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02/02/2009 | FRANCE | N°07NC01180

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 02 février 2009, 07NC01180


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 août 2007, complétée par un mémoire enregistré le 14 novembre 2007, présentée pour M. Philippe X, demeurant ..., par Me Boaretto, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600930 en date du 12 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, des décisions du ministre de l'intérieur retirant des points de son permis de conduire, d'autre part, de la décision en date du 19 mai 2006 par laquelle le préfet de la Meuse lui a enjoin

t de restituer son titre de conduite ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 20 août 2007, complétée par un mémoire enregistré le 14 novembre 2007, présentée pour M. Philippe X, demeurant ..., par Me Boaretto, avocat ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0600930 en date du 12 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, des décisions du ministre de l'intérieur retirant des points de son permis de conduire, d'autre part, de la décision en date du 19 mai 2006 par laquelle le préfet de la Meuse lui a enjoint de restituer son titre de conduite ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du ministre de l'intérieur des 20 et 25 septembre 2005 lui retirant des points de son permis de conduire et du 24 avril 2006 invalidant son permis, et celle du préfet de la Meuse du 19 mai 2006 l'obligeant à le restituer ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à lui verser au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- les retraits de points ne lui sont pas opposables, faute de lui avoir été notifiés lors de la commission de chaque infraction ;

- il n'a pas été informé, lors de la commission des infractions, de la totalité de l'information prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, notamment du nombre exact de points dont la perte était encourue ; ce fait constitue une violation des dispositions de l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- concernant l'infraction du 25 septembre 2005, il n'a pas été destinataire d'un procès verbal mentionnant notamment l'existence d'un traitement automatisé et la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9 dudit code ;

- concernant l'infraction du 20 septembre 2005, il n'a pas reçu les informations susmentionnées, l'administration produisant un avis de contravention ne correspondant pas à cette infraction ;

- le principe du contradictoire serait méconnu si l'Etat se contentait de produire en cours d'instance les documents justifiant que l'information obligatoire a été délivrée ;

- le stage de reconstitution partielle du capital de points, qu'il a suivi, aurait dû être pris en

compte ; quatre points doivent donc lui être attribués à la date du 21 juillet 2006, date à laquelle les retraits de points litigieux n'étaient pas définitifs ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er octobre 2007, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales qui conclut au rejet de la requête, en soutenant qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 janvier 2009 :

- le rapport de M. Devillers, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions à fins d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-3 du code de la route : «Lorsque l'intéressé est avisé qu'une des infractions entraînant retrait de points a été relevée à son encontre, il est informé des dispositions de l'article L. 223-2, de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès conformément aux articles L. 225-1 à L. 225-9. / Lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'auteur de l'infraction est informé que le paiement de l'amende ou l'exécution de la composition pénale entraîne le retrait du nombre de points correspondant à l'infraction reprochée, dont la qualification est dûment portée à sa connaissance ; il est également informé de l'existence d'un traitement automatisé de ces points et de la possibilité pour lui d'exercer le droit d'accès. Le retrait de points est porté à la connaissance de l'intéressé par lettre simple quand il est effectif.» ; qu'aux termes de l'article R. 223-3 du même code, selon lesquelles : «I. - Lors de la constatation d'une infraction entraînant retrait de points, l'auteur de celle-ci est informé qu'il encourt un retrait de points si la réalité de l'infraction est établie dans les conditions définies à l'article L. 223-1. / II. - Il est informé également de l'existence d'un traitement automatisé des retraits et reconstitutions de points et de la possibilité pour lui d'accéder aux informations le concernant. Ces mentions figurent sur le document qui lui est remis ou adressé par le service verbalisateur. Le droit d'accès aux informations ci-dessus mentionnées s'exerce dans les conditions fixées par les articles L. 225-1 à

L. 225-9.» ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le ministre de l'intérieur a notifié à

M. X le retrait de quatre points de son permis de conduire à la suite d'une infraction commise le

25 mars 2006 et a récapitulé les pertes de points antérieures d'un total cumulé de huit points, qui avaient été notifiées par lettre simple, pour des infractions commises les 20 et 25 septembre 2005 et 2 janvier 2006 ;

Considérant, en premier lieu, que les conditions de la notification au conducteur des retraits de points de son permis de conduire, prévue par les dispositions de l'article L. 223-3 du code de la route, ne conditionnent pas la régularité de la procédure suivie et partant la légalité de ces retraits ; que cette procédure a pour seul objet de rendre ceux-ci opposables à l'intéressé et de faire courir le délai dont il dispose pour en contester la légalité devant la juridiction administrative ; que la circonstance que l'administration ne soit pas en mesure d'apporter la preuve que la notification des retraits successifs, effectuée par lettre simple, a bien été reçue par son destinataire, ne saurait lui interdire de constater que le permis a perdu sa validité, dès lors que, dans la décision procédant au retrait des derniers points, elle récapitule les retraits antérieurs et les rend ainsi opposables au conducteur qui demeure recevable à exciper de l'illégalité de chacun de ces retraits ; que le moyen tiré du défaut de notification des points retirés à l'occasion de la constatation de chacune des infractions doit donc être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions législatives et réglementaires précitées que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire, à la suite d'une infraction dont la réalité est établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues aux articles L. 223-3 et

R. 223-3 de ce code, qui constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tous moyens, qu'elle a satisfait à cette obligation préalable d'information ; que si en vertu des dispositions des articles 429 et 537 du code de procédure pénale, les procès-verbaux établis par les officiers ou les agents de police judiciaire pour constater les infractions au code de la route, font foi jusqu'à preuve contraire en ce qui concerne la constatation des faits constitutifs des infractions, il n'en va pas de même de la mention portée sur les procès-verbaux relative à l'information prévue par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route qui n'est pas revêtue de la même force probante ; que, toutefois, même contredite par le contrevenant, cette indication peut emporter la conviction du juge si elle est corroborée par d'autres éléments ;

Considérant que M. X excipe, à l'encontre des décisions de retrait de points prises à l'occasion des infractions commises les 20 et 25 septembre 2005, du moyen tiré de l'absence de délivrance, au moment de l'infraction, de l'information prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; que le ministre, qui reconnaît ne pas être en mesure d'apporter la preuve de la délivrance de l'information requise lors de la constatation de ces deux infractions, se borne, concernant l'infraction du 20 septembre 2005, à produire un exemplaire de modèle identique à l‘avis de contravention qu'aurait reçu le requérant à la suite à l'infraction constatée par un radar automatique, comportant l'information requise, et concernant l'infraction du 25 septembre 2005, à exposer que la délivrance de cette information doit être présumée compte tenu de la mauvaise foi du requérant dans trois des quatre retraits de points contestés; que, dans ces conditions, l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe de la délivrance des informations requises lors de la constatation des infractions précitées ; qu'il en résulte que les décisions par lesquelles le ministre a retiré respectivement deux et trois points du capital de M. X, à la suite de ces deux infractions sont illégales en ce qu'elles reposent sur une procédure irrégulière ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 223-6 du code de la route que le préfet est tenu de rejeter toute demande de reconstitution de points acquis à la suite d'un stage de sensibilisation lorsque le conducteur a reçu, avant le dernier jour du stage, la notification régulière d'une décision du ministre de l'intérieur l'informant que son permis de conduire a perdu sa validité par suite de l'épuisement de son capital de points ; qu'ainsi, M. X n'est, pas fondé à soutenir que les quatre points acquis à la date du 21 juillet 2006 à la suite de sa participation à un tel stage devaient être pris en compte par le préfet de la Meuse dans sa décision en date du 19 mai 2006 lui ordonnant de restituer son permis ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'administration ne pouvait légalement retirer du compte de M. X les cinq points correspondant aux infractions des 20 et 25 septembre 2005 ; qu'ainsi, le solde de son compte s'établissant au 24 avril 2006 à cinq points, la décision du ministre de l'intérieur l'informant de la perte de validité de son permis de conduire est entachée d'illégalité ; que

M. X est donc fondé à en demander l'annulation ; que, par voie de conséquence, dans la mesure où la décision du 19 mai 2006 du préfet de la Meuse l'enjoignant de restituer son titre de conduite est fondée sur la décision ministérielle, M. X est, également, fondé à en demander l'annulation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de l'Etat, qui est, dans la présence instance, la partie perdante, la somme de 800 euros demandée par M. X, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement en date du 12 juin 2007 du Tribunal administratif de Nancy ensemble les décisions du ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire retirant cinq points affectés au capital du permis de conduire de M. X à la suite des infractions des 20 et 25 septembre 2005, la décision du 24 avril 2006 dudit ministre annulant ledit permis et la décision du 19 mai 2006 du préfet de la Meuse faisant injonction à M. X de restituer le titre sont annulés.

Article 2 : L'Etat (ministre de l'intérieur) versera à M. X une somme de 800 euros (huit cents euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Philippe X et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Copie en sera adressée au préfet de la Meuse.

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07NC01180


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07NC01180
Date de la décision : 02/02/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: M. Pascal DEVILLERS
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : LEGICONSEIL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2009-02-02;07nc01180 ?
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