La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/06/2008 | FRANCE | N°07NC01615

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 26 juin 2008, 07NC01615


Vu la requête enregistrée le 23 novembre 2007 sous le n° 07NC01615, présentée pour M. Samuel X, demeurant ..., par Me Airoldi Martin, avocat ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 23 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 mai 2007 du préfet du Bas-Rhin lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire en désignant l'Angola comme pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin, sous astreinte de 100 € par jour de retard à...

Vu la requête enregistrée le 23 novembre 2007 sous le n° 07NC01615, présentée pour M. Samuel X, demeurant ..., par Me Airoldi Martin, avocat ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 23 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 mai 2007 du préfet du Bas-Rhin lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire en désignant l'Angola comme pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt de la Cour, de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à Me Airoldi Martin de la somme de 1 000 € en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Il soutient que :

- la décision de refus de titre de séjour est illégale en ce qu'elle a été signée par une autorité incompétente, n'a pas été précédée de la consultation de la commission du titre de séjour et est insuffisamment motivée ; la décision est entachée d'erreur de fait et d'erreur de droit dans la mesure où elle repose sur un avis du médecin inspecteur contradictoire avec un précédent avis et incomplet ; elle méconnaît au surplus les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences du refus sur sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire a été signée par une autorité incompétente ; elle est insuffisamment motivée ; elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et méconnaît l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision désignant le pays de renvoi est signée par une autorité incompétente ; elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ; elle est contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; l'appréciation portée par l'OFPRA ne lie pas le préfet ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 janvier 2008, présenté par le préfet du Bas-Rhin ; le préfet conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que la décision de refus de titre de séjour a été signée par le secrétaire général de la préfecture qui dispose d'une délégation régulière, est régulièrement motivée et n'avait pas à être précédée de la consultation de la commission du titre de séjour ; que le refus de titre de séjour n'est entaché ni d'erreur de fait ni d'erreur de droit, ni ne porte atteinte au droit de l'intéressé, qui n'est pas dépourvu d'attaches en Angola où résident ses deux enfants mineurs, au respect de sa vie privée et familiale ; que l'obligation de quitter le territoire est régulière en la forme et fondée en droit ; que la décision fixant le pays de renvoi est légale ;

Vu la décision du bureau de l'aide juridictionnelle, près le Tribunal de grande instance de Nancy (section administrative) accordant à M. Y le bénéfice de l'aide juridictionnelle et désignant Me Airoldi Martin pour le représenter ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647l du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 juin 2008 :

- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité de l'arrêté du 18 mai 2007 portant refus de titre de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit: (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin inspecteur de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) » ;

Considérant, en premier lieu, que par arrêté du 1er septembre 2006, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Bas-Rhin a donné à M. Raphaël Le Méhauté, secrétaire général de la préfecture, délégation pour signer toutes mesures d'éloignement d'étrangers en situation irrégulière ; qu'une telle délégation n'avait pas à être renouvelée postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 modifiant l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 21 février 2007 doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté du 18 mai 2007 du préfet du Bas-Rhin portant refus de titre de séjour comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que l'état de santé de M. X a été reconnu, par le médecin inspecteur de la santé, dans son avis du 21 mars 2007, comme nécessitant une prise en charge médicale dont le défaut ne peut pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressé pour lequel un bilan médical a été fait, nécessite des soins de suite qui peuvent être pris en charge par les praticiens médicaux et les instances sanitaires de son pays d'origine ; que cet avis qui est suffisamment motivé et n'est pas en contradiction avec l'avis émis le 26 octobre 2004, intervenu à la suite de l'intervention chirurgicale subie par M. X, donne au préfet du Bas-Rhin les éléments suffisants pour lui permettre d'apprécier l'état de santé de l'intéressé et la possibilité pour celui-ci de poursuivre son traitement en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'en se fondant sur un tel avis pour refuser faire droit à la demande de renouvellement de titre de séjour présentée par M. X en raison de son état de santé, le préfet du Bas-Rhin n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en quatrième lieu, que si M. X fait valoir qu'il vit en France depuis quatre ans, n'a plus de contact avec son pays d'origine et est bien intégré à la société française, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est entré en France, à l'âge de 26 ans, a deux enfants mineurs en Angola ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment des conditions et de la durée de son séjour en France, M. X n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant le renouvellement de son titre de séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard du but poursuivi, en violation des dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en cinquième lieu, que, compte tenu de ce qui précède, le préfet n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle, qu'il a examinée, de M. X ;

Considérant, en sixième lieu, qu'il résulte des termes mêmes de l'article L. 313-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que la commission du titre de séjour ne doit être saisie que lorsque l'autorité administrative envisage de refuser un titre de séjour à un étranger qui remplirait les conditions autorisant la délivrance d'un titre en application des articles L. 313-11, L. 314-11 et L .314-12 du même code ; que, dès lors qu'ainsi qu 'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus, tel n'est pas le cas de M. X,Xle moyen tiré de ce que ladite commission n'a pas été saisie de sa demande ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en septième lieu, que la circonstance que l'arrêté mentionne un refus de délivrance d'un titre de séjour et non le refus de renouvellement d'un titre de séjour est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée dès lors qu'il n'est ni établi, ni même allégué que cette erreur aurait eu une incidence sur le sens de la décision ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 18 mai 2007 en tant qu'il porte refus de délivrance d'un titre de séjour ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire et désignant le pays de destination :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens :

Considérant que l'obligation de quitter le territoire français dont le préfet peut, en application de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, assortir le refus ou le retrait d'un titre de séjour est une mesure de police qui doit, comme telle, être motivée en application des règles de forme édictées, pour l'ensemble des décisions administratives, par l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; que si la motivation de cette mesure, se confondant avec celle du refus ou du retrait de titre de séjour dont elle découle nécessairement, n'appelle pas d'autre mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 1er de la loi du 11juillet 1979, c'est toutefois à la condition que le préfet ait fait mention dans sa décision de l'article L. 511-1 du même code, qui l'habilite à assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire ;

Considérant qu'en se bornant en l'espèce à viser le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Bas-Rhin a méconnu cette exigence ; que la décision par laquelle il a fait obligation à M. Xde quitter le territoire français et fixé le pays de destination doit en conséquence être annulée ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée (...) l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas » ;

Considérant que si le présent arrêt n'implique pas qu'il soit enjoint au préfet du Bas-Rhin de délivrer à M. X un titre de séjour, il implique, par application des dispositions précitées, que le préfet délivre à l'intéressé, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il soit à nouveau statué sur sa demande ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet de prendre les mesures en ce sens ; qu'en l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 et aux articles 37 et 75 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 € à payer à Me Airoldi Martin, avocat de M. X, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, Xsous réserve que cet avocat renonce à la perception de l'indemnité prévue par l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il rejette les conclusions de M. X dirigées contre la décision du préfet du Bas-Rhin en date du

18 mai 2007 en tant qu'elle porte obligation de quitter le territoire et désigne le pays de destination, ainsi que ladite décision, dans cette même mesure, sont annulés..

Article 2 : L'Etat versera à Me Airoldi Martin la somme de mille euros (1 000 €) en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat pour l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Y et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Copie en sera adressée à préfet du Bas-Rhin.

2

N°07NC01615


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07NC01615
Date de la décision : 26/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: Mme Marie GUICHAOUA
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : AIROLDI MARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2008-06-26;07nc01615 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award