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18/03/2010 | FRANCE | N°09NC00007

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 18 mars 2010, 09NC00007


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 janvier 2009, complétée par mémoire enregistré le 28 juillet 2009, présentée pour Mme Sylvie A, demeurant ..., par Me Alexandre ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703896-0801327 du 19 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation, d'une part, de la décision en date du 4 avril 2007 par laquelle la directrice départementale des affaires sanitaires et sociales du Bas-Rhin a procédé à sa mutation et a réduit ses primes au t

itre de l'année 2007, ensemble la décision du 21 juillet 2007 rejetant son rec...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 janvier 2009, complétée par mémoire enregistré le 28 juillet 2009, présentée pour Mme Sylvie A, demeurant ..., par Me Alexandre ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703896-0801327 du 19 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation, d'une part, de la décision en date du 4 avril 2007 par laquelle la directrice départementale des affaires sanitaires et sociales du Bas-Rhin a procédé à sa mutation et a réduit ses primes au titre de l'année 2007, ensemble la décision du 21 juillet 2007 rejetant son recours gracieux, et, d'autre part, de l'arrêté en date du 23 janvier 2008 du ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité et du ministre de la santé, de la jeunesse et des sports lui infligeant un avertissement ;

2°) d'annuler lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre l'administration de la réaffecter sur son précédent poste et de lui payer ses indemnités, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- en premier lieu, la réduction de la prime n'a pas été précédée d'un entretien préalable ; en deuxième lieu, cette réduction est intervenue à titre disciplinaire et s'ajoute aux autres sanctions dont elle a fait l'objet ; en troisième lieu, l'indemnité forfaitaire versée aux agents des services déconcentrés de la santé publique ne peut varier qu'en fonction du quantum de travaux supplémentaires réalisés ; enfin, la réduction de sa prime n'est pas justifiée ;

- le changement d'affectation est, d'une part, intervenu sans convocation préalable, ni information ; d'autre part, il avait un objet disciplinaire et n'a pas été pris dans l'intérêt du service ; la procédure disciplinaire n'a pas été respectée ; il s'ajoutait aux autres sanctions dont elle a fait l'objet ; enfin, il n'était pas justifié puisque sa notation du 26 septembre 2006 ne comportait aucun reproche ; le rapport confidentiel de Mme B du 20 octobre 2005, confirmé par une note de la même personne du 19 octobre 2006, ainsi qu'une lettre du 23 novembre 2006 du directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation, ne lui ont pas été communiqués ;

- l'avertissement est, d'une part, intervenu sans que la règle du contradictoire soit respectée ; elle n'a pu consulter son dossier ; il n'a notamment pas été tenu compte du mémoire qu'elle a adressé à l'administration le 7 février 2008 ; d'autre part, l'avertissement s'ajoute aux autres sanctions qui lui ont été infligées ; enfin, il n'est pas justifié ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 mars 2009, présenté par le ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité et de la ville et le ministre de la santé et des sports, qui concluent au rejet de la requête ;

Ils soutiennent que :

- la baisse de primes a été précédée d'un entretien qui s'est déroulé le 4 avril 2007 ; elle était justifiée par la qualité insuffisante du travail fourni par l'appelante ; pour évaluer la manière de servir de Mme A, il pouvait être tenu compte de faits sanctionnés disciplinairement ; la décision du 4 avril 2007 est motivée ;

- Mme A a été informée de son changement d'affectation le 4 avril 2007 avant que ne soit prise la mesure ; elle a pu consulter son dossier ; ce changement d'affectation ne constitue pas une sanction disciplinaire, mais a été décidé dans l'intérêt du service ; les notations établies en 2000 et 2005 ainsi que les rapports et notes émanant de son supérieur hiérarchique et de l'agence régionale de l'hospitalisation démontrent la mauvaise manière de servir de l'intéressée ;

- Mme A a été informée, par courrier du 7 novembre 2007, de l'engagement d'une procédure disciplinaire à son encontre, de sa possibilité de consulter son dossier et de présenter des observations ; l'administration n'avait pas à répondre aux observations émises par l'appelante le 7 février 2008 ; l'avertissement est la seule sanction disciplinaire qui lui a été infligée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 22 avril 1905, et notamment son article 65 ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 2002-63 du 14 janvier 2002 relatif à l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires des services déconcentrés ;

Vu le décret n° 2004-925 du 1er septembre 2004 portant attribution d'une indemnité de technicité au corps des inspecteurs de l'action sanitaire et sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 février 2010 :

- le rapport de M. Tréand, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens articulés à l'encontre des décisions litigieuses :

Sur la décision en date du 4 avril 2007 de la directrice départementale des affaires sanitaires et sociales du Bas-Rhin en tant qu'elle réduit de 5% l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires et l'indemnité de technicité accordées à Mme A en 2007 :

Considérant que, par décision du 4 avril 2007, la directrice départementale des affaires sanitaires et sociales du Bas-Rhin a décidé de réduire de 5% les primes de Mme A pour l'année 2007 suite aux fautes professionnelles répétées dans l'exercice des missions qui lui sont confiées dans le cadre du service des établissements de santé ; que, le 10 avril suivant, la même autorité a indiqué au service Gestion des ressources de la DDASS du Bas-Rhin qu' en raison d'une sanction disciplinaire, l'attribution indemnitaire de Mme Sylvie A pour l'année 2007 correspondra à 95% du barème indemnitaire ; qu'ainsi, la diminution du régime indemnitaire de l'appelante au titre de 2007, dès avant que ne lui soit infligé un avertissement prononcé le 23 janvier 2008, reposait, contrairement à ce que soutiennent les ministres intimés, sur un motif d'ordre disciplinaire ; que la décision de diminuer les primes attribuées à un fonctionnaire ne fait pas partie de la liste limitative des sanctions disciplinaires dont les agents de la fonction publique de l'Etat peuvent faire l'objet en application de l'article 66 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 ; que, par suite, la décision en date du 4 avril 2007 de la directrice départementale des affaires sanitaires et sociales du Bas-Rhin, en tant qu'elle réduit de 5% l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires et l'indemnité de technicité accordées à Mme A en 2007, doit être annulée comme entachée d'excès de pouvoir ;

Sur la décision en date du 4 avril 2007 de la directrice départementale des affaires sanitaires et sociales du Bas-Rhin en tant qu'elle a modifié l'affectation de Mme A :

Considérant qu'aux termes de l'article 65 de la loi susvisée du 22 avril 1905 : Tous les fonctionnaires civils et militaires (...) ont droit à la communication personnelle et confidentielle de toutes les notes, feuilles signalétiques et tous autres documents composant leur dossier, soit avant d'être l'objet de mesure disciplinaire ou d'un déplacement d'office, soit avant d'être retardés dans leur avancement à l'ancienneté ;

Considérant que, par décision en date du 4 avril 2007, la directrice départementale des affaires sanitaires et sociales du Bas-Rhin a décidé de muter d'office Mme A ; que si cette dernière n'a été affectée qu'ultérieurement au sein du service médico-social, il n'est pas contesté qu'elle a été immédiatement déchargée de ses fonctions au sein du service des établissements de santé ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, cette mutation, prise en considération de la personne, a été prononcée sans que Mme A ait été préalablement mise utilement à même de consulter son dossier ; que, par suite, elle est intervenue en méconnaissance des dispositions suscitées de l'article 65 de la loi du 22 avril 1905 et est entachée d'illégalité ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision en date du 4 avril 2007 par laquelle la directrice départementale des affaires sanitaires et sociales du Bas-Rhin a procédé à sa mutation et a réduit ses primes au titre de l'année 2007, ensemble la décision du 21 juillet 2007 rejetant son recours gracieux ; qu'en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, elle est également fondée à demander à la Cour d'enjoindre la directrice départementale des affaires sanitaires et sociales du Bas-Rhin de lui restituer sa précédente affectation et de lui verser les primes qui lui ont été retirées au titre de l'année 2007, le présent arrêt impliquant nécessairement que l'administration prenne une décision en ce sens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de prescrire à l'administration de procéder à ces mesures d'exécution dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

Sur l'avertissement du 23 janvier 2008 :

Considérant que dès lors, d'une part, que, par le présent arrêt, la décision en date du 4 avril 2007 de la directrice départementale des affaires sanitaires et sociales du Bas-Rhin, en tant qu'elle réduit de 5% l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires et l'indemnité de technicité accordées à Mme A en 2007 comme ayant un caractère disciplinaire est annulée, et, d'autre part, que l'avertissement infligé à l'appelante le 23 janvier 2008 était fondé sur les mêmes faits disciplinairement fautifs, ledit avertissement est entaché d'illégalité dès lors qu'il constitue une seconde sanction reposant sur les mêmes motifs ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 23 janvier 2008 des ministres du travail, des relations sociales et de la solidarité et de la santé, de la jeunesse et des sports lui infligeant un avertissement ;

Sur l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 19 novembre 2008 est annulé.

Article 2 : La décision en date du 4 avril 2007 par laquelle la directrice départementale des affaires sanitaires et sociales du Bas-Rhin a procédé à la mutation de Mme A et a réduit ses primes au titre de l'année 2007, ensemble la décision du 21 juillet 2007 rejetant son recours gracieux, ainsi que l'arrêté en date du 23 janvier 2008 du ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité et du ministre de la santé, de la jeunesse et des sports lui infligeant un avertissement sont annulés.

Article 3 : La directrice départementale des affaires sanitaires et sociales du Bas-Rhin est enjointe de restituer à Mme A sa précédente affectation et de lui verser les primes qui lui ont été retirées au titre de l'année 2007, dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Article 4 : L'Etat versera à Mme A une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Sylvie A, au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville et au ministre de la santé et des sports.

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09NC00007


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC00007
Date de la décision : 18/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Olivier TREAND
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SCP ALEXANDRE LEVY KAHN ; SCP ALEXANDRE LEVY KAHN ; SCP ALEXANDRE LEVY KAHN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-03-18;09nc00007 ?
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