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08/01/2009 | FRANCE | N°07NC01706

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 08 janvier 2009, 07NC01706


Vu I°) la requête, enregistrée le 7 décembre 2007 sous le n° 07NC01706, présentée par M. Laïd X, demeurant ..., par Me Geny-La Rocca ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703589 en date du 8 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juin 2007 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre le pr

fet du Bas-Rhin de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la not...

Vu I°) la requête, enregistrée le 7 décembre 2007 sous le n° 07NC01706, présentée par M. Laïd X, demeurant ..., par Me Geny-La Rocca ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703589 en date du 8 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juin 2007 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre le préfet du Bas-Rhin de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, durant le temps de l'instruction, une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 50 € par jour, en application des dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser 1 500 € en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, un tel règlement valant renonciation à l'aide juridictionnelle ;

Il soutient qu'il appartient à l'administration de justifier qu'à la date de la décision attaquée, le signataire bénéficiait d'une délégation suffisamment précise et qu'elle a été régulièrement publiée pour la décision relative au titre de séjour et pour celle portant obligation de quitter le territoire ; que la motivation retenue est particulièrement laconique, le préfet se bornant à reprendre les termes de l'avis médical du médecin inspecteur ; que le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour ; que le préfet a commis une erreur de droit en s'estimant lié par l'avis médical en date du 27 février 2007 ; qu'il a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'il peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'en raison des évènements traumatisants qu'il y a vécus, son retour en Algérie aggraverait son état mental ; qu'il est effectivement suivi en France au niveau psychiatrique ; que la décision portant obligation de quitter le territoire est privée de base légale en raison de l'illégalité du refus de délivrance d'un titre de séjour qui lui a été opposé ; que la décision fixant le pays de retour est contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et aux dispositions de l'article 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il a fait partie de l'armée algérienne de 2002 à 2004 et appartient à une famille de militaires et de gendarmes ; que trois des siens ont été tués le 27 septembre 2004 ; qu'il a été lui-même menacé et recherché ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 janvier 2008, présenté par le préfet du Bas-Rhin, qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la décision attaquée a été signée par M. Y, qui a reçu régulièrement délégation de signature ; qu'elle comporte les motifs de droit et de fait requis par l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ; qu'il n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour, M. X ne remplissant pas les conditions pour obtenir un titre de séjour ; que le requérant n'apporte pas la preuve que la décision attaquée entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité pour sa situation personnelle ; que l'Algérie assure une offre de soins satisfaisante pour la pathologie dont souffre le requérant ; qu'il ne produit aucun élément probant qui permettrait d'établir le risque de subir des traitements inhumains ou dégradants auxquels l'exposerait son retour ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

Vu II°) la requête, enregistrée le 7 décembre 2007 sous le n° 07NC01707, présentée pour M. Laïd X, demeurant ..., par Me Geny-La Rocca ; M. X demande à la Cour de prononcer le sursis à exécution du jugement n° 0703589 en date du 8 novembre 2007, par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juin 2007 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination :

Il soutient que l'exécution du jugement lui causerait un préjudice considérable et qui ne serait pas réparable ; que son état de santé ne permet pas son retour en Algérie, en raison de ses conséquences psychologiques ; qu'il existe des risques avérés d'atteinte à son intégrité physique ; qu'il existe des moyens sérieux à l'appui du recours pour excès de pouvoir qu'il a formé ; que les conditions posées par l'article R. 811-17 du code de justice administrative sont ainsi réunies ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 2008 :

- le rapport de M. Brumeaux, président,

- et les conclusions de M Collier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes susvisées n°s 07NC01706 et 07NC01707 présentées par M. X sont dirigées contre la même décision et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par un même arrêt ;

Sur le refus de délivrance du titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 45 du décret du 29 avril 2004 susvisé : « I... En cas de vacance momentanée du poste de préfet, l'intérim est assuré par le secrétaire général de la préfecture... » ; qu'il ressort des pièces du dossier que la décision litigieuse a été signée par M. Y, secrétaire général de la préfecture du Bas-Rhin, en qualité de chargé de l'administration de l'Etat dans le département, qu'il détenait en application des dispositions précitées en tant qu'assumant l'intérim entre le départ de M. Jean-Paul A, nommé directeur de cabinet du Premier Ministre par arrêté du 18 mai 2007 et l'installation, le 9 juillet 2007, du nouveau préfet M. Jean-Marc Z ; que M. Y disposant ainsi de l'intégralité des compétences dévolues à un préfet de département à la date de la décision attaquée, c'est par suite à juste titre que le tribunal administratif a écarté le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte ;

Considérant, en deuxième lieu, que la décision de refus de séjour opposée à M. X énonce de manière précise les motifs de droit et de fait retenus par le préfet du Bas-Rhin ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit ainsi être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : « Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (...) 7° Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. » ;

Considérant que M. X, ressortissant algérien, présente des troubles anxio-dépressifs pour lesquels il est médicalement suivi ; que si, dans son avis du 27 avril 2007, le médecin inspecteur de la santé publique a indiqué que l'état de santé du requérant nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il précisait que cet état, pour lequel un bilan médical a été dressé et un traitement médicamenteux mis en route, nécessitait des soins d'une durée prévisionnelle de six mois, pouvant être pris en charge tant par les praticiens médicaux que par les instances sanitaires du pays d'origine ; que si l'intéressé soutient que son état psychiatrique serait fragilisé par son retour en Algérie, cette circonstance, à la supposer établie, n'est pas de nature à remettre en cause les conclusions de l'avis médical susmentionné ; que, dès lors, le préfet du Bas-Rhin, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il se serait estimé lié par l'avis du médecin inspecteur de la santé publique, n'a pas commis d'erreur d'appréciation en estimant que M. X pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine et n'a ainsi pas méconnu les stipulations précitées de l'article 6 7° de l'accord franco-algérien ;

Considérant, en quatrième lieu, que si M. X soutient que sa santé rend impossible son retour en Algérie en raison des traumatismes que la guerre civile lui a causés, ce moyen est en tout état de cause sans incidence sur la légalité de la décision lui refusant un titre de séjour ;

Considérant, en cinquième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet du Bas-Rhin a procédé à un examen particulier de la situation personnelle du requérant, dès lors que son arrêté en date du 25 juin 2007 précise que M. X ne remplit pas les conditions d'obtention d'une carte de séjour à un autre titre et qu'il ne justifie pas d'une atteinte disproportionnée à sa situation personnelle et familiale, ni de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels autorisant son admission au séjour ;

Considérant, enfin, que si l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants algériens, dispose que la commission du titre de séjour « est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger (...) », il résulte de ce qui précède que, M. X n'étant pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article 6 7° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1986 modifié, le préfet du Bas-Rhin n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu que, comme il a été dit ci-dessus, M. Y, secrétaire général de la préfecture du Bas-Rhin, signataire de ladite décision, disposait, à la date de l'arrêté attaqué, de l'intégralité des compétences dévolues à un préfet de département ; que, par suite, le requérant ne saurait utilement faire valoir que le signataire de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français n'aurait pas reçu une délégation du préfet du Bas-Rhin spécifique à cette mesure ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de séjour opposé à M. X doit être écarté ;

Sur la fixation du pays de destination :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants » ; que, par ailleurs, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. » ;

Considérant que M. X soutient que la décision fixant le pays de destination d'office à destination du pays dont il a la nationalité méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison des violences dont il pourrait être victime en raison de son appartenance passée à l'armée, il n'établit cependant ni la réalité des menaces dont il fait état, ni qu'il serait soumis à la torture ou à des peines et traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la mesure d'éloignement aurait été prise en violation des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'à supposer même que, comme il le soutient, les troubles psychiatriques présentés par le requérant seraient en lien avec les traumatismes subis dans son pays d'origine, la décision litigieuse n'a pas pour effet nécessaire de le conduire sur les lieux mêmes où il aurait subi les événements dont il fait état ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 25 juin 2007 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé son pays de destination ; que, par suite, ses conclusions présentées en application de l'article L. 761- du code de justice administrative doivent être rejetées ;

Sur la requête tendant au sursis à l'exécution du jugement attaqué :

Considérant que ces conclusions sont devenues sans objet ;

Sur les conclusions à fin de réexamen de la situation de l'intéressé :

Considérant que la présente décision, qui rejette la requête de M. X, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce que le préfet soit enjoint de procéder à un nouvel examen de son dossier sous astreinte de 50 € par jour et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ne peuvent être accueillies ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. X aux fins de sursis à exécution du jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 8 novembre 2007.

Article 2 : La requête n° 07NC01706 de M. X est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Laïd X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

2

N°07NC01706…


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07NC01706
Date de la décision : 08/01/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Michel BRUMEAUX
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : GENY- LA ROCCA

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2009-01-08;07nc01706 ?
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