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20/10/2008 | FRANCE | N°07NC01564

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 20 octobre 2008, 07NC01564


Vu la requête, enregistrée le 16 novembre 2007, complétée par le mémoire enregistré le 15 avril 2008, présentée pour Mme Marie-Rose X, demeurant ..., par Me Boukara ; Mme X demande à la Cour :

1) d'annuler le jugement du 16 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 février 2007 par lequel le préfet du Bas-Rhin à refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2) d'annuler l'arrêté préfectoral du

7 février 2007 ;

3) d'enjoindre le préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une carte d...

Vu la requête, enregistrée le 16 novembre 2007, complétée par le mémoire enregistré le 15 avril 2008, présentée pour Mme Marie-Rose X, demeurant ..., par Me Boukara ; Mme X demande à la Cour :

1) d'annuler le jugement du 16 mai 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 février 2007 par lequel le préfet du Bas-Rhin à refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2) d'annuler l'arrêté préfectoral du 7 février 2007 ;

3) d'enjoindre le préfet du Bas-Rhin de lui délivrer une carte de résident ou, à défaut, une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa demande en statuant sur celle-ci dans un délai de 15 jours suivant la notification de la décision à intervenir, l'une et l'autre des possibilités devant être assorties d'une astreinte de 150 € par jour de retard ;

4) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 300 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 500 € à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que celui-ci renonce à la contribution de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

Elle soutient que :

Sur la décision de retrait de l'admission au séjour :

- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;

- le retrait de l'admission au séjour aurait dû être précédé de la procédure contradictoire prévue à l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- le préfet a commis une erreur de fait sur sa situation familiale ;

- la décision litigieuse porte atteinte à sa vie privée et familiale et contrevient aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- c'est à tort que les premiers juges ont déclaré inopérant ce dernier moyen ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- l'arrêté attaqué est signé par une autorité incompétente ;

- la délégation de signature accordée par le préfet est irrégulière ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait dû être précédée de la procédure contradictoire prévue à l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- la décision litigieuse est insuffisamment motivée ;

- l'illégalité du refus de séjour entraîne l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- le préfet a commis une erreur de fait sur sa situation familiale et aurait dû prendre en compte celle-ci avant de prendre sa décision ;

- la décision litigieuse porte atteinte à sa vie privée et familiale et contrevient aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du fait de son mariage avec un ressortissant français ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 mars 2008, par lequel le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français a été signée par M. Y, secrétaire général de la préfecture du Bas-Rhin, qui a régulièrement reçu délégation de signature ;

- la décision attaquée comporte tous les éléments devant apparaître dans une décision administrative conformément aux dispositions de l'article 3 du 11 juillet 1979 ;

- la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus ou du retrait de séjour ;

- les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ne s'appliquent pas au cas d'espèce ;

- il était fondé à refuser l'admission au séjour à la requérante suite au refus qui lui avait été opposé à sa demande de reconnaissance du statut de réfugié ;

- Mme X n'a jamais fait mention de son mariage aux services préfectoraux et n'a jamais sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjointe de ressortissant français ;

- il a, avant de prendre l'arrêté contesté, procédé à l'examen de l'ensemble de la situation administrative et personnelle de l'intéressée au vu des éléments qu'elle avait fournis à l'administration ;

- la décision attaquée n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Vu la décision du 28 septembre 2007 du bureau d'aide juridictionnelle accordant à Mme X l'aide juridictionnelle partielle au taux de 15 % pour la présente instance ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée relative à la motivation des actes administratifs ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 relatifs aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 septembre 2008 :

- le rapport de M. Vincent, président de chambre,

- et les conclusions de M. Collier, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme X, de nationalité camerounaise, est, selon ses dires, entrée irrégulièrement en France le 1er septembre 2005 ; qu'à la suite du rejet de sa demande de reconnaissance du statut de réfugié par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 30 décembre 2005, confirmé par la Commission des recours des réfugiés le 26 janvier 2007, le préfet du Bas-Rhin, par arrêté du 7 février 2007, a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

Sur la décision portant refus de séjour :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du 7 février 2007 comporte l'indication des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il précise notamment, d'une part, que Mme X avait fait une demande de reconnaissance du statut de réfugié dont elle avait été déboutée et, d'autre part, les principaux éléments constitutifs de sa situation personnelle et familiale dont l'administration avait connaissance à la date de cette décision ; que, par suite, l'arrêté querellé, en ce qui concerne le refus de séjour, doit être regardé comme suffisamment motivé, alors même qu'il ne mentionne pas la circonstance que la requérante avait bénéficié d'une admission provisoire au séjour en qualité de demandeur d'asile ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 : « Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. (...) » ;

Considérant qu'il résulte de leurs termes mêmes que les dispositions précitées ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour, qui est prise en réponse à une demande formulée par l'intéressé ; qu'il en est notamment ainsi lorsque le préfet refuse la délivrance d'une carte de résident à un étranger auquel la qualité de réfugié a été refusée, dès lors que cette décision doit être regardée comme prise en réponse à une demande d'admission au séjour en qualité de demandeur d'asile ; que la décision litigieuse n'avait pas ainsi à être précédée d'un débat contradictoire ; qu'en mettant fin, par ailleurs, à l'autorisation provisoire de séjour délivrée à Mme X lors du dépôt de sa demande d'asile, le préfet du Bas-Rhin, qui n'a fait que tirer les conséquences du rejet de cette demande, ne saurait être regardé comme ayant décidé d'office de procéder au retrait de ce titre provisoire et n'était ainsi pas davantage tenu d'observer une procédure contradictoire pour ce dernier motif ;

Considérant, en dernier lieu, que si Mme X soutient, en outre, que la possibilité dont elle pourrait bénéficier de demeurer en France à un autre titre impliquerait nécessairement le respect de la procédure contradictoire prescrite par les dispositions précitées, le refus de séjour que le préfet du Bas-Rhin lui a également opposé sur tout autre fondement que l'asile politique, après avoir procédé à l'examen particulier de sa situation, auquel ledit préfet était tenu de se livrer, s'inscrit dans le cadre de la demande d'admission au séjour formée par l'intéressée en qualité de demandeur d'asile ; qu'ainsi, le moyen doit être également écarté ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, que si, comme il vient d'être dit, le préfet est tenu, sur la base des documents dont il dispose, de procéder à un examen particulier de la situation de l'intéressé avant de refuser l'admission au séjour en France sollicitée par un étranger, il n'a pas obligation de rechercher les éléments utiles à cette appréciation que ce dernier ne lui aurait pas spontanément fournis ; qu'ainsi, Mme X, qui n'établit pas, ni même n'allègue, avoir communiqué au préfet des informations relatives à l'évolution de sa situation de famille, notamment son mariage avec un ressortissant français, ne saurait faire grief à la décision litigieuse d'être entachée d'erreur de fait en tant qu'elle la mentionne comme célibataire et de n'avoir pas été précédée d'un examen particulier de sa situation à cet égard ;

Considérant, en second lieu, que si Mme X fait valoir qu'elle s'est mariée avec un ressortissant français le 8 août 2006, la décision litigieuse, eu égard à la brièveté du séjour de l'intéressée en France et au caractère récent de son mariage, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a par suite pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 43 du décret du 29 avril 2004 susvisé dans sa rédaction alors applicable : « Le préfet de département peut donner délégation de signature : 1° En toutes matières et notamment pour celles qui intéressent plusieurs chefs des services des administrations civiles de l'Etat dans le département, au secrétaire général et aux chargés de mission ; (...) » ; que le préfet du Bas-Rhin a ainsi pu légalement conférer à M. Y, secrétaire général de la préfecture, par arrêté en date du 1er septembre 2006, délégation à l'effet de signer tous actes, arrêtés et décisions à l'exception des arrêtés de conflit ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort de la minute dudit arrêté que le moyen tiré du défaut de signature par le préfet de l'arrêté portant délégation de signature manque en fait ;

Considérant, en troisième lieu, que l'obligation de quitter le territoire français est une mesure de police qui doit, comme telle, être motivée en application des règles édictées par l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que, toutefois, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus ou ce retrait est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, de mention spécifique ; qu'en citant dans les visas de l'arrêté attaqué l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Bas-Rhin a suffisamment précisé le fondement juridique de cette mesure, sans qu'il soit besoin de mentionner, en outre, le I dudit article relatif à l'obligation de quitter le territoire français, par opposition au II relatif aux arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière ; que les dispositions de l'article L. 742-2 du même code, qui ne servent pas de fondement à une décision d'obligation de quitter le territoire français, n'avaient pas davantage à être rappelées ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français et, par suite, exclure l'application des dispositions de l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000 selon lesquelles les décisions individuelles qui doivent être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 ne peuvent légalement intervenir qu'après que l'intéressé a été à même de présenter des observations écrites ou orales ; qu'ainsi, Mme X ne peut utilement soutenir qu'en prenant l'arrêté attaqué l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet du Bas-Rhin aurait méconnu ces dispositions ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la décision refusant le séjour n'est pas entachée d'illégalité ; que le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français serait illégale en raison de l'illégalité de la décision qui la fonde doit être ainsi écarté ;

Considérant, en second lieu, que pour les mêmes raisons que celles évoquées ci-dessus à propos du refus de séjour, les moyens tirés de l'erreur de fait qu'aurait commise le préfet du Bas-Rhin et de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent qu'être écartés ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction présentées sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative et celles tendant à la condamnation de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du même code et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE

Article 1er : La requête de Mme X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Marie-Rose X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

2

N°07NC01564


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07NC01564
Date de la décision : 20/10/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Pierre VINCENT
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : BOUKARA

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2008-10-20;07nc01564 ?
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