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01/04/2010 | FRANCE | N°09NC00925

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 01 avril 2010, 09NC00925


Vu la requête, enregistrée le 22 juin 2009, présentée pour Mme Florence A, demeurant ..., par la société civile professionnelle d'avocats Cahn et associés ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605174 rendu le 16 avril 2009 par le Tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a accueilli partiellement les conclusions de la société anonyme Gartiser tendant à ce qu'elle la garantisse des condamnations prononcées à son encontre à la demande de la commune de Bitche en réparation des désordres survenus dans le cadre d'un marché portant sur l

a réalisation de travaux d'aménagement du glacis de la citadelle de Bitche ;

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Vu la requête, enregistrée le 22 juin 2009, présentée pour Mme Florence A, demeurant ..., par la société civile professionnelle d'avocats Cahn et associés ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605174 rendu le 16 avril 2009 par le Tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a accueilli partiellement les conclusions de la société anonyme Gartiser tendant à ce qu'elle la garantisse des condamnations prononcées à son encontre à la demande de la commune de Bitche en réparation des désordres survenus dans le cadre d'un marché portant sur la réalisation de travaux d'aménagement du glacis de la citadelle de Bitche ;

2°) de rejeter ces conclusions d'appel en garantie et de la mettre ainsi hors de cause ;

3°) de mettre à la charge de la société anonyme Gartiser le paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le rapport d'expertise n'a pas retenu sa responsabilité dans la survenance des désordres ;

- le cahier des clauses techniques particulières du marché imposait clairement à la société Gartiser de fournir des pierres conformes à la norme X. P. B. 10.601 qui définit les prescriptions générales d'emploi des pierres naturelles ;

- le maître d'oeuvre n'était pas tenu d'intervenir dans le choix du matériau, qui devait être fait par l'entrepreneur dans le respect normes techniques contractuellement applicables ;

- elle a signalé la mauvaise qualité de la pierre utilisée par l'entrepreneur dans les comptes rendus des réunions de chantier du 12 avril et du 19 avril 2001 ;

- elle pouvait se fier à la fiche technique présentée par le fournisseur des pierres, la société anonyme Carrières Reinberger ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 3 novembre 2009, présenté pour la société anonyme Gartiser, par Me Deleau ; la société Gartiser conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à la condamnation de Mme A à la garantir à hauteur de 80 % des condamnations prononcées à son encontre par le jugement attaqué ; elle demande également qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme A en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la responsabilité de Mme A est engagée tant au titre de sa mission de conception des travaux qu'au titre de sa mission de direction de l'exécution des travaux ainsi qu'au titre de sa mission d'assistance aux opérations de réception ;

- c'est la commune de Bitche et Mme A qui ont choisi la société anonyme Carrières Reinberger parmi les quatre fournisseurs de pavés en grès consultés ;

- le maitre d'oeuvre n'a fait procéder à aucun essai sur ces pavés avant de proposer de les retenir, ni avant la pose de ceux-ci, ni même avant la réception des travaux ;

- le rapport d'expertise a relevé l'imprécision du marché en ce qui concerne les caractéristiques des pierres à mettre en oeuvre ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le décret n°93-1268 du 29 novembre 1993 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 2010 :

- le rapport de M. Couvert-Castéra, président,

- les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public,

- et les observations de Me Deleau, avocat de la société anonyme Gartiser ;

Considérant que par un marché conclu le 30 octobre 2000 la commune de Bitche a confié à la société Gartiser la réalisation du lot n° 1 : Dépose, démolition, terrassements, voiries et assainissement des travaux d'aménagement du glacis de la citadelle de Bitche ; que la maîtrise d'oeuvre de ces travaux a été confiée à un groupement dont Mme A, architecte, est le mandataire, par un marché conclu le 17 décembre 1999 ; que, postérieurement à la réception de ces travaux, sont apparus des désordres consistant en un délitement de la surface ainsi que dans des épaufrures des arrêtes de la quasi-totalité des pavés qui constituent le revêtement du parc de stationnement aménagé sur le glacis ; que le Tribunal administratif de Strasbourg a jugé que ces désordres résultaient de la mise en oeuvre de pavés en grés ne répondant pas aux normes de résistance à la compression et de résistance au gel et étaient de nature à engager la responsabilité décennale des constructeurs, puis a condamné sur ce fondement la société Gartiser, seule poursuivie par la commune de Bitche, à les réparer ; que ce jugement n'est pas contesté sur ces questions ni sur la fixation du montant du préjudice résultant de ces désordres, l'appel principal de Mme A et les conclusions d'appel incident de la société Gartiser ne portant que sur l'article 6 dudit jugement, par lequel le Tribunal a condamné Mme A à garantir ladite société à hauteur de 40 % des sommes mises à sa charge ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'article 1.06 du chapitre I du cahier des clauses techniques particulières du marché (C.C.T.P.) que l'ensemble des ouvrages doit satisfaire aux normes énumérées par cet article, parmi lesquelles celle qui définit les prescriptions générales d'emploi des pierres naturelles ; que la société Gartiser était chargée de la fourniture des matériaux du lot n°1 en vertu de l'article 2.02.1 du chapitre II dudit cahier ; que l'article 1.04.4, intitulé Pavage pierre , du chapitre III dudit document stipule que l'entrepreneur devra la réalisation d'un revêtement en pavage constitué ... des éléments suivants : ... des dalles de pierre ingélives de St André ou de Jaumont de teinte beige-rosé au choix du maître d'oeuvre .... Localisation : ... pavage pour parking compris rampe d'accès et raccordement sur rue ; que, par un avenant n°1 conclu le 7 juillet 2001, les parties sont convenues de modifier les stipulations du marché concernant le revêtement du parking en pavage pierre ; que, si la commune de Bitche a retenu dans le cadre de cet avenant la variante proposée par la société Gartiser incluant la pose de pavés en grès fournis par la société anonyme Carrières Reinberger , choisie parmi quatre autres fournisseurs auprès desquels la société Gartiser avait sollicité des devis, ledit avenant n'a pas pour autant modifié les stipulations du marché qui faisaient obligation à la société Gartiser de mettre en oeuvre un matériau répondant aux normes techniques contractuellement applicables et il ne résulte pas de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que des pavés en grès n'étaient pas susceptibles de répondre à ces normes ; que la société Gartiser a manqué à cette obligation ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte du cahier des clauses administratives particulières du marché de maîtrise d'oeuvre que le groupement dont Mme A était le mandataire était investi d'une mission incluant les études d'avant-projet, qui comportent la définition des matériaux utilisés, la direction de l'exécution des travaux, qui comporte la vérification de la conformité des travaux aux prescriptions des pièces contractuelles, ainsi que l'assistance du maître d'ouvrage lors des opérations de réception ; qu'aux termes de l'article 1.08.1 du C.C.T.P.: Les opérations de contrôle relatives à ... l'acceptation des matériaux ... seront effectuées à la demande du maître d'oeuvre, conformément aux prescriptions ... du présent C.C.T.P (...) et qu'aux termes de l'article 2.01.7 dudit document : L'entrepreneur du présent lot devra fournir à ses frais, sur simple demande du maître d'oeuvre, un échantillonnage complet ... des matériaux à mettre en oeuvre . ; qu'il appartenait à Mme A, d'une part, de s'assurer, lors du choix des pavés en grès retenus par l'avenant n°1 ainsi que lors de la livraison de ceux-ci, qu'ils étaient conformes aux normes techniques contractuellement applicables et notamment aux prescriptions générales d'emploi des pierres naturelles qui définissent la résistance à la compression et la résistance au gel et, d'autre part, lors de la réception des travaux, d'attirer l'attention du maître d'ouvrage sur l'absence de conformité de l'ouvrage aux spécifications du marché ; qu'il résulte de l'instruction que Mme A a manqué à ces obligations ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la responsabilité prépondérante de la société Gartiser dans la fourniture des matériaux qu'elle a mis en oeuvre, il sera fait une juste appréciation de la responsabilité de chacun des constructeurs en condamnant Mme A, sur le fondement de sa responsabilité quasi-délictuelle à l'égard de la société Gartiser, à garantir cette dernière à hauteur de 30 % du montant des sommes mises à sa charge par le jugement susvisé du Tribunal administratif de Strasbourg ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que Mme A est seulement fondée à demander que la proportion dans laquelle elle a été condamnée par le jugement attaqué à garantir la société Gartiser soit ramenée de 40 % à 30 % et, d'autre part, que doivent être rejetées les conclusions d'appel incident de la société Gartiser tendant à ce que cette proportion soit portée à 80 % ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A, qui n'est pas la partie perdante pour l'essentiel dans la présente instance, la somme que la société Gartiser demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la société Gartiser, sur le fondement des mêmes dispositions, à verser une somme de 1 500 euros à Mme A ;

DÉCIDE :

Article 1er : Mme A est condamnée à garantir la société Gartiser à hauteur de 30 % des sommes mises à sa charge par le jugement n° 0605174 rendu le 16 avril 2009 par le Tribunal administratif de Strasbourg.

Article 2 : Ledit jugement est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : La société anonyme Gartiser versera à Mme A une somme de 1 500 € (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête d'appel de Mme A est rejeté.

Article 5 : Les conclusions d'appel incident de la société anonyme Gartiser sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Florence A et à la société anonyme Gartiser.

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N° 09NC00925


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC00925
Date de la décision : 01/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SOUMET
Rapporteur ?: M. Olivier COUVERT-CASTERA
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : CAHN G. -CAHN T. - BERGMANN - BORGHI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-04-01;09nc00925 ?
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