Vu la requête, enregistrée le 22 décembre 2008 au greffe de la Cour, présentée pour la SA FRANCIOLI, dont le siège social est 7 rue de l'Arne à Lavans les Dole (39700), par Me Maurin, avocat ;
La SA FRANCIOLI demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0700943 du Tribunal administrative de Besançon du 23 octobre 2008 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à ce que le montant du marché en date du 2 octobre 2006 conclu avec le syndicat intercommunal d'assainissement des Ruchottes soit arrêté à la somme de 130 921,15 euros HT et à sa condamnation à lui verser 5 000 euros à titre des dommages et intérêts pour résistance abusive ;
2°) de condamner le syndicat intercommunal d'assainissement des Ruchottes à corriger le montant du marché litigieux pour le porter à la somme de 130 921,15 euros ;
3°) de condamner le syndicat intercommunal d'assainissement des Ruchottes à lui verser la somme de 23 701,20 euros HT ;
4°) de condamner ledit syndicat intercommunal à lui verser 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
5°) d'enjoindre audit syndicat intercommunal de produire l'ensemble des originaux des détails estimatifs et des actes d'engagement souscrits par tous les candidats ;
6°) de mettre la somme de 3 000 euros à la charge du syndicat intercommunal d'assainissement des Ruchottes au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
La SA FRANCIOLI soutient que :
- le devis estimatif du 31 juillet 2006 d'un montant de 130 921,15 euros HT stipulait expressément que la variante de moins value, soit 23 701,20 euros HT, était comprise dans l'acte d'engagement ;
- l'acte d'engagement du 31 juillet 2006 a été offert à la signature pour un montant de 130 921,15 euros et stipulait que la variante était déjà comprise dans l'acte ;
- l'acte d'engagement signé n'est pas celui qu'elle a dressé, mais un acte établi par le syndicat intercommunal ;
- la commune et le syndicat ont commis une erreur à propos du montant sur lequel la moins value devait être déduite ;
- l'erreur commise revient à ce que son offre soit inférieure de 44 % à celle de la seconde entreprise candidate, ce qui n'est pas possible ;
- elle n'a pas formulé deux offres, mais une seule ;
- le devis estimatif et l'acte d'engagement signalent tous les deux la variante en moins value comprise ;
- la commune a unilatéralement modifié le montant proposé par elle, qui ne correspond ni à son offre ni à son devis estimatif ;
- le syndicat ne peut invoquer la force obligatoire d'un contrat pour lequel une erreur de rédaction a été commise ;
- la commune et le syndicat n'ont jamais remis en cause le fait que l'acte d'engagement et le détail estimatif comportaient une mention manuscrite précisant que le prix prenait en compte la moins value ni contesté que la variante en moins value avait été acceptée ;
- la signature du marché par elle résulte d'une erreur qui ne pouvait être ignorée par la commune et le syndicat intercommunal ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 avril 2009, présenté pour le syndicat intercommunal d'assainissement les Ruchottes, par Me Rémond, avocat ; il conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SA FRANCIOLI en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que :
- les conclusions tendant à sa condamnation à verser la somme de 23 701,20 euros sont nouvelles en appel et irrecevables ;
- aucune erreur n'a été commise dans l'examen de l'offre soumise par la société requérante ; l'offre de base était exprimée pour 130 921,15 euros et à laquelle était jointe une variante en moins value d'un montant de 23 701,20 euros ;
- l'acte d'engagement signé par les parties et accepté par le maître de l'ouvrage le 2 octobre 2006 mentionne sans ambiguïté que le prix du marché s'établit à 107 464,95 euros ;
- la notification du marché avec l'ordre de service n° 1 rappelle ce montant ;
- la société FRANCIOLI était tenue d'exécuter son marché moyennant ce quantum, aucune erreur ayant été commise dans son attribution ;
- aucune faute n'a été commise par le maître de l'ouvrage, qui a proposé à l'entrepreneur d'achever le bassin d'orage au prix initialement arrêté dans l'offre de base pour un montant de 24 475,61 euros et de résilier à l'amiable le marché concernant le réseau d'eaux pluviales ;
- les conclusions indemnitaires présentées pour résistance abusive sont irrecevables, faute d'avoir été précédées d'une demande préalable ;
- la circonstance que la SA FRANCIOLI ait pu commettre une erreur dans l'établissement de son offre est sans influence sur la validité de sa soumission et de son acte d'engagement ;
- aucune erreur matérielle n'entache les documents contractuels signés par les parties ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 9 juin 2009, présenté pour la SA FRANCIOLI ; elle maintient l'ensemble de ses conclusions et soutient que :
- ses conclusions indemnitaires relèvent de la même cause et poursuivent le même objectif qu'en première instance, à savoir obtenir le paiement de la somme correspondant à son offre ;
- le maître de l'ouvrage a soustrait par erreur une variante déjà déduite ;
- l'erreur matérielle porte uniquement sur le prix des travaux réseau des eaux pluviales ;
- son offre variante déduite deux fois présente des écarts très importants avec les autres offres et l'estimation du maître d'oeuvre, excluant ainsi la bonne foi du maître de l'ouvrage ;
- la modification unilatérale opérée ne traduit pas la commune intention des parties et remet en cause les conditions de mise en concurrence ;
Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 27 octobre 2009, présenté pour la SA FRANCIOLI, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures ;
Vu l'ordonnance en date du 16 octobre 2009 du président de la 3ème chambre fixant la clôture de l'instruction de la présente affaire au 6 novembre 2009 à 16 heures ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 décembre 2009 :
- le rapport de M. Brumeaux, président,
- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,
- et les observations de Me Maurin, avocat de la SA FRANCIOLI ;
Considérant que le syndicat intercommunal d'assainissement des Ruchottes, agissant en qualité de mandataire du maître d'ouvrage, la commune de Lavans-les-Dole, a engagé une procédure adaptée de marché public, sur le fondement de l'article 28 du code des marchés publics, en vue d'attribuer le marché pour l'extension du réseau d'eaux pluviales de la commune et la création d'un bassin d'orage ; que la SA FRANCIOLI a été retenue par délibération du 4 août 2006 du syndicat intercommunal, en raison du montant de son offre, la moins disante, et du délai d'exécution de quatre mois proposé ; que, par acte d'engagement en date du 2 octobre 2006, le marché lui a été confié pour un montant de 107 464,95 euros HT et l'ordre de service de commencer les travaux lui a été notifié le même jour ; qu'estimant toutefois qu'une erreur matérielle avait été commise par le syndicat intercommunal, qui aurait déduit une seconde fois le montant d'une variante en moins-value déjà intégrée dans l'acte d'engagement présenté dans le cadre de la procédure, la SA FRANCIOLI demande que le prix du marché soit arrêté à 130 921,15 euros et que le maître de l'ouvrage soit condamné à lui verser la somme de 23 701,20 euros HT ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la SA FRANCIOLI :
Sur les conclusions tendant à ce que la cour arrête le montant du marché à la somme de 130 921,15 euros HT et condamne le syndicat intercommunal des Ruchottes à lui verser une somme de 23 701 euros HT :
Considérant que, si le caractère définitif des prix stipulés au marché s'oppose en principe à toute modification unilatérale ultérieure, ce principe ne saurait recevoir application dans le cas exceptionnel où il s'agit d'une erreur purement matérielle et d'une nature telle qu'il serait impossible à l'une des parties de s'en prévaloir de bonne foi ; que, dans un tel cas, le juge du contrat, saisi de conclusions en ce sens présentées par l'un des cocontractants, a le pouvoir de procéder à la modification du prix stipulé afin de réparer cette erreur ;
Considérant que si la SA FRANCIOLI fait valoir que l'offre qu'elle a présentée le 21 juillet 2006 précisait, par une mention manuscrite voir variante déjà comprise dans l'acte d'engagement , lequel mentionnait un montant hors taxes de 130 921,15 euros HT, et que le détail estimatif comportait la même précision, il résulte toutefois de l'instruction que l'acte d'engagement en date du 2 octobre 2006, signé par les deux parties, comportait un montant hors taxes de 107 464,95 euros après déduction d'une moins value de 23 701,20 euros HT, qui figurait dans l'offre initiale ; qu'à supposer que ce dernier montant ait été arrêté à la suite d'un malentendu quant à la formulation de l'offre de l'entrepreneur, la réfaction ainsi opérée ne saurait être regardée, en tout état de cause, comme procédant d'une erreur purement matérielle, quand bien même le montant du marché litigieux serait inférieur de 38 % à la moyenne des offres des entreprises concurrentes ; qu'au surplus, la société requérante a signé le même jour l'ordre de service n°1 par lequel le syndicat intercommunal d'assainissement lui a notifié le marché pour le montant précité de 107 464,95 euros et a ordonné le commencement des travaux, et n'a contesté ce montant que six semaines après, alors que les travaux avaient déjà substantiellement avancé ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner les mesures d'instruction sollicitées, que la SA FRANCIOLI n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à ce que le montant du marché soit arrêté à 130 921,15 euros HT ; que, par suite, ses conclusions indemnitaires doivent être également rejetées ;
Sur les conclusions de la SA FRANCIOLI tendant à la condamnation du syndicat intercommunal d'assainissement des Ruchottes à lui verser 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que le syndicat intercommunal des Ruchottes a refusé de rectifier le montant du marché litigieux ; que, par suite, lesdites conclusions indemnitaires ne peuvent qu'être rejetées ;
Sur les conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du syndicat intercommunal d'assainissement des Ruchottes, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la SA FRANCIOLI au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la SA FRANCIOLI une somme de 2 000 euros au profit du syndicat intercommunal d'assainissement des Ruchottes en application des mêmes dispositions ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SA FRANCIOLI est rejetée.
Article 2 : La SA FRANCIOLI versera au syndicat intercommunal d'assainissement des Ruchottes une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SA FRANCIOLI et au syndicat intercommunal d'assainissement des Ruchottes.
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