commune de Santans ;

3) subsidiairement, de limiter sa responsabilité à la réfection des travaux de la deuxième tranche ;

4) de mettre à la charge de la commune de Santans une somme de 2 000 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier : les premiers juges ont accordé une indemnisation de 53.861,92 euros TTC alors qu'il n'était demandé que 45.035,05 euros HT ;

- la commune de Santans ne justifiant pas ne pas pouvoir récupérer la TVA, la condamnation n'avait pas à inclure cette taxe ;

- si aucun procès verbal de réception n'a été établi, la première tranche de travaux a cependant bien été réceptionnée tacitement par la commune, réglée par elle, et ne peut donc plus donner lieu à l'engagement de sa responsabilité contractuelle ; d'ailleurs, à l'inverse, la deuxième tranche a bien fait l'objet d'un refus exprès de règlement, donc de réception ;

- les frais de reprise de la seule seconde tranche de travaux, pour 360 m², s'élèvent à 18 873,85 euros ;

- le jugement crée une situation d'enrichissement sans cause de la commune, qui n'a payé que la première tranche et obtient sa condamnation à supporter la charge de l'intégralité des travaux de reprise des deux tranches ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 août 2008, présenté pour la commune de Santans (39380), représentée par son maire en exercice, par la SCP Lutz-Alber-Pernot ; la commune de Santans conclut :

-au rejet de la requête ;

-à ce que le montant de 53.861,92 euros TTC alloué soit indexé sur l'indice BT 01 du coût de la construction, l'indice de référence étant celui publié le 19 juillet 2005 et l'indice multiplicateur étant celui publié le jour du paiement ;

-à ce que soit ordonnée la capitalisation des intérêts ;

-subsidiairement, à ce que la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS soit condamnée à la reprise de la totalité de l'ouvrage, sous astreinte de 300 euros par jour de retard passé un délai de trente jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

- à ce que soit mise à la charge de la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS une somme de 1 500 euros à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- elle n'est pas assujettie à la TVA et a droit d'être indemnisée TTC ;

- seule l'interruption des travaux nécessitée par la canicule de l'été 2003 explique que ceux ci aient été réalisés en deux parties ;

- les désordres constatés concernent l'ensemble des façades et ne sont pas simplement esthétiques puisque l'enduit s'est détaché sur 1 m² ; la première tranche est également impliquée en raison des raccords d'échafaudage trop visibles et des entourages de baies peu soignés ; l'entreprise a donc bien failli à son obligation de résultat ;

- aucune réception tacite de la première tranche des travaux n'a pu intervenir alors que le maintien des échafaudages empêchait de s'apercevoir des défauts des raccords d'exécution ; en outre, un courrier adressé à l'entreprise le 28 août 2003 attirait son attention sur la couleur du crépi et les raccords ; le règlement d'une partie des travaux est intervenu dès lors que le marché ne stipulait pas de retenue de garantie et n'était pas achevé dans sa totalité ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, le courrier par lequel les parties ont été informées que l'arrêt paraissait susceptible d'être fondé sur un moyen soulevé d'office ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2010:

- le rapport de M. Devillers, premier conseiller,

- les conclusions de M. Wallerich , rapporteur public,

- et les observations de Me Devevey, avocat de la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS ainsi que celles de Me Sancey, avocat de la commune de Santans ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la commune de Santans, ayant obtenu le 7 novembre 2000 un permis de construire, assorti de diverses prescriptions, pour la restauration de son église inscrite à l'inventaire des monuments historiques, a confié les travaux à la société TERRIER PERE ET FILS par contrats des 14 mars 2002 pour la réfection des enduits extérieurs et 22 mai 2002 pour la maçonnerie nécessaire à la réfection des contreforts ; que les travaux démarrés en décembre 2002 ont porté sur les enduits du clocher et de la partie nord de l'église jusqu'à leur interruption en juin 2003 en raison des congés et de la canicule de l'été 2003 ; que cette première partie des travaux a donné lieu au paiement d'une facture de 27 070 euros HT ; que la seconde partie des travaux, réalisée de septembre 2003 à novembre 2003, a porté sur la maçonnerie de réfection des contreforts et sur les enduits des partie sud et les deux ailes de l'église ; que l'entreprise a alors émis une deuxième facture, d'un montant de 22 550 euros HT, que la commune a refusé de régler à la suite d'un constat de non-conformité dressé par la direction régionale des affaires culturelles (DRAC), qui a déclaré le 18 novembre 2003 refuser le versement de la subvention annoncée ; que la commune de Santans a demandé au Tribunal administratif de Besançon la condamnation de la société TERRIER PERE ET FILS à lui payer la somme de 45.035,05 euros HT au titre des réparations, et de 24.810 euros correspondant au montant des subventions dont elle a été privée ;

Sur les conclusions principales de la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

Considérant qu'il résulte du jugement attaqué et des pièces du dossier de première instance que le tribunal a écarté la demande de condamnation de l'entreprise à une somme de 24.810 euros, correspondant au montant des subventions escomptées par la commune, comme se rapportant à un préjudice de caractère incertain ; qu'en ce qui concerne le montant demandé au titre de la réparation des malfaçons, les premiers juges ont statué au delà des conclusions dont il étaient saisis par la commune demanderesse, en lui allouant un montant toutes taxes comprises, de 53.861,92 euros, alors qu'il n'était demandé qu'une somme de 45.035,05 euros hors taxes ; que, par suite, la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS est fondée à soutenir qu'en allouant cette somme, le tribunal administratif a statué au-delà des conclusions dont il était saisi ; qu'il y a lieu de réformer dans cette mesure le jugement du 31 janvier 2008 du Tribunal administratif de Besançon et de limiter au montant de 45.035,05 euros hors taxes la somme due par la requérante à la commune de Santans ;

En ce qui concerne la responsabilité contractuelle :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que si un paiement de la première partie des travaux a été effectué après leur interruption en juin 2003, aucune réception expresse n'a été prononcée, ni aucune prise de possession valant réception tacite de l'ouvrage n'est intervenue ; que l'échafaudage resté en place ne permettait pas au maître d'ouvrage de prendre la mesure des défauts affectant les raccords d'exécution à ses différents niveaux ; qu'enfin, les travaux de réfection des enduits commencés durant la première partie des travaux ont été achevés durant la seconde et les prestations réalisées ne peuvent donc être dissociées ; que la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS n'est dès lors pas fondée à soutenir que la première partie des travaux ayant été réceptionnée sans réserve, sa responsabilité contractuelle serait, dans cette mesure, éteinte ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise que des malfaçons affectent l'intégralité des enduits et maçonneries réalisées ; qu'en ce qui concerne les travaux effectués de décembre 2002 à juin 2003, les raccords d'exécution au niveau des échafaudages sont visibles et les encadrements de portes et fenêtres grossièrement exécutés ; qu'il en va de même des travaux de la seconde tranche, pour lesquels l'expert a constaté sur les façades ouest est et sud une mauvaise qualité du talochage de l'enduit fini, lissé très grossièrement, et une réalisation grossière de l'entourage des encadrements de baies ; que ces travaux sont, compte tenu des caractéristiques de l'ouvrage en cause et des prescriptions du permis de construire, esthétiquement inacceptables et engagent la responsabilité contractuelle de l'entreprise ; que celle ci a donc été à bon droit condamnée à la réparation de l'intégralité des malfaçons constatées, pour un montant des travaux de reprise estimé par l'expert à la somme de 45 035,05 euros HT susmentionnée ;

En ce qui concerne la dette de la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la commune de Santans n'a pas réglé à la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS la facture émise par celle ci pour avoir paiement de la deuxième tranche de travaux réalisés ; qu'il y a lieu, dès lors, de soustraire le montant correspondant, de 22 550 euros HT, de la somme de 45 035,05 euros HT mise à la charge de l'entreprise pour la réparation des malfaçons, de réformer le jugement et limiter la condamnation de la société TERRIER PERE ET FILS envers la commune de Santans au versement d'une somme de 22 485,50 euros HT ;

Sur les conclusions incidentes de la commune de Santans :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 256 B du code général des impôts : ''Les personnes morales de droit public ne sont pas assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée pour l'activité de leurs services administratifs, sociaux, éducatifs, culturels et sportifs lorsque leur non-assujettissement n'entraîne pas de distorsion dans les conditions de la concurrence'' ; qu'en vertu de ces dispositions, la commune de Santans, présumée ne pas être en mesure de déduire la taxe sur la valeur ajoutée grevant les travaux de réfection de son église, alors que la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS n'apporte aucun élément de nature à combattre cette présomption, est fondée à demander que l'indemnité susmentionnée de 22 485,5 euros HT soit majorée de la TVA, et porté ainsi au montant de 26 892,66 euros TTC, demeurant dans la limite du montant total de l'indemnité réclamée en première instance;

Considérant en deuxième lieu que si la commune de Santans n'a, à aucun moment de la procédure, demandé que la condamnation prononcée à son profit porte intérêts, la demande de capitalisation des intérêts formée par elle le 22 août 2008 devant la cour doit être regardée comme comportant nécessairement demande des intérêts de droit ; qu'il y a lieu de faire droit à cette demande et de fixer au 14 février 2006, date d'enregistrement par le tribunal administratif de Besançon de la demande d'indemnité formée par la commune de Santans, le point de départ de ces intérêts ; que la capitalisation des intérêts a été demandée par la commune le 22 août 2008; qu'à cette date les intérêts étant dus pour plus d'une année entière, il y a lieu d'ordonner leur capitalisation ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure ;

Considérant, en dernier lieu, que doivent être rejetées comme irrecevables les conclusions de la commune de Santans tendant, d'une part, à ce que le montant qui lui est alloué soit indexé sur l'indice BT 01 du cout de la construction, constituant, en tout état de cause, une demande nouvelle en appel ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant que les frais de l'expertise ordonnée le 11 février 2005 ont été liquidés et taxés à la somme de 1 779 euros HT, par ordonnance du président du Tribunal administratif de Besançon en date du 13 octobre 2005 ; qu'il y a lieu de mettre ces frais à la charge définitive de la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que la commune de Santans demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Santans la somme de 1.000 euros au titre des frais exposés par la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La somme que la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS a été condamnée à verser à la commune de Santans par le jugement du Tribunal administratif de Besançon du 31 janvier 2008 est ramenée à 26 892,66 euros TTC. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 14 février 2006. Les intérêts échus le 22 août 2008 seront capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Besançon du 31 janvier 2008 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Les frais d'expertise sont mis à la charge définitive de la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS et de l'appel incident de la commune de Santans est rejeté.

Article 5 : La commune de Santans versera une somme de 1 000 euros (mille euros) à la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE TERRIER PERE ET FILS et à la commune de Santans.

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08NC00483


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08NC00483
Date de la décision : 31/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: M. Pascal DEVILLERS
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : SCP BEGIN DEVEVEY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-05-31;08nc00483 ?
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