Vu, la requête, enregistrée le 11 février 2009, complétée par mémoires enregistrés les
26 mars et 16 octobre 2009, présentée pour M. et Mme Michel A demeurant ... par Me Chiron et Martin ; M. et Mme A demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0501439 du 11 décembre 2008 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 1999 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent que :
- l'administration ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de distributions au sens de l'article 111-c du code général des impôts consenties par l'EURL Petit Immobilier ;
- la remise en cause du prix de cession par l'EURL de l'appartement sis à Langres, aux troisième et quatrième étages d'un immeuble dénué d'ascenseur est fondée sur la comparaison avec un bien ne présentant pas les mêmes caractéristiques, le bien dont s'agit étant exposé au nord, éclairé en partie par des vélux sans aucune vue sur la place Jeanson et constitué de combles n'acceptant que des meubles bas ; que sa cession à Mme A était une condition du développement ultérieur de l'entreprise qui, n'ayant pu s'en défaire en temps utile, avait l'obligation de dégager des liquidités ;
- la preuve n'est pas rapportée par l'administration de ce que l'EURL aurait fait exécuter en 1999 par des membres de son personnel des travaux au profit de M. et Mme A qui n'auraient donné lieu à aucune facturation alors qu'il résulte du nombre d'heures accomplies par les deux seuls ouvriers de l'EURL qu'elle était dans l'impossibilité d'effectuer les travaux n'ayant pas donné lieu à facturation ; que l'administration a commis une confusion avec les employés des SCI Carrefour de Joinville et Les Trois Jumeaux et ne démontre pas que ces employés auraient agi pour le compte de l'EURL ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 août 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ; le ministre conclut au rejet de la requête ;
Il soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est de nature à entraîner la décharge des impositions contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 octobre 2009 :
- le rapport de Mme Le Montagner, président,
- et les conclusions de Mme Fischer-Hirtz, rapporteur public ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a imposé entre les mains de M. et Mme A, sur le fondement des dispositions de l'article 111-c du code général des impôts, les avantages consentis en 1999 par l'EURL Petit Immobilier, dont M. A est l'associé unique, sous la forme d'une part, de la cession à Mme A d'un appartement à un prix inférieur à sa valeur vénale et, d'autre part, de travaux effectués sur des biens leur appartenant en propre ;
Sur la cession d'un appartement au profit de Mme Muriel Petit :
Considérant que l'EURL Petit Immobilier, qui exerce les activités de marchand de biens et de promoteur immobilier, a cédé le 27 août 1999 à l'épouse de son gérant, Mme Muriel Petit, un appartement en duplex, d'une surface au sol de 126 m2, situé aux 3ème et 4ème étages d'un immeuble sis 28, rue Gambetta à Langres pour un prix fixé à 570 000 francs ; que, pour estimer que le prix unitaire de 4 523 francs par mètre carré consenti lors de cette transaction s'écartait de la valeur vénale du bien, l'administration a pris en considération le prix de vente unitaire de
6 451 francs par mètre carré ressortant de la cession faite à un tiers par l'EURL, quelques mois auparavant, d'un appartement d'une surface de 124 mètres carrés situé au premier étage du même immeuble ; que la valeur vénale du bien cédé à Mme Petit a en conséquence été reconstituée en appliquant à la surface au sol le prix unitaire de 6 800 francs le mètre carré pour ensuite pratiquer sur le montant réévalué un abattement de 20 % afin de tenir compte de la situation mansardée de l'appartement, d'une surface habitable limitée à 92 mètres carrés ; que l'administration a ultérieurement suivi l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires et limité l'insuffisance de valeur vénale, arrêtée à 670 000 francs, à la somme de 100 000 francs ;
Considérant que dans les hypothèses où la procédure contradictoire a été suivie, il revient à l'administration d'apporter la preuve que l'entreprise s'est écartée d'une gestion commerciale normale en renonçant à percevoir une recette qui lui était due ; qu'en l'espèce, il n'est pas établi que le prix de l'appartement d'une configuration traditionnelle situé au premier étage et retenu comme seul terme de comparaison correspondrait à la valeur vénale du bien cédé à Mme A telle qu'elle résulterait de l'état du marché des biens de qualité comparable dès lors que cet élément de référence ne comporte pas un niveau suffisant de pertinence compte tenu de l'influence sur le prix de vente des paramètres affectant le duplex acquis par Mme A, et tenant à l'absence d'ascenseur, au défaut de fenêtres donnant sur la place Jeanson, à une orientation moins favorable, au caractère mansardé, et à des ouvertures sur l'extérieur constituées pour l'essentiel, ainsi qu'il résulte notamment des photographies versées au dossier, de velux donnant sur les toits ; que la circonstance, invoquée par l'administration, que le cachet d'un appartement mansardé refait à neuf et doté de poutres apparentes soit recherché par un certain type de clientèle ne peut à elle seule, en l'absence de termes de comparaison susceptibles de refléter l'état du marché, suffire à établir qu'en l'espèce un prix préférentiel a été consenti à Mme A ; que, dès lors, M. et Mme A sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté leur demande tendant à la décharge de l'imposition résultant du rehaussement de la valeur vénale du bien acquis par Mme A, regardé comme constitutif d'une distribution au sens de l'article 111-c du code général des impôts ;
Sur les travaux effectués sur des biens appartenant en propre à M. et Mme A :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a estimé, à partir d'un relevé produit en cours de vérification par l'EURL Petit Immobilier, que les deux ouvriers employés par l'entreprise avaient effectué sur des biens immobiliers appartenant en propre à M. et Mme A au cours des onze mois de l'exercice 1999 une durée totale d'intervention, évaluée à 2 070 heures, n'ayant pas donné lieu à facturation ; qu'elle a en conséquence rattaché aux résultats imposables de l'exercice 1999 le chiffre d'affaires correspondant aux recettes que l'EURL s'était abstenue de percevoir, déterminé en appliquant aux heures tenues pour non facturées le prix moyen horaire de 126 francs et imposé M. et Mme A à raison de l'avantage ainsi consenti sur le fondement des dispositions de l'article 111-c du code général des impôts ;
Considérant toutefois qu'il résulte de l'état des données sociales relatif à l'année 1999 que les deux employés de l'EURL Petit Immobilier, M. B et Mme C n'ont accompli ensemble au sein de l'entreprise qu'un nombre de 2 264 heures de travail ; que la requérante soutient, sans être contredite, qu'elle a facturé au cours de l'exercice considéré un montant de
668 heures de travail, auquel il convient d'ajouter le temps consacré par les salariés aux immeubles acquis par l'entreprise, ressortant sur une période de onze mois à 1 468 heures ; qu'elle précise également que les travaux réalisés sur les biens appartenant à M. et Mme A ont été en 1999 réalisés par des salariés des SCI du Carrefour de Joinville et des Trois Jumeaux dont elle joint copie des bulletins de salaires ; qu'en se bornant a faire état d'un relevé de 351 heures et 21 heures accomplies respectivement par M. B et Mme C sur des immeubles appartenant en propre à M. et Mme A, et dont il n'apparait pas qu'elles ne seraient pas au nombre des
668 heures déjà facturées, l'administration ne rapporte pas la preuve qui lui incombe des faits sur lesquels elle se fonde pour soutenir que l'EURL Petit Immobilier aurait renoncé à percevoir des recettes qui lui étaient dues ; que, par suite, M. et Mme A sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a refusé de leur accorder la décharge de l'imposition procédant de l'avantage résultant de la renonciation à recettes consentie par l'EURL ;
Sur la demande tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. et Mme A une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : M. et Mme A sont déchargés de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 1999 du fait de l'imposition entre leurs mains des avantages consentis par l'EURL Petit Immobilier sous la forme de la cession d'un appartement à un prix inférieur à sa valeur vénale et, d'autre part, de travaux effectués sur des biens leur appartenant en propre.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme A la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Michel A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
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N° 09NC00180