La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/04/2010 | FRANCE | N°09NC00683

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 08 avril 2010, 09NC00683


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 11 mai 2009 pour la télécopie et 15 mai 2009 pour l'original, présentée pour la SARL SCHIOCCHET, dont le siège social est ..., par Me Schönberger ; la SARL SCHIOCCHET demande à la Cour de :

1°) réformer le jugement n° 0601433 en date du 10 mars 2009 du Tribunal administratif de Nancy en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Beuvillers à l'indemniser du préjudice que lui a causé l'arrêté du 28 juin 2006 du maire interdisant le stationnement des poids lourds et des véhicules à usage

de transport sur le territoire de la commune ;

2°) condamner la commune...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 11 mai 2009 pour la télécopie et 15 mai 2009 pour l'original, présentée pour la SARL SCHIOCCHET, dont le siège social est ..., par Me Schönberger ; la SARL SCHIOCCHET demande à la Cour de :

1°) réformer le jugement n° 0601433 en date du 10 mars 2009 du Tribunal administratif de Nancy en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Beuvillers à l'indemniser du préjudice que lui a causé l'arrêté du 28 juin 2006 du maire interdisant le stationnement des poids lourds et des véhicules à usage de transport sur le territoire de la commune ;

2°) condamner la commune de Beuvillers à lui verser une indemnité de

22 119, 45 euros pour réparer le préjudice économique et une indemnité de 10 000 euros pour le préjudice extrapatrimonial, majorées des intérêts à compter de la réception de la demande préalable et de leur capitalisation ;

3°) mettre à la charge de la commune de Beuvillers la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La SARL SCHIOCCHET soutient que :

- la faute commise par la commune en prenant un arrêté illégal entraîne sa responsabilité ;

- le tribunal administratif a relevé l'illégalité de l'arrêté du 28 juin 2006 du fait de la portée générale et absolue de l'interdiction de stationnement qu'il édictait et de l'absence de l'avis du préfet requis par l'article R. 411-8 du code de la route ;

- le préjudice a été constitué par les nombreux allers et retours quotidiens entre la commune de Boulange, où a dû stationner l'autocar, et la commune de Beuvillers, où réside M. et où il prend son service ;

- le coût de ces placements supplémentaires s'élève à 21 034,85 euros pour l'autocar et 1 084,61 euros pour le véhicule privé de M. pour la période du 25 juin 2006 au 12 décembre 2006 ;

- l'image de la société requérante a été atteinte par l'exclusion de ses véhicules du territoire de la commune alors qu'ils effectuent les transports scolaires quotidiens des enfants de cette commune ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 juillet 2009, présenté pour la commune de Beuvillers par Me Gasse ; elle conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de la SARL SCHIOCCHET au titre des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ; la commune fait valoir que :

- le siège de la SARL SCHIOCCHET est situé à Boulange et non à Beuvillers ;

- les frères et les trois soeurs de M. Jean-Claude , tous titulaires du permis transport en commun, résident à Boulange ;

- aucun client ne s'arrête à Beuvillers ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 4 septembre 2009, présenté pour la SARL SCHIOCCHET; la société maintient l'ensemble de ses conclusions et demande à la Cour d'ordonner sous astreinte de 500 euros par jour l'enlèvement de l'ensemble des panneaux d'interdiction de stationner dans un délai de trois jours à compter de la notification du présent arrêt ; elle soutient que :

- son siège social est bien à Beuvillers, et non à Boulanges ;

- M. Jean-Claude est effectivement le conducteur de l'autocar qui dessert Beuvillers ;

- l'ensemble des cars a dû se replier sur la commune de Boulange ;

- elle dispose d'un droit d'usage sur les usoirs de la commune, qui sont des dépendances du domaine public ;

- seuls ses véhicules ont été verbalisés ;

- la commune n'a pas exécuté le jugement n° 0700139 du 10 mars 2009 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mars 2010 :

- le rapport de M. Brumeaux, président,

- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré produite le 1er avril 2010 pour la SARL SCHIOCCHET ;

Considérant que, par arrêté en date du 28 juin 2006, le maire de Beuvillers a interdit le stationnement des poids lourds et des véhicules à usage de transport en commun sur le territoire de la commune ; que cette mesure est restée en vigueur jusqu'à son retrait par arrêté du 12 décembre 2006 ; que, par jugement du 10 mars 2009, le Tribunal administratif de Nancy a annulé l'arrêté du 28 juin 2006 au motif qu'il avait été édicté sans l'avis du préfet requis par l'article R. 411-8 du code de la route et en raison de la portée générale et absolue de l'interdiction qu'il édictait ; que la SARL SCHIOCCHET relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires dirigées contre la commune de Beuvillers ;

Sur les conclusions indemnitaires :

Considérant, en premier lieu, que la SOCIETE SCHIOCCHET fait valoir le préjudice né de la nécessité, pour le véhicule assurant un service au départ de Beuvillers, de stationner dans une commune voisine et, par voie de conséquence, d'accomplir un parcours plus long ; que si elle ne justifie pas précisément l'étendue de son préjudice en se bornant à présenter un calcul théorique de la distance supplémentaire à effectuer par son autocar, l'interdiction litigieuse a, nonobstant la possibilité, au demeurant contestée par la requérante, de stationner ce dernier sur une propriété privée située à Beuvillers et indépendamment de la question de savoir où se situe son siège effectif, nécessairement allongé les déplacements du véhicule que la société a exploité durant la période du 28 juin au 12 décembre 2006 sur le territoire de la commune ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice économique subi de ce chef en lui accordant une somme de 500 euros ;

Considérant, en deuxième lieu, que si la SOCIETE SCHIOCCHET se prévaut du préjudice personnel subi par un de ses gérants, M. Jean-Claude , en tant que ce dernier, conducteur de l'autocar, a dû emprunter sa voiture personnelle pour se rendre de son domicile à la commune voisine où celui-ci est stationné, il ne résulte pas de l'instruction et il n'est pas davantage allégué que la société requérante aurait pris à sa charge les frais supplémentaires que l'intéressé aurait exposés ; qu'un tel préjudice ne peut ainsi en tout état de cause ouvrir droit à indemnisation dans le cadre de la présente instance ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'arrêté litigieux aurait porté une grave atteinte à l'image de la société requérante auprès des habitants de Beuvillers alors même qu'elle est chargée du transport scolaire des enfants de cette commune ;

Considérant enfin que si la société fait état de frais de procédure qu'elle aurait exposés dans le cadre de poursuites diligentées à son encontre devant la juridiction de proximité pour infractions à l'arrêté en cause dont elle a été relaxée du fait du retrait de celui-ci, elle ne produit aucun élément permettant à la Cour d'apprécier l'étendue de ce préjudice ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL SCHIOCCHET est fondée à demander la condamnation de la commune de Beuvillers à lui verser une somme de 500 euros ; qu'il y a ainsi lieu d'annuler l'article 2 du jugement attaqué par lequel le tribunal a rejeté le surplus des conclusions de sa requête ;

Sur les intérêts et leur capitalisation :

Considérant que la SARL SCHIOCCHET a droit aux intérêts légaux afférents à la somme précitée de 500 euros à compter du 22 août 2006, date de sa demande préalable auprès de la commune de Beuvillers ; que la capitalisation des intérêts a été demandée le 18 février 2008 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; qu'il y a lieu, par suite, en application de l'article 1154 du code civil, de faire droit à cette demande à cette date ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de celle-ci ;

Sur les conclusions tendant à l'exécution du jugement n° 0700139 :

Considérant que l'article L. 911-1 du code de justice administrative prévoit que :

Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ;

Considérant que le jugement du tribunal administratif n° 0700139 en date du

10 mars 2009 dont la société SCHIOCCHET demande l'exécution n'est pas celui frappé d'appel dans le cadre de la présente instance ; que, par suite, cette demande, à laquelle il a été répondu au titre de l'instance 09NC00682, ne peut être accueillie ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SARL SCHIOCCHET, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la commune de Beuvillers au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Beuvillers une somme de 1 500 euros en application des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement du Tribunal administratif de Nancy en date du 10 mars 2009 est annulé.

Article 2 : La commune de Beuvillers est condamnée à verser à la SARL SCHIOCCHET une indemnité de 500 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 22 août 2006. Les intérêts échus le 18 février 2008 seront capitalisés à cette date ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de celle-ci.

Article 3 : La commune de Beuvillers versera une somme de 1 500 euros à la SARL SCHIOCCHET en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la SARL SCHIOCCHET est rejeté.

Article 5 : Les conclusions présentées par la commune de Beuvillers en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL SCHIOCCHET et à la commune de Beuvillers.

''

''

''

''

2

N° 09NC00683


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC00683
Date de la décision : 08/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Michel BRUMEAUX
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : TABERY et WAUTHIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-04-08;09nc00683 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award